Réunis en sommet extraordinaire à Accra ce dimanche, les dirigeants ouest-africains ont fait le choix de la fermeté et annoncé de lourdes sanctions économiques contre Bamako.
Le mécontentement affiché par les dirigeants de la sous-région ces derniers jours laissait peu de place au doute, mais ce sont tout de même de très lourdes sanctions, économiques pour la plupart, qui ont été annoncées ce dimanche 9 janvier depuis Accra.
Réunis à huis clos dans la capitale ghanéenne, ils ont décidé de sévir contre les autorités maliennes qui, en plus de n’avoir pas respecté l’échéance du 27 février pour organiser des élections, ont proposé que la transition qui s’est ouverte avec le renversement d’Ibrahim Boubacar Keïta en août 2020 soit prolongée de cinq années supplémentaires.
La Cedeao échaudée
Devant le tollé, Bamako avait tenté ces derniers jours de calmer le jeu et insisté sur le fait que ce nouveau délai, proposé le 31 décembre à l’issue des assises nationales, n’était qu’une « base pour la négociation ». Un message qu’Abdoulaye Diop, le ministre malien des Affaires étrangères, s’est employé à répéter à ses différents interlocuteurs lors de la tournée qu’il a effectuée en fin de semaine et qui l’a conduit en Côte d’Ivoire, en Sierra Leone, au Burkina Faso et en Algérie.
Selon nos informations, Abdoulaye Diop a tenté jusqu’à la dernière minute d’éviter les sanctions. À Accra, ce samedi, où il s’est rendu accompagné du ministre malien de l’Administration territoriale et de la Décentralisation, le lieutenant-colonel Abdoulaye Maïga, il a même proposé que les cinq ans soient ramenés à deux. Mais, échaudée et consciente que c’est aussi sa crédibilité qui était en jeu, la Cedeao a choisi la fermeté.
Ont donc été annoncées la fermeture des frontières terrestres et aériennes entre les pays membres de la Cedeao et le Mali, ainsi que la suspension de toutes les transactions commerciales. Une exception est faite pour les biens de consommation essentiels, les produits pharmaceutiques, les fournitures et équipements médicaux, les produits pétroliers et l’électricité.
Avec effet immédiat
Les avoirs du Mali au sein de la BCEAO sont en outre gelés. Le pays se voit également suspendu de toutes les aides qui lui étaient versées via la BIDC et la BOAD. Enfin, les pays membres de la Cedeao rappellent leurs ambassadeurs accrédités à Bamako.
LES CONSÉQUENCES SONT LOURDES POUR L’ÉTAT MALIEN, QUI NE POURRA PLUS FAIRE FACE À UN CERTAIN NOMBRE D’ÉCHÉANCES
« Ces sanctions seront appliquées immédiatement, précise le communiqué publié en début de soirée. [Elles] ne seront progressivement levées qu’après la finalisation d’un chronogramme acceptable et convenu. »
« Les conséquences sont lourdes pour l’État malien, qui ne pourra plus faire face à un certain nombre d’échéances, résume un haut cadre malien. Il ne pourra plus lever de fonds sur les marchés financiers ni accéder au compte unique du Trésor, où sont ses actifs financiers. À très court terme, le manque de liquidités va affecter notamment le paiement des salaires des fonctionnaires et des agents de l’État. »
Mise en garde
Les militaires maliens doivent-ils y voir une mise en garde ? La Cedeao annonce, dans le même communiqué, qu’elle décide « d’activer immédiatement » sa Force en attente et que celle-ci se tiendra « prête à toute éventualité ».
Au sujet de la présence de mercenaires russes liés au groupe Wagner, la Cedeao prend la peine d’ajouter que, « malgré le démenti du gouvernement de transition malien, [elle] reste profondément préoccupée par le rapport cohérent sur le déploiement d’agents de sécurité privée au Mali avec son impact potentiellement déstabilisateur sur la région ».
Reste à savoir quelle sera la réaction malienne, tant du côté des autorités, que de la rue, chauffée à blanc par les précédentes sanctions.