Vu au Sud - Vu du Sud

Sénégal : les élections locales, premier grand test pour Macky Sall avant 2024

 
Par  - à Dakar
Mis à jour le 4 novembre 2021 à 17:40
 


Le scrutin local sénégalais aura lieu le 23 janvier 2022 © Pierre Vanneste/Hans Lucas via AFP

 

Toutes les listes d’investitures pour le scrutin du 23 janvier 2022 ont désormais été déposées. Qui sont les principaux candidats ? Quels grands duels ? Quels enjeux ? Jeune Afrique fait le point.

Une première grande étape a été franchie dans la nuit de mercredi 3 novembre au Sénégal, dans la perspective des élections municipales. Les différents partis, coalitions et listes indépendantes du pays avaient jusqu’à minuit pour déposer la liste de leurs candidats pour le scrutin du 23 janvier 2022. « Je n’ai pas dormi depuis 48 heures, mais on commence à en voir le bout », confiait un membre d’une des principales coalitions de l’opposition.

Jusqu’au bout, la constitution de ces listes aura donné lieu à d’intenses tractations au sein des formations politiques. Et généré frustrations, déceptions… et quelques trahisons. Tour d’horizon des grands enjeux de ce scrutin, local certes, mais qui pourrait avoir des implications nationales cruciales pour la suite du second mandat de Macky Sall.

NOUS AVONS 2024 EN LIGNE DE MIRE, ASSURE UN CONSEILLER DE L’OPPOSITION

Pourquoi ces élections seront cruciales ?

Plusieurs fois reporté par le pouvoir, ce scrutin municipal sera le premier depuis la réélection de Macky Sall, en février 2019. Situé à mi-chemin de son deuxième mandat – qui prendra fin en 2024 -, dont on ne sait pas encore s’il sera le dernier, il fera figure de premier grand test avant la présidentielle. « Quand Idrissa Seck a rejoint le pouvoir [en novembre 2020], on s’est dit que Macky Sall était encore plus fort, confie le président d’un parti allié au PDS. Il fallait créer quelque chose. » « Nous avons 2024 en ligne de mire : plus nous gagnons de collectivités [aux locales], plus nous avons de chances de voir le pouvoir changer de camp », ajoute le conseiller d’un candidat de l’opposition appartenant à la coalition concurrente.

« C’est une erreur de penser que les élections municipales ont un enjeu national. Les locales sont avant tout des affaires de cuisine interne au sein des partis et des coalitions », estime pour sa part un opposant de longue date à Macky Sall. Plus que jamais, ce scrutin laisse la part belle aux ambitions personnelles et aux luttes intestines : de quoi fragiliser certaines alliances historiques ?

Selon nos informations, la plupart des coalitions semblent avoir observé le même principe, souffrant forcément des exceptions : reconduire les maires sortants, vainqueurs du précédent scrutin. Évidemment, les choses se compliquent lorsqu’il s’agit d’une commune à conquérir.

Élus pour un mandat de cinq ans au suffrage universel direct, les maires seront choisis selon deux modes : un scrutin proportionnel et un scrutin de liste majoritaire à un tour. En d’autres termes, la première liste qui l’emporte, d’une seule voix ou plus, donne à la personne qui la dirige l’assurance de devenir maire. Un mode d’élection qui rend les coalitions très importantes pour s’assurer la victoire.

Le scrutin peut-il fragiliser certaines alliances ?

L’exemple le plus parlant est sans contexte celui de Benno Bokk Yakaar (BBY). La coalition présidentielle réunit en effet, en plus de l’Alliance pour la République de Macky Sall, une kyrielle d’autres partis et coalitions, qui pourraient bien avoir envie de présenter des listes parallèles. En octobre dernier, JA racontait comme Macky Sall et ses proches ont tenté au maximum de limiter la casse, grâce à des investitures censées assurer la victoire et éviter la sécession de leurs alliés. Des choix difficiles qui n’ont pas fait que des heureux. Ainsi, l’allié de Macky Sall et maire sortant de Ziguinchor (Casamance), Abdoulaye Baldé, n’a pas été investi par la coalition BBY… dont il a immédiatement claqué la porte pour présenter sa propre liste.

LES AMBITIONS DIVERGENTES ONT FAIT ÉCLATER LA GRANDE COALITION DE L’OPPOSITION

Au sein du parti socialiste, allié de Macky Sall depuis 2012, plusieurs listes parallèles ont aussi été déposées – la formation continue néanmoins de revendiquer sa loyauté à la majorité. À Podor, la maire sortante Aïssata Tall Sall, l’actuelle ministre des Affaires étrangères qui a récemment rallié BBY, a cédé sa place à la surprise générale. « Après douze ans à la tête de la commune, j’ai pris librement la décision de ne pas me représenter. Suite à mon entretien avec le président Macky Sall, j’ai exprimé le vœu que la liste de Benno Bokk Yakaar à Podor soit consensuelle, ouverte à toutes les forces politiques en présence. », a déclaré la « Lionne du Fouta », ouvrant la voie à la candidature de l’homme d’affaires Mamadou Racine Sy.

Au sein de l’opposition également, les ambitions et les stratégies divergentes ont fait éclater la grande coalition censée faire barrage à Macky Sall, qui fera campagne en rangs dispersés.

Pourquoi la bataille de Dakar attire tous les regards ?

« Le seul enjeu réel de cette élection, c’est Dakar. », assène un ministre de Macky Sall, également candidat dans sa propre commune. L’importance de la capitale et de sa banlieue est évidente, tant d’un point de vue démographique (4 millions d’habitants environ, soit près d’un quart de la population totale du pays) que symbolique. Si le bulldozer BBY a remporté la majorité des communes du pays lors des précédentes locales, elle n’a pas su ravir Dakar à l’opposition. La maire sortante Soham El Wardini – qui assure l’intérim depuis l’emprisonnement de Khalifa Sall – est d’ailleurs candidate sur une ligne indépendante.

Au total, on dénote pas moins de sept candidats à la mairie. Le ministre de la Santé Abdoulaye Diouf Sarr, maire de la commune de Yoff et membre du parti présidentiel, est en bonne position pour l’emporter. Il est néanmoins en concurrence avec un autre membre de la majorité et conseiller du président, le ministre d’État Mbaye Niang. Du côté de l’opposition, le maire de Mermoz-Sacré-cœur, Barthélémy Dias, proche de Khalifa Sall et populaire à Dakar, a également ses chances. Ils seront en compétition avec Soham El Wardini et l’ancien député libéral Doudou Wade (Wallu Sénégal), neveu de l’ancien président Abdoulaye Wade mais aussi avec l’ancien maire de la capitale Pape Diop (Bokk Gis Gis) et le magnat des médias Bougane Gueye Dany (Geum Sa Bopp).

ZIGUINCHOR ET SAINT-LOUIS FERONT L’OBJET D’ÂPRES BATAILLES POLITIQUES

Quels seront les autres grands duels ?

Plusieurs communes feront également l’objet d’âpres batailles politiques, comme la capitale casamançaise Ziguinchor, déjà au cœur de tensions et de violences. L’ancien candidat à la présidentielle Ousmane Sonko, dont le parti Pastef participera pour la première fois à un scrutin local, affrontera l’apériste Benoît Sambou, et le dissident Abdoulaye Baldé. À Saint-Louis, le sortant Mansour Faye, beau-frère du chef de l’État et ministre des Infrastructures, affrontera pour BBY Mary Teuw Niane, président du conseil d’administration Petrosen et lui aussi membre du parti présidentiel.

Quelles sont les prochaines étapes avant le scrutin ?

À présent que les listes sont déposées, les préfets ont 48 heures pour en vérifier la validité. En cas d’irrégularité, le mandataire d’une liste problématique dispose de trois jours pour rectifier le tir, sous peine de voir sa candidature rejetée. Le préfet peut ensuite attendre jusqu’à 70 jours avant le scrutin pour diffuser officiellement les listes, soit le dimanche 14 novembre.

En Côte d’Ivoire, les taxis protestent contre les VTC

 

Des taxis stationnés dans une rue d'Abidjan, le 7 août . Guillaume Mignot / Flickr / CC

 

 

Depuis quelques années, les voitures de transport avec chauffeur proposées par les applications Uber et Yango ont investi les rues d’Abidjan. Ce qui n’est pas du goût des taxis classiques qui ont plus de taxes et de frais que leurs collègues conducteurs de VTC. Mardi, les chauffeurs de taxis ont fait grève pour attirer l’attention du gouvernement.

Avec notre correspondant à Abidjan, Sidy Yansané

Très difficile ce mercredi de trouver un taxi compteur. Ces véhicules oranges qui sillonnent habituellement la ville ont recouvert leur lampe d’un morceau de plastique ou de tissu pour indiquer qu’ils sont en grève contre les avantages accordés au VTC opérant pour Yango ou Uber.

Ce chauffeur de taxi gréviste explique que ses frais sont beaucoup plus important que ceux des nouveaux venus : « Nous on paye beaucoup de taxes. On paye plus de 43 000 [francs CFA] d'assurance. Le Yango paie une assurance personnelle d'environ 12 000. Et puis la police nous fatigue. Souvent les policiers nous demandent pourquoi vous n'avez pas tel papier. Mais les Yango, les policiers ne les arrêtent pas. »

L’Association des conducteurs de taxis compteurs se dit victime d’une concurrence déloyale du fait de la prise en charge de frais et taxes plus importants que les VTC. Patente, assurance transport, contrôle technique tous les six mois… alors que les chauffeurs Uber et Yango sont soumis à des règles plus souples. 

Pour Agathe Té Flan Ouattara, directrice commerciale de TE Car VIP, entreprise partenaire des applications de VTC, la colère des taxis est justifiée, mais précise que sa société est aussi soumise aux charges et à l’impôt. Elle n’est pas surprise par cette grève et déplore un manque d’anticipation de l’État. 

La semaine dernière, des discussions avec le ministère des Transports se sont ouvertes. Le porte-parole du gouvernement Amadou Coulibaly affirme que la recherche d’un compromis est en cours afin de réguler ce secteur en évolution. En attendant, l’Association des taxis compteurs a suspendu son appel à la grève.

Dakar annonce de nouveaux financements pour la lutte contre le sida en Afrique de l’Ouest

 

Le nombre d'infections a surtout augmgenté parmi les jeunes et les femmes. Ici un enfant positif au VIH à Bangui

Le sommet régional sur le VIH en Afrique de l’Ouest et du Centre s’est clôturé mardi 2 novembre, notamment avec la participation du président sénégalais Macky Sall, qui a annoncé le montant supplémentaire de deux milliards de francs CFA pour lutter contre la pandémie dans son pays.

 

Avec notre correspondante à Dakar, Charlotte Idrac

La pandémie de Covid-19 a sérieusement perturbé la lutte contre le VIH : difficultés de circulation donc d’accès aux traitements, fermeture de centres communautaires, ou encore interruption des programmes de prévention… Mais l’objectif de mettre fin au VIH doit rester une « priorité urgente », selon les participants au sommet, venus de 26 pays.

Le président Macky Sall a également martelé : « La lutte contre le VIH-sida doit rester plus que jamais d’actualité. Même dans le conteste de la riposte anti-Covid-19. »

L’Afrique de l’Ouest et du Centre, à la pointe au début de l’épidémie de sida, a pris du retard, et fait face à une hausse des nouvelles infections, essentiellement chez les jeunes et les femmes. L’an dernier, 150 000 décès liés au sida ont été enregistrés dans la région.

Depuis dimanche 31 octobre, le sommet a réuni des ministres de la Santé et de l’Économie de seize pays de la région et des organisations de la société civile, dans le but de « réinventer la riposte à la pandémie de VIH ».

En Afrique de l’Ouest et du Centre, 4,7 millions de personnes vivent actuellement avec le VIH, et la région fait face à une hausse des nouvelles infections. Pour faire face, il faudra plus de financement, a estimé le chef de l’État, qui a donc annoncé un budget supplémentaire de 2 milliards de francs CFA au Sénégal, dont la moitié pour les acteurs de la société civile engagés dans la riposte.

il n’y a pas de « manque de volonté politique » selon lui :

La réalité c’est qu’en Afrique, les maladies n’ont pas connu de traitements adéquats, par défaut de prise en charge, de budget… je serais très heureux que le Sénégal puisse dire très prochainement"merci au Fonds mondial [de lutte contre le sida] pour nous avoir accompagnés depuis tant d’années, maintenant, nous prendrons en charge intégralement la riposte".

Rôle crucial de la société civile

Pour relancer la riposte, et « ne laisser personne de côté », selon le slogan de ce sommet, les représentants de la société civile ont notamment plaidé pour plus d’appui aux acteurs communautaires. L’enjeu : aller trouver, là où elles sont, les personnes les plus vulnérables.

Selon la directrice d’Onusida en République Démocratique du Congo, Susan Kasedde, les acteurs de la société civile ont également un rôle crucial à jouer dans la lutte contre le VIH. Pour elle, mettre fin au VIH d’ici 2030, c’est tout à fait possible.

Selon la directrice d’ONUSIDA en République Démocratique du Congo, Susan Kasedde, il est possible d'en finir avec le VIH d'ici 2030 en RDC

Sur le front de la pandémie de Covid-19, Macky Sall a une nouvelle fois appelé les populations à aller se faire vacciner : « Nous étudierons les modalités d’instauration d’un pass sanitaire pour l’accès aux lieux publics », a ajouté le chef de l’État sénégalais.

 À écouter aussi : Reportage Afrique: Sénégal: le pays mise sur les autotests VIH

Guinée : qui est Lauriane Doumbouya, la nouvelle première dame ?

Mis à jour le 28 octobre 2021 à 17:01
 


Mamadi Doumbouya pose avec sa femme, Lauriane, et sa mère lors de la cérémonie d’investiture, le 1er octobre 2021 à Conakry. © CELLOU BINANI/AFP


Le 1er octobre, lors de la cérémonie d’investiture de Mamadi Doumbouya, la présence de cette Française aux côtés du putschiste a été remarquée. « Jeune Afrique » a enquêté sur cet officier de gendarmerie devenue première dame.

Le téléphone sonne désespérément dans le vide. Il n’y a plus personne pour répondre à la ligne enregistrée au nom de Mamadi Doumbouya. Le contrat renvoie à une adresse à Chabeuil, plus précisément à un logement de fonction de la gendarmerie de cette petite commune de la Drôme, dans le sud-est de la France. C’est là que Lauriane Doumbouya, née Darboux, officiait pour la dernière fois au sein des forces de l’ordre françaises. 

Si personne ne répond, c’est parce que l’officier de gendarmerie française vit désormais à plusieurs milliers de kilomètres. Le 1er octobre, lors de la cérémonie d’investiture de Mamadi Doumbouya au poste de président de la transition, la présence de cette femme blanche n’est pas passée inaperçue. Le port altier, vêtue d’un boubou et d’un bazin, voilà cette Française inconnue du grand public propulsée au rang de première dame de Guinée. Une séquence d’autant plus particulière que c’est par les armes que son mari est parvenu au pouvoir, le 5 septembre dernier, renversant Alpha Condé.

Blagueuse et bonne vivante

De la vie passée de Mamadi Doumbouya, peu d’informations filtrent. Alors quand il s’agit de son épouse, l’exercice est encore plus compliqué. Ni biographie officielle, ni bureau alloué, ni service de communication. De Chabeuil à Conakry, des hommes du Comité national de rassemblement pour le développement (CNRD) à la famille Darboux, chacun entretient le mystère sur cette femme à la taille (1,80 m environ) presque aussi impressionnante que celle de son mari.

Selon nos informations, Mamadi Doumbouya et Lauriane se sont rencontrés peu après l’arrivée en France de celui-ci, en 2005. Cette année-là, celui qui deviendra le chef du Groupement des forces spéciales (GFS) arrive pour revêtir le béret vert de la légion étrangère, pendant cinq ans, au sein du deuxième régiment étranger d’infanterie de Nîmes (Gard). Lauriane, elle, vient de terminer une formation de trois mois au sein de l’école de gendarmes-adjoints de Tulle. On l’y décrit « sportive » et « sûre d’elle », selon les mots d’une de ses camarades de promotion. Elle est aussi bonne cavalière, ce qui va l’amener à quitter le sud de la France en 2006 pour intégrer la Garde républicaine de Paris.

Mais les choses ne se passent pas comme prévu. Les rôles subalternes dédiés aux gendarmes-adjoints de la Garde ne l’enthousiasment pas. « Elle voulait être gendarme mais, compte tenu de son jeune âge, elle n’avait pas pris compte des sacrifices à faire », ajoute l’une de ses camarades. Un autre tempère : « Nous étions jeunes et nous sortions du baccalauréat. À cet âge-là, nous étions nombreux à être là sans trop savoir quoi faire plus tard », explique celui qui la décrit comme « blagueuse », « joviale » et « bonne vivante ». 

Carrière éclair

Lauriane Darboux quitte Paris sans avoir perdu son accent pour retrouver le Sud de la France. Elle semble très attachée à la vallée du Rhône où des membres de sa famille vivent encore. Après être retournée faire ses classes de sous-officier en 2006 à Libourne (Gironde), elle retourne à sa terre d’origine, Chabeuil. C’est dans cette ville que démarre véritablement sa carrière de gendarme. Selon nos informations, au mois de septembre 2008, Lauriane porte déjà l’uniforme. 

A-t-elle rencontré Mamadi Doumbouya lors de l’une de ses permissions ? Jusqu’en 2010, celui-ci ne pourra en tout cas lui rendre visite que ponctuellement, car un légionnaire n’a droit qu’à 45 jours de permission par an (sur accord du commandement), en plus des week-ends. C’est peu de temps après sa sortie de la légion, en 2011, qu’il se marie avec Lauriane. Ils ont aujourd’hui trois enfants. 

Pour Lauriane, le dilettantisme des débuts laisse place à la détermination. En 2011 et en 2014, elle reçoit une prime de résultats exceptionnels. Ne s’arrêtant pas en si bon chemin, elle devient officier de police judiciaire de la gendarmerie en 2016 et maréchal des logis-chef en 2017. Une ascension rapide, comme son mari.

Après quelques années durant lesquelles on perd sa trace, Mamadi Doumbouya est envoyé en 2013 à l’École d’application d’infanterie de Thiès, au Sénégal. Puis en 2014, il effectue un stage à l’Institut des hautes études de défense nationale en France (IHEDN). Quatre ans plus tard, il reçoit le brevet d’études militaires supérieures de l’École de guerre de Paris. Il est alors promu commandant des forces spéciales, l’unité d’élite chargée du contre-terrorisme. 

Mamadi Doumbouya s’installe définitivement à Conakry. Le flou entoure les éventuelles allées et venues de Lauriane entre la France et la Guinée. Selon une source proche du pouvoir, elle a développé d’étroites relations avec les membres de sa belle-famille à Kankan, ville natale de Mamadi Doumbouya. En 2018, elle y a été vue aux fêtes de Tabaski. D’après nos informations, juste après l’investiture de son mari, le 1er octobre dernier, Lauriane Doumbouya logeait au palais du Peuple, à quelques pas de là où Alpha Condé est détenu. Mais depuis, elle n’est plus apparue publiquement, ni à Conakry ni à Chabeuil.  

Sénégal : Youssou N’Dour, griot du new deal agricole

Mis à jour le 27 octobre 2021 à 17:40
 
Damien Glez
 

Par Damien Glez

Dessinateur et éditorialiste franco-burkinabè.


Damien Glez © Damien Glez

 

Avec l’ancien ministre Haidar El Ali et le capitaine d’industrie Abbas Jaber, le chanteur lance un appel en faveur d’une agriculture africaine réinventée.

De la vague enthousiaste des indépendances au tournant d’un monde 2.0 pollué, les fantasmes d’une Afrique révolutionnée n’ont cessé de générer moult discours. Jusqu’à plus soif. Quid d’un continent capable d’enjamber un secteur économique secondaire par la magie numérique du tertiaire ? Confrontée aux financements timides, aux tics politiques et à la dégradation environnementale précipitée, l’étape de l’industrialisation est-elle une chimère ? Le miracle présumé de « jeunes pousses » métissées surfant sur une vague de start-up entraînera-t-il la classe moyenne à « ruisseler » vers les plus pauvres ?

En amont du dernier sommet Afrique-France, parfois perçu comme une grand-messe médiatique propice au « pschitt » hivernal, les Montpellier Global Days soulignaient la nécessité de ne pas négliger les thèmes des systèmes alimentaires, de la biodiversité, de l’eau ou des transitions écologiques observées sous le prisme de l’agronomie. Pas très glamour, la paysannerie traditionnelle ? Certes, la vague des gentlemen farmers de l’agro-business des années 2000 a remis le secteur primaire à la mode. Mais pas toujours au profit de doctrines économiques adaptées et d’ambitions collectives.

Un projet nommé Oasis

Les lampions des sommets éteints, trois personnalités du pays de la Teranga réembouchent la trompette des Montpellier Global Days, à travers verbe et geste. Le geste, c’est un projet dénommé « Oasis ». Le verbe, c’est une tribune largement diffusée, notamment dans les colonnes de médias internationaux.

Ces trois personnalités ont la légitimité commune d’être nées au Sénégal auquel elles accordent une représentativité plus que continentale, puisqu’aux « portes de l’Afrique de l’Ouest, à la jonction du Maghreb, de l’Europe et de l’Amérique ». Un Sénégal où, de surcroît, un président français – Nicolas Sarkozy – avait démontré l’incurie d’observateurs internationaux en matière de questions agricoles africaines, en évoquant ce caricatural « paysan africain » étranger à « l’idée de progrès ».

Ces trois Sénégalais auteurs de la tribune « En Afrique, l’agriculture a besoin d’un new deal » mettent sur la table leur légitimité individuelle. Chanteur sénégalais de renommée internationale, Youssou N’Dour cultive également une réflexion politique qui l’a conduit aux responsabilités publiques. Ancien ministre de la Pêche puis de l’environnement du Sénégal, Haidar El Ali est présenté comme « la personne qui a planté le plus d’arbres au monde ». Quant à Abbas Jaber, il met dans la balance son expérience entrepreneuriale de capitaine d’industrie à la tête du Groupe Advens-Géocoton, leader de la filière cotonnière en Afrique.

Économie, climat, égalité…

Au-delà du respect dû à un secteur tertiaire, au nom de la corde sensible de la tradition, le projet de ces trois personnalités parle d’économie, de climat, de marchés mondiaux, de démographie, de place de la femme, d’équilibre entre le nord et le sud mais aussi d’égalité entre les populations du sud. Au-delà de l’injonction faite aux pouvoirs publics de consacrer davantage de moyens à l’agriculture et à l’élevage, les trois signataires esquissent le bon usage qui pourrait être fait desdits moyens.

Conscient que l’agriculture emploie toujours près des trois quarts de la population africaine, le projet Oasis s’inscrit dans la ligne droite de la Grande Muraille verte, appelant même de ses vœux « une révolution doublement verte » – performante et durable – dans une Afrique sous pression économique, environnementale et sanitaire. Il appelle à encourager les acteurs privés du secteur agricole et invoque l’écologie de l’être, l’émergence de filières, la complémentarité entre les producteurs agricoles et les éleveurs, la transformation des matières premières, l’accès sécurisé à une énergie peu chère, la formation professionnelle ou encore les politiques monétaires. Pour Youssou N’Dour, El Ali Haidar et Abbas Jaber, l’Afrique est la dernière frontière qui mérite le déploiement d’un nouveau narratif. Pourvu que ça ne soit pas qu’une affaire de mots…