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[Chronique] Les dix « losers » africains de l’année 2019

| Par
Glez

En attendant les bonnes résolutions de janvier 2020, décembre 2019 offre son lot de bilans plus ou moins glorieux. Côté déprime, voici le palmarès de ceux qui ont trébuché pendant l’année.

Au moment où les médias décernent les trophées des « winners » de 2019, certaines personnalités garderont de cette année un goût amer. N’évoquons pas les « déçus en bien » – selon l’expression suisse – , ceux pour qui la déception effective fut bien moindre que la déculottée prévue.

Si les groupies du Sénégalais Sadio Mané se sont offusqués que leur idole ne figure pas sur le podium du Ballon d’or, le footballeur doit déjà être bien fier de talonner Messi, Van Dijk et Ronaldo. Quant à Koffi Olomidé, en bisbilles avec une commission de censure, il doit admettre que 2019 s’est plutôt mieux déroulée que 2018 et son mandat d’amener zambien…

Décagnottées, conspuées ou condamnées, d’autres sommités ont plus franchement chuté en 2019. Tentons, par ordre décroissant, un « hit-parade » des plus gros « losers » de ces douze derniers mois.

10- Martin Fayulu

Dès le début de 2019, Félix Tshisekedi lui a coupé l’herbe sous le pied. Martin Fayulu, qui se présentait comme le plus radical des adversaires au régime sortant en RDC, a vu un « Fatshi » élu composer avec Joseph Kabila.

Lâché par les chancelleries internationales, arc-bouté sur une coalition « Lamuka » fragile, le second de la présidentielle a du mal à exister politiquement, entre un Jean-Pierre Bemba qui n’en finit pas de revenir en RDC et un Moïse Katumbi qui vient de transformer sa plateforme électorale en parti politique.

9- Mohammed Ben Salman

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L’image du prince héritier du trône d’Arabie saoudite n’a cessé de se faner en 2019. S’il n’a pas reconnu avoir commandité le meurtre du journaliste saoudien Jamal Khashoggi, « MBS » a dû en assumer « toute la responsabilité », en septembre, à l’occasion d’un documentaire diffusé à la veille du premier anniversaire de la mort du dissident.

Embourbé dans la « sale guerre » yéménite, MBS n’a pas su enrayer la menace terroriste qui s’est manifestée, en septembre, à Abqaiq et Khurais.

8- Pascal Affi N’Guessan

Si rien n’est perdu pour le présidentiable, à l’orée de la précampagne du scrutin de 2020, l’ancien Premier ministre a peiné à s’imposer au Front populaire Ivoirien (FPI).

Même Henri Konan Bédié a négligé l’affranchi pour se tourner vers Laurent Gbagbo, l’ancien président qui a repris du poil de la bête à la suite de son acquittement par la Cour pénale internationale, en janvier.

L’ancien mentor a même fragilisé directement Affi N’Guessan en soumettant leur rencontre, programmée en mars, à un préalable jugé « méprisant » par l’ancien aficionado, présenté aujourd’hui comme un « Brutus ».

7- Lambert Mende

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Même si son camp politique est largement resté aux manettes après l’élection à la présidence de Félix Tshisekedi, l’ex-porte-parole intarissable du régime Kabila connaît une difficile reconversion.

En mai, l’affaire d’un présumé diamant découvert chez lui crée la polémique. En juillet, il est battu dans le Sankuru, à l’issue du scrutin au poste de gouverneur.

Seule consolation de 2019 : le Conseil européen a levé les sanctions qui le visaient. La meilleure preuve qu’il est politiquement dépassé ?

6- Slim Riahi

Mauvaise année pour Nidaa Tounes. C’est dans un dossier libyen que l’ancien secrétaire général de la formation politique tunisienne a été condamné, le 12 décembre, à onze ans de prison ferme pour « blanchiment d’argent ».

En février, il avait écopé de cinq ans assortis d’une amende de 180 000 dinars pour chèque sans provision. Hafedh Caïd Essebsi, lui, représentant légal de Nidaa Tounes et fils du défunt président Béji Caïd Essebsi, a trouvé refuge en France…

5- Brice Laccruche Alihanga

Descente aux enfers pour l’ancien directeur de cabinet d’Ali Bongo Ondimba. Limogé du gouvernement le 2 décembre, il est interpellé, le lendemain, par la Direction générale des recherches (DGR).

Cité dans une affaire de détournement de fonds publics et de blanchiment, il est déféré – un vendredi 13 – devant le juge d’instruction spécialisé de Libreville et placé en détention préventive.

4- Omar el-Béchir

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Trois décennies sur le trône, quatre mois d’un mouvement populaire d’une ampleur inédite au Soudan, et l’ancien chef de l’État est destitué par l’armée, le 11 avril.

Commence pour lui un long tunnel judiciaire, loin tout de même de la CPI qui le réclame pour crimes contre l’humanité et crimes de guerre au Darfour. Il était le premier chef d’État en exercice à être inculpé par cette juridiction.

3- Gilbert Diendéré

Quatre ans après la tentative de putsch qualifiée de « coup d’État le plus bête du monde », l’ancien chef d’état-major particulier de la présidence de Blaise Compaoré est condamné, en septembre, à vingt ans d’emprisonnement. L’autre général inculpé, Djibrill Bassolé, écope, lui, de dix ans de prison.

Verdicts plus cléments que la perpétuité requise par le parquet, après 19 mois de procès, mais conclusion bienvenue pour le Burkinabè lambda qui lorgne désormais du côté des affaires « Thomas Sankara » et « Norbert Zongo ».

2- Bosco Ntaganda

Terminé pour « Terminator » : le 7 novembre, l’ex-chef de guerre congolais né au Rwanda est condamné à trente ans d’emprisonnement par la chambre de première instance de la CPI.

En juillet, il avait été reconnu coupable de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité, pour des faits commis en 2002 et 2003 en Ituri, alors qu’il était à la tête du groupe rebelle des Forces patriotiques pour la libération du Congo (FPLC).

1- Abdelaziz Bouteflika

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Après vingt années de pouvoir et la tentation d’un cinquième mandat, l’ancien président algérien démissionne, le 2 avril, sous la pression d’une population en révolte. Il entraînera dans sa chute des proches comme Ahmed Ouyahia et Abdelmalek Sellal, tous deux anciens Premiers ministres, ou son propre frère, Saïd. Le système contesté, lui, est-il vraiment tombé ?

2020 pourrait rimer avec félicité pour certains. Pour les autres, rendez-vous dans douze mois…

Afrique: les dix bonnes nouvelles de 2019

Alaa Salah, icône de la révolution au Soudan, pose devant une peinture murale la représentant, en face du ministre de la Défense à Khartoum, le 20 avril 2019.
© REUTERS/Umit Bektas

Malgré l'extension de la menace sécuritaire dans le Sahel et les défis récurrents posés par le chômage, la pauvreté et le changement climatique, l'Afrique avance, dans tous les domaines. En témoignent ces 10 bonnes nouvelles de l'année 2019, politiques, économiques, sociales, culturelles et sportives.

Révolution au Soudan

Alaa Salah, une jeune femme vêtue de blanc avec un disque d’or en boucle d’oreille, devient l’icône de la révolution au Soudan. Juchée sur le toit d’une voiture, elle chante, la main levée, parmi des milliers de manifestants qui campent devant le quartier général de l’armée à Khartoum. Le 11 avril 2019, l’état-major destitue Omar el-Béchir, au pouvoir depuis 1989 et prêt à briguer un troisième mandat en 2020, après quatre mois de contestation. À l'origine de la colère populaire : la hausse des prix du pain. Sous le coup d’un mandat d’arrêt lancé par la Cour pénale internationale (CPI) pour génocide, des crimes de guerre et crimes contre l’humanité commis au Darfour, Omar el-Béchir est incarcéré, à 75 ans. Il est condamné le 14 décembre à deux ans de prison pour corruption, avant deux autres procès, l’un pour meurtre de manifestants, l’autre sur les crimes au Darfour. Plus de 100 manifestants sont tués début juin, mais les civils gagnent le bras de fer face à l’armée. Celle-ci accepte de partager un pouvoir de transition qui se donne trois ans pour mener le pays aux élections. Le vent des « printemps arabes » de 2011 souffle-t-il encore sur le continent ? En Algérie, c’est le hirak ( «mouvement » ) qui tient tout un peuple en haleine, à partir du 16 février 2019, pour contester la candidature à un cinquième mandat du président sortant, Abdelaziz Bouteflika, qui démissionne le 2 avril.

Fatwa de l’Université Al-Azhar contre les mariages d’enfants

« Le mariage est basé sur le consentement, lequel exige que la jeune femme ait atteint l’âge de la maturité et la raison pour qu’il soit valablement donné. L’âge de 18 ans marque le stade où une femme peut valablement exprimer sa volonté de se marier. Cela garantit qu’elle puisse jouir de ses droits fondamentaux à l’enfance, à l’éducation et à la capacité d’assumer la responsabilité du mariage ». Salah Abbas, grand imam adjoint de l’Université Al-Azhar du Caire, l’institution qui fait référence dans l’islam sunnite, a énoncé cette fatwa historique le 18 mai 2019 à Dakar, lors du premier sommet africain sur les mutilations génitales féminines et le mariage précoce. Le Mozambique, où la moitié des filles sont mariées avant leurs 18 ans, a adopté en août une loi rendant le mariage de mineurs illégal. La Tanzanie en a fait de même en octobre. Selon l’UNFPA, quatre filles sur 10 sont mariées avant 18 ans en Afrique occidentale et centrale, et une fille sur 7 avant ses 15 ans.

Ouverture de nouveaux musées à Kinshasa et Lomé

Le musée national de la République démocratique du Congo ( MNRDC ) a ouvert en juin à Kinshasa sur le boulevard Triomphal, à côté du Parlement. Le bâtiment, offert par la coopération sud-coréenne pour 22 millions de dollars, conserve 12 000 des 45 000 pièces de l’Institut des musées nationaux de la RDC. Le nouveau musée se dit prêt à accueillir, au titre d’une restitution que le président Félix Tshisekedi a précisé ne pas vouloir faire dans la « précipitation », quelques-unes des 180 000 pièces, pour l’essentielle congolaises, que détient l’AfricaMuseum de Bruxelles.

Au Togo, c’est le Palais de Lomé, « parc d’arts et de culture », qui a ouvert le 7 décembre, après sept ans de travaux de rénovation de l’ancien palais des gouverneurs, abandonné depuis les années 1990. Le site comprend un parc botanique de 10,5 hectares, des espaces d’exposition multimédia, une librairie, une galerie d’art, deux restaurants et une boutique.

Percée du styliste camerounais Imane Ayissi dans la mode

Cet ancien danseur et mannequin international fait une entrée remarquée dans la cour des grands, lors de la Fashion Week de Paris, fin juin. Imane Ayissi, 51 ans, a fondé sa griffe en 2001. Sa haute couture rend hommage aux tissus africains, jacquards manjak ou kita de Côte d’Ivoire mixés à des soies ou des cotons italiens et français, alliance de la tradition du drapé africain avec le tailoring ou des éléments de cultures graphiques propres à différents pays africains confrontés au minimalisme et à la simplicité. Avec ses robes spectaculaires, rose fuchsia ou jaune citron, il donne un coup de peps à l’univers de la mode africaine, en plein élan.

►À lire aussi : 2019 : l’année de l’envol de la mode africaine

Lancement de la ZLEC

Tous les pays membres de l’Union africaine ( UA ), à l’exception de l’Érythrée, ont lancé à Niamey le 8 juillet 2019 la Zone de libre-échange continentale africaine ( ZLECAf ). Celle-ci vise à donner un coup de fouet aux échanges intra-africains, parents pauvres du commerce extérieur du continent ( 15,2 % du total des exportations de l’Afrique sur 2015-17, contre 47 % d’échanges intracontinentaux en Amérique, 61  % en Asie et 67 % en Europe selon la Cnuced ). Ce marché commun de 1,2 milliard de consommateurs est appelé à devenir le plus grand du monde. Il devrait être opérationnel en juillet 2020, après négociation d’accords sur les droits de douane et les règles d’origine.

Plus de 1 million d’euros pour une toile du Nigérian Ben Enwonwu

« Christine », un tableau qu’avait conservé la famille du modèle pendant cinquante ans, a défrayé la chronique pour son montant, 1,3 million d’euros. C’est la somme déboursée par un acquéreur le 16 octobre à Londres dans une vente aux enchères chez Sotheby’s. Ce portrait de jeune femme fait en 1971 par le père du modernisme au Nigeria, Ben Enwonwu, mort en 1994, se rapproche de son premier record. Le portrait de la princesse « Tutu », surnommé « La Joconde africaine », s’était vendu 1,36 million d’euros à Londres. Ben Enwonwu figure parmi les artistes africains contemporains disparus les plus chers du marché, avec la Sud-Africaine Irma Stern, dont une œuvre a été achetée 3,8 millions d’euros par un musée du Qatar en 2011. D’autres battent des records de leur vivant, comme la Sud-Africaine Marlene Dumas ( 6,3 millions de dollars pour son tableau « The Visitor » en 2008 ), et le sculpteur ghanéen El Anatsui ( 1,3 million d’euros pour une œuvre chez Sotheby’s New York en 2014 ).

L’Afrique du Sud, championne du monde de rugby

Pour la troisième fois de leur histoire, après 1995 et 2003, les Springboks remportent la coupe du monde de rugby. Ils ont vaincu le 2 novembre face au Royaume-Uni, à Yokohama, à 32 contre 12. C’est aussi la victoire d’un maillot de bain masculin, aux couleurs du drapeau sud-africain. Une star est née, le capitaine de l’équipe nationale de rugby, ce sport qui ne peut plus être considéré comme celui « des Blancs » : c’est un jeune Noir de 28 ans, Siya Kolisi, qui a grandi dans un township de Port Elizabeth, ville industrielle et port du Cap-Oriental.

Zozibini Tunzi, Sud-Africaine, Miss Univers 2019

Miss Afrique du Sud, cette belle au teint d’ébène et aux cheveux courts a été couronnée Miss Univers 2019 le 8 décembre à Atlanta. Son discours a été remarqué : « J’ai grandi dans un monde où une femme comme moi, avec mon type de peau et mon type de cheveux, n'a jamais été considérée comme étant belle. Il est temps que ça change aujourd'hui ». Elle a impressionné le jury avec ses tenues et une démarche originale : elle a mené une campagne en ligne exhortant les Sud-Africains à écrire des lettres d’amour aux femmes du pays. Des missives qu’elle a incorporées dans des petits nœuds à son costume « national », aux couleurs du drapeau sud-africain.

Abiy Ahmed, Premier ministre éthiopien, Prix Nobel de la paix

En poste depuis avril 2018, le Premier ministre de l’Éthiopie, 43 ans, a été récompensé le 10 décembre à Oslo pour ses efforts en faveur de la paix et la coopération internationale, en particulier pour « son initiative visant à résoudre le conflit frontalier avec l'Érythrée ». Ce Prix Nobel controversé est-il prématuré ? Il a fait se lever des sourcils, dans la mesure où le principal test pour l’actuel Premier ministre est à venir, avec les élections générales de mai 2020, sur fond d’incertitude économique et de hausse des violences communautaires.

Fin annoncée du franc CFA en Afrique de l’Ouest

Le 21 décembre, les présidents français et ivoirien, Emmanuel Macron et Alassane Ouattara, annoncent à Abidjan la fin du franc CFA. La devise créée en 1945 et qui tire son nom initial des « Colonies françaises d’Afrique » sera remplacée par l’éco, la monnaie commune que projette de lancer depuis 1983 la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest ( Cédéao ). Les liens seront coupés avec la France, dont le Trésor public ne détiendra plus les réserves en devises de ses anciennes colonies ouest-africaines, pour garantir la convertibilité de la monnaie. Une page d’histoire se tourne, malgré des réactions plus que mitigées. « C’est une merveilleuse nouvelle », affirme Kako Nubukpo, économiste togolais, l’un des plus ardents pourfendeurs du franc CFA, créé en 1945 et qui tire son nom initial des « Colonies françaises d’Afrique ». « Un faux pas qui sème la confusion », analyse de son côté Jean-Baptise Placca sur RFI.

La justice ivoirienne condamne Charles Blé Goudé à 20 ans de prison

En liberté conditionnelle à La Haye, Charles Blé Goudé a été condamné par la justice ivoirienne par contumace (image d'illustration)
© Peter Dejong / POOL / AFP

L'ex-chef des Jeunes patriotes ivoiriens Charles Blé Goudé a annoncé lundi 30 décembre à l'AFP avoir appris sa condamnation à vingt ans de prison par la justice ivoirienne lors d'une audience à Abidjan le même jour.

La justice ivoirienne a condamné Charles Blé Goudé par contumace à « 20 ans de prison, 10 ans de privation de ses droits civiques, 200 millions de francs CFA » de dommages et intérêts à verser aux victimes, a expliqué L'ex-chef des Jeunes patriotes ivoiriens à l’AFP, précisant que le tribunal a en outre délivré un mandat d'arrêt contre lui.

La justice ivoirienne gardait sous le coude un dossier sur Charles Blé Goudé depuis plusieurs années, avant de le réactiver il y a quelques semaines. La justice ivoirienne avait en effet ouvert un dossier le concernant avant son transfèrement à la CPI, notamment pour actes de torture, viols, assassinats commis par lui-même ou ses partisans en 2010 et 2011. Des faits différents de ceux pour lesquels l’ancien « général de la rue » comme il fut autrefois surnommé, était poursuivi par la CPI. La procédure avait été relancée il y a deux mois et depuis lors, ses avocats comme l’opposition ivoirienne n’ont eu de cesse de dénoncer une entreprise politique émanant d’une justice à la solde du pouvoir.

Charles Blé Goudé s'est dit « surpris par ce verdict », prononcé sans la présence d'un avocat. Il était accusé par la justice ivoirienne d' « actes de torture, homicides volontaires et viol », avaient indiqué ses avocats le 18 décembre, jour où son procès devait s'ouvrir.

Liberté conditionnelle à La Haye

L'un de ses avocats, Me Suy Bi Gohoré, avait alors affirmé que le président du tribunal criminel d'Abidjan avait « retiré l'affaire du rôle » dans l'attente de l'examen d'un pourvoi en cassation formulé par lui, fondé sur l'absence de l'accusé et sur d'autres vices de forme dans la procédure. Les avocats avaient dénoncé une « violation flagrante » des droits de Charles Blé Goudé, du fait de son impossibilité à assister à son procès. « Charles Blé Goudé n’est pas libre de rentrer en Côte d’Ivoire pour répondre à la justice puisqu’il est en liberté conditionnelle à La Haye. Or en droit, on ne peut juger quelqu’un par contumace que s’il n’a pas de raison valable pour ne pas se présenter devant le tribunal », expliquait ce matin à RFI Me Suy Bi.

Le COJEP, le parti politique, dont Blé Goudé est le président, s'est s’exprimé cet après-midi. Il estime que le pouvoir joue un jeu dangereux : « Nous sommes à dix mois des élections. Nous pensons que le pouvoir d’Abidjan, au lieu de tout mettre en oeuvre pour créer les conditions d’une élection apaisée dans des conditions de quiétude, nous pensons que le pouvoir d’Abidjan créé une atmosphère pré-électorale tendue », souligne Patrice Saraka, le secrétaire général du COJEP.

Quant à Charles Blé Goudé lui-même, il apparaissait hier soir dans un message vidéo sur Facebook, tout sourire, faisant frire son aloco, plat traditionnel ivoirien, et promettant de s’exprimer dans les prochains jours. Il avait été transféré par les autorités ivoiriennes à la CPI en 2014. Avec son ancien mentor, l'ex-président ivoirien Laurent Gbagbo, il a été jugé pour crimes contre l'humanité.

Tous deux ont été acquittés début 2019 et placés en liberté conditionnelle dans l'attente de l'examen de l'appel formulé par la procureure de la CPI. M. Blé Goudé ne peut pas rentrer en Côte d'Ivoire tant que la procédure n'est pas terminée.

On ressuscite des procédures, on méprise des règles élémentaires de Code de procédure pénale... J'ai honte. La justice ne doit pas fonctionner comme ça...

Maître Claver N'Dri Kouadio, l'un des avocats de Charles Blé Goudé.
31-12-2019 - Par RFI

Côte d'Ivoire: le procureur détaille les accusations portées contre Soro

Guillaume Soro le 15 février 2019 à Abidjan.
© ISSOUF SANOGO / AFP

Trois jours après avoir émis un mandat d’arrêt international contre Guillaume Soro, le procureur de la République Richard Adou, a tenu une conférence de presse au tribunal de première instance d’Abidjan. Il a détaillé les accusations portées contre le candidat à l'élection présidentielle de 2020.

Lors de sa déclaration à la télévision nationale du 24 décembre, Richard Adou avait parlé d’un enregistrement sonore incriminant Guillaume Soro dans les charges de « tentative d’atteinte à l’autorité de l’État ».

Cet enregistrement a été versé à l’enquête et le procureur l’a fait écouter ce jeudi après-midi. Il est de mauvaise qualité, mais on entend effectivement un homme, présenté comme Guillaume Soro, s’entretenir avec d’autres personnes en évoquant les préparatifs d’une attaque armée. Il dit avoir le soutien de commandant de zones, issus de la rébellion, dans une tentative de déstabilisation du régime.

« On a l'armée. En fait, il faut minimiser les coûts humains, le sang tout ça. On va regarder la situation. Si elle est favorable à une insurrection populaire, tant mieux », entend-on dans l'enregistrement.

Aussi bien en Côte d'Ivoire qu'à l'étranger, certaines personnes proches de lui [Guillaume Soro ndlr] n'hésitait pas à amplifier le discrédit sur les institutions en place. Ces actes, loin d'être isolés, étaient constitutifs d'un complot qui devait aboutir à une insurrection civile et militaire. Les éléments en possession des services de renseignement notamment un enregistrement sonore établissent clairement que le projet devait être mis en place incessamment.

Cette mauvaise qualité de l’enregistrement est une preuve, estime le procureur Richard Adou. « Si c’était un montage, on aurait pu la rendre plus audible. C’est pour ça que je me suis excusé à la fin de l’audio. Si c’était un montage, on aurait fait des choses très claires. On aurait même pu faire un film ! »

Pour le camp Soro, l'enregistrement date de 2017

Du côté de Guillaume Soro, c’est de nouveau maître Affoussi Bamba qui s’est exprimée, affirmant que cet enregistrement, s’il est bel et bien authentique, daterait de 2017 et serait lié à une obscure affaire d’espionnage dont Guillaume Soro serait victime : « Cet audio est d’une légèreté déconcertante avouons-le. Je précise et j’insiste qu’il date de l’année 2017. Pourquoi l’exhumer aujourd’hui quasiment trois ans après ? Et pourquoi l’audio est-il incomplet ? »

Son avocate a poursuivi en donnant une explication sur les circonstances de l'enregistrement : « lorsque monsieur Guillaume Kigbafori Soro se vante du soutien de ses ex-"com-zones", cette affirmation n’a d’autres objectifs que de tirer les vers du nez de l’espion du jour qui accompagnait monsieur Francis Perez, le nommé Olivier Bazol de son nom de barbouze. Mais aussi un message à l’endroit du régime d’Abidjan. »

« L'audio est coupé, a expliqué l'avocate, parce que dans la version originale, l'espion affirme qu'il a la gendarmerie nationale avec lui, par le truchement de Robert Montoya, opératuer dans l'armemement bien connu dans la sous-région ouest-africaine. » Maître Affoussi Bamba a également annoncé qu’elle donnerait des éléments de réponse à dose « homéopathique » dans cette histoire qui promet encore de durer.

Sur le mandat d’arrêt en lui-même, le procureur a indiqué qu’Interpol avait été saisi et que si rien n’obligeait les pays à exécuter ce mandat, il serait tout de même surprenant, qu’en vertu des accords internationaux, que celui-ci ne soit pas suivi de faits.

Présidentielle au Burkina : le CDP suspendu à la décision de Blaise Compaoré
| Par

L'ancien président burkinabè, Blaise Compaoré.

Il aura fallu une médiation du fondateur du parti, Blaise Compaoré, pour que les « frondeurs » qui avaient été exclus du Congrès pour la démocratie et le progrès soient réintégrés. Mais ce retour ne met pas un terme à la principale cause de discorde interne : la désignation d’un candidat pour la présidentielle de 2020.

La hache de guerre est-elle définitivement enterrée entre la direction du Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP) et les « frondeurs » qui avaient été sanctionnés ? Le 7 décembre, au terme d’un congrès extraordinaire du parti de Blaise Compaoré qui s’est tenu à Ouagadougou, les sanctions prises à l’encontre des cadres qui avaient été suspendus ou exclus ont été annulées.

Cette décision du congrès est en fait la traduction de la volonté exprimée par le fondateur du CDP. Blaise Compaoré avait donné ses instructions au terme d’une médiation à la mi-octobre.

Komboïgo contre Kadré

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Eddie Komboïgo, le président du parti, et Kadré Désiré Ouédraogo, ex-Premier ministre de Blaise Compaoré. © DR/

 

Depuis Abidjan, l’ancien président burkinabè a reçu des représentants des deux factions qui se déchirent autour de l’investiture du candidat du CDP à la présidentielle de 2020. D’un côté les partisans de Eddie Komboïgo, président du parti, de l’autre ceux de Kadré Désiré Ouédraogo, ancien Premier ministre.

Kadré Désiré Ouédraogo, qui a annoncé sa candidature dès février 2019, soit avant les primaires au sein de son parti, a démissionné du CDP fin septembre, entraînant avec lui une partie des cadres. Dans la foulée, l’ancien Premier ministre a lancé le mouvement « Agir ensemble », en vue de porter sa candidature à la présidentielle.

Pas sûr, cependant, que l’annulation des sanctions qui pesaient contre les frondeurs permettent de mettre un terme définitif à la lutte fratricide qui se joue dans le parti depuis des mois.

Pour l’instant, aucune rencontre n’a eu lieu entre la direction et les sanctionnés

Aucun des 27 sanctionnés n’a d’ailleurs fait le déplacement au congrès extraordinaire. Certains évoquent « une invitation tardive ». D’autres assurent avoir préféré attendre la levée effective des sanctions avant de revenir.

« Pour l’instant, aucune rencontre n’a eu lieu entre la direction et les sanctionnés. Mais étant donné qu’ils ont retrouvé leurs statuts de membres, ils pourront prendre part aux prochaines réunions et à la vie du parti », explique Achille Tapsoba, premier vice-président du CDP.

Dès la semaine prochaine, une rencontre du secrétariat permanent devrait avoir lieu et une session du bureau exécutif national est prévue d’ici fin décembre. C’est à l’aune de ces rendez-vous que l’on saura si les « frondeurs » sont bel et bien de retour au sein des instances du parti.

Des tensions persistantes

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Lors du congrès extraordinaire du CDP, le 7 décembre 2019 à Ouagadougou. © DR / CDP

 

Les divergences sont loin d’être aplanies, et chacun continue de camper sur ses positions

Bien que, pour le CDP, qui fut privé de candidat en 2015 après la chute de Blaise Compaoré en octobre 2014, la prochaine présidentielle soit un rendez-vous crucial, les divergences entre les deux clans sont loin d’être aplanies, et chacun continue de camper sur ses positions.

« Nous n’avons pris aucun engagement. L’annulation des sanctions a été faite conformément aux instructions du fondateur du parti. Je pense toujours que celui qui peut le mieux représenter le parti reste Kadré Désiré Ouédraogo », martèle de son côté Alpha Yago, membre du bureau exécutif du CDP, en charge des mouvements associatifs et des Organisations de la société civile (OSC).

« Nous avions été exclus ou suspendus du parti parce que nous avons déclaré ouvertement soutenir la candidature de Kadré Désiré Ouédraogo. Cela ne changera pas, car nous sommes résolus à maintenir cette candidature », insiste Léonce Koné, l’un des poids lourds du parti et qui compte parmi les figures de proue au sein des frondeurs.

Une posture qui crispe d’ores et déjà dans les rangs des soutiens de Eddie Komboïgo. « Il est interdit par les statuts de soutenir un candidat qui n’est pas désigné par le parti. S’ils reviennent en suivant la demande de Blaise Compaoré, ils ont pour obligation de respecter les règles. Nous avons montré des gages de bonne foi, c’est à leur tour de faire de même », plaide Achille Tapsoba.

Dans l’attente de Blaise Compaoré

Mais si, de part et d’autre, on reconnaît que cette divergence – fondamentale – demeure d’actualité, chacun assure aussi que la communication n’est pas rompue et que des échanges informels existent.

Surtout, tous attendent désormais la décision de Blaise Compaoré, qui a assuré qu’il mènerait des consultations en vue de la désignation du futur candidat. « Les textes prévoient qu’il donne des orientations avant que les instances du parti se prononcent », précise Léonce Koné. « À Abidjan, nous avons également évoqué les dysfonctionnements dans la gestion actuelle du parti. Là dessus également, Blaise Compaoré a annoncé qu’il allait mener des consultations. »