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Burkina Faso : un méga-plan de développement à 29 milliards d’euros

Mis à jour le 3 décembre 2021 à 13:31
 


Vue aérienne de Ouagadougou, capitale du Burkina Faso. © Renaud VAN DER MEEREN/EDJ

 

Le nouveau référentiel national de développement, portant sur la période 2021- 2025, veut « transformer » la structure de l’économie burkinabè.

Planifier le développement, coordonner l’action gouvernementale et séduire les investisseurs. C’est ce que veut faire le Burkina Faso avec son deuxième Plan national de développement économique et social (PNDES-II).

Adopté en Conseil des ministres en juillet, ce plan, qui porte sur la période 2021-2025 et prend le relais d’un premier PNDES mené entre 2016 et 2020, s’élève à 29 milliards d’euros (19 000 milliards de F CFA). Il doit être financé à 63 % via la mobilisation de ressources propres, les 37 % restants devant venir de financements extérieurs et/ou innovants. Un quart de ces financements extérieurs (environ 2,1 milliards d’euros) ont déjà fait l’objet d’accords avec les partenaires du développement. Il reste donc 6,4 milliards d’euros à trouver.

Pour ce faire, le pays entend mobiliser l’aide publique au développement (prêts concessionnels et dons), recourir aux marchés de capitaux et au secteur privé (emprunts de capitaux à moyen et long terme) mais aussi tester des modes de financements innovants, dont les partenariats public-privé, les financements participatifs, les ressources de la diaspora et les fonds « verts ».

Quatre axes stratégiques

La stratégie de développement 2021-2025, qui repose entre autres sur les objectifs de développement durable (ODD) 2015-2030, l’agenda 2063 de l’Union africaine et le Cadre stratégique de la Cedeao, est bâtie autour de quatre axes stratégiques : la consolidation de la résilience, la sécurité, la cohésion sociale et la paix ; l’approfondissement des réformes institutionnelles et la modernisation de l’administration publique ; le développement du capital humain, la solidarité nationale et, enfin, la dynamisation des secteurs porteurs pour l’économie et les emplois.

LES FEMMES BURKINABÈ SONT LES PLUS CONCERNÉES PAR L’EXTRÊME PAUVRETÉ

Au vu des tensions sécuritaires provoquées par la menace djihadiste, le rétablissement de la sécurité fait partie intégrante du plan. Comme stipulé dans la documentation officielle, « il s’agit de faire baisser le nombre de décès liés aux attaques terroristes par an de 628 en 2019 à moins de 100 en 2025, mais aussi d’augmenter le taux de réinsertion socioéconomique des personnes déplacées internes de 7 % en 2020 à plus de 50 % en 2025 et de faire passer l’indice de perception de la paix et de la sécurité de 0,761 en 2018 à 0,850 en 2025 ».

En lien, le gouvernement met l’accent sur l’autonomisation économique des jeunes et des femmes, en particulier ceux exposés à la menace terroriste. Le PNDES-II fixe donc l’objectif d’augmenter de 15 % à l’horizon 2025 la proportion de jeunes auto-entrepreneurs et de faire passer le pourcentage de femmes bénéficiant de crédit d’une institution financière de 75,3 % en 2018 à 85 % en 2025. Pour rappel, les femmes burkinabè, qui ont deux fois moins accès à l’éducation que les hommes, sont les plus concernées par l’extrême pauvreté.

 

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Inflation et déficit budgétaire

L’économie du Burkina Faso repose majoritairement sur l’agriculture avec 80 % de la population qui vit de cette activité, selon les derniers chiffres de la Banque mondiale. Pourtant, ce pays du Sahel à faible revenu dispose de ressources naturelles limitées. Étant classé 144e sur 157 pays selon le nouvel indice du capital humain établi par la Banque mondiale, le Burkina fait face à d’importants défis en matière de santé et d’éducation, avec 40,1 % de la population vivant en-dessous du seuil de pauvreté.

Lassané Kaboré, ministre de l’Économie et des Finances du Burkina Faso.


Lassané Kaboré, ministre de l’Économie et des Finances du Burkina Faso. © Olympia de Maismont pour Jeune Afrique

Avec la crise du Covid 19, le PIB réel n’a augmenté que de +1,9 % en 2020. L’inflation, qui se matérialise par un redressement des loyers ainsi qu’une augmentation des prix des produits alimentaires et de l’énergie, a atteint +3,2 % en 2020 et +2,8 % en août 2021, contre -3,2 % en 2019.

Croissance du PIB annuel au Burkina Faso

Croissance du PIB annuel au Burkina Faso © Croissance du PIB annuel au Burkina Faso Source : Banque Mondiale

Avec la persistance du Covid-19 et la combinaison de défis sécuritaires, humanitaires et sociaux à relever, la Banque mondiale estime que le déficit budgétaire devrait rester élevé en 2021, à -5,5 % du PIB. « Son retour progressif vers le critère de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (Uemoa) de -3 % est prévu d’ici à 2024 », indique la même source.

Boucler le financement

Malgré l’annulation  en raison de l’apparition du nouveau variant du Covid-19 et de la rapidité de propagation du virus en Europe  d’une conférence internationale des partenaires prévue les 2 et 3 décembre à Bruxelles, le gouvernement burkinabè se veut rassurant sur sa capacité à boucler le financement du PNDES-II.

« Une fois que la situation sanitaire connaîtra une accalmie, cette conférence va se tenir, probablement dans le courant du premier trimestre de 2022 », a ainsi assuré le ministre de l’Économie, des Finances et du Développement, Lassané Kaboré, lors d’un point presse le 30 novembre.

Selon le ministre, ce report n’affectera pas les objectifs fixés par le gouvernement alors que, selon les organisateurs de la conférence, les discussions informelles vont pour l’heure se tenir à distance. « Des missions de plaidoyer ont été effectuées, des engagements et même des annonces de financement ont été formulées », a encore indiqué le ministre.

Communiqué de presse du ministère l’Économie, des Finances et du Développement

Transition politique au Tchad :
Le conseil national de transition installé, le dialogue inclusif se poursuit

Le Conseil national de transition, parlement intérimaire formé de 93 membres, est installé depuis le 5 octobre dernier. C’est l’une des institutions majeures de la transition politique menée depuis la mort du Maréchal Idriss Déby Itno. Dans le même temps, le dialogue national et le processus de réconciliation continuent d’enregistrer des résultats.

 

Le 20 avril, en annonçant la mort du maréchal Idriss Déby Itno dans des combats contre des rebelles, alors qu’il venait d’être déclaré réélu après 30 années au pouvoir, le général Mahamat Idriss Déby Itno était proclamé chef de l’État à la tête d’un Conseil militaire de transition (CMT) composé de quatorze autres généraux. Celui-ci était chargé de faire face aux menaces auxquelles le pays était confronté, d’organiser des élections libres et transparentes, dans un délai de dix-huit mois mais aussi de mener un processus de réconciliation entre Tchadiens, alors que chaque gouvernement est confronté depuis des décennies à une opposition armée.

Pour accomplir ces missions, dès le 21 avril, le CMT a doté le pays d’une Charte de transition. C’est conformément à cette Charte qu’un Premier ministre de transition civil, Albert Pahimi Padacké, a été nommé le 26 avril. Cinq jours plus tard, celui-ci prenait la tête d’un gouvernement de transition composé d’une quarantaine de ministres.

Le Conseil national de transition représente l’ensemble de la société

Il restait à mettre en place le Conseil national de transition (CNT). Pas moins de cinq mois ont été nécessaires à la formation de ce parlement provisoire, nommé le 24 septembre par un décret du chef de l’État. Ses 93 membres, sélectionnés par un comité ad hoc, respectent des quotas fixés à l’avance, notamment en termes de représentativité de la société tchadienne. Au moins 30 % de députés de l’Assemblée nationale sortante devaient ainsi apparaître dans le CNT, de même que 30 % de femmes et 30 % de jeunes.

Ses membres représentent une douzaine de courants politiques. On retrouve dans le CNT des personnalités de la société civile et du mouvement syndical, des représentants religieux, des personnes issues de l’univers « politico-militaire », le dernier chef de l’opposition parlementaire, sous Idriss Déby Itno, ou encore l’ancien Premier ministre, Kassiré Coumakoye. Aucun membre de la plateforme Wakit Tama, qui conteste toujours le pouvoir actuel, n’y figure en revanche.

LE CNT AURA NOTAMMENT POUR MISSION D’EXAMINER LE PROJET DE FUTURE CONSTITUTION, UNE ÉTAPE CLÉ DE LA TRANSITION 

 

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© Les membres du comité ayant sélectionné les dossiers des membres du CNT, le 26 septembre 2021.

 

C’est un homme politique d’expérience, Haroun Kabadi, qui devra guider le CNT dans ses missions. L’une des plus importantes consistera à examiner le projet de future Constitution, une étape clé de la transition. •

HAROUN KABADI :  un poids lourd pour présider le CNT

Nommé le 5 octobre dernier à la tête du CNT, en même temps que l’institution démarrait ses travaux, Haroun Kabadi est âgé de 73 ans. Agronome formé aux États-Unis, il était le président de l’Assemblée nationale sortante. Il a passé dix ans à la tête du législatif tchadien, après avoir été Premier ministre dans les années 2000.

LES OPPOSANTS NOMBREUX À REJOINDRE LE DIALOGUE NATIONAL INCLUSIF

Si Wakit Tama ne figure pas dans le CNT, nombre de personnalités de l’opposition participent au dialogue national, afin de contribuer de l’intérieur à la transition, y compris des membres de cette plateforme de partis politiques et de la société civile qui continue de manifester contre le pouvoir.

Mahamat Nour Ibedou : un militant historique va au dialogue

C’est le cas de Mahamat Nour Ibedou. Ancien opposant au régime d’Hissène Habré, puis d’Idriss Déby Itno, dont il a dans un premier temps été un chargé de mission, il est depuis 2011 le secrétaire général de la Convention tchadienne pour les droits humains (CTDDH).

« Nous avons assez lutté en dehors du système, a-t-il déclaré le 11 octobre. Et là, franchement, nous risquons d’être d’éternels contestataires. Nous refusons désormais de subir et nous avons décidé, cette fois-ci, de lutter de l’intérieur, c’est-à-dire d’aller au dialogue. Il faut vraiment participer aux instances qui doivent décider de la vie du pays ».

« NOUS AVONS DÉCIDÉ DE LUTTER DE L’INTÉRIEUR, C’EST-À-DIRE D’ALLER AU DIALOGUE »

Laoukein Kouraleyo Médard reçu par le président du CMT

Le parti la Convention tchadienne pour la paix et le développement (CTPD) a lui aussi annoncé, le 14 septembre, prendre part au dialogue national inclusif.

« Si nous n’y allons pas, cela veut dire que nous leur donnons l’occasion de s’éterniser au pouvoir ou de prolonger la durée de la transition », estime Laoukein Kouraleyo Médard, son président. Lui-même ex-candidat à la présidentielle, ex-ministre et ancien maire, il a été reçu le 28 septembre par le président du CMT, Mahamat Idriss Déby Itno, « dans le cadre des consultations régulières avec les leaders de formations politiques ».

La Ligue tchadienne des droits de l’homme représentée au sein du Dialogue

Son point de vue est également partagé par Dobian Assingar, ancien président de la Ligue tchadienne des droits de l’homme (LTDH). Ce dernier a été nommé membre du comité d’organisation du dialogue national. Pour rappel, lors de la nomination des membres de ce comité, le 13 août dernier, une place a été réservée à des entités comme la LTDH ou l’Union des syndicats du Tchad (UST), également membres de Wakit Tama.

LES PARTICIPANTS  ESPÈRENT QUE LE DIALOGUE, RÉCLAME DEPUIS DES DÉCENNIES, JETTERA LES BASES DE RÉFORMES PROFONDES DE L’ÉTAT 

Il faut rappeler que les anciens chefs de file de l’opposition, Saleh Kebzabo, de l’Union nationale pour le développement et le renouveau (UNDR), et Mahamat Ahmat Alhabo, du Parti pour les libertés et le développement (PLD), ont tôt rejoint le dialogue national. Le premier a même été nommé mi-août vice-président du comité d’organisation du dialogue national inclusif.

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Haroun Kabadi - Président du CNT © Haroun Kabadi – Président du CNT


Comme les autres participants à ce processus, ils espèrent que le dialogue, réclamé depuis des décennies, jettera les bases de réformes profondes de l’Éta
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© Timrane Erdimi – Dirigeant du groupe armé de l’Union des forces pour la résistance (UFR)

 

DES REBELLES ARMÉS SAISISSENT LA MAIN TENDUE

Depuis son arrivée au pouvoir, le chef de l’État tend la main aux groupes rebelles qui acceptent de déposer les armes pour participer à un futur dialogue inclusif. C’est dans ce cadre que plusieurs dirigeants du groupe armé de l’Union des forces pour la résistance (UFR), dirigé par Timan Erdimi, ont saisi l’opportunité de regagner le Tchad et même de rencontrer le président du CMT, Mahamat Idriss Deby Itno, le 3 septembre dernier.

Bénin: deux soldats tués lors d'une attaque terroriste dans le nord-ouest

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Un soldat dans le parc de la Pendjari, au Bénin. STEFAN HEUNIS / AFP

 

Une attaque terroriste perpétrée a eu lieu durant la nuit de mercredi à jeudi dans le nord-ouest du Bénin, près de la frontière avec le Burkina Faso. Deux soldats des forces armées béninoises sont décédés.

Avec notre correspondant à CotonouJean-Luc Aplogan

Cette attaque intervient seulement 24 heures après un accrochage dans le lit du fleuve Mekrou, faisant un mort parmi les jihadistes. Elle a eu lieu dans la nuit du mercredi au jeudi entre minuit et 1 heure du matin.

Selon nos informations, c’est une position de l’armée de terre béninoise qui a été attaquée dans la région de Porga, non loin du parc de la Pendjari, à 650 km au nord-ouest de Cotonou et proche de la frontière brukinabè.

 

Lourd bilan

Côte FAB, le bilan est lourd. Deux militaires ont été tués et entre cinq et sept ont été blessés, selon les sources. Ils ont tous été évacués vers un hôpital de la région. Côté jihadistes, un cadavre a été retrouvée par l’armée béninoise.

Le nombre d’assaillants est encore inconnu et aucun communiqué de revendication n’a été diffusé. L’appartenance du groupe d’assaillants est donc, pour l’heure, toujours inconnu.

Le gouvernement béninois n’a pas encore communiqué sur l’attaque, mais, selon nos informations, le patron de l’armée de terre a adressé un message écrit à ses hommes. Un message dans lequel il présente ses condoléances aux familles des frères d’armes tombés sur le champ d’honneur et ajoute « que le danger est réel sur le terrain ».

 À lire aussi : Quatre présumés jihadistes arrêtés au nord du Bénin

Tchad : ce que Mahamat Idriss Déby Itno est prêt à concéder aux rebelles

Par Jeune Afrique
Mis à jour le 1 décembre 2021 à 17:50
 


Mahamat Idriss Déby Itno, le président de la transition tchadienne. © Vincent Fournier pour JA

 

Pour obtenir leur participation au dialogue officiel, le président de la transition tend la main aux chefs des groupes politico-militaires. Après les avoir amnistiés, il s’apprête à satisfaire une autre de leurs revendications.

Les groupes politico-militaires ont obtenu, le 29 novembre, la mesure d’amnistie qu’ils avaient réclamée et posée comme condition première à leur participation à tout dialogue officiel avec le pouvoir de N’Djamena. Selon nos informations, ils pourraient également voir une autre de leurs revendications satisfaite : la restitution de leurs biens saisis par les autorités tchadiennes.

Villas et sommes d’argent

Plusieurs de leurs chefs avaient en effet établi, il y a plusieurs mois, une liste de terrains, villas, véhicules et sommes d’argent ayant appartenu aux membres de leurs groupes et confisqués par la justice tchadienne ces dernières années. Celle-ci avait ensuite été transmise au comité technique chargé de favoriser le dialogue entre les opposants rebelles et Mahamat Idriss Déby Itno, une instance présidée par Goukouni Weddeye.

Un sous-comité également dirigé par l’ancien président tchadien s’est ensuite mis au travail et a analysé point par point les demandes de restitution. Puis un rapport a été transmis à la présidence. C’est sur la base de ces recommandations que le chef de l’État doit décider d’accéder ou non à la demande des groupes politico-militaires.

D’après un proche de son cabinet, Mahamat Idriss Déby Itno y est favorable. Au palais présidentiel, une équipe est actuellement chargée de préparer un projet de décret fixant les modalités et l’ampleur des restitutions. Le document pourrait être validé à court terme, dès lors que les dossiers liés à l’amnistie annoncée le 29 novembre auront été bouclés.

Selon plusieurs opposants contactés par Jeune Afrique, cette mesure était la deuxième condition indispensable à leur participation à un « pré-dialogue », dont l’organisation pourrait être lancée prochainement au Qatar et qui précéderait le dialogue national prévu dans les prochains mois à N’Djamena.

D’autres dirigeants de groupes politico-militaires ont posé des préalables différents, tels que l’octroi de documents de voyage et la présence comme témoins, lors des futures discussions à Doha, de représentants de l’Union africaine (UA), des Nations unies et des « pays amis », comme la France ou les États-Unis.

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