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Faut-il craindre une épidémie de la fièvre de Lassa
en Afrique de l’Ouest ?

 

Au Niger, comme au Bénin et au Burkina Faso, les autorités craignent une recrudescence de la fièvre de Lassa en Afrique de l'Ouest, en s'appuyant sur une augmentation des cas observés chez ses voisins. Sylvain Baize, de l'Institut Pasteur de Paris, fait le point sur la réalité de la menace sanitaire.

« Zoom sur un danger de mort », « Bénin : Un homme meurt du virus Lassa à Ségbana », « La fièvre de Lassa a fait 30 morts depuis janvier 2018 au Nigeria »… Depuis le début de l’année, plusieurs médias au Niger, au Burkina ou encore au Bénin ont multiplié les articles inquiets, voire alarmant, faisant planer la crainte de la propagation d’une nouvelle épidémie de la fièvre de Lassa en Afrique de l’Ouest. 

L’inquiétude est d’autant plus forte que la maladie, dans sa forme sévère, peut s’avérer létale (dans 1% des cas observés, selon l’OMS). D’autant que les symptômes de cette fièvre hémorragique virale aiguë sont proches de ceux d’Ebola.

Face à l’inquiétude naissante au sein de l’opinion publique, au Bénin, les autorités se préparent à cette éventualité. Le pays a d’ores et déjà mis en place des campagnes de sensibilisation et installé des salles d’isolement dans les hôpitaux. En 2016, l’épidémie de la fièvre de Lassa y avait fait 54 victimes.

Les autorités sanitaires nigériennes qui, elles aussi, s’inquiètent de cette situation dans ces pays frontaliers, 
ont rendu public le lundi 29 janvier un communiqué dans lequel elles appellent la population à la vigilance. 

Cette inquiétude est-elle justifiée ? Faut-il vraiment craindre une nouvelle flambée de la fièvre de Lassa en Afrique de l’Ouest ? Sylvain Baize, responsable de l’unité de biologie des infections virales émergentes à l’Institut Pasteur de Paris, analyse pour Jeune Afrique les contours de la situation actuelle et les précautions à prendre pour éviter la contagion.

Jeune Afrique : Plusieurs cas de fièvre de Lassa ont été détectés au Bénin et au Nigeria depuis le début de l’année. Faut-il craindre une flambée de la maladie en Afrique de l’Ouest ?

Sylvain Baize : Le virus Lassa est endémique au Nigeria. Tous les ans, à la même période, on recense à peu près le même nombre de cas. Au 25 janvier 2018, on recensait plusieurs cas dans dix États du Nigeria : 107 cas suspects, dont 67 confirmés, et 16 morts. Ces chiffres sont plus au moins similaires à ceux de l’année précédente.

Le Bénin, jusque-là épargné, voit cette maladie devenir désormais endémique. Une soixantaine de personnes ont été touchées en 2016. L’existence de cas sporadiques n’a rien de surprenante, dans la mesure où de nombreuses personnes circulent entre les deux pays. Elles ont aussi pu être infectées au Bénin. Mais pour le moment, on ignore s’il s’agit de cas autochtones ou importés.

A-t-on une idée du nombre de pays touchés dans la région ?

On peut parler d’une maladie endémique en ce qui concerne le Liberia, la Sierra Léone et la Guinée. Mais, comparé au Nigeria, le nombre de cas est moins élevé. C’est aussi en saison sèche qu’on dénombre plus de malades.

En regardant la carte de l’Afrique, on remarque une chose étonnante : la maladie n’est pas endémique dans plusieurs pays d’Afrique de l’Ouest, parmi lesquels la Côte d’Ivoire, le Burkina, le Mali, le Bénin et le Togo. On y note juste quelques cas sporadiques.

Les symptômes de la fièvre de Lassa sont similaires à ceux de plusieurs autres maladies, ce qui la rend plus difficilement détectable…

Les signes cliniques au début de la maladie sont similaires au paludisme : fièvre, céphalées, douleurs, etc. Il n’y a pas de test de diagnostic rapide (TDR) à l’instar du paludisme. Avant de pouvoir diagnostiquer une personne résidant en brousse, on perd donc beaucoup de temps. Au final, les signes spécifiques se manifestent dès lors qu’il y a hémorragie.

Quand le personnel soignant est touché, on commence à suspecter des cas de fièvre de Lassa parce qu’il y a eu transmission inter humaine.

Là est le problème avec cette pathologie semblable aux fièvres hémorragiques comme Ebola ou Marburg. Il est difficile de les diagnostiquer rapidement. Par exemple, le premier cas de l’épidémie d’Ebola en Afrique de l’Ouest en 2014 a été diagnostiqué en mars. Or, c’est en décembre 2013 qu’avait été contaminé le patient zéro. Il s’est écoulé plus de trois mois avant que le diagnostique ne soit posé! Pendant ce temps, personne n’a soupçonné le virus Ebola dont les signes cliniques sont très proches de pathologies beaucoup plus fréquentes.

Comment se passe la contamination ?

Le rongeur de type Mastomys, une espèce africaine, est le réservoir de Lassa. Il vit dans les cases, au village, et se nourrit des aliments stockés par l’homme. Sans compter que ces animaux défèquent dans les habitations et l’homme peut inhaler les selles déshydratées. Il arrive aussi parfois que l’homme mange ce rongeur.

On retrouve les mêmes modes de propagation qu’Ebola. Soit le contact avec les fluides biologiques d’un malade, le plus souvent présent à l’hôpital. Les épidémies sont plus rares avec la fièvre de Lassa dans la mesure où la transmission inter humaine est plus faible.

Peut-on guérir de la fièvre de Lassa ?

Si vous êtes atteint et admis dans un hôpital avec un bon service de réanimation, vos chances de survie sont considérablement augmentées. Le traitement symptomatique permet aussi de limiter la mortalité.

Comme traitement spécifique pour Lassa, il y a la Ribavirine, dont l’efficacité a été démontrée dans les années 1980. Ce médicament augmente les chances de survie si le traitement est initié juste après le début de la maladie.

Mais sur le terrain, il n’est très souvent pas disponible… Et lorsque le patient est en phase terminale, la Ribavirine n’a plus aucun effet.

Terrorisme au Mali: motos et pick-up
interdits dans certaines circonscriptions

Vue de Mopti, ville du centre du Mali (photo d'illustration).
© Getty Images/Friedrich Schmidt
 

Au Mali, les moyens de transport prisés par les présumés jihadistes sont les motos et les véhicules pick-up. Pour mieux faire face à la situation, surtout au moment où l’armée malienne annonce une « vaste opération militaire sur le terrain », une décision officielle interdit la circulation de ces moyens de transport dans une vingtaine de circonscriptions. Les présumés jihadistes sur le territoire malien opèrent à motos et en véhicule pick-up.

Des localités situées dans trois régions administratives du Mali sont concernées par la mesure : Ségou, Mopti et Tombouctou. A Ségou, au nord de Bamako, par exemple, dans les cercles de Niono, Tominian et Macina, jusqu’à nouvel ordre, pas de circulation à moto ou en véhicules pick-up sans autorisations spéciales.

A Mopti au centre sont concernés huit cercles, soit des dizaines de communes rurales. A Tombouctou au nord, plusieurs autres localités, dont celle de Soumpi, où récemment des affrontements se sont déroulés entre l’armée malienne et de présumés jihadistes, sont concernées par la mesure d’interdiction. Le communiqué officiel précise que tout individu qui ne respecterait pas cette décision sera considéré comme « cible militaire ».

L’annonce de cette nouvelle intervient à quelques jours du déclenchement « d’une vaste opération militaire sur le terrain », notamment au centre du Mali. Il s’agit selon le Premier ministre malien Soumeylou Boubeye Maïga , de débarrasser plusieurs localités maliennes de groupes criminels, et de redéployer l’administration. « Nous avons mobilisé les moyens qu’il faut », ajoute le chef du gouvernement.

Le président nigérien Mahamadou Issoufou

prend la tête du G5 Sahel

                 Issoufou Mahamadou, le président du Niger.
                   © today.ng/news/africa
 

Après les chefs d'état-major des pays du G5 Sahel, lundi 5 février, ce sont les chefs d'Etat qui sont réunis à Niamey depuis ce matin. De nombreux partenaires de l’organisation participent aussi à ce nouveau sommet qui devrait notamment permettre de faire un point sur le financement de la force militaire.

Les chefs d'Etat vont plancher sur la recherche de financements complémentaires. En janvier, à Bamako, ils ont décidé de mettre en place un fonds fiduciaire pour accueillir les contributions, mais malgré les engagements de l'Union européenne et de plusieurs pays, comme l’Arabie saoudite, le compte n’y est toujours pas.

Ce matin, le président malien, Ibrahim Boubacar Keïta, l'a rappelé à la tribune, seuls 294 millions d'euros ont été mobilisés sur les 450 qu'attendent les pays membres. Et toujours, aucun mécanisme de financement pérenne n'a pour l'instant été trouvé. Les chefs d'Etat vont donc faire un point cet après-midi sur la question avant le prochain rendez-vous, la conférence des donateurs du 23 février, à Bruxelles.

Deux opérations transfrontalières ont déjà été menées

La force du G5 est pour l'instant en rodage. Deux opérations transfrontalières ont déjà été menées avec les premiers bataillons disponibles. Deux QG sont prêts à Sévaré au Mali où se trouve le commandement, et à Niamey au Niger. Mais ce qu'on appelle les fuseaux centre au Tchad et ouest en Mauritanie ne sont pas encore opérationnels même si les choses commencent à s'organiser, en tout cas du côté de la frontière Mali / Mauritanie.

Le président français Emmanuel Macron a fait savoir à plusieurs reprises qu'il souhaitait que la force remporte rapidement ses premières victoires. Florence Parly, la ministre française de la Défense, se trouve d'ailleurs à Niamey aujourd'hui auprès des chefs d'Etat du G5. Elle a par ailleurs demandé, il y a quelques jours, au Japon de fournir une aide financière ou matérielle au G5.

A l'occasion de ce sommet, le G5 change aussi de présidence. Le président IBK passe le flambeau à son homologue nigérien Mahamadou Issoufou, pour une année de présidence tournante. A cette occasion, le secrétaire permanent est lui aussi remplacé. Maman Sidikou, l'ancien patron de la Monusco en RDC, remplace un autre Nigérien Mohamed El Hadj Najim en poste depuis la création de l'organisation. Maman Sidikou va désormais travailler en tandem avec le président Issoufou pour accompagner l'action militaire, par des projets de développement.

Côte d’Ivoire : le Conseil café-cacao
consacre 34,5 milliards de francs CFA
pour lutter contre le virus du cacaoyer

 

En Côte d'Ivoire, le nouveau plan de lutte contre le "swollen shoot", le virus infectant les cacaoyers, a été annoncé fin janvier par le directeur général du Conseil café-cacao. Il prévoit d'arracher 100 000 hectares, avec une compensation pour les paysans concernés et la plantation de souches plus résistantes à la maladie.

Le Conseil café-cacao (CCC), le gendarme de la filière agricole stratégique pour la Côte d’Ivoire, a entamé fin janvier l’offensive contre le virus de la pousse de cacao gonflée, aussi connu sous le nom de « swollen shoot ».

Cette maladie endémique de l’Afrique de l’Ouest, qui a resurgi en 2003 après avoir pratiquement disparu depuis les années 1950, détruit les plantations de cacao, en Côte d’Ivoire, mais aussi au Ghana et au Nigeria. À ce jour, son seul remède est l’arrachage des arbres infectés, pour éviter toute propagation.

Quelque 300 000 hectares de plantation de cacao sont infectés en Côte d’Ivoire

En Côte d’ivoire, selon les statistiques du Centre national de recherche agronomique (CNRA), quelque 300 000 hectares de plantation de cacao sont infectés dans le pays, dont plus de 77 000 hectares dans la seule région du Marahoué, au cœur de la nouvelle boucle de cacao.

Peu d’impact sur la production nationale

C’est dans cette région, épicentre de la maladie, que Yves Brahima Koné, le directeur général du CCC, a lancé le plan de lutte qui coûtera 34,5 milliards de francs CFA (52,6 millions d’euros) sur la période 2017-2020. 100 000 hectares de cacao infectés devraient être détruits durant cette période. Le financement de cette opération est assuré par les fonds propres du CCC, ainsi que par la plateforme de partenariat dans le cacao, composée des acteurs principaux du secteur.

>>> A LIRE – Crise du cacao : une filière en pleine restructuration

Outre l’arrachage des arbres infectés, le plan de lutte prévoit un dédommagement de 50 000 FCFA par hectare détruit pour les paysans, ainsi qu’une opération de distribution de semences plus résistantes à la maladie.

Pour le moment, la propagation du swollen shoot n’impacte pas la production nationale, qui a atteint 2 millions de tonnes lors de la campagne 2016-2017. Pour la campagne 2017-2018, qui a démarré en octobre dernier et qui s’achèvera le 30 septembre prochain, la récolte a déjà franchi la barre du million de tonnes. Le gouvernement a fait une prévision de 1,943 million de tonnes pour la campagne en cours.

25 pays africains réaffirment vouloir mettre en œuvre

la Convention de Bamako

 
     La cargaison toxique du Probo Koala, qui aurait dû être décontaminée aux Pays-Bas, avait été répandue dans des décharges autour      D’Abidjan, provoquant la mort de 17 personnes en septembre 2006.
                      © AFP /Issouf Sanogo
 

A Abidjan en Côte d'Ivoire s'est achevée ce jeudi 1er février la 2e Conférence des parties à la Convention de Bamako, la COP2, sous le thème « une plateforme pour une Afrique sans pollution ». La Convention de Bamako  interdit l'importation de déchets dangereux en Afrique et encourage la réduction et le contrôle des mouvements transfrontaliers de ces déchets sur le continent africain. Elle a été adoptée en 1991. Pourtant, il aura fallu attendre 22 ans pour que se tienne en 2013 sa première conférence. Pendant trois jours les représentants des 25 pays africains signataires ont réaffirmé leur engagement à mettre en œuvre la Convention de Bamako.

En 2006 le cargo Probo Koala affrété par une multinationale pétrolière déversait plus de 500 mètres cubes de déchets hautement toxiques à Abidjan, causant la mort de 17 personnes et empoisonnant des dizaines de milliers d'autres. C'est pour que ce genre de catastrophes ne se reproduise plus que se sont réunis les Etats signataires de la Convention. Avec l'objectif affiché : que l'Afrique ne soit plus la poubelle du monde.

« Nous estimons qu'il y a une seule réaction à avoir : c'est notre mobilisation, notre organisation et notre solidarité autour de cette problématique avec la mise en place de mécanismes de contrôle et de suivi des mouvements de ce type de déchets de l'extérieur de l'Afrique vers l'Afrique, mais également à l'intérieur de l'Afrique », témoigne Anne Désirée Ouloto, la ministre ivoirienne de l'Environnement et présidente de cette COP.

Une série de recommandations a été mise sur la table, telle que la mise en place de réseaux d'échanges d'information sur les déchets dangereux entre les pays membres ou encore le développement de partenariats public - privé pour la gestion des déchets toxiques produits en Afrique. La COP2 a également décidé d'établir le siège de la Convention au Mali.

Parmi les défis encore à relever : trouver des financements alors que les Etats parties rechignent à s'acquitter de leurs contributions. Et convaincre les 29 pays africains n'ayant pas ratifié la Convention à rejoindre le mouvement.

Prochain rendez-vous pour la COP3,  février 2020 au Congo.