Témoignages

 

Pourquoi Thomas «Sankara n’est pas mort»?

« Sankara n’est pas mort », un film de Lucie Viver, avec le poète burkinabè Bikontine.
« Sankara n’est pas mort », un film de Lucie Viver, avec le poète burkinabè Bikontine. (c) Meteore Films

Merci aux vingt salles virtuelles nous offrant l’occasion de découvrir « Sankara n’est pas mort », grâce à sa sortie en e-cinéma cette semaine. Ce premier long métrage de Lucie Viver est une perle rare. Il explore le « pays des hommes intègres » sur les traces du « Che Guevara » d’Afrique, et cela après l'insurrection de 2014 au Burkina Faso, loin des sentiers battus. Entretien.

Que reste-t-il de Thomas Sankara, homme des idées révolutionnaires et président du Burkina Faso ? Assassiné lors du coup d’État de 1987, il continue d’être jusqu’à aujourd’hui un modèle et un souvenir à la fois douloureux et plein d’espoir pour beaucoup de Burkinabè.

Pour mesurer la portée et l’impact de ses idées et mesurer le chemin parcouru, Lucie Viver entreprend un voyage à travers le pays, guidée et accompagnée par un poète burkinabè, Bikontine. Ce dernier avait 5 ans lors de l’assassinat de Sankara. Aujourd’hui, il fait partie de la génération qui a renversé le dictateur (« l’espoir s’est planté dans nos rêves ») et cherche maintenant sa place.

Avec, comme seul bagage un stylo et son esprit artistique, Bikontine part alors à la rencontre de ses compatriotes, curieux de trouver l’esprit Sankara dans les écoles, chez les commerçants, ouvriers, paysans, chercheurs d’or, balayeuses de rues... Un médecin lui souffle une pépite philosophique : « Le poète a sa part dans la responsabilité du développement de la société. Il y a des gens qui mènent une vie heureuse, parce qu’ils ont lu un poème. »

Avec son premier film, après avoir été assistante, entre autres, de Mati Diop, Lucie Viver assure d’une certaine façon et de manière percutante la suite d’un autre documentaire, Capitaine Thomas Sankara, du Suisse et Burkinabè d’adoption Christophe Cupelin. Réalisé (et interdit de diffusion) pendant le règne de Blaise Compaoré, il fut accueilli avec un enthousiasme énorme lors du Fespaco 2015, le Festival du cinéma panafricain de Ouagadougou. Mais là, où Cupelin devait se contenter d’un savant montage d’images d’archives, Viver part à la recherche de l’héritage de Sankara après la révolution d’octobre 2014 et la chute du président Compaoré. Suivant le tracé d’une voie ferrée, 600 kilomètres, du sud-ouest au nord-est du pays, elle suit l’histoire des idées éclairantes de Sankara, mais aussi l’histoire du Burkina Faso, créé par le sang, la sueur et la créativité du peuple.

RFI : Êtes-vous sûr que « Sankara n’est pas mort » ?

Lucie Viver : J’étais attentive de laisser la porte ouverte à la réflexion. Le film a été déjà montré plusieurs fois au Burkina Faso. Et c’est toujours cet aspect qui déclenche le plus de débat parmi le public. Le film ne cherche pas à donner une réponse.

Pourquoi avez-vous décidé de suivre le tracé d’une voie ferrée au Burkina Faso pour raconter l’héritage de Thomas Sankara ?

Déjà pour une question de simplicité. Il y a une seule ligne de chemin de fer au Burkina Faso. Elle part de la Côte d’Ivoire, d’Abidjan, entre au Burkina et remonte jusqu’à Ouagadougou, et même jusqu’à Kaya. Mais la section entre Ouagadougou et Kaya n’est plus active actuellement. Ce chemin de fer part du sud-ouest jusqu’à nord-est, ce sont 600 kilomètres de trajet qui traversent de nombreuses régions, de paysages différents, des ethnies différentes, des grandes villes et des villages. Il y avait déjà cet aspect panoramique très intéressant.

« Sankara n’est pas mort », un film de Lucie Viver, avec le poète burkinabè Bikontine.
« Sankara n’est pas mort », un film de Lucie Viver, avec le poète burkinabè Bikontine. (c) Meteore Films

Puis, la voie ferrée a été construite pendant la colonisation française et permet d’aborder aussi cette question. Surtout, c’est à l’initiative de Sankara que ce chemin de fer a été prolongé, de Ouagadougou à Kaya, sur 100 kilomètres. Et comme personne n’avait voulu aider le Burkina de Sankara pour ces travaux, ce sont les Burkinabè eux-mêmes qui ont posé ces rails, du village au village. On appelle cela aujourd’hui « la bataille du rail ». Les Burkinabè en sont très fiers. C’est quelque chose qui les a beaucoup marqué et dont ils parlent encore beaucoup aujourd’hui. Et le nouveau segment du chemin de fer s’arrête brutalement, au milieu de la brousse, parce que les travaux se sont arrêtés tout simplement peu après la mort de Thomas Sankara.

Un poète, que peut-il apporter à la société burkinabè ? Qui est Bikontine, le poète qui vous accompagne pendant cette aventure ?

Bikontine est d’origine lobi, une ethnie du sud-ouest du Burkina Faso. Il vit à Bobo-Dioulasso et écrit des poèmes. Avant de participer au film, il faisait très peu lire ses poèmes. Le film, c’est aussi l’occasion pour lui d’assumer son rôle de poète auprès de toutes les personnes qu’il rencontre pendant le voyage. Le film pose la question : quelle est la place d’un poète dans un pays qui vient juste de vivre un bouleversement. Parfois, il se sent exclu, il est un peu en retrait. Parfois, c’est lui qui va faire le lien et éclairer les choses. C’est lui qui voit les choses un peu différemment et invite à réfléchir et ressentir les choses différemment. C’est peut-être ça qu’un poète peut apporter aujourd’hui.

Les images sont souvent calmes, presque méditatives, mais le récit se montre souvent agité et révolté. Est-ce à l’image du pays que vous avez découvert ?

Tout à fait. C’est vraiment venu de notre voyage, avec Bikontine, avec les rencontres qu’on a faites. Il y a une forme de suite à l’insurrection, un événement très important. Après, il y a une réception très contrastée des choses dans le pays, avec toujours une colère, une envie ou un espoir très important. En même temps, il y a une forme de désenchantement, un désarroi par rapport à la situation qui ne va pas forcément en s’améliorant. C’est toute cette ambivalence que le film essaie de retranscrire.

Sankara n’est pas mort évoque l’espoir, le rêve, l’illusion d’une vie meilleure après la révolution de 2014. Tout cela s’est arrêté ce dernier temps avec une menace terroriste très élevée, avec des attentats, de l’insécurité, avec des centaines de milliers de Burkinabè contraintes à fuir leur domicile. Peut-on dire votre film documente une bulle d’espoir, un peu comme la bulle d’enthousiasme provoquée par Sankara jusqu’à son assassinat ?

C’est exactement ça. On a eu la chance de faire ce voyage et de tourner le film entre l’insurrection et le début des attentats. Il y en a eu avant qu’on tourne, mais c’était plus réduit et ponctuel. Cette petite « fenêtre » montre quand même quelles sont les questions essentielles que les Burkinabè se posent. Aujourd’hui, avec les attentats, l’insécurité et la crise sanitaire en plus, tout devient très compliqué, mais le film permet de se rendre compte de la situation à ce moment-là, en 2017, l’année où l’on avait tourné le film. Les préoccupations sont toujours là, même si aujourd’hui elles sont éclipsées par d’autres plus urgente du moment.

« Sankara n’est pas mort », un film de Lucie Viver, avec le poète burkinabè Bikontine.
« Sankara n’est pas mort », un film de Lucie Viver, avec le poète burkinabè Bikontine. (c) Meteore Films

Ces questions essentielles, sont-elles toujours nourries des idées de Thomas Sankara ?

Oui. C’est une référence omniprésente. Plusieurs personnages dans le film y font spontanément référence. On sent leur attachement très fort, leur relation quasi-personnelle. Chacun délivre une petite part de sa relation politique ou personnelle ou parfois même enfantine, ce sont parfois des souvenirs d’enfant qui sont racontés. Sankara est présent dans les discours, dans les têtes, mais il est souvent absent dans les débats sur la scène politique officielle. Et quand il est cité, c’est souvent de manière un peu superficielle. Mais il est toujours là. Il est vraiment un moteur pour les débats entre Burkinabè.

Quel effet cela vous fait-il de sortir votre film sous forme de e-cinéma dans des salles virtuelles ?

Il était prévu que le film sorte en salle. Donc, c’est vraiment assez inédit pour tout le monde. C’est la première fois que le distributeur sort un film de cette manière. L’idée était de faire exister le film, malgré le contexte. Pour l’instant, j’ai l’impression que cela attire l’attention, aussi parce que ce mode de diffusion est nouveau. La curiosité, l’attente des spectateurs sont là.

Le fait de sortir le film en liaison avec une vingtaine de salles, avec des spectateurs géolocalisés, 10 ou 50 kilomètres autour des salles, est-ce que cela pourrait représenter aussi des avantages pour un film comme le vôtre ?

C’est une inconnue pour l’instant. On ne sait pas comment le public va se comporter. Mais, c’est quand même un vrai film de cinéma, conçu pour les salles, dans le traitement de l’image et du son. Et on espère bien, quand les salles rouvriront un jour, de pouvoir quand même montrer le film sur grand écran.

Au Burkina Faso, après la sortie en salles, y aura-t-il une e-sortie en ce temps de confinement ?

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Je ne sais pas encore. Dans un premier temps, on avait envie de se déplacer et de rencontrer le public physiquement. L’idée est de montrer le film à un public le plus large possible, donc de le proposer aussi en e-cinéma, si le système se développe au Burkina Faso.

Y a-t-il des débats prévus pour la e-sortie ?

Oui, pratiquement tous les soirs, il y a des séances suivies de rencontres virtuelles, avec moi et Bikontine, le personnage principal du film, qui sera en direct de son bureau de Bobo-Dioulasso, parce qu’ils sont confinés là-bas. Ce sont des séances à heures fixes, dans des zones géographiques prédéterminées, portées par les salles. Donc, ce sont les exploitants qui nous soutiennent dans cette e-sortie et je les remercie chaleureusement pour cela.

« Sankara n’est pas mort », un film de Lucie Viver, avec le poète burkinabè Bikontine.
« Sankara n’est pas mort », un film de Lucie Viver, avec le poète burkinabè Bikontine. (c) Meteore Films

► Sankara n’est pas mort, séances en e-cinéma, à 20h30 (heure de Paris). Réservation dans une vingtaine de salles virtuelles sur www.25eheure.com, avec débat en direct après les séances, en présence de la réalisatrice Lucie Viver et de Bikontine, personnage principal du film.

► Le dimanche 3 mai, à 18 h (heure de Paris), aura lieu un débat avec Lucie Viver, Bikontine et Rodolphe Burger, compositeur du film.

 
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Coronavirus: le regard d'une figure de la culture au Mali

Alioune Ifra N’Diaye
Alioune Ifra N’Diaye RFI / Arnaud Jouve

La pandémie du coronavirus n’a pas épargné le Mali ni la population de sa capitale, Bamako, qui s’interroge face à la maladie. Regard de l’homme de culture Alioune Ifra N’Diaye sur le ressenti de la rue de Bamako face au coronavirus

Alioune Ifra N’Diaye est l’une des grandes figures de la culture malienne, résidant à Bamako. Il est le directeur de Wokloni, le Complexe Culturel Blonba, président de la Fédération des artistes du Mali (Fedama), et auteur de nombreuses réalisations au théâtre, dans l’audiovisuel et dans de multiples autres domaines.

RFI : Alioune Ifra N’Diaye, depuis quand Bamako est confrontée au coronavirus et quels sont les messages et recommandations qui ont été faits à la population ?

Alioune Ifra N’Diaye : Il est difficile de dire à partir de quand Bamako a été confrontée au coronavirus, mais les premières mesures restrictives ont été prises par le gouvernement le 11 mars 2020, en suspendant notamment les regroupements importants de personnes au Mali, comme les festivals et autres manifestations culturelles et artistiques. Puis s’en est suivi l’installation d’un couvre-feu entre 21h00 et 5h00. Les recommandations se sont alors concentrées sur les mesures d’hygiènes et de distanciation sociale. Et c’est à sa troisième adresse à la nation, dans le cadre de la crise sanitaire le 10 avril 2020, que le président de la République, Ibrahim Boubacar Keïta, a vraiment engagé le gouvernement du Mali, en prenant des mesures exceptionnelles pour accompagner les tissus économiques et socio-culturels. Et là, les autorités du Mali ont fait un choix stratégique clair : le confinement à l’occidentale n’étant pas possible, elles ont investi sur le port généralisé du masque, les mesures d’hygiène, la distanciation sociale. La mise en œuvre de ces mesures est difficilement en cours.

Comment l’annonce de cette épidémie a-t-elle été reçue par les habitants ?

Connectée au monde et à sa diaspora, la population malienne a été informée dans un premier temps par les médias occidentaux, relayés par quelques médias nationaux. Elle ne se sentait pas directement concernée. Mais par sa diaspora, via les réseaux sociaux, vivait quasiment en direct les mesures restrictives des pays sous crise sanitaire. Et avec beaucoup de questions : « Pourquoi pour une petite grippe, les plus grands pays du monde sont en panique », « Est-ce que ce n’est pas le châtiment de Dieu ? », « Est-ce que ce n’est pas une nouvelle guerre entre puissances du monde ? », «  Est-ce que ce n’est pas un nouveau test de vaccin auquel on nous prépare pour venir recoloniser l’Afrique ? ». Des questions dont les réponses aboutissent généralement aux théories complotistes ou au châtiment de Dieu.

Après la déclaration officielle des premiers cas au Mali par les autorités, une grande partie de la population malienne s’est réfugiée dans une forme de déni ou s’est accrochée à des chimères. Jusqu’à maintenant, malheureusement, elle a fait le choix de gérer le Covid-19 comme une maladie normale. D’ailleurs, est-ce qu’elle a le choix ? Elle est dans un mode de survie quotidienne. Elle sort tous les jours pour gagner son « nansongon » (prix du condiment, prix du repas) quotidien.

Quels sont les sujets de discussion les plus fréquemment abordés par la population autour de cette question du coronavirus ?

Le Mali est un des pays au monde les plus connectés sur Facebook et WhatsApp. Ces réseaux sont devenus les principales sources d’information du grand public urbain et ont supplanté de très loin les tentatives de programmes de sensibilisation de l’État. Et malheureusement ce sont les « fake news » qui y dominent. Entre les théories complotistes, les faux médicaments qui guérissent la pandémie et les tentatives d’associations pour porter la saine information, ça parle de tout. Mais, à regarder de près, on sent une inquiétude créée par un manque de perspectives claires de la gestion de la pandémie et de l’après pandémie.

Que disent les gens sur le coronavirus à propos de la situation au Mali ?

Les gens s’attaquent beaucoup aux autorités. Celles-ci étaient déjà extenuées et fragilisées face aux crises multiformes en cours depuis presque huit ans (guerre, crise institutionnelle latente, crise de confiance généralisée entre les usagers des services publics et les autorités institutionnelles, risque d’ethnicisation de la crise au centre du pays, émergence de certaines formes d’islam....) et n’arrivent pas à créer une dynamique nationale contre le Covid-19. Donc chacun développe sa théorie pour se rassurer au fond : « La chaleur va nous protéger », « Nous sommes une population jeune », « Nous sommes déjà de grands consommateurs de chloroquine, le coronavirus ne pourrait pas résister dans nos corps », « Le Covid-19 est une grippe comme les autres, ça va passer », « Si ton destin est que tu dois mourir de Covid-19, tu mourras de Covid-19, tu ne pourrais rien contre la volonté de Dieu », etc…

Dans l’impuissance, les gens se répètent ces théories comme des prières pour nourrir leur résilience face à la pandémie. Par exemple, je viens de perdre mon beau-frère à cause du Covid-19. Pensant me soulager, les gens me disent régulièrement que c’était son destin, que c’est la volonté de Dieu.

Comment la population de Bamako voit-elle la situation dans les autres pays ?

On a toujours l’habitude au Mali d’envier ce qui se passe ou vient de loin. Au-delà de cette habitude, qui amène la population à commenter les mesures prises par les présidents de la sous-région, notamment ceux du Sénégal, de la Côte d'Ivoire, du Burkina Faso et du Bénin et de les comparer à celles du président du Mali, je ne constate pas de grands intérêts sur ce qui se passe ailleurs. Par contre la classe moyenne suit de près, par les grands canaux d’information comme RFI, France 24, et les réseaux sociaux, l’évolution de la pandémie en France, en Italie et en Espagne.

Qu’est-ce que cela a changé dans la vie de tous les jours ?

Une grande partie de la société malienne continue de vivre de l’économie informelle. Son rythme de revenu est quotidien. Elle est donc condamnée au travail quotidien et elle continue chaque jour à aller animer les marchés et à prendre les transports, les Sotrama (mini-bus), totalement bondés de monde. C’est seulement pendant la nuit que le couvre-feu oblige les gens à rester à la maison de 21h00 à 5h00. La gestion délicate des lieux de culte n’a pas non plus été heureuse. Contrairement aux leaders chrétiens qui ont fermé les églises, les imams, dans leur très large majorité, ont décidé de garder les mosquées ouvertes. Les gens continuent à aller donc normalement dans les mosquées.

Par contre, un grand pan des activités formelles est arrêté. Comme ce sont celles-là qui, de plus en plus, nourrissent l’économie informelle, nous sentons un marasme général qui s’installe inexorablement. Nous avons l’habitude des marasmes économiques en répétition et avons développé une forme de résilience pour y faire face. Mais celui-là est inédit. Mon secteur, la culture, est à la limite de 100 % d’arrêt d’activités depuis le 11 mars. Dans la lancée du discours du 10 avril du président, on avait pressenti une dynamique de mise en place de mécanismes d’urgence pour accompagner les secteurs en détresse. L’espoir qu’avait suscité ce discours est en train de se transformer en anxiété tant les résultats concrets tardent à se mettre en place.

Qu’est-ce que cette crise sanitaire peut changer pour l’avenir ?

La gestion de la crise sanitaire a encore une fois démontré que le Mali s’est installé profondément dans la défiance. Au lieu de faire corps pour créer une dynamique contre la crise sanitaire, nous continuons à nous réfugier dans l’impuissance dès que se présente un problème. Toujours dans la plainte, renvoyant au destin, à la magie et à Dieu la responsabilité individuelle que chacun de nous doit assumer vis-à-vis de soi-même et de l’autre. La gestion de la crise sanitaire nous appelle à cette responsabilité individuelle. Notre pays n’a pas les moyens de faire face à la maladie. Mais si nous assumons notre responsabilité individuelle, nous pouvons atténuer considérablement la pandémie. La mosquée n’est pas fermée ? J’assume ma responsabilité de ne pas y aller et de prier à la maison. Je suis en ville ? Je porte mon masque, garde la distance nécessaire entre les autres et moi et lave régulièrement mes mains. J’évite tout acte qui peut m’exposer ou exposer l’autre à la transmission du virus. C’est ainsi, par cette responsabilisation individuelle, que je réduis considérablement le risque d’attraper le virus et de l’amener dans ma famille, dans mon lieu de travail, dans mon quartier, dans mon cercle d’amis…

Aujourd’hui, au-delà des mécanismes d’urgence que l’État doit rendre rapidement opérationnels pour accompagner les secteurs en détresse, il doit également urgemment investir dans un grand programme d’éducation à la citoyenneté pour créer un grand mouvement populaire de responsabilité contre la crise sanitaire. C’est une question de sécurité nationale et de survie du Mali.

Mais pour résumer, à l’heure qu’il est, le sentiment général, c’est l’incompréhension.

 
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Kiye2019L’hebdomadaire de l’aumônerie des jeunes de la paroisse de Dyou : Rendez-vous du père Vincent KIYE avec les jeunes, n°62 du 20 avril 2020 
Jésus dit alors : « En vérité, en vérité, je te le dis : si l’on n’est pas né de l’eau et de l’Esprit, on ne peut pas entrer dans le Royaume de Dieu. »
Bien-aimés dans le seigneur,
Recevez nos salutations fraternelles depuis la paroisse de Dyou/Kadiolo au Mali
 Comme chaque semaine, nous voici pour ce rendez-vous hebdomadaire au cours duquel nous nous engageons de vous offrir des interprétations originales des textes de la liturgie pour nourrir la foi des enfants de Dieu sur les réseaux sociaux.
 Pour notre partage d’aujourd’hui, c’est la figure de Nicodème qui retient notre attention. Une figure que nous connaissons bien depuis des années à tel point qu’elle entre même dans nos humours pour qualifier ceux et celles qui excellent dans les complots nocturnes ou qui s’en vont trouver les autorités ou les supérieurs la nuit pour dénoncer les autres ou bénéficier des multiples faveurs. Nous les surnommions des Nicodèmes. Mais en quoi cette figure de Nicodème peut nous inspirer aujourd’hui ?
Chers frères et sœurs en Christ,
L’évangéliste saint Jean nous dit qu’il y avait chez les Pharisiens un homme nommé Nicodème, c’était un chef des Juifs.  2 Il vint de nuit trouver Jésus et lui dit : “Maître, nous savons que tu es venu de Dieu pour enseigner, car personne ne peut faire des signes comme ceux que tu fais si Dieu n’est pas avec lui.”
 S’il est vrai que la théologie johannique reprise dans ce texte nous peint l’exigence du baptême de l’eau et de l’Esprit pour entrer dans le Royaume de Dieu, pour entrer dans la famille des enfants de Dieu, notre émerveillement est grand devant l’attitude de ce notable juif.
Premièrement, il brûle de désir de rencontrer le Christ malgré les barrières traditionnelles ou l’hostilité des juifs dont il était le chef, vis-à-vis de Jésus. Pour ne pas s’attirer la foudre vis-à-vis de ses compères, il s'arrange à venir trouver Jésus la nuit.
Oui chers frères et sœurs, comme un cerf altéré cherche l’eau vive, notre ami Nicodème avait lui aussi soif du Seigneur. Il avait désiré rencontrer Jésus parce qu’il avait foi en lui et lui dit : “Maître, nous savons que tu es venu de Dieu pour enseigner, car personne ne peut faire des signes comme ceux que tu fais si Dieu n’est pas avec lui.” C’est alors que Jésus lui révèle la voie sûre pour entrer dans le Royaume de Dieu, pour combler son désire : renaître de l’eau et de l’Esprit.
Chers frères et sœurs,
Quelle est notre attitude lorsque nous butons face à certaines réalités existentielles susceptibles de nous empêcher de rencontrer le Seigneur, de le prier, d’aller à la messe ?
En ces jours de la pandémie de la maladie à coronavirus, la fermeture des églises mieux des lieux de prières ne devrait pas nous empêcher de trouver des issus pour prier Dieu celui qui seul peut nous inspirer les vraies dispositions à prendre à ce temps-ci, celui qui seul peut nous révéler le vrai remède contre cette pandémie.
     Brûler de désir de rencontrer le Seigneur, malgré le tumulte des nations, malgré les mesures barrières en vigueur ici et là, les enfants de Dieu que nous sommes devrons trouver des moyens nécessaires pour pouvoir toujours entrer en contact avec le maître du monde pour lui dire comme les apôtres dans la première lecture de ce lundi 20 avril: « Maître, toi, tu as fait le ciel et la terre et la mer et tout ce qu’ils renferment…(en ces jours où la pandémie de la maladie à Coronavirus tue tes enfants à travers le monde..) Sois attentif à sa menace. Donne à ceux et celles qui travaillent jour et nuit à la recherche des solutions adéquates pour éradiquer cette pandémie, ta sagesse et l’amour de ton peuple. Etends donc ta mai pour que se produisent guérisons, signes et prodiges, par le nom de Jésus, ton Saint, ton Serviteur.»
Quel est notre désir le plus intime ? Est-ce la présence du Seigneur, le maître du monde qui seul peut inspirer les bonnes dispositions pour une sortie de crise ou bien les désirs désordonnés des hommes de notre? Pour preuve, les recherches des spécialistes semblent de nos jours, être très politisées. Ça sent une guerre des compétences entre les grandes puissances. Lorsque nos désirs les plus intimes restent les plaisirs temporaires ou les intérêts idéologiques, l’accès au Royaume des cieux devient un horizon quasi impossible. Malheureusement, nous y sommes dans la plupart de cas. Combien de nous, face aux mesures barrières en vogue, qui en réalité sont salvatrices, se préoccupent pour trouver des moyens intermédiaires pour maintenir leur rythme de prières en communauté restreinte ou en famille ? C’est maintenant  le moment de comprendre qui prie par devoir ou nécessité. Ce qui est né de la chair est chair ; ce qui est né de l’esprit est esprit, dira le Seigneur.  Prions et prions encore pour confier notre cause au Seigneur, le maître du monde qui seul peut nous inspirer comment renaître. Amen.
Le Seigneur soit avec vous !
✍Père KIYE Mizumi Vincent, Mafr
Aumônier paroissial des jeunes
Paroisse de Dyou/Diocèse de Sikasso-Mali
E-mail: Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.
Whatsapp : (+223) 72 65 74 82
 
L’hebdomadaire de l’aumônerie des jeunes de la paroisse de Dyou/Kadiolo, n° 63 : Rendez-vous du Père UFOYURU Bosco avec les Jeunes du 26 Avril 2020 : 3ème Dimanche de Pâques, Année A.
Chers frères et sœurs en Christ,
Recevez nos Salutations fraternelles depuis la paroisse de Dyou/Kadiolo!
En ce troisième dimanche de Pâques, autrement appelé, le dimanche des apparitions, chacun et chacune de nous est invité à méditer sur sa propre rencontre avec le Christ Ressuscité. En ce même dimanche, nous sommes tous et toutes invités à reconnaître davantage la présence du Christ Ressuscité dans notre vie quotidienne et de devenir davantage de vrais témoins du Christ Ressuscité, comme l’ont fait les deux disciples d’Emmaüs.
Découragés et déçus par la mort brutale de leur Maître, certains des disciples du Christ quittent Jérusalem pour se retourner chez eux. Et c’est particulièrement le cas des deux disciples d’Emmaüs. Saint Luc nous dit : ‘’Le même jour, deux disciples faisaient route vers un village appelé  Emmaüs’’ (Lc 24 :13). Eux, qui avaient tout quitté pour suivre le Christ ; eux, qui avaient mis leur foi en Jésus Christ, voilà maintenant leur foi s’effondre. Mais, le Christ Ressuscité vint lui-même à la rencontre de ses disciples déçus et découragés. Pleins de doutes et de questionnements, Jésus vint leur montrer qu’il est Vivant. Il marcha discrètement avec eux. il les accompagna progressivement de leurs doutes à la Foi et espérance. Il accepta leur accueil et mangea avec eux dans leur village d’Emmaüs.
Emmaüs, est un village situé à environ trente kilomètre à l’ouest de la ville de Jérusalem. Il est devenu un des Lieux Saints, où chaque Lundi de Pâques, des centaines des chrétiens et des pèlerins font la même expérience de marche comme l’ont faite les deux disciples d’Emmaüs. C’est une marche de Foi en Jésus Ressuscité. C’est une sainte marche pendant laquelle le Christ vient à la rencontre de tout homme et de toute femme qui lui ouvre son cœur pour y demeurer. Cette sainte marche que chacun et chacune de nous puisse faire, soit sur la Coline Mariale à Kita (Mali), pendant le mois de Novembre, est une marche de la rencontre personnelle avec le Christ Ressuscité. C’est cette même rencontre personnelle que chacun et chacune de nous puisse faire, soit, dans le sacrement de la réconciliation où le Christ Ressuscité vient à la rencontre de tout homme et de toute femme qui lui ouvre son cœur blessé pour que Lui, le Ressuscité, puisse le guérir et le remplir de sa Paix, de sa Joie et de sa Présence.
Dans l’Evangile que nous venons d’entendre, Saint Luc nous rapporte comment les deux disciples d’Emmaüs, déçus et découragés, ont été remplis de joie. Saint Luc nous raconte, comment leur marche et leur rencontre personnelle avec le Christ Ressuscité ont transformé toute leur vie de foi en Jésus : « Notre cœur n’était-il pas brûlant en nous, tandis qu’il nous parlait sur la route et nous ouvrait les Écritures ? » (Lc 24 :32). Dans leur marche d’obscurité et de déception, les disciples ne pouvaient même pas voir le Christ qui marchait discrètement avec eux. Leurs yeux étaient empêchés de Le reconnaître.
Chers frères et sœurs en Christ, parfois, il nous arrive aussi de connaître des moments de déceptions. Parfois, il nous arrive de vivre des moments de découragement ou de l’obscurité. Il nous arrive de nous sentir trahis par nos amis intimes mêmes comme Judas Iscariote avait fait à Jésus. Alors, pendant ces moments de doutes et de questionnements, sur qui nous appuyons-nous ? Pendant ces moments de déceptions et de découragement, pensons-nous que le Christ, demeure toujours présent dans notre vie ? Est-ce que pendant ces moments de tribulations et d’abandon, le Christ ne marche-t-il pas toujours avec toi ? Et pendant ce temps de confinement où tu es empêché d’aller à l’Eglise, ne penses-tu pas que le Christ Ressuscité est toujours présent dans ta vie et qu’Il est en train de marcher avec toi ?
Etant arrivés dans leur village d’Emmaüs, les deux disciples accueillent cet étranger qui marchait discrètement avec eux. Mais ils l’ont reconnu seulement pendant le repas, pendant la fraction du Pain. Certes, le Christ qui n’a pas été abandonné à la mort et dont la chair n’a pas connu la corruption, nous dit la première Lecture ; bénit le pain, il le rompt et le donne à ses disciples comme il leur fit  au Cénacle, le Jeudi Saint. Et donc, ce n’est pas un esprit qui agit. Mais, c’est un Corps, c’est un Être vivant, le Christ Ressuscité Lui-même qui se manifeste à toute l’humanité. Il montre qu’Il a vaincu le pouvoir du mal. Et que sur Lui la mort n’a aucun pouvoir.
Chers frères et sœurs en Christ, en ce troisième dimanche de Pâques, le Christ vient à ta rencontre. Le Christ Ressuscité souhaite que tu lui ouvre ton cœur pour qu’Il y demeure.  Comme les deux disciples d’Emmaüs, le Christ vient se joindre à toi pour marcher ensemble avec toi. Mais avec une seule condition : C’est d’accepter d’ouvrir ton cœur pour accueillir le Christ Ressuscité.
En effet, il est question de la volonté. Il est question de vouloir croire et espérer en Jésus, sur qui tu t’appuies. Il est question de faire une expérience de rencontre personnelle avec la personne du Christ Ressuscité. Il est évidemment question de reconnaître que le Christ est mort sur la croix pour que par son Précieux Sang, chacun et chacune de nous vive dans la joie et dans la paix qu’Il nous offre. Car, par son Sang qui fut coulé sur la croix, le Christ nous a d’ores et déjà réconciliés avec Dieu le Père.
Les deux disciples sont devenus de témoins oculaires de la résurrection du Christ. Puisque ‘’le Seigneur s’était fait reconnaître par eux à la fraction du pain’’ (Lc 24 :35). Immédiatement, ils retournèrent à Jérusalem en courant et en chantant : « Le Christ est vraiment Ressuscité des morts. Alléluia, Alléluia !» Etant arrivés à Jérusalem, ils racontèrent aux onze autre disciples l’expérience de leur rencontre personnelle avec la personne du Christ. Comme une communauté de foi en Jésus, ils partagèrent avec leurs frères et sœurs qui furent confinés à Jérusalem, comment le Christ a ouvert leurs yeux et leur intelligence au plan du salut de l’humanité que ‘Dieu avait planifié dès avant la création du monde’ (cf. 1 Pt 1 :20). Ils leur partagèrent comment le Christ leur a expliqué toutes les Saintes Ecritures. En fait, toutes les Saintes Écritures (Du Livre de la Genèse à l’Apocalypse) parlent de l’accomplissement parfait du salut de l’humanité en Jésus Christ, mort et ressuscité.
Oui, chers frères et sœurs, avant que le confinement arrive, chaque dimanche vous veniez aussi participer à la célébration Eucharistique. Chacun et chacune de vous venait faire non seulement une expérience personnelle, mais aussi communautaire avec la personne du Christ Ressuscité qui se donne en nourriture spirituelle à chacun et à chacune de nous.
Le dimanche, le jour de la sainte convocation, nous rencontrons le Christ Ressuscité dans sa Parole lue et proclamée. À cette sainte convocation, vous venez vous nourrir de la Parole du Christ qui vous édifie quotidiennement.  Mais aussitôt la messe finie, combien parmi vous se souviennent encore, soit d’une des Paroles du texte liturgique du jour ? Aussitôt la messe finie, combien parmi vous se souviennent encore de l’Evangile du jour ? Aussi la messe finie, combien parmi vous, rentre à la maison et continue d’annoncer le message du Christ Ressuscité ? Quelle vie de témoignage montrez-vous à vos frères et sœurs, à vos voisins ?
Prions aujourd’hui pour que le Christ Ressuscité transforme nos doutes à la Foi et l’Espérance. Qu’il fasse de chacune et de chacun de nous de vrais témoins de la joie et de la Paix et continue de bénir toutes les familles qui se tournent constamment vers Lui pendant ce temps de confinement !
Bon temps de Ramadan à nos frères et sœurs Musulmans !
Le Seigneur soit avec vous !
✍Père UFOYURU Bosco, Mafr
Vicaire paroissial
Paroisse de Dyou, Diocèse de Sikasso-Mali
 
 
 
 
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Les communautés virtuelles sont-elles de vraies communautés ?

Devant la profusion de nombreuses initiatives sur les réseaux sociaux, n’y a-t-il pas un risque de déconnecter la célébration d’une pratique communautaire ? Les réflexions de Mgr Benoist de Sinety, vicaire général du diocèse de Paris.

Les communautés virtuelles sont-elles de vraies communautés ?

Les chrétiens ne vont probablement pas pouvoir retourner à la messe avant le 15 juin prochain, et beaucoup vont continuer à se réunir par ordinateur interposé. Ces communautés virtuelles sont-elles de vraies communautés ? Cela ne risque-t-il pas d’engendrer une certaine lassitude ?

Précisons que rien n’est encore décidé. Les responsables des cultes qui ont dialogué mercredi 22 avril avec le président de la République ont demandé que l’on puisse autoriser au plus tôt, une fois le confinement amorcé, le retour à la pratique, mais rien n’a été tranché. On peut penser cependant qu’il faudra du temps pour revenir aux pratiques habituelles. On a vu fleurir depuis le début du confinement de nombreuses initiatives sur les réseaux sociaux : des prêtres célèbrent la messe ou dispensent des enseignements pour garder un lien avec les fidèles. Ces initiatives sont très appréciées. Certains y ont vu le risque de déconnecter la célébration d’une pratique communautaire, et d’en faire un acte individuel et à distance, intensifiant plus encore que d’habitude le principe du choix d’aller écouter tel prêtre plutôt que tel autre, ce qui dissout l’appartenance communautaire. C’est évidemment un risque. La mise en place de célébrations relayées par internet, tout comme la messe diffusée chaque dimanche à la télévision depuis 1948 pour ceux qui ne peuvent pas s’y rendre, est nécessaire parce qu’elle rend l’absence moins douloureuse, mais elle n’est pas suffisante. Je dirais que c’est un pis-aller.

Voir aussi sur croire.com

On a l’impression, devant toutes ces initiatives, que seule compte la messe. N’y aurait-il pas d’autres formes de pratique à mettre en valeur ?

C’est une question que l’on se pose depuis le concile Vatican II qui, en rappelant que l’eucharistie est la source et le sommet de l’Église, a pu laisser penser que sans la messe, point d’Église possible, point de vie chrétienne possible, point d’Évangile possible. Cela mérite d’être nuancé. Un des grands mérites de l’impossibilité pour les croyants de se rassembler à l’église, c’est qu’elle pourrait faire émerger la liturgie familiale, une forme de célébration dont les catholiques français n’ont pas du tout l’habitude. Les juifs la vivent depuis toujours. Les protestants également, pour une part. Les orthodoxes ont pratiqué des liturgies familiales sous le régime communiste, qui leur interdisait toute célébration publique. Mais c’est une forme de liturgie méconnue du catholicisme français. Dans ma famille, certains de mes cousins qui étaient confinés à la campagne ont allumé un feu pascal dans leur jardin le samedi saint, ont lu les grands récits bibliques de la vigile pascale, ont chanté autour du feu. D’autres qui étaient en appartement à Paris ont partagé en famille l’évangile du dimanche de Pâques… Il ne s’agit pas de remplacer la messe. Mais l’impossibilité de se rassembler pour l’eucharistie permet aux chrétiens de chercher comment entrer en communion avec le Seigneur et avec la communauté chrétienne, par le partage de la Parole ou par la mise en place de petites liturgies familiales qui manifestent le désir de prier et de cheminer ensemble.

On a aussi beaucoup parlé de « communion de désir ». Qu’en pensez-vous ?

B. de S. : C’est quelque chose que l’on a oublié, mais qui n’est pas une simple piste pour temps de crise. Cela nous indique que recevoir le pain de vie, le corps du Christ, nous met certes en communion avec le Seigneur et avec nos frères, mais que le désir profond qui habite notre cœur et qui est nourri par l’Esprit saint permet aussi de trouver un chemin de communion avec le Christ. Il y a des chrétiens qui ne peuvent jamais communier, pour des questions de discipline notamment, en raison de leur état de vie, ou parce qu’ils vivent trop loin du lieu de célébration eucharistique, comme le synode sur l’Amazonie le rappelait récemment. Ces personnes ne sont pas moins chrétiennes que les autres. Charles Péguy n’a pas pu communier pendant des années parce qu’il était marié civilement mais pas religieusement. Il allait néanmoins très souvent à la messe. Et, voyant les gens s’avancer vers l’autel, il serrait les poings et se disait intérieurement : « Je suis bien chrétien, moi aussi ». Tout cela ouvre des perspectives qui je pense, vont être riches pour l’avenir en théologie et dans la vie sacramentelle.

Cela nous rapproche des chrétiens d’Amazonie…

B. de S. : En effet, nous sommes des Indiens depuis un mois. Nous n’avons malheureusement considéré ce synode, nous chrétiens occidentalo-centrés, que comme un lieu de débat ou d’attente sur l’élargissement de la communion aux divorcés-remariés, ce qui n’était pas du tout l’enjeu. Il s’agissait de réfléchir à ce qu’est la communion, et finalement à ce qu’est l’Église. Souhaitons que les théologiens qui se poseront ces questions soient de cultures les plus variées possible, car la diversité des cultures est ce qui fait la richesse de l’Église catholique. Et que des théologiens amazoniens, africains, indiens, européens, puissent, en portant les cultures qui sont les leurs, travailler avec enthousiasme à toutes ces questions-là.

 
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Notice biographique de Pierre Du Suau de la Croix

Voici la notice biographique provisoire du Père Pierre Du Suau de la Croix. La notice définitive sera publiée plus tard dans le Petit Echo.

Le 4 mars 1923, Pierre est né dans une famille de médecin à ‘le Houga d’Armagnac’ dans le Gers. Il était le quatrième d’une famille de 7 enfants. Il y vécut une enfance et une adolescence heureuses où, dans un contexte très chrétien, se développa, aidé par le scoutisme, une forte personnalité. Dès cette époque, se précise sa vocation artistique. Sa famille lui fait suivre des cours de peinture à Auch où il résidait alors.

L’appel missionnaire retentit très tôt. Il mûrit au séminaire d’Auch qui l’accompagna jusqu’à la philosophie incluse. Il se rendit alors au noviciat des Pères Blancs à Maison Carrée (1941-1942).

Ce fut ensuite la formation Père Blanc classique, interrompue cependant par la guerre, ce qui l’a amené à participer à 3 débarquements : la Corse en septembre 1943, l’Italie en janvier 1944 et la Provence en septembre de la même année. Suivit la campagne d’Alsace qui le conduisit jusqu’à l’été 1945 date à laquelle il fut démobilisé. Il s’adonne alors durant quatre ans à la théologie en Tunisie. Il Fut ordonné prêtre en 1949 et fut nommé en Haute-Volta Burkina Faso où il se rendit en 1950, affecté au diocèse de Nouna.

Le Sourou fut son premier poste, transféré dès 1952 à Zaba, paroisse qu’il fonda. Il y apprit trois langues. L’apostolat, avec ses différents aspects : culte, catéchèse, …. etc. l’absorba totalement, et il a gardé un bon souvenir de ces treize ans de pastorale rurale, y compris le temps passé à Tansilla. Il revint en congé en 1957 et en 1963, mais le climat très chaud qui l’affaiblissait lui fit comprendre qu’un changement de pays s’imposait. Ce fut le Rwanda qui l’accueillit.

Il y vécut 25 ans, pays qu’il a beaucoup aimé. Le paysage certes, mais surtout la population dont il apprit la difficile langue. Cela lui permit d’être un pasteur actif à Rwaza dans la région des volcans. Il y déploya une activité pastorale débordante. Mais en 1990 on lui demanda de mettre en sourdine l’apostolat paroissial pour s’occuper à temps plein de la décoration  des églises : mosaïques, vitraux et peintures. Avant d’installer son atelier à Kigali d’où il rayonnait sur tout le Rwanda, il travailla chez un maître-verrier à Paris qui l’initia à la technique du vitrail. Il aurait aimé continuer ce travail qui lui plaisait et que bien des visiteurs admiraient, mais les événements de 1994 le forcèrent à accepter l’invitation du régional à profiter des évacuations des ressortissants étrangers par les soldats Français. En avril 1994, on le retrouve donc à Paris.

Il avait alors 72 ans et se sentait en forme. Aussi, après un bon temps de repos, il accepta la proposition que le provincial lui transmit, proposition émanant du P. Louis Blondel en Afrique du Sud : « Faut que tu viennes me rejoindre car j’ai un centre de formation et on veut y créer un atelier d’Art ». C’est ainsi qu’en juin 1995 il atterrit à Johannesburg, et se dirigea vers Orange­Farm à 80 km de là. Il se mit courageusement à l’anglais, et très vite, les commandes affluèrent si bien qu’il était souvent absent de sa communauté ( 2 français, 1 irlandais et 1 canadien) et il dut abandonner le projet d’atelier d’Art. Sa voiture l’emmenait alors pour plusieurs semaines au Transvaal, au Lesotho, au Swaziland, … Une œuvre  qui lui tint particulièrement à cœur fut un chemin de croix avec 15 stations et un chemin de lumière avec également 15 stations. Cela lui prit quatre mois. Hélas ! « monter sur des échafaudages à parfois plusieurs mètres de haut, pour peindre fresques et mosaïques commencèrent à devenir problématique à 80 ans ». En juin 2005, la décision fut prise d’un retour en France. Pierre avait passé 9 ans en Afrique du Sud et ce lui fut pénible de s’en arracher.

En septembre 2005, Pierre est à Billère. Ce sera difficile pour lui de devenir sédentaire après des années de vie indépendante en différents pays. Mais l’atelier qui lui fut réservé lui permit de continuer son travail artistique : mosaïques à l’entrée de la maison, peintures diverses, entre autres, Notre-Dame d’Afrique. Il écrit alors : « l’aide fraternelle de la communauté, la prière et l’eucharistie quotidienne sont une source d’optimisme et de joie ». Et de fait, les témoignages concernant cette époque nous parlent d’un Pierre avec un certain entrain, commentant la télé, toujours amateur de courses automobiles et de football.

Mais, les infirmités, la vieillesse, amenèrent une dépendance que Pierre vécu difficilement, rendant sa vie pénible pour lui et pour son entourage pourtant très prévenant.

Cependant, il garde à travers sa souffrance une sérénité que sous-tend un de ces derniers écrits : « pour moi, la vieillesse n’est pas un naufrage comme disait le Général de Gaulle. C’est plutôt la vue prochaine du port après une traversée pleine d’écueils dont j’ai été protégé par le Seigneur. Aussi, ma prière est un magnificat, celle du P. de Foucault : ‘Seigneur, je m’abandonne à toi. Fais de moi ce qui te plaira. Quoique tu fasses de moi, je te remercie »

Merci Pierre. Tu nous laisses le souvenir d’un confrère dont les œuvres  continuent à faire l’admiration des visiteurs, tant à l’entrée de la maison (mosaïque) qu’à la chapelle (Notre-Dame d’Afrique), souvenir d’un confrère zélé pour l’apostolat, plein d’une ardeur artistique qui lui a permis d’embellir notre vie.

Jean-Marie Vasseur, M.Afr.

 
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Les informations sur nos maisons de formation datent de quelques années, et nous avons demandé aux responsables de ces maisons de nous donner des nouvelles plus récentes.
La première réponse reçue vient de Samagan, le noviciat près de Bobo-Dioulasso (lire la suite)

 

La deuxième réponse nous a été donnée par la "Maison Lavigerie", notre maison de formation à la périphérie de Ouagadougou, où les candidats ont leurs trois premières années de formation (lire la suite)