Témoignages

 

Les Pierres vivantes

  • Christiane Rancé, 

 

Les Pierres vivantes
 

Samedi, j’étais invitée par une association littéraire et culturelle, Rencontres buissonnières, à venir à Cîteaux évoquer deux figures féminines à qui j’ai consacré une biographie, Simone Weil et Thérèse d’Avila. Cîteaux ! Depuis longtemps, cette abbaye faisait partie de mes projets d’échappées belles, toujours rêvées, sans cesse remises. Et là, enfin, l’occasion m’était offerte de passer une grande journée dans ces lieux, avec quelques-unes de ces personnalités qui œuvrent sans bruit au maintien d’une parole, d’un art de vivre, d’une conversation sur le monde comme il va et comme il s’écrit. Ainsi, la créatrice de cette association, Francine Ohet, professeure de français dévouée à présenter, avec la complicité des moines cisterciens, ceux qui aiment lire les livres à ceux qui aiment les écrire. Des musiciens, les Tapatou. Une conteuse, Jacqueline Lescure, pour dire des histoires de la Bible. Et tout cela dans ce lieu marqué par saint Bernard de Clairvaux.

Lorsque je suis arrivée, j’étais déjà conquise – comment résister à la complicité singulière, à la dévotion secrète que suscite ce saint exceptionnel qui embrasa tout le XIIe siècle d’un feu d’amour ? Tant et tant que dans la Divine comédie, c’est à lui que Virgile confie Dante pour qu’il ait, après celle de Béatrice, l’entrevision de la Vierge et du Paradis. J’ai ressenti, dès le seuil de cette abbaye, ce que j’avais déjà éprouvé en découvrant, au détour d’une route des Corbières, l’abbaye cistercienne de Fontfroide, la petite sœur de Cîteaux. De la joie, un élan de l’âme si spontané qu’il devient une profession de foi, un regard si ébloui qu’il devient gratitude. Cîteaux a pour elle d’être le laboratoire de la vision du monde de saint Bernard, un art qu’il ira déployer à Clairvaux, où le silence et la lumière, travaillés comme des matériaux, refléteront les images intactes de la perfection divine.

Je ne pouvais pas être mieux installée pour parler de Simone Weil qui avait fait les vendanges en récitant le Notre Père en grec. Elle s’était appliquée, à sa façon, la Règle de saint Benoît : Ora et labora, prie et travaille – voire, fais du travail une prière. Ou encore pour évoquer Thérèse d’Avila, si sensible à l’harmonie dans ses monastères et attachée à déployer la beauté autour d’elle, pour rendre grâce. Et il était émouvant de se dire qu’il y avait quelque neuf siècles, ici même, Bernard de Clairvaux avait élaboré une doctrine des rapports de l’art avec le salut, où sont exaltés le dépouillement et l’ascèse, et toute une théologie baignée de dévotion à la douceur de Marie, et ce pour contrecarrer le dévoiement des moines de Cluny, leur goinfrerie, leur passion pour le pouvoir et les richesses. Simone Weil, sainte Thérèse, et bien sûr, à l’ombre de saint Bernard, tous les autres saints et leur rôle, chacun à son époque, dans le rétablissement de la paix quand la guerre, la violence, l’injustice régnaient en maîtres.

Quel saint nous faudrait-il aujourd’hui ? me suis-je demandé en rentrant chez moi, où les nouvelles du monde déversaient par la radio, la télévision, les journaux des images désespérantes : la reprise de l’épidémie, les déceptions du sommet sur le climat, les vagues migratoires aux frontières et les tensions géopolitiques qu’elles occasionnent, l’espace peuplé désormais d’armes de destruction massive… Ce ne sera certes pas la sainteté anonyme que l’époque reconnaît aux simples individus appliqués à œuvrer pour le bien général – et sans vouloir déprécier ces dons simples qui maintiennent encore l’édifice des liens d’amour et d’affection, de charité. Il faudra, il faut un saint capable, de son vivant même, d’opérer ces miracles que réclame le Vatican pour canoniser un bienheureux. J’ai alors saisi, d’un seul coup, pourquoi le miracle était nécessaire et indispensable à la canonisation – un miracle : entendons deux, voire trois guérisons spectaculaires et radicales. C’est que le miracle atteste de la force du charisme du saint. L’éclat de sa parole, de sa foi, de son exemple irradie d’amour, si puissamment qu’il guérit corps et âme. C’est par cette irradiation que les saints que nous connaissons – Catherine de Sienne, Vincent de Paul, Ignace de Loyola, et tous les autres… – ont converti leurs contemporains et rendu le monde à la lumière.

Simone Weil, qui n’a connu ni la bombe atomique, ni le changement climatique, ni la surexploitation mortifère des ressources de la planète, autant dire rien de notre pouvoir actuel de nous anéantir collectivement, disait déjà, au cœur de la deuxième déflagration mondiale, que l’époque exigeait « une sainteté qui ait du génie ». Le génie d’opérer sur l’humanité une conversion telle qu’elle lui redonne le pouvoir de s’opposer au suicide collectif dont les hommes se sont désormais donné les moyens.

Sur Cîteaux, le beau livre, Des Hommes et des Cieux. Textes de Dom Olivier Quenardel, photographies de Pierre Aymar de Broissia.

kiye2021
L'hebdomadaire de la paroisse de Nioro du Sahel n°17 du mercredi 17 novembre 202:  Laisser chacun faire fructifier ses dons reçus de Dieu et exprimer l’étendue de ses potentialités pour la plus grande gloire de Dieu est une marque de respect envers Dieu (Une réflexion du Père Vincent  KIYE Mafr) 
« Faites-les fructifier jusqu’à mon retour. » (Luc 19,13)
Tel est l'ordre que le Maître du monde a donné à chacun de ses enfants à qui il a accordé des multiples talents, chacun selon sa grâce. Et toi pourquoi ne veux-tu pas les faire fructifier ou pourquoi veux-tu empêcher les autres à exprimer toute l'étendue de leurs talents? 
Bien-aimés dans le Seigneur, La liturgie de ce jour nous invite à agir conformément aux exigences de la grâce de Dieu en chacun de nous, exprimée en termes de talents.
Il sied de préciser ici que Dieu a créé chacun d’entre nous en nous donnant une combinaison de dons très précis, de manière à effectuer une tâche particulière dans le monde, de contribuer ou de participer par ces dons, à l’œuvre de la création. Qu’en faisons-nous ? Utilisons-nous ces dons conformément à sa volonté ou bien nous les détournons de la vision de Dieu, celle de les utiliser de manière à participer à l’œuvre de la création ? Il s’avère que certaines personnes utilisent à bon escient ces dons, d’autres non ou en abusent et d’autres encore se voient empêchés d’exprimer toute l’étendue de leurs potentialités, simplement par les intrigues des hommes. Chacun de nous se situe certes, dans l’un des trois cas cités. Tout compte fait, si quelqu’un n’utilise pas ses dons dans le but que Dieu les lui a donné, la justice de Dieu ne saura tarder comme dans l’évangile.
Rappelons ici que parmi les dons les plus précieux que Dieu a faits aux hommes figure celui de la lumière de sa révélation totale faite aux hommes, laquelle révélation incite à la confiance et à la l’attachement à Dieu. C’est ce don dont a fait preuve cette femme dans la première lecture qui supporta les l’épreuve de l’exécution de ses sept « sans faiblir à cause de l’espérance qu’elle mettait dans le Seigneur. » (2 Maccabées 7,20) Elle l’a fait fructifier jusqu’à produire des fruits dont la résistance devant ces roi Antiocus. Laissons la grâce de Dieu se manifester en chacun selon le don reçu pour sa plus grande gloire et le salut du monde. Amen
Le Seigneur soit avec vous !
✍Père KIYE Mizumi Vincent, Mafr
Paroisse de Nioro du Sahel, diocèse de Kayes
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Whatsapp : (+223) 72 65 74 82
 
 
L'hebdomadaire de la paroisse de Nioro du Sahel n°18 du dimanche 28 Novembre 2021, 1er dimanche de l’Avent année C : Peu importe les problèmes que tu as dans ta vie, redresse-toi et relève la tête. Ce n’est pas la fin : ta délivrance est proche !
Textes du jour :
1ère Lecture : Jérémie 33, 14–16
Deuxième Lecture : 1·Thessaloniciens 3, 12—4 2
Évangile : Luc 21, 25–28, 34–36 
Bien-aimés dans le Seigneur, recevez nos salutations depuis la paroisse de Nioro du Sahel dans le diocèse de Kayes
 « Dès que commenceront ces choses, redressez-vous et relevez la tête : votre délivrance est proche ! » (Luc 21,28)
 Bien-aimés dans le Seigneur, tout au long de cette année liturgique nous vous avons livré quelques méditations que nous pouvons résumer en deux orientations : la prise de conscience de nos manquements et le regard tourné vers l’espérance de la délivrance à venir. La présente méditation n’en dit pas moins. Elle s’inscrit dans la même dynamique de l’interpellation contre nos péchés et l’invitation à recourir à la grâce de la délivrance de Dieu. C’est ce qui est renfermé dans ce verset de l’Evangile de saint Luc à partir duquel nous avons voulu orienter cette méditation pour décrire les couleurs de ce temps de l’Avent. Comme vous pouvez le remarquer, la première partie de cet évangile annonce une série d’évènements douloureux et terrifiants qui tuent toute espérance dans nos cœurs et si l’on ne s’arrête que là, nous demeurons dans les traumatismes sans nombre. Ce sont, certes, la réalité de notre vie au quotidien. Le monde évolue, la Bonne Nouvelle est chaque jour annoncée malheureusement le mal, les crimes, les coups bas vont au même rythme que l’annonce de l’Evangile. Malgré cela, et pour nous sortir de nos peurs et de nos torpeurs, le Christ nous rassure que la délivrance est proche, qu’il y a de l’espoir au bout du tunnel. D’où cette invitation à redresser la tête. Jésus veut nous rassurer que les évènements douloureux et/ou malheureux de notre vie n'insinuent pas l’anéantissement de notre existence ou de notre vie, mais leur perfectionnement dont le secret se trouve en Dieu qui, par sa prescience fait exister les réalités du monde possible dans une condition dont Lui seul détient le secret.
Frères et sœurs en Christ, s’il est vrai que cet évangile reflète l’aujourd’hui de notre vie dans le monde, surtout en ces temps qui sont les derniers, caractérisées par une suite d'événements malheureux qui ont paralysé l’ordre mondial et dont les traumatismes restent encore présents dans la mémoire de la plupart de nos frères et sœurs, les catastrophes naturelles et guerres d’un côté, les épidémies de l’autre côté, notre responsabilité devant tout cela est à prendre en compte. Nous avons une part de responsabilité dans le dysfonctionnement de l’ordre du monde. Nous avons perturbé l’harmonie dans nos rapports avec l’univers, avec l’autre et avec Dieu. Notre responsabilité n’est pas moindre devant ces évènements malheureux qui fragilisent notre monde. C’est surtout la conséquence de notre manque d’écoute de la parole de Dieu que les prophètes ne cessent de nous annoncer comme le dit Saint Paul dans la deuxième lecture lorsqu’il dit : « Nous vous avons enseigné comment vous devez vous conduire pour plaire à Dieu et déjà vous le faites, mais faites encore des progrès. Vous savez quelles sont les traditions que nous vous avons données avec l’autorité du Seigneur Jésus. » (1Thessaloniciens 4 1-2). Pour ce faire, l’urgence de recourir à la Parole de Dieu qui inspire les comportements responsables et dignes de Dieu pour abandonner nos manquements vis-à-vis de la nature, de l’autre et de Dieu et rétablir l’ordre du monde perturbé par nos péchés de toutes sortes et pour lesquels notre conscience nous accuse.
Pour clore, disons que si la première partie de cet évangile s’ouvre sur une série d’évènements malheureux, elle se clôture par ailleurs par une note d’espérance et de joie qui dessine tout le décor de ce temps de l’Avent qui s’ouvre devant nous. Vivons dans l’espérance de la délivrance à venir.
Le Seigneur soit avec vous !
✍Père KIYE Mizumi Vincent, Mafr
Paroisse de Nioro du Sahel, diocèse de Kayes
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Mali : Ibrahim Ikassa Maïga, un pilier du gouvernement de Choguel Maïga

Mis à jour le 1 septembre 2021 à 15:14
 

 

Ibrahim Ikassa Maïga©capture d’ecran Kayes – TV/Youtube © Ibrahim Ikassa Maïga ©capture d’ecran Kayes – TV/Youtube

 

Figure du M5 et membre de l’URD, le nouveau ministre de la Refondation s’est rapidement imposé comme un élément incontournable du dispositif instauré par le chef du gouvernement.

Qu’il paraît loin le temps où Ibrahim Ikassa Maïga montait à la tribune devant les partisans du Mouvement du 5 juin-Rassemblement des forces patriotiques (M5-RFP) pour dénoncer l’action du gouvernement. Des mois durant, il a appelé à la mobilisation contre Ibrahim Boubacar Keïta d’abord, contraint à la démission le 18 août 2020, puis contre Bah N’Daw, éphémère président de la transition, et même contre Assimi Goïta, officiellement à la tête de l’État depuis le 28 mai. Mais ensuite, Ibrahim Ikassa Maïga est entré au gouvernement.

Ce mercredi matin, c’est un homme pressé qui nous consacre quelques minutes au téléphone. Il accepte de répondre à nos questions, mais celles-ci vont devoir être brèves, prévient-il. « J’entre en conseil des ministres ! »

Nommé le 11 juin dernier à la Refondation de l’État, chargé des Relations avec les institutions, l’ancien coordinateur du M5 est désormais l’un des plus proches alliés du Premier ministre, Choguel Kokalla Maïga, et un poids lourd du gouvernement. C’est en effet de son ministère que va dépendre l’organe unique censé organiser les élections (présidentielle et législatives) de février 2022.

Gardien de la refondation du Mali

« Le Mali est considéré comme un État en faillite et pour sortir de cette situation, il est urgent de lancer des réformes, nous explique-t-il en arpentant les couloirs du palais de Koulouba. Mon ministère va être l’architecte de ces réformes et nous allons veiller à ce que celles-ci respectent l’esprit de refondation que nous souhaitons pour le pays. »

La refondation, poursuit-il, passera par une révision de la Constitution, un changement de mode de gouvernance et des réformes structurelles en matière de défense, de sécurité, d’éducation et de santé.

Dans les prochaines semaines, il va devoir conduire les assises nationales, chères à Choguel Maïga. Leur organisation était l’une des principales exigences du M5-RFP, dont Choguel et Ikassa étaient les principaux cadres.

Depuis le 2 août et l’adoption du Plan d’action gouvernemental (PAG) par le Conseil national de transition (CNT), qui est l’organe législatif de la transition malienne, Ibrahim Ikassa Maïga et ses collaborateurs s’échinent à convaincre les partis de trouver « un consensus politique » autour de ces assises.

Une partie d’entre eux les rejette, dénonçant une manœuvre destinée à prolonger la période de transition, censée s’achever en 2022 avec l’organisation des élections. Toutefois, le ministre se veut rassurant. « Lors de ces assises seront évoquées les recommandations et conclusions du dialogue national [de 2019], mais aussi de la conférence d’entente nationale [de 2017] et même les états généraux de l’éducation », insiste-t-il. À l’en croire, « il ne s’agit pas de refaire le débat, mais de se retrouver devant les Maliens et de redéfinir les priorités du pays pour mieux hiérarchiser les réformes ».

Le but étant selon lui, que dans le temps qu’il reste à la transition, le gouvernement mette en œuvre un maximum de réformes, charge revenant ensuite aux prochains dirigeants de les poursuivre pour « sortir du système actuel ».

Alliance de circonstance

Comment cet homme, que l’on qualifié volontiers de « mystérieux » à Bamako, s’est-il retrouvé à un poste aussi stratégique ? Enseignant à l’Université des sciences politiques et juridiques de Bamako, Ibrahim Ikassa Maïga, qui aime utiliser son titre de « professeur », a rencontré Choguel Maïga en octobre 2018. « Jusque-là, je ne le connaissais qu’à travers les médias. »

Cette année-là, Soumaïla Cissé échoue à remporter un scrutin présidentiel dont il ne reconnaît pas les résultats. Avec plusieurs autres partis, il crée le Front pour la sauvegarde de la démocratie (FSD), une coalition destinée à contester la réélection d’Ibrahim Boubacar Keïta. Ibrahim Ikassa Maïga, membre de l’Union pour la République et pour la démocratie (URD) et proche de Soumaïla Cissé, rencontre Choguel Maïga dont le Mouvement patriotique pour le renouveau (MPR) a rejoint le FSD.

AUJOURD’HUI ENCORE, IL NE TARIT PAS D’ÉLOGES SUR LE PREMIER MINISTRE

C’est en se côtoyant au sein du M5 qu’ils vont se rapprocher. Alors que ses camarades commencent à perdre foi en la capacité du mouvement – qui n’a obtenu aucun poste au gouvernement – à peser sur la transition, Ikassa s’accroche. « Il croyait fermement au M5 et en Choguel, assure le politologue Sidy Lamine Bagayoko, proche de l’URD. Peu à peu, un lien de confiance s’est installé entre eux. »

Aujourd’hui encore, il ne tarit pas d’éloges sur le Premier ministre. « Il a une clairvoyance unique sur les tenants et les aboutissants des enjeux nationaux, s’enthousiasme-t-il. Travailler à ses côtés n’a fait que décupler ma motivation. »

Soumaïla, le parrain

Né en 1971 à Tondibi, dans la région de Gao, cette figure emblématique du M5 a passé son enfance à Sévaré, dans la région de Mopti (Centre). Il y obtient son baccalauréat en 1991. Admis à l’École nationale d’administration (ENA) de Bamako, il pose ses valises dans la capitale malienne. En 1996, diplôme en poche, Ikassa part pour le Burkina voisin.

« J’ai poursuivi mon cursus à Ouagadougou parce que les études y étaient abordables et que l’un de mes frères qui travaillait à la commission de l’UEMOA [Union économique et monétaire ouest-africaine] y vivait », confie-t-il. Là -bas, il décroche un DESS en droit économique et international et découvre le milieu syndical estudiantin burkinabè, très « mouvementé ». Et voit une certaine similitude entre les soubresauts politiques qui agitent le Burkina et le Mali.

Soumaïla Cissé est à l’époque président de la commission de l’Uemoa, et l’étudiant dîne parfois chez lui. C’est grâce à lui qu’il rejoint l’URD en 2013. « Soumaïla lui faisait confiance, affirme Sidy Lamine Bagayoko. Il faisait d’ailleurs partie des experts qui ont préparé l’atelier de Selingue [en 2018], au cours duquel l’URD a conçu son programme de réformes politiques. »

Depuis la disparition de Soumaïla Cissé, Ikassa se positionne comme le porte-voix de l’URD au sein du M5 et du gouvernement. Il ne souhaite pas commenter les tractations en cours et la guerre des clans qui divisent la formation, mais les suit de près. « Il demeure un membre actif du parti. Une semaine après sa nomination, il a insisté lors d’une réunion du bureau national sur le fait qu’il était ministre au nom de l’URD », confie l’un de ses cadres. Reste à savoir s’il soutiendra le candidat choisi par le parti à la prochaine élection présidentielle ou si ses nouvelles amitiés le feront transhumer.

Guinée : dix choses à savoir sur Ousmane Gaoual Diallo, opposant à Alpha Condé devenu ministre de Mamadi Doumbouya

Mis à jour le 11 novembre 2021 à 12:23

 

Ousmane Gaoual Diallo© DR © Ousmane Gaoual Diallo © DR

Il fait partie des rares ministres « politiques » au sein du gouvernement de Mohamed Béavogui. Retour sur le parcours hors norme de ce cadre de l’UFDG en guerre ouverte contre Cellou Dalein Diallo.

1. Un ex-opposant parmi les militaires

Ousmane Gaoual Diallo, membre de l’Union des forces démocratiques de Guinée (UFDG), a rejoint un exécutif composé de technocrates et de quelques militaires fidèles à Mamadi Doumbouya. Avec Ibrahima Abé Sylla, le leader de la Nouvelle génération pour la république (NGR), et Alpha Soumah, membre de l’Union des forces républicaines (UFR, de Sidya Touré), il compte parmi les rares « politiques » désignés parmi les anciens opposants à Alpha Condé pour rejoindre l’équipe gouvernementale dirigée par Mohamed Béavogui.

2. Proche du CNRD

S’il s’employait à entretenir le mystère autour de ses relations avec les putschistes conduits par Mamadi Doumbouya, Ousmane Gaoual Diallo s’est très rapidement trouvé plongé au cœur du dispositif mis en place par le Comité national de rassemblement pour le développement (CNRD), le nom que s’est donné la junte militaire. Il a notamment travaillé au sein d’une commission d’évaluation des marchés publics de l’État mise en place par le nouvel homme fort de Conakry.

AVANT MÊME LA NOMINATION DE MOHAMED BÉAVOGUI, IL RENCONTRAIT RÉGULIÈREMENT MAMADI DOUMBOUYA

Tout comme le général Aboubacar Sidiki Camara – dit Idi Amin –, Ousmane Gaoual Diallo avait installé son bureau dans la Cité des Nations, non loin du palais Sékhoutouréya et du palais Mohamed V, où a été transférée la présidence. Une position privilégiée, qui lui a permis, avant même la nomination de Mohamed Béavogui, de rencontrer régulièrement Mamadi Doumbouya.

Malgré cette proximité avec le président du CNRD, Gaoual Diallo a dû attendre la toute dernière salve de nominations au sein du gouvernement, le jeudi 4 novembre, pour qu’il n’hérite par décret du ministère de l’Urbanisme, de l’Habitat et de l’Aménagement du territoire.

3. Champion de lutte

Ancien lutteur de haut niveau, il affirme que cette discipline a fortement influencé sa tumultueuse carrière politique, en lui inculquant « la maîtrise de soi et la gestion de la pression ».  Il a défendu les couleurs de la Guinée lors de plusieurs compétitions africaines et mondiales de lutte gréco-romaine. En 1985, alors âgé de 17 ans, il a ainsi été sélectionné au sein de l’équipe nationale junior de Conakry. L’année suivante, il bénéficie d’une bourse de formation en ex-URSS d’un an et demi, attribuée par le Comité international de la solidarité olympique.

Médaillé de bronze au championnat d’Afrique en 1987 à Tunis, il se qualifie pour le championnat du monde de lutte qui se tient la même année en France, à Clermont-Ferrand. Il combattra également sous les couleurs de la Guinée lors des Jeux africains de Nairobi, où il manque de peu la médaille de bronze, terminant quatrième. L’année suivante, il se rendra à Séoul, pour les Jeux Olympique 1988.

4. Opposant à Lansana Conté

Né en 1968 à Labé, dans le nord de la Guinée, Gaoual a commencé à militer dès le lycée. Mais c’est son passage sur les bancs de l’université Gamal Abdel Nasser de Conakry, où il multiplie les grèves et manifestations, qui sera déterminant.  Farouche opposant à Lansana Conté, il prend à cette époque sa carte au Parti guinéen du peuple (PGP), d’Alpha Abdoulaye Diallo – dit « Portos ». Il y rejoint notamment un autre étudiant de sa génération, Abdoulaye Yéro Baldé, qui deviendra, en 2016, ministre de l’Enseignement supérieur.

5. Siradiou Diallo pour modèle

À l’époque, il prend pour modèle ses aînés guinéens, les opposants Alpha Condé, feu Siradiou Diallo, ou encore Bah Oury. L’étudiant d’alors s’intéresse aussi à ce qu’il se passe au sein de la Fédération estudiantine et scolaire de Côte d’Ivoire (FESCI) ou au Sénégal, où Abdoulaye Wade mène la contestation.

6. Long exil

Son activisme contre Lansana Conté lui vaut, comme plusieurs autres étudiants remuants, d’être exclu de l’université. En 1992, Ousmane Gaoual Diallo s’enfuit pour la France, où il poursuit ses études entre Paris et Lyon, avant de partir pour Montréal. Devenu ingénieur en informatique, il mènera une grande partie de sa carrière en France, où il a travaillé dans le secteur bancaire – à la Société générale et à BNP Paribas – et dans l’automobile, chez Renault.

7. « Gorko soussaye »

De retour en Guinée en 2009, après la mort de Lansana Conté, Ousmane Gaoual Diallo se remet très vite en selle, au sein de l’UFDG, où il acquiert le surnom de « Gorko soussaye » (« l’homme doit oser » en peul), qu’il doit tout autant à sa posture radicale qu’à ses coups d’éclat.

En mars 2011, lors d’une des toutes premières visites officielles d’Alpha Condé en France, Ousmane Gaoual Diallo joue les trouble-fêtes lors d’une rencontre entre le chef de l’État récemment élu et les représentants du Medef. Interpellé ce jour-là, il revient cependant à la charge le lendemain et le surlendemain, parvenant même à empêcher une rencontre prévue entre Alpha Condé et la diaspora… en jetant des grenades lacrymogènes dans la salle où devait se tenir l’évènement.

AU LENDEMAIN DE LA PRÉSIDENTIELLE DE 2020, IL EST ARRÊTÉ POUR « FABRICATION ET DÉTENTION D’ARMES DE GUERRE »

8. Trois incarcérations

De retour en Guinée, il multipliera les sorties tonitruantes à l’encontre d’Alpha Condé. La virulence de ses propos lui vaut d’être écarté par une partie de la presse, qui rechigne à relayer ses attaques verbales extrêmement offensives. Elle lui vaut aussi des ennemis : en 2014, sa villa de Gbessia est brûlée. Il accuse alors « des militants du RPG », le Rassemblement du peuple de Guinée d’Alpha Condé.

Entre 2015 et 2020, Ousmane Gaoual a été incarcéré trois fois. La première fois, en 2015, il passe quelques jours en détention préventive à la prison de Conakry dans le cadre de poursuites pour « coups et blessures » après une bagarre avec un homme d’affaires adjudicateur du marché de fourniture de véhicules à l’Assemblée nationale. Il sera condamné à dix-huit mois de prison avec sursis. Un an plus tard, il est condamné à deux ans de prison pour « outrage au chef de l’État » après avoir traité Alpha Condé de « criminel ». Au lendemain de la présidentielle de 2020, comme plusieurs autres cadres de l’opposition, il sera à nouveau arrêté et incarcéré, cette fois pour « fabrication et détention d’armes de guerre ». Il passera neuf mois en détention préventive.

9. Remise en liberté

Ousmane Gaoual Diallo a acquis la nationalité française lors de son long exil. En janvier 2021, interrogé sur l’incarcération de ce Franco-Guinéen lors d’une séance au Sénat, le ministre français des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian a annoncé avoir demandé à ce que l’opposant bénéficie de la protection consulaire, s’est inquiété de son état de santé et a affirmé avoir réclamé aux autorités guinéennes de « prendre les initiatives nécessaires ».

SA NOMINATION AU GOUVERNEMENT EST UN COUP SUPPLÉMENTAIRE POUR CELLOU DALEIN DIALLO

Il faudra cependant attendre le mois de juillet suivant pour qu’il bénéficie d’une remise en liberté pour raisons de santé, négociée directement avec la présidence. Il quittera alors la Guinée pour se faire soigner en France, où il se trouvait lorsqu’il a appris la chute d’Alpha Condé, le 5 septembre 2021.

10.  Un ambitieux face à Cellou

Dès son élection comme député de Gaoual, en 2013, Ousmane Gaoual Diallo ne cache pas ses ambitions politiques, aux premiers rangs desquelles celle de prendre la suite de Cellou Dalein Diallo à la tête de l’UFDG. Il accuse ce dernier de concentrer tous les pouvoirs entre ses mains et de bloquer l’ascension des éventuels concurrents. S’il l’a accusé d’être trop « mou » face à Alpha Condé, il a changé de position lors de son incarcération, reprochant à Cellou son isolement et se montrant cette fois favorable à l’ouverture d’un dialogue avec Alpha Condé.

Le patron de l’UFDG a affirmé avoir appris la nomination de Gaoual au gouvernement qu’une fois celle-ci entérinée, assure n’avoir été ni consulté, ni informé. Il a cependant souhaité « bonne chance » – du bout des lèvres – au nouveau ministre issu des rangs de son parti.

Si les deux hommes assurent aujourd’hui entretenir de « bonnes relations », la nomination au gouvernement de ce remuant cadre, en guerre ouverte avec lui au sein de son propre parti, est un revers pour Cellou Dalein Diallo.

Sous-catégories

Les informations sur nos maisons de formation datent de quelques années, et nous avons demandé aux responsables de ces maisons de nous donner des nouvelles plus récentes.
La première réponse reçue vient de Samagan, le noviciat près de Bobo-Dioulasso (lire la suite)

 

La deuxième réponse nous a été donnée par la "Maison Lavigerie", notre maison de formation à la périphérie de Ouagadougou, où les candidats ont leurs trois premières années de formation (lire la suite)