Mesdames, Messieurs,
Mon compatriote et frère aîné l’Archevêque émérite d’Alger, Mgr Henri Teissier, pasteur d’un christianisme généreux, humaniste, rassembleur et respectueux de tous les enfants de Dieu, nous a malheureusement quittés dans la matinée du mardi 1er décembre, jour de la mémoire liturgique d’un autre compatriote, Saint Charles de Foucauld, aux liens notoires avec l’Algérie.
A sa famille, ses parents, les frères que nous sommes, ses amis, I’Algérie, son pays de choix et de cæur, par ma voix, présente ses condoléances les plus attristées.
C’est, en effet, notre deuil à tous, car I’Algérie perd I’un de ses dignes fils, le pleure et partage pleinement la douleur de sa famille et de tous ceux qui comptaient pour lui et l’appréciaient, lui, l’inlassable berger de la foi catholique chrétienne, épris d’humanité et pour qui les hommes, quels qu’ils
soient et d’où qu’ils proviennent, étaient d’égale valeur.
Vous aurez, toutes et tous, noté combien cette perte a été douloureusement ressentie en Algérie notamment, ainsi que l’attestent les très nombreux messages, témoignages et vibrants hommages qui, tous, saluent la
mémoire d’Henri Teissier, l’homme humble et aimant d’abord, mais aussi le
dignitaire religieux d’exception.
Homme de convictions et de passions, Mgr Teissier en eut effectivement trois : Dieu, I’Eglise et l’Algérie.
ll fit du rapprochement des grandes religions monothéistes que sont le christianisme et I’lslam, le combat de toute une vie. De fait, pour lui < (La) relation islamo-chrétienne a formé la texture de ma vie de foi et de mon témoignage chrétien pendant toutes ces années. Et je remercie Dieu qui m’a donné cette vocation et cette mission >>.
Nous avons en mémoire, et il s’agit d’un souvenir impérissable, le dense parcours ecclésiastique de notre regretté frère qui a inlassablement æuvré au rayonnement de I’Eglise d’Algérie, favorisé la tolérance et le dialogue inter-religieux et démontré le plus grand respect à l’égard de la foi, majoritairement musulmane, du peuple algérien.
Adepte de Saint-Augustin < le numide universel > et de sa pensée, il fut aussi un précurseur du vivre-ensemble, qu’iltraduisit personnellement dans les faits en optant pour une immersion totale et une communauté de destin avec le peuple algérien aux toutes premières années de l’indépendance, qu’il appuya, devenant algérien au lendemain de I’indépendance.
Ce choix d’une communauté de destin et ce fort sentiment d’appartenance prit un sens tout particulier lorsque, durant les années sombres du terrorisme, Mgr Teissier fit le choix courageux de demeurer dans son pays et de vivre le pire, en toute solidarité avec les siens. ll avait, au demeurant, rappelé que ( Nous avons réussi à vivre ensemble. Même de 1991 à 1999 quand on était, tous ensemble, menacés par la même violence >>, Une
déclaration qui avait interpellé un de ses grands amis avec lequel il partageait ces mêmes idées qui n’était autre que Reda Malek. L’ancien Chef du Gouvernement algérien, parlant du continuateur de Mgr Duval, disait qu’une mention spéciale s’imposait à sa personne tant I’attachement
de Mgr Teissier à cette terre, au paroxysme de l’angoisse, n’a pas faibri, tandis que son courage infatigable a suscité I’estime et I’admiration de tous.
Mgr Teissier faisait ainsi valoir, je cite, que ( l’un des motifs déterminants de notre présence en Algérie, c’est la possibilité de vivre une relation humaine et spirituelle avec des partenaires musulmans. A travers nos rencontres, c’est I’Eglise et le Monde musulman qui communiquent et, parfois même, qui communient au nom de Dieu >.
Qu’il repose en paix. Sit tibi terra levis.
Salam mon frère, toi qui faisais valoir que I’expression < salam > constituait l’un des fondements du christianisme. De fait, l’homme de paix que tu étais, ne pouvait qu’apprécier à sa juste valeur ce mot arabe quotidiennement scandé par des millions de musulmans de par le monde, qui signifie paix.
Adieu à toi qui va retrouver la terre algérienne chère à Mgr Duval, à Mgr Claverie mais aussi à tes chers amis ayant partagé le même idéal que toi.
Saches que ton nom restera à jamais gravé dans la mémoire du peuple algérien car tu fus pour lui un exemple.
Exemple d’intégrité, exemple d’engagement, exemple de compétence, mais aussi exemple de modestie, d’humilité, de tenue, de retenue et surtout de courage.
Allah yarhmek Ayouh El Akh El Aaiz.Inna lilahi oua inna ilahi rajioun.
A Dieu nous appartenons. A Dieu nous retournons.
Sources: Copie d’une lettre du Secrétaire de l’Ambassade d’Algérie en France, du 8 décembre 2020