Dialogue interreligieux

« Lorsque nous travaillons pour les âmes, nous ne pouvons user que de persuasion et d'amour... Nous ne pouvons rien faire tant que nous n'avons pas persuadé les gens autour de nous qu'ils sont aimés... » (Cardinal Lavigerie, 1885)

« Nous croyons qu'en toute religion il y a une secrète présence de Dieu, des semences du Verbe qui reflètent un rayon de sa lumière... » (Chapitre 1967)

« Nous célébrons et partageons cette vie avec Dieu lorsque nous allons à la rencontre des cultures et des religions... nous réjouissant de la foi vivante de ces croyants et les rejoignant dans leur quête de la Vérité, cette Vérité qui nous rend tous libres. » (Chapitre 1998)

Missionnaires, nous sommes appelés à faire les premiers pas pour rencontrer les personnes, qu'elles que soient leurs convictions, leur religion.

Au Burkina Faso, cette réalité se traduit surtout dans la rencontre respectueuse et évangélique avec les adeptes des religions traditionnelles et avec les musulmans.

Dans cette rubrique, nous étudierons divers aspects de ces religions, particulièrement de l'islam.

La visite du Pape François à Bahreïn

 
Manama la capitale ©crédit photo-tous droits réservés
 

La visite du pape François à Bahreïn du 3 au 6 novembre fera de lui le premier pape à visiter la nation de l’archipel du golfe Persique.

L’objectif de la visite sera le Forum de Bahreïn pour le dialogue : l’Est et l’Ouest pour la coexistence humaine à Awali et des rencontres avec les principaux dirigeants musulmans, mais elle comprendra également un rassemblement œcuménique et une prière pour la paix dans la nouvelle cathédrale Notre-Dame d’Arabie. , une messe et des rencontres avec des catholiques dans le pays à majorité musulmane.

 

Bahreïn est une petite nation insulaire – plus petite que Londres – et un allié clé des États-Unis dans le golfe Persique.Le roi du pays a invité le pape François à lui rendre visite, soulignant l’importance accordée au dialogue interreligieux et à la compréhension entre les différentes cultures et civilisations. Le roi a également approuvé le Document sur la fraternité humaine pour la paix mondiale et le vivre ensemble, signé à Abou Dhabi le 4 février 2019 par le pape François et le cheikh Ahmad el-Tayeb, grand imam d’Al-Azhar en Égypte.

Sur plus de 1,5 million d’habitants du pays, les immigrants représentent environ 45 % de la population totale. Environ 74% sont musulmans et 9% sont chrétiens. Des personnes de confession hindoue, bouddhiste et juive font partie des autres communautés présentes.

Les catholiques de Bahreïn viennent principalement des Philippines, de l’Inde et du Sri Lanka. Les Sud-Américains, les Européens et les Arabes de la région du Levant représentent le reste de la population chrétienne de l’île.

Ci-dessous l’agenda diffusé par le Vatican le 6 octobre

. Les heures indiquées sont locales, avec l’heure européenne entre parenthèses.

Jeudi 3 novembre (Rome, Awali)

— 9h30 (4h30) Départ de l’aéroport de Rome Fiumicino.

— 16h45 (9h45) Arrivée à la base aérienne de Sakhir à Awali et accueil officiel.

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— 17h30. (10h30) Visite de courtoisie avec le roi Hamad bin Isa Al Khalifa au palais de Sakhir.

— 18h10 (11h10) Cérémonie de bienvenue dans la cour du Palais Sakhir.

— 18h30. (11h30) Rencontre avec les autorités, les membres du corps diplomatique et les représentants locaux au palais. Discours du pape.

Vendredi 4 novembre (Awali)

— 10h00 (3h00) Clôture du Forum de Bahreïn pour le dialogue : Est et Ouest pour la coexistence humaine sur la place Al-Fida au Palais Sakhir. Discours du pape.

— 16h (9 h) Rencontre privée avec le cheikh Ahmad el-Tayeb, grand imam de la mosquée et de l’université égyptienne Al-Azhar, à la résidence où séjourne le pape sur le terrain du palais.

— 16h30. (9h30) Rencontre avec les membres du Conseil musulman des sages à la mosquée du palais royal. Discours du pape.

— 17h45 (10h45) Rencontre œcuménique et prière pour la paix à la cathédrale Notre-Dame d’Arabie. Discours du pape.

Samedi 5 novembre (Awali)

— 8 h 30 (1 h 30) Messe au stade national de Bahreïn. Homélie du pape.

— 17h (10 h) Rencontre avec les jeunes de l’école Sacré-Cœur. Discours du pape.

Dimanche 6 novembre (Awali, Manama, Awali, Rome)

— 9h30 (1h30) Réunion de prière et prière de l’Angélus avec les évêques, les prêtres, les religieux, les séminaristes et les agents pastoraux à l’église du Sacré-Cœur à Manama. Discours du pape.

— 12h30 (4h30) Cérémonie d’adieu à la base aérienne de Sakhir à Awali.

— 13h (5h00) Départ en avion pour Rome.

— 17h (11h00) Arrivée à l’aéroport de Rome Fiumicino.

La Rédaction
redaction [@] tribunechretienne [.] com

« La Conspiration du Caire », lutte d’influence au sommet de l’islam 

Critique 

Prix du scénario à Cannes, ce thriller politico-religieux met en scène la lutte entre les pouvoirs spirituel et politique au sein de la prestigieuse université Al-Azhar du Caire. Après Le Caire confidentiel, Tarik Saleh poursuit avec talent son auscultation de la société égyptienne et nous fait entrer dans les arcanes de la plus haute institution de l’islam sunnite.

  • Céline Rouden, 
« La Conspiration du Caire », lutte d’influence au sommet de l’islam
 
Le film suit l’arrivée d’Adam, interprété par Tawfeek Barhom (au centre), à l’université Al-Azhar, pilier de l’islam sunnite.MEMENTO DISTRIBUTION

La Conspiration du Caire **

de Tarik Saleh

Film suédois, 2 heures

Avec Le Caire confidentiel, polar vibrant et poisseux qui dénonçait la corruption généralisée d’un régime, celui de Moubarak, à bout de souffle juste avant que n’éclatent les manifestations de la place Tahrir, Tarik Saleh frappait un grand coup. Le réalisateur, suédois d’origine égyptienne, y mettait en scène un policier qui tente de naviguer entre son éthique personnelle et les ordres d’une hiérarchie aux ordres du pouvoir. Le film, tourné finalement au Maroc, lui a valu d’être expulsé d’Égypte, où il est désormais interdit de séjour. Cette péripétie n’a pas empêché ce cinéaste prometteur de revenir à son sujet, et après une parenthèse américaine peu convaincante, de signer ce thriller politico-religieux couronné par un prix du scénario au dernier Festival de Cannes.

Mais le temps a passé depuis les espoirs soulevés par le printemps arabe et cette fois, c’est la lutte d’influence acharnée entre le président Al Sissi et les Frères musulmans qui sert de toile de fond à son intrigue. L’épicentre en est la fameuse université Al-Azhar, pilier de l’islam sunnite, où débarque Adam, un modeste fils de pêcheur, armé simplement d’une bourse et de sa foi simple et profonde. Premier de sa famille à faire des études, comme le grand-père du cinéaste, il est fasciné par ce temple du savoir théologique en même temps qu’il s’émancipe de la tutelle d’un père autoritaire.

Une bataille sans pitié entre élites religieuses et politiques

Malheureusement pour lui, le Grand Imam, l’une des personnalités musulmanes les plus influentes au monde, meurt subitement le jour de la rentrée. Le conseil des oulémas doit se réunir pour désigner son successeur. Le processus, extrêmement codifié, va devenir le théâtre d’une bataille sans pitié entre les élites politiques et religieuses du pays, dans laquelle l’étudiant va se trouver bien involontairement embringué. « Ton cœur est encore pur, mais chaque minute que tu passes ici va le noircir », le prévient un de ses camarades avant d’être mystérieusement assassiné.

Pour visionner une partie du film cliquer ci-dessous

https://youtu.be/l_e4cKyG8aA 
 

Sous prétexte d’enquêter, le colonel Ibrahim – interprété par Fares Fares qui jouait déjà le rôle du policier dans Le Caire confidentiel – va, au nom de la sûreté de l’État, placer ses pions pour influencer le vote et éliminer les candidats qui déplaisent au régime en place, soit celui des Frères musulmans prônant un islam strict, ou un vieux cheikh modéré dont la sagesse est très populaire. « Il ne peut pas y avoir deux pharaons dans le pays », lui intime le général commandant les forces de sécurité. Recruté par le policier à son corps défendant, le jeune Adam est missionné pour infiltrer un groupe radical et se livrer à toutes sortes de manipulations.

Dans les arcanes de la plus prestigieuse université islamique du monde

Une fois de plus, Tarik Saleh mêle habilement le film de genre et le propos politique. Son film, à la mise en scène maîtrisée, a pour principale originalité de nous faire pénétrer dans les arcanes de la plus prestigieuse université islamique du monde, avec sa ferveur religieuse et ses affrontements doctrinaux qui culminent lors d’un concours de récitation et de psalmodie. On y suit un Adam tiraillé entre son innocence et la nécessité d’accomplir sa mission sans y laisser trop de plumes. Il évolue dans le dédale d’une université aussi labyrinthique que l’intrigue s’y déroulant.

S’il est question une fois de plus de corruption, c’est de celle des âmes des croyants qu’il s’agit ici. Et de la tentative de l’État pour contrôler le pouvoir religieux. Mais, comme le résume un protagoniste, « il ne peut pas y avoir d’affrontement entre les chefs religieux et le pouvoir, ou sinon c’est la guerre civile ». Les petits arrangements qui en découlent se font sur le dos du peuple égyptien, semble nous dire le réalisateur. Malgré un épilogue un peu trop alambiqué et des méchants (généraux d’un côté, radicaux musulmans de l’autre) frisant la caricature, le film séduit par le point de vue unique qu’il confère sur ce sujet.

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Tarik Saleh, documentariste de son époque

1972. Naissance à Stockholm d’une mère suédoise et d’un père égyptien.

1989. Débute comme graffeur sous le pseudonyme de Circle and Tarik.

2001-2005. Il réalise avec Erik Gandini deux documentaires remarqués sur la mort de Che Guevara (Who Betrayed Che Guevara) et sur le camp de détention de Guantanamo (Gitmo : The New Rules of War).

2009Metropia (film d’animation).

2014. Tommy.

2017Le Caire confidentiel, grand prix du jury au Festival de Sundance et du Festival du film policier de Beaune.

2019. Après les séries Ray Donovan et Westworld, il tourne aux États-Unis The Contractor.

2022La Conspiration du Caire (Boy from Heaven), sélectionné en compétition au Festival de Cannes.

• Non ! * Pourquoi pas ** Bon film *** Très bon film **** Chef-d’œuvre

Le « combat perdu » des catholiques de La Manif pour tous 

À l’automne 2012 naissait une mobilisation d’une ampleur inattendue contre la loi Taubira ouvrant le mariage civil et l’adoption aux couples gays et lesbiens. Dix ans plus tard, nombre de catholiques engagés dans ce mouvement ont tourné la page, évoquant un héritage frustrant sinon embarrassant.

  • Benoît Fauchet, Arnaud Bevilacqua et Laurent de Boissieu, 

 

Le « combat perdu » des catholiques de La Manif pour tous
 
Un rassemblement de La Manif pour tous, à Nantes, en novembre 2013.JEAN-SÉBASTIEN EVRARD/AFP

« Merci pour l’invitation, mais je préfère ne pas parler de ce mouvement. » C’est un intellectuel catholique qui oppose cette fin de non-recevoir, après avoir été sollicité par La Croix pour évoquer la mobilisation contre la loi ouvrant le mariage et l’adoption aux couples de même sexe. Sa réponse en dit long : dix ans après leur lancement, les manifestations contre le « mariage pour tous » suscitent des silences gênés dans les rangs catholiques, qui avaient constitué le gros des troupes.

Ceux qui parlent exigent souvent l’anonymat. « C’est disqualifiant, aujourd’hui, d’avoir été dans le mouvement, fait valoir une personnalité. Pour moi, et je pense ne pas être le seul, il y a un malaise certain autour de cet épisode, parce qu’il y a eu un emballement excessif, qui a viré au bras de fer au-delà du sujet. »

Lors des premières manifestations, pourtant, l’humeur des organisateurs et des manifestants est au beau fixe. Le 17 novembre 2012, un cortège sous l’égide d’un collectif nouvellement créé, La Manif pour tous (LMPT), rassemble à Paris 200 000 personnes selon les organisateurs, 70 000 d’après la police.

Deux mois plus tard, le 13 janvier 2013, LMPT revendique un million de manifestants sur le pavé parisien, quand la préfecture de police en dénombre 340 000. Du jamais-vu pour une mobilisation impliquant majoritairement des catholiques – même si La Manif pour tous se présente comme aconfessionnelle – depuis le mouvement pour « l’école libre » en 1984.

« Le relatif succès de La Manif pour tous est lié à sa capacité à désenclaver la cause, et à opérer une connexion avec le catholicisme ordinaire, en impliquant un certain nombre de paroisses, des évêques », rembobine la sociologue du religieux Céline Béraud (1).

Timothée (2), qui avait alors 15 ans, se souvient avoir accompagné ses parents à l’un des plus gros rassemblements. « J’avais été convaincu par une bonne sœur au détour d’un week-end scout de l’importance du sujet. Ce qui m’a marqué, c’est la joie de sentir qu’on appartient à un groupe. Pour moi, ça a été une expérience politique fondatrice », explique-t-il. Aujourd’hui « à gauche, mais conservateur sur les sujets sociétaux », il « ne renie pas cet engagement d’adolescent » qui explique aussi ce qu’il est devenu.

« Au début, La Manif pour tous – et c’est ce qui a permis son succès – a mobilisé très largement, plutôt chez les catholiques pratiquants, et des manifestants pas aussi typés qu’on le pense sur le plan ecclésial ou politique », analyse Yann Raison du Cleuziou, politologue spécialiste du catholicisme (3). « Il faut déconstruire l’image qui en reste, liée au durcissement du mouvement. »

Ce raidissement intervient au printemps 2013, après la manifestation du 24 mars : si LMPT affiche une fréquentation record (1,4 million de manifestants), ce n’est pas l’avis du gouvernement, qui pointe une mobilisation en recul à 300 000 personnes. Des incidents ont lieu, que condamne le premier ministre Manuel Valls. Les relations se tendent sensiblement avec le pouvoir, à mesure que le calendrier d’adoption de la loi accélère et que la galaxie « manif pour tous » produit des satellites plus radicaux, comme le Printemps français. Une association LGBT dénonce une « homophobie ambiante ».

À partir de ce moment-là, c’est le reflux. Nombre de catholiques, notamment parmi les électeurs de droite modérée ou du centre, ne se retrouvent plus dans les cortèges. « Le sujet a clivé les paroisses, le conflit a traversé le mouvement scout, les communautés. Ce n’est pas que les gens sont devenus subitement favorables au mariage pour tous, mais beaucoup ont désapprouvé le mode de mobilisation et ses effets homophobes », estime Céline Béraud.

Lors d’entretiens avec des couples catholiques gays ou lesbiens en 2014-2015, la chercheuse a entendu des personnes lui racontant avoir connu « un moment terrible dans leur vie de foi, où ils ont été exposés à une forme d’homophobie explicite venant soit du curé, soit d’autres paroissiens. Les évêques en ont pris conscience, c’est très clair, et beaucoup de fidèles avec eux. »

Mais sur ce point, les frictions de 2013 ont produit un fruit inattendu voire paradoxal, selon Yann Raison du Cleuziou. « J’ai constaté des trajectoires de personnes qui ont franchi un seuil dans l’acceptation de l’homosexualité grâce au contexte d’affrontement et à leur engagement dans LMPT. L’attention à ne pas blesser les personnes homosexuelles devenait indispensable pour défendre leurs convictions », indique le politiste.

Ce qui autorise aujourd’hui la présidente de La Manif pour tous, Ludovine de La Rochère, à affirmer dans une tribune publiée par La Croix : les manifestants « n’ont cessé d’entendre les porte-parole du mouvement (…) condamner vigoureusement toute forme d’homophobie. Et nous avons constaté que ce message a bien davantage porté que toutes les communications faites jusque-là par les pouvoirs publics. J’en veux pour preuve la multiplication des initiatives qui ont suivi pour mieux accueillir les personnes homosexuelles, en particulier dans la sphère chrétienne. »

Un autre dossier a pesé contre un engagement durable des catholiques dans la bataille : la crise des abus, qui s’est imposée dans le débat public à partir de 2016, et la mise en cause du cardinal Philippe Barbarin – l’un des plus éminents soutiens du mouvement contre le mariage homosexuel – pour non-dénonciation d’agressions sexuelles sur mineurs. « Les scandales invitent l’Église à une certaine modestie sur sa prétention à dire le bien sur les questions de sexualité », constate Céline Béraud. « Les entrepreneurs de morale sexuelle catholique ont pris du plomb dans l’aile. »

L’échec de La Manif pour tous à s’opposer à la légalisation du mariage homosexuel – la loi dite Taubira a été promulguée le 17 mai 2013 – se double d’une incapacité à trouver une traduction politique. À droite, d’ailleurs, l’invitation à parler de ce mouvement ne suscite guère d’enthousiasme. « Je ne renie pas ce moment, mais je ne veux pas être sans cesse ramené à ce sujet et en reprendre pour dix ans. L’étiquette datée et simpliste de “la droite manif pour tous” est un marquage au fer rouge », explique un parlementaire Les Républicains (LR).

Il est vrai que ce parti a perdu le courant issu des mobilisations de 2012-2013 : Sens commun. Devenu le Mouvement conservateur après avoir échoué à conduire François Fillon à l’Élysée, l’association a soutenu Éric Zemmour à l’élection présidentielle de 2022 puis fournit 18 des 54 candidats Reconquête ! aux élections législatives. Début octobre, c’est encore sa présidente, Laurence Trochu, qui a représenté le parti d’extrême droite à l’élection législative partielle de la 2e circonscription des Yvelines (11 % des suffrages exprimés).

D’anciens compagnons de route de Sens commun, lorsque l’association était associée à l’UMP puis à LR, ont à l’inverse rallié la majorité présidentielle d’Emmanuel Macron. Parmi eux, le député Éric Woerth, signataire à l’époque du manifeste « la droite que nous voulons », aux côtés notamment de Bruno Retailleau, Éric Ciotti ou Laurent Wauquiez.

« Je ne regrette rien, raconte Éric Woerth. Nous avions voté contre la loi Taubira mais pas tous avec les mêmes arguments : ce qui était fondamental pour moi, ce n’était pas le mariage homosexuel, c’était et c’est toujours la conception et l’intérêt de l’enfant. C’est pourquoi la GPA reste une ligne rouge, comme Emmanuel Macron l’a lui-même réaffirmé. »

Le député insiste en outre sur la vertu d’avoir été un opposant : « Sur des questions aussi fondamentales, anthropologiques, il faut dans la société des contradicteurs qui apportent un éclairage différent, ce qui évite un débat trop léger ou des évolutions précipitées. »

Éric Woerth note d’ailleurs que, « à l’intérieur de LR aussi, des élus ont évolué et considèrent que le mariage homosexuel est entré dans les mœurs, comme ce fut le cas de l’avortement ». C’est un fait : sur les sujets de société, la droite a changé. En avril 2013, 96 % du groupe UMP avait voté contre la loi Taubira. Autrement dit, toute la droite y était opposée, à l’exception de quelques individualités. En 2019, 74 % du groupe LR a voté contre l’ouverture de la PMA à toutes les femmes, le reste se partageant entre le vote pour et l’abstention.

« Le combat perdu de La Manif pour tous a marqué une cassure triste pour ces catholiques qui ont eu le sentiment de ne plus être vraiment partie prenante de cette société, estime une figure engagée. Cela a contribué à jeter un nombre important de catholiques dans les bras d’une droite radicale et identitaire : Zemmour ne serait pas devenu ce qu’il est sans La Manif pour tous. J’ai connu des amis plutôt MoDem qui sont devenus zemmouriens, mus par ce sentiment de divorce. »

Un ancien acteur du mouvement confie avoir « fait le deuil d’un catholicisme triomphant ». Laïc, il croit davantage aux vertus d’un engagement « missionnaire » ou associatif. « Je pense que l’Église est passée à autre chose, ajoute un autre. Même si ça reste présent : j’ai assisté à une réunion sur la fin de vie récemment, beaucoup de gens avaient participé à La Manif autour de la table. La référence était dans les têtes. »

(1) Coautrice avec Philippe Portier de Métamorphoses catholiques. Acteurs, enjeux et mobilisations depuis le mariage pour tous, aux Éd. de la MSH, en 2015.

(2) Le prénom a été changé.

(3) Codirecteur de l’ouvrage collectif À la droite du Père, qui paraît ce vendredi 21 octobre (lire ci-contre).

Quelle place pour les religieux dans la résolution des conflits ?

 mosquee

Officiellement au nom du principe de laïcité, ils ne participent pas au jeu politique. Et pourtant dans la réalité ce sont des acteurs très actifs. Souvent sollicités, ils jouent les médiateurs, les conciliateurs lorsque survient une grave crise sociale, politique ou militaire. Du Sénégal à la République Démocratique du Congo en passant par la Centrafrique et le Burkina Faso, les religieux ont un lien particulier avec la sphère politique. Faut-il craindre leur implication et leur influence ?

Avec la participation de :

Bakary Sambe, directeur régional de Timbuktu Institute- African Center for Peace Studies

Kessy Martine Ekomo-Soignet, fondatrice et directrice de l’Observatoire pour la paix et le développement basé en République centrafricaine, activiste pour la jeunesse

Issaka Sourwema, communicateur et socio-anthropologue, chef traditionnel du village de Dawelgué au Burkina Faso, président de l'Association pour la tolérance religieuse et le dialogue interreligieux (ATR/DI) et ancien ministre des Affaires religieuses et coutumières