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Présidentielle en Côte d'Ivoire: KKB, un «gros caillou dans les souliers de Bédié»

 
Kouadio Konan Bertin, membre du Parti démocratique de Côte d'Ivoire (PDCI), à Abidjan, en octobre 2013.
Kouadio Konan Bertin, membre du Parti démocratique de Côte d'Ivoire (PDCI), à Abidjan, en octobre 2013. AFP/Sia Kambou

Dissident du PDCI, Kouadio Konan Bertin, dit « KKB », est candidat pour la seconde fois à l’élection présidentielle en Côte d’Ivoire. En 2015, il avait obtenu 3,88 % des suffrages exprimés.

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Que son nom figure sur la liste des quatre candidats retenus pour le scrutin d’octobre prochain n’a pas manqué d’irriter certains des candidats recalés. Kouadio Konan Bertin fait figure de « petit candidat » face aux vieux pachydermes de la politique ivoirienne que sont Alassane Ouattara, Henri Konan Bédié et Pascal Affi N’Guessan, trois adversaires soutenus par une machinerie politique bien huilée.

Selon le Conseil constitutionnel, l’équipe de « KKB » a collecté les signatures d’au moins 1 % des inscrits dans 19 des régions de Côte d’Ivoire sur un minimum de 17 exigé. Sa candidature est ainsi retenue de justesse, mais soulève des interrogations. Peu après cette annonce officielle, lundi 14 septembre, beaucoup ont partagé leur étonnement de voir Kouadio Konan Bertin en mesure de pointer pour la course finale alors que de nombreux candidats jugés mieux à même de recueillir les parrainages nécessaires ne les ont pas obtenus. Sur RFI, l’analyste politique Sylvain N’Guessan s’est notamment dit « surpris de voir que M. Kouadio Konan Bertin ait pu réunir les conditions tandis que M. Mamadou Koulibaly [parti LIDER, NDLR] n’est pas candidat ».

Entre les lignes, Alassane Ouattara est accusé par une portion non négligeable de l’opposition et de certains observateurs d’avoir minutieusement choisi cet adversaire, grâce à ses liens supposés avec le président du Conseil constitutionnel, Mamadou Koné. L’accusation est grave, mais les accusateurs l’expliquent ainsi : la candidature de « KKB risque d’affaiblir le PDCI d’Henri Konan Bédié, principal concurrent du président sortant et ainsi favoriser les affaires du RHDP ». « Pour le PDCI, la validation de la candidature de Kouadio Konan Bertin n’est pas une bonne nouvelle, parce qu’il chassera sur les terres de Bédié et pourrait rogner ses voix. […] Il est un gros caillou dans les petits souliers de Bédié », écrit l’hebdomadaire politique et satirique L’Éléphant déchaîné. Pour mettre fin au débat et balayer ces accusations, l’équipe de campagne de « KKB » a mis en ligne une longue vidéo visant à détailler le processus d’obtention des parrainages.

Déjà qualifié d’opposant « fantoche », de « marotte du RHDP », l’homme de 52 ans est pourtant décrit par son entourage comme un battant à la trajectoire « cohérente ».

 

Sauver le soldat Bédié

Fils de planteur de cacao, natif de Lakota, Kouadio Konan Bertin a émergé sur la scène politique en 1999 à la suite du coup d’État du général Guéï contre le président Henri Konan Bédié. À l’époque, cet étudiant en fin de cycle, militant au PDCI, quasiment inconnu et absent des instances du parti, se dresse contre la junte militaire en exigeant le retour de Bédié, exilé en France. « Toute la classe dirigeante au PDCI, que ces personnes aient été députés, ministres, maires, n’a pas existé quand il y a eu le coup d’État de 1999 », se souvient Théodore Konimi, l’un de ses plus proches collaborateurs et fidèles. Alors que les pontes du PDCI veulent enterrer discrètement l’ancien président de la République en lui ôtant la tête du parti, « KKB » est l’un de ceux qui s’y opposent avec ardeur.

Par ses prises de position publiques en faveur du rétablissement de la démocratie et en réussissant à sauver définitivement le soldat Bédié de retour d’exil en 2001, Kouadio Konan Bertin gagne en audience dans le cœur des militants du PDCI. Il se rapproche aussi d’Henri Konan Bédié qu’il considère comme son père politique et qu’il choisit pour être témoin à son mariage.

Longuement, il raconte au « Sphinx de Daoukro » comment, dans ses années étudiantes, il s’est opposé à la toute-puissance de la Fesci – la Fédération estudiantine de Côte d’Ivoire –, jugée trop radicale, et dirigée par Guillaume Soro et Charles Blé Goudé, entre autres, en créant la CERAC, la « Cellule de réflexion et d'actions concrètes », chargée de remettre en cause l’omniprésence de l’organisation syndicale sur les campus ivoiriens et de la combattre politiquement. « Les membres de la CERAC se faisaient violemment agresser sur les campus », raconte Sylvain N’Guessan. Ayant obtenu la confiance et l’oreille du président du PDCI, KKB mène une riche carrière au sein du parti centriste. En 2003, il devient, à 35 ans, président des Jeunes-PDCI, et obtient un siège au bureau politique. En 2011, il fait son entrée à l’Assemblée nationale, élu député de Port-Bouët (jusqu’en 2016). Comment imaginer alors que cet homme, bon soldat du parti et fidèle parmi les fidèles soit devenu, en 2020, une épine dans le pied du PDCI, un frondeur multirécidiviste ? « Il s’est battu pour le PDCI et a l’impression de ne pas avoir été récompensé », résume Sylvain N’Guessan.

Déloyal ou courageux ?

C’est à l’aube de l’été 2020 que Kouadio Konan Bertin laisse poindre son intention de se présenter à la magistrature suprême. Problème : l’indéboulonnable chef du parti, Henri Konan Bédié, a déjà fait part de ses nouvelles ambitions présidentielles. Dans l’ancien parti unique, s’opposer au « Vieux » équivaut à une déclaration de guerre, d’autant que « KKB » n’inspire plus confiance. « Il est là, il n’est pas là ? Avec nous, contre nous ? Ça faisait déjà un moment qu’on ne savait plus trop », confie un cadre du parti.

Courageux pour les uns, indiscipliné et déloyal pour les autres, nombreux s’étonnent de le voir se dresser une nouvelle fois sur la route du « chef naturel » de sa famille politique. « Les jeunes loups du PDCI sont des fils à papa qui n’osent pas s’opposer au chef, mais lui n’a aucun problème à renverser l’ordre établi », analyse un homme politique qui préfère garder l’anonymat.

En 2013 déjà, sept ans plus tôt, il avait créé l’émoi en voulant briguer la tête du parti à l’occasion du congrès ordinaire face à ce même Henri Konan Bédié. Les statuts du PDCI instauraient une limite d’âge et interdisaient de fait à HKB, âgé de 79 ans à l’époque, d’être candidat. Mais à la faveur d’un bidouillage du règlement intérieur, le « Sphinx de Daoukro » avait obtenu l’autorisation de se présenter pour conserver la présidence du parti. « C’est à ce moment-là que les premières mésententes entre Henri Konan Bédié et Kouadio Konan Bertin sont apparues », explique Theodore Konimi. Il garde de cette expérience un goût amer. « KKB s’est toujours opposé à ceux qui tordaient le cou aux règles et aux normes qu’on l’on se fixe, donc de ce point de vue, il y a un conflit de valeurs qui ne peut pas permettre que deux personnes qui s’aimaient bien, puissent continuer de s’aimer », avance-t-il encore.

Rejet de l’appel de Daoukro

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Pour l’ambitieux quadragénaire, c’est désormais clair : le parti est prisonnier d’un schéma qui appartient au passé entre verticalité excessive, rigidité, « grand-frérisme » et absence de démocratie interne. Une vision qui ne correspond plus aux demandes de renouvellement de la classe politique que réclament les organisations issues de la société civile. Au sein même de sa famille politique, il ne quittera plus ses habits de frondeur : son maître devient peu à peu son adversaire.

En 2014, il rejette sans hésiter « l’appel de Daoukro », discours par lequel Henri Konan Bédié scelle son alliance avec Alassane Ouattara dans l’optique de créer le parti unifié RHDP. L’année suivante, il se lance, contre l’avis du parti, dans la course à la présidentielle, exposant ainsi au grand jour les querelles internes du PDCI. « C’est inacceptable que ce parti puisse décider de s’absenter de l’élection présidentielle. Ne pas avoir de candidat en 2015, c'est participer ensemble à la signature de l'acte de décès du parti de Félix Houphouët-Boigny », s’emportait-il, il y a cinq ans, pour justifier sa décision de faire cavalier seul.

Trois ans plus tard, l’alliance entre le PDCI et le RDR explosait en plein vol. « Aujourd’hui, Kouadio Konan Bertin se frotte les mains, il se dit qu’il avait raison sur toute la ligne », confie une source. « Le temps lui a toujours donné raison. Les orientations ont été justes », renchérit son directeur de cabinet, Théodore Konimi.

Empêché en interne de briguer l’investiture PDCI l’été dernier, KKB se présente donc en indépendant et remporte une première bataille en obtenant sa place parmi les derniers challengers. L’outsider participe pour la deuxième fois à une course présidentielle et espère inscrire définitivement son nom parmi les grands de l’arène politique ivoirienne. « Il a su tirer son épingle du jeu », commente un bon connaisseur de la vie politique, qui va jusqu’à le comparer à Nicolas Sarkozy. « Si tout se passe comme prévu, c’est-à-dire la réélection d’Alassane Ouattara, il sera appelé pour prendre la tête d’un grand ministère d’État, dans un gouvernement d’ouverture », prédit pour sa part un homme politique membre du RHDP. Si « KKB » n’a aucune réelle chance de victoire et pourrait même obtenir un moins bon score qu’en 2015, sa campagne va lui apporter un espace médiatique favorable à sa propre carrière politique. « Il est en train de jouer sa carrière professionnelle, commente Sylvain N’Guessan, parce qu’il est maintenant convaincu qu’il ne peut rien obtenir de Bédié ».

► À lire aussi :

Tchad: le président Déby met en place une commission de relecture de la Constitution

  Idriss Déby Itno, le président du Tchad.

Idriss Déby Itno, le président du Tchad.
 RFI

Texte par :
RFISuivre

2 mn

Le président Idriss Déby a créé, mercredi soir, un comité chargé de l’organisation du deuxième Forum national inclusif. Ce comité aura pour mission d’organiser une sorte de relecture de la Constitution adoptée il y a deux ans et qui a consacré le passage du Tchad à la IVe République.

Avec notre correspondant à Ndjamena, Madjiasra Nako

La création de ce comité est la réalisation d’une promesse du chef de l’État tchadien. En clôturant le Forum national inclusif, qui a abouti à l’adoption de la Constitution en 2018, Idriss Déby Itno avait souhaité qu’il y ait tous les deux ans une évaluation de la mise en œuvre de la nouvelle loi fondamentale, censée améliorer le fonctionnement du pays.

Depuis deux ans, la suppression du poste de Premier ministre, l’instauration d’un serment confessionnel pour les ministres et les hauts fonctionnaires, ou encore le fait de fixer l’âge pour être candidat à la présidence de la République à 45 ans, sont les dispositions les plus critiquées dans l’actuelle Constitution. Beaucoup même qualifient celle-ci « d’illégitime » car n’ayant pas été adoptée par un référendum.

La participation de toutes les couches de la société tchadienne au deuxième forum, sera le principal défi pour le comité d’organisation. En 2018, l’opposition et une partie des syndicats avaient boycotté le Forum national inclusif, indiquant ne pas vouloir participer à une réunion dont les conclusions étaient connues d’avance.

[Chronique] Tebboune, le Hirak et Bernard de la Villardière

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Mis à jour le 22 septembre 2020 à 18h39
 
 

Par  Damien Glez

Dessinateur et éditorialiste franco-burkinabè.

À la suite de la diffusion d'un documentaire sur le Hirak, la chaine française M6 est interdite en Algérie.

À la suite de la diffusion d'un documentaire sur le Hirak, la chaine française M6 est interdite en Algérie. © Glez

Les autorités ont décidé d’interdire toute activité de la chaîne privée française M6 sur le territoire algérien. Explications.

Pour les régimes qui ne peuvent jouir de pouvoirs absolument autocratiques, la coercition des médias indépendants vire souvent au cercle vicieux. La récente condamnation en appel du journaliste algérien Khaled Drareni a ravivé la lumière médiatique internationale sur le mouvement du Hirak que ni la démission d’Abdelaziz Bouteflika ni la crise sanitaire n’avaient tout à fait euthanasié.

Dimanche 20 septembre, la chaîne privée française M6 diffusait un reportage intitulé « L’Algérie, le pays de toutes les révoltes », dans le cadre de l’émission « Enquête Exclusive ». Dès le lendemain, le ministère algérien de la Communication décidait de « ne plus autoriser » l’organe à opérer en Algérie, sous quelque forme que ce soit.

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SUR LE FOND, LE COMMUNIQUÉ DÉNONCE « UN REGARD BIAISÉ SUR LE HIRAK »

Les assauts des autorités contre la déontologie des journalistes incriminés sont d’ordres éditorial et technique. Sur le fond, le communiqué des autorités algériennes dénonce « un regard biaisé sur le Hirak », des « clichés réducteurs » et même un « agenda » politique visant à ternir l’image de l’Algérie.

Autorisation de tournage

Sur le plan de la procédure, le ministère ne semble pas priser la technique des « caméras discrètes », mais dénonce surtout une présumée « fausse autorisation de tournage » qui devrait entraîner des poursuites pour faux en écriture.

Si une demande d’accréditation avait bien été introduite, dès le mois de mars, en vue d’un tournage sur la valorisation de l’essor économique et touristique de la ville d’Oran et le multiculturalisme, celle-ci – déjà présumée trompeuse – n’avait reçu aucune réponse favorable.

La réaction de la YouTubeuse algérienne Noor apporte-t-elle de l’eau au moulin du gouvernement ? Protagoniste de l’enquête, elle s’est désolidarisée, lundi, d’un film dont elle met en doute le professionnalisme.

Certes, le format télévisuel du journaliste Bernard de La Villardière est régulièrement taxé de sensationnalisme. Mais la diffusion, en mai, d’« Algérie mon amour », un autre documentaire sur le même sujet par la chaîne publique France 5, avait déjà déclenché des tensions entre Alger et Paris.

Côte d’Ivoire : l’opposition engage un bras de fer contre Alassane Ouattara

| Par - à Abidjan
Henri Konan Bédié, candidat du PDCI, lors du meeting de l'opposition à Abidjan, le 20 septembre 2020.

Henri Konan Bédié, candidat du PDCI, lors du meeting de l'opposition à Abidjan, le 20 septembre 2020. © REUTERS/Luc Gnago

Réunie le 20 septembre, l’opposition ivoirienne a posé plusieurs préalables à sa participation à la présidentielle prévue le 31 octobre.

En Côte d’Ivoire, le processus électoral n’a pas encore déraillé, mais il est proche de l’impasse. Moins d’une semaine après l’annonce des candidatures retenues pour l’élection présidentielle du 31 octobre, les décisions du Conseil constitutionnel ne passent pas toujours auprès de l’opposition.

Réunies dimanche 20 septembre, les principales plateformes de l’opposition ont demandé le retrait pur et simple de la candidature d’Alassane Ouattara à un troisième mandat, estimant toujours que la Constitution le lui interdit.

Appel à la « désobéissance civile »

Elles ont ensuite listé une série de conditions à leur participation au prochain scrutin, comme la dissolution du Conseil constitutionnel et de la commission électorale, ainsi qu’une « réforme profonde du cadre législatif et institutionnel des élections ».

Elle a enfin appelé  la population « à se mobiliser pour des manifestations sur l’ensemble du territoire », sans pour le moment donner de mot d’ordre plus précis.

De son côté, Henri Konan Bédié (HKB), dont la candidature à la présidentielle a été entérinée, a lancé un appel à « la désobéissance civile », expression dont il n’a pas précisé la signification concrète, mais qu’il a qualifié d’ »action citoyenne (…) légitimement fondée ».

Outre la coalition dirigée par le président du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), plusieurs partis ou groupements de partis se sont associés à cette démarche : Ensemble pour la démocratie et la souveraineté (EDS) de Georges Armand Ouegnin (dont est membre la frange du Front populaire ivoirien (FPI) représentant Laurent Gbagbo), l’Union pour la démocratie et pour la paix en Côte d’Ivoire (UDPCI) d’Albert Mabri Toikeusse, Génération peuples et solidaires (GPS) de Guillaume Soro, le Lider de Mamadou Koulibaly et l’Union républicaine pour la démocratie (URD) de Danielle Boni Claverie.

Affi et KKB absents

En revanche, Pascal Affi N’Guessan et Kouadio Konan Bertin (KKB), les deux autres candidats retenus à la présidentielle, n’étaient pas présents. En conflit avec Laurent Gbagbo, Affi N’Guessan avait pourtant rencontré Bédié, le 17 septembre, et souhaitait participer à la rencontre.

« Le PDCI a finalement choisi un autre format », explique-t-il, tout en se disant « solidaire » des déclarations faites par l’opposition. « Nous sommes sur la même longueur d’onde », assure-t-il. L’ancien Premier ministre devrait être reçu par Bédié dans les prochains jours. « Il est possible qu’il soit associé aux discussions », précise un proche de Gbagbo.

Les propos de l’opposition font échos à ceux tenus par trois jours plus tôt à Paris par Guillaume Soro. « J’en appelle à une unité d’action de l’opposition pour stopper Alassane Ouattara dans sa folle aventure par tous les moyens légaux et légitimes. Je demande aux candidats, retenus ou non, et plus spécifiquement au président Bédié, au président Gbagbo, au Premier ministre Affi N’Guessan, au ministre Amon-Tanoh, au ministre Mabri Toikeusse, de prendre ensemble nos responsabilités et de faire bloc […] Ensemble, nous devons organiser la mobilisation de tout le peuple ivoirien depuis la campagne, les hameaux, les villages et les villes pour faire barrage au troisième mandat anticonstitutionnel de Ouattara », avait déclaré l’ancien président de l’Assemblée nationale, dont la candidature a été rejetée par le Conseil constitutionnel.

Craintes de violences

Comme cela est redouté par de nombreux observateurs depuis le choix d’Alassane Ouattara de briguer un troisième mandat, le sort de l’élection présidentielle pourrait bien se jouer dans la rue. Plusieurs marches ont déjà été organisées depuis le 13 août.

Si elles n’ont pas encore été d’ampleur significative, elles ont occasionné un lourd bilan humain et matériel. Plus d’une dizaine de personnes ont été tuées. En réaction, les autorités ont choisi d’interdire tout rassemblement sur la voie publique jusqu’au 30 septembre. En parallèle, plusieurs personnalités de l’opposition ou de la société civile ont été arrêtées.

Le 18 septembre, l’Union européenne a déploré « les violences et affrontements survenus ces dernières semaines, qui ont fait plusieurs victimes », demandant aux autorités de « mener des enquêtes afin d’en poursuivre les auteurs ».

L’UE a également appelé « au respect des libertés publiques, notamment le droit pour chaque citoyen de manifester pacifiquement, dans le cadre prévu par la loi, sans être inquiété, et d’exprimer des opinions politiques sans être arrêté ou emprisonné ».

[Tribune] Les trois « V » pour mettre fin à la pandémie de coronavirus

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Mis à jour le 17 septembre 2020 à 16h23

 

Par  Anuradha Gupta

Directrice générale adjointe de Gavi, l'Alliance du vaccin

A Kinshasa, une infirmière transporte des vaccins dans une boîte réfrigérée.

A Kinshasa, une infirmière transporte des vaccins dans une boîte réfrigérée. © Phil Moore (pour Gavi)

Une fois les vaccins opérationnels, il faudra mobiliser les vaccinateurs et les vaccinés, ce qui suppose de trouver des financements et de pousser des stratégies nationales innovantes, notamment en Afrique, estime Anuradha Gupta, la directrice générale adjointe de l’Alliance du vaccin.

Quand un vaccin Covid-19 sera-t-il prêt ? Telle est la question posée sans arrêt depuis le début de la pandémie. Cela n’est pas surprenant, étant donné que le nombre de décès dus au Covid-19 dépassera bientôt le million et qu’un nombre important de morts n’ont pas été comptabilisés. La vie de chacun a été bouleversée. L’économie mondiale est en chute libre.

Il y a peu de désaccords sur le fait que les vaccins sont la seule solution pour mettre fin à la pandémie. Mais si la communauté scientifique et les fabricants de vaccins font d’énormes progrès dans la course vers cet objectif, il est important de se rappeler que les vaccins ne sont que l’un des trois V nécessaires pour vaincre ce coronavirus. En plus des vaccins, il nous faudra les vaccinateurs et les vaccinés ; les gens qui les administrent et ceux qui veulent les recevoir. Et ce sera loin d’être simple.

La crise actuelle présente de nouveaux défis. Les agents de santé et les vaccinateurs bénévoles peuvent ne pas être disponibles faute de mesures incitatives et de soutien. Ils peuvent être eux-mêmes infectés par le Covid-19 ou être dans l’incapacité de travailler parce qu’ils n’ont pas l’équipement de protection individuelle nécessaire pour rester en sécurité. Ceux qui sont disponibles sont soumis à une pression énorme et à un risque élevé pour eux-mêmes lorsqu’ils essaient de faire fonctionner des services de santé tels que la vaccination infantile. Une plus grande empathie envers le personnel de santé, associée à la reconnaissance et à des récompenses pour leurs efforts héroïques, augmenterait leur moral et leur permettrait de faire parvenir les vaccins Covid-19 aux populations.

Confiance des citoyens

Même dans des circonstances normales, les campagnes de vaccination de masse ne sont couronnées de succès que si les gens font confiance au gouvernement et le considèrent juste, bienveillant et agissant dans le meilleur intérêt de la population. Le fait de ne pas fournir les services les plus essentiels comme l’eau, l’assainissement, le carburant, les écoles, les soins de santé primaires, les routes, l’électricité et des politiques visant à soutenir les moyens de subsistance des populations, peut gravement saper la confiance du public.

Cela peut également fournir un terrain propice à la désinformation et  à la diffusion de fausses rumeurs sur la sécurité vaccinale, rendant la tâche d’administrer les vaccins Covid-19 encore plus difficile – ce que nous voyons déjà. Des investissements visant à renforcer la confiance du public dans la rigueur, l’efficacité et l’innocuité des vaccins sont nécessaires de toute urgence.

Un autre défi est que dans la plupart des pays en développement, des services de vaccination sont mis en place pour administrer des vaccins aux enfants de moins de deux ans. Les vaccins Covid-19 auront un groupe cible différent – au départ, les agents de santé qui sont les plus exposés à la maladie, ainsi que les populations plus âgées qui sont à haut risque.

Stratégies nationales novatrices

Compte tenu des difficultés actuelles auxquelles sont confrontés les pays à faible revenu, même dans le suivi des naissances et donc de la population cible de la vaccination infantile, il ne sera pas aisé d’identifier les personnes à vacciner contre le Covid-19. Cela nécessite un financement immédiat et un soutien technique de la part de la communauté mondiale et l’encouragement de stratégies nationales novatrices.

Mettre fin à la pandémie, c’est sauver la vie et les moyens de subsistance des gens. Mais, sans les gens, impossible de procéder au déploiement mondial d’un vaccin qui soit le plus important et le plus rapide de tous les temps