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Burkina Faso : création d’un label pour le poulet bicyclette

Un livreur de poulets dans les rues de Ouagadougou.(Illustration).
Un livreur de poulets dans les rues de Ouagadougou.(Illustration). AFP - ISSOUF SANOGO

Le Burkina Faso va créer un label pour le poulet bicyclette. Les ministères du Commerce et des Ressources animales l'ont annoncé cette semaine. Le poulet est l'une des viandes les plus consommées par les ménages burkinabè. Rien qu'à Ouagadougou, ce sont 80 000 têtes de poulets qui sont utilisées chaque jour. Mais le poulet bicyclette subit la rude concurrence des poulets importés, d'où la nécessité d'un label.

Bien que le Burkina produise 50 millions de têtes de poulets par an, il n'arrive pas à satisfaire sa demande nationale. Certains producteurs se tournent alors vers des poulets de chair importés, ou bien croisent des espèces pour produire un poulet hybride.

Avec ce label, le Burkina entend promouvoir son poulet local. Le Dr Tegwende Modeste Yerbanga, ministre des Ressources animales explique : « Le poulet bicyclette est très prisé par les consommateurs dans la sous-région. Cela avait également suscité auprès des acteurs de production locale un phénomène de compétition pour pouvoir créer une différence par rapport aux poulets importés ou poulets de race. Le label va aussi créer de la valeur ajoutée pour ces ménages qui en font une activité permanente ».

Un poulet local met quatre à cinq mois pour atteindre son poids de vente. Les poulets de race, eux, n'ont besoin que de 45 jours. Ils sont donc bien plus rentables.

Seynou Ouedraogo est éleveur avicole dans la province de la Sissili au Sud du pays. « Aujourd’hui, le marché burkinabé est envahi par les bleus de Hollande, les coquelets, les poulets qui viennent du Ghana et de la Côte d’Ivoire ou d'ailleurs. Et donc le label du poulet bicyclette va donner de la valeur ajoutée à notre volaille. »

 

Parmi les critères pour obtenir le label, ont été retenus: la race de l'animal, une utilisation modérée de produits vétérinaires, une alimentation en partie faite de résidus alimentaires et un espace de plein air. 

► À réécouter :  Burkina Faso : à Ouagadougou, le fabuleux destin du poulet burkinabè

Culture africaine: les rendez-vous de juillet

Dana Scruggs : « Nyadhour, Elevated », Vallée de la Mort, Californie, 2019. Du 4 juillet au 26 septembre, les Rencontres d’Arles de la photographie accueillent « The New Black Vanguard », une « conversation autour de la représentation du corps noir et de la vie des Noirs en tant que sujet ».
Dana Scruggs : « Nyadhour, Elevated », Vallée de la Mort, Californie, 2019.

Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser..">Où auront lieu en juillet les rendez-vous phares de la culture africaine ? Voici sept propositions. Et n’hésitez pas à nous envoyer vos « incontournables » à l’adresse Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser..

À partir du 3 juillet nous attend l’exposition Cosmogonies. Zinsou, une collection africaine. L’Hôtel des collections du MO.CO à Montpellier accueille une centaine de sculptures, photographies, peintures et installations de 37 artistes, dont Frédéric Bruly-Bouabré, Mallick Sidibé, Chéri Samba, Zanele Muholi, Sammy Baloji… Le personnage de l’artiste béninois Cyprien Tokudagba (1939-2012) servira de « fil conducteur de cette histoire ».

Jusqu’au 19 juillet, le Centre Pompidou présente Fly by night, une programmation spéciale dédiée à l’Afrique. Parmi les artistes invités originaires du Nigeria, de la République démocratique du Congo et du Rwanda figurent Qudus Onikeku, Nkisi, Simon Rouby, Native Maqari, Keziah Jones et Dorothée Munaneza. Six spectacles inédits programmés à la Grande Salle et au Forum du Centre Pompidou-Paris pour « faire vivre la vitalité artistique du continent africain ».

Du 3 au 11 juillet, Montpellier accueille le Festival United States of Africa. La Halle Tropisme se transforme en territoire africain, « une zone qui abat les frontières géopolitiques, artistiques et linguistiques ». Musiciens, plasticiens, cuisiniers, danseurs, cinéastes… Avec quatre grands focus sur l’Égypte, le Cameroun, l’Éthiopie, le Maroc.

Du 4 juillet au 26 septembre, les Rencontres d’Arles constituent l’épicentre mondial de la photographie. Parmi les nombreuses expositions et découvertes : The New Black Vanguard ouvre « la conversation autour de la représentation du corps noir et de la vie des Noirs en tant que sujet ». Une autre exposition intitulée Thawra ! Révolution !, aborde le « Soudan, histoire d’un soulèvement ». Après la chute d’Omar el-Bechir, le 11 avril 2019, les Soudanais ont ouvert un nouveau chapitre. Les images d’une nouvelle génération de photographes documentent le désir de documenter la résistance et la répression.

 
Guillaume Bonn : « Appartements avec vue sur le centre-ville de Maputo ». « Etat d’esprit africain – villes hybrides », exposition aux Rencontres d’Arles 2021.
Guillaume Bonn : « Appartements avec vue sur le centre-ville de Maputo ». « Etat d’esprit africain – villes hybrides », exposition aux Rencontres d’Arles 2021. © Guillaume Bonn

Le Festival d’Avignon ouvrira le 5 juillet sa 74e édition dans la Cour d’honneur du Palais des papes avec La Cerisaie de Tchekhov, mise en scène par le Portugais Tiago Rodrigues. Il y aura aussi une belle présence de créateurs et de thèmes africains. L’économiste, penseur, philosophe et auteur sénégalais Felwine Sarr sera l’acteur principal de Liberté, j’aurai habité ton rêve jusqu’au dernier soir. Il y est question des combats de René Char et Frantz Fanon et de leur « rêve d’une absolue liberté ». Le Sacrifice, de la chorégraphe Dada Masilo de Johannesburg, née en 1985 à Soweto, en Afrique du Sud, est inspiré du célèbre Sacre du Printemps d’Igor Stravinsky, mais aussi de la version majestueuse de Pina Bausch. « Avec Le Sacrifice, je fais la fusion des danses de rituels et contemporaines. La danse tswanaise est une danse du Botswana, c’est une belle danse, élégante, rythmée, qui est basée sur le mouvement de petits animaux. » La metteuse en scène française d’origine malienne et ivoirienne Eva Doumbia présentera un spectacle « indiscipliné ». Autophagies évoque des « histoires de bananes, riz, tomates, cacahuètes, palmiers, et puis des fruits, du sucre, du chocolat » pour parler des ravages du colonialisme et ses effets néfastes jusqu’à aujourd’hui. Dans le cadre du festival, du 11 au 16 juillet, RFI présentera sur place et en diffusion vidéo sur Facebook sa 9e édition de Ça va, ça va le monde !, son fameux cycle de lectures au service du théâtre contemporain francophone et en particulier africain dont La Cargaison, texte du Guinéen Souleymane Bah, prix RFI Théâtre 2020.

Du 6 au 18 juillet, le Festival de Cannes accueillera deux films africains dans la compétition officielle pour la Palme d’or. Le réalisateur marocain Nabil Ayouch montrera Casablanca Beats (Haut et fort). Le Tchadien Mahamat-Saleh Haroun, Grand Prix en 2010, présentera Lingui – les liens sacrés. Depuis 1975 et la Chronique des années de braise de l’Algérien Mohammed Lakhdar-Hamina, on attend toujours la deuxième Palme d’or remportée par un cinéaste africain. Cette année, la réalisatrice sénégalaise Mati Diop, Grand prix du Festival en 2019 avec Atlantique, est membre du jury qui décernera la Palme.

Africa Tambien est la première exposition présentant le travail d’artistes africains majeurs dans les Baléares. En collaboration avec la Galerie Magnin-A, la Galerie Tambien présente sur l’île d’Ibiza, du 15 juillet au 30 septembre, des œuvres de Seydou Keita, Malick Sidibé, J. D. Okhai Ojeikere, Houston Maludi, Marcel Miracle…

► Merci à tous les artistes et professionnels pour leurs propositions. Vous aussi, vous pouvez nous envoyer vos « incontournables » de la culture africaine en 2021 à l’adresse Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser..

Côte d’Ivoire : Alassane Ouattara peut-il proposer un « New Deal » aux Ivoiriens ?

| Par 
Mis à jour le 29 juin 2021 à 18h08
Les moins de 25 ans, qui profitent peu de la forte croissance économique, représentent plus de la moitié de la population.
Les moins de 25 ans, qui profitent peu de la forte croissance économique,
représentent plus de la moitié de la population. © Mahmut Serdar Alakus /Anadolu Agency via AFP

En dépit d’une forte croissance, le pays ne réduit pas suffisamment les inégalités. Depuis deux ans, le gouvernement ivoirien redouble d’efforts pour inverser la tendance. Jeune Afrique fait le point

« Les grands-pères sont en train de résoudre leurs problèmes, mais qu’est-ce que cela apporte aux jeunes », tempête Francis Akindès. Interrogé par Jeune Afrique au début de juin, le sociologue regrette que la classe politique se concentre autant sur le retour au pays de l’ancien président, Laurent Gbagbo, après son acquittement devant la Cour pénale internationale. « Ils oublient l’autre dimension de la réconciliation, la réconciliation intergénérationnelle, celle du partage des richesses », estime le sexagénaire.

Alors que les moins de 25 ans représente plus de 50 % de la population, « on ne les convoque en politique que pour leur musculature. On leur promet l’avenir, mais le présent leur échappe », juge le chercheur.

Croissance à la chinoise

Pourtant, depuis 2012, la Côte d’Ivoire arbore une croissance à la chinoise. Plus de 8 % en moyenne, après une décennie de stagnation. La performance fait la fierté du pouvoir et entretient la mobilisation en faveur du pays des bailleurs de fonds et des institutions internationales. Elle s’est également traduite par une montée en puissance du secteur privé avant la crise liée au Covid-19, avec des investissements directs étrangers multipliés par deux entre 2012 et 2019, selon la Cnuced, et un taux d’investissement du privé passé de 6 % à 16 % du produit intérieur brut (PIB), alors que celui du public est stable autour de 6 %.

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ON NE CONVOQUE LES JEUNES EN POLITIQUE QUE POUR LEUR MUSCULATURE. ON LEUR PROMET L’AVENIR, MAIS LE PRÉSENT LEUR ÉCHAPPE

Élu l’an dernier pour un troisième mandat, le chef de l’État Alassane Ouattara n’avait pas manqué, pendant la campagne, de mettre en avant les réalisations enregistrées depuis son arrivée au pouvoir : 40 000 kilomètres de routes construites ou réhabilitées, des accès à l’électricité et à l’eau potable améliorés, des centaines de classes ouvertes, des universités et des hôpitaux construits et rénovés. Mais le goudron ne se mange pas, répond la rue.

« Le pouvoir assure que le taux de pauvreté a diminué, mais les gens ne font pas le même constat, remarque Francis Akindès. Les jeunes ont du mal à s’insérer, même ceux qui vont à l’université. Et ils constatent le désengagement de l’État qui a, en parallèle, favorisé le développement du secteur privé. » Avec une dépense consacrée à l’éducation tombée à moins de 4 % du PIB entre 2015 et 2018, les chiffres confirment ce sentiment.

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L’ABSENCE DE DÉBOUCHÉS POUR UNE PARTIE DE LA JEUNESSE SE TRADUIT DANS LES VILLES PAR LES PHÉNOMÈNES DES MICROBES ET DES BROUTEURS

« La massification des effectifs, accentuée par la décision du président en 2015 de rendre l’école obligatoire jusqu’à 16 ans, n’a pas été suffisamment accompagnée et les infrastructures sont insuffisantes, en dépit des fonds apportées par la coopération française dans le cadre du C2D [contrat de désendettement et de développement] », estime Koffi Christian N’da, chercheur au laboratoire d’analyse et de modélisation des politiques économiques (Lampe).

L’absence de débouchés pour une partie de la jeunesse se traduit dans les villes par les phénomènes des microbes (bandes de jeunes délinquants) et des brouteurs (cyber-escrocs). « C’est une manière pour ces jeunes de trouver une place, par l’informel et la violence », juge Francis Akindès.



Supermarché Cash Ivoire – St Michel Adjamé, à Abidjan (Cote d’Ivoire). © Guillaume Binet/ MYOP pour Jeune Afrique

Réussite individuelle

À son arrivée au pouvoir, le chef de l’État a choisi de dépolitiser la sortie de la crise en mettant de côté des sujets comme la citoyenneté, à l’origine du conflit de 2010-2011. Il a fait de l’émergence son principal objectif, et de la réussite individuelle l’un de ses marqueurs. Un discours en partie accepté par une population épuisée, aspirant à une vie normale. Mais, avec ce discours, il a aussi créé des frustrations.

Le revenu par habitant a doublé entre 2011 et 2019, passant de 1 120 dollars à 2 290 dollars, mais ce chiffre masque d’importantes disparités. Une partie de la croissance est, par ailleurs, gommée par l’augmentation de la population (2,4 % par an), qui est six fois plus importante qu’en Chine.

Les politiques impulsées par Alassane Ouattara, ancien haut fonctionnaire du Fonds monétaire international (FMI) et libéral assumé, offrent une source permanente de critiques pour l’opposition, « alors qu’elle-même n’a pas de solution », souligne Francis Akindès.

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SI LE REVENU PAR HABITANT A DOUBLÉ ENTRE 2011 ET 2019, PASSANT DE 1 120 DOLLARS À 2 290 DOLLARS, CE CHIFFRE MASQUE D’IMPORTANTES DISPARITÉS

« C’est vrai que pour les privilégiés du régime, le bilan est fantastique puisqu’ils se sont enrichis comme jamais. Pour la majorité de notre population, c’est une autre histoire », dénonçait, par exemple, Kouadio Konan Bertin, membre du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) et conseiller du président de cette formation, Henri Konan Bédié, dans une interview donnée à JA l’an dernier.

« Personne ne peut nier les efforts entrepris, analyse l’économiste Denis Cogneau, mais les inégalités n’ont pas été pour autant réduites de manière significative. Elles restent importantes en Côte d’Ivoire. Moins qu’en Afrique du Sud ou en Angola, mais plus qu’au Mali ou au Burkina Faso. Elles se situent à peu près au niveau des États-Unis », témoigne le chercheur, qui a travaillé sur une comparaison internationale allant d’une période de 1990 à 2018. « C’est un héritage que l’on ne peut pas imputer seulement au pouvoir actuel. Il remonte au moins à la fin des années 1980», précise-t-il.

Réduction de la pauvreté

En quarante ans, les planteurs de cacao ont, par exemple, vu leur pouvoir d’achat divisé par trois. Premier producteur mondial de fèves, la Côte d’Ivoire a bien tenté ces deux dernières années de créer un cartel avec le Ghana pour tirer un meilleur profit de ses exportations, mais son influence sur les cours mondiaux – contrôlés par les multinationales de l’agroalimentaire – est restée très limitée. Pour la petite campagne de 2021, qui s’étale de janvier à mai, les cacaoculteurs devront se contenter de 750 F CFA par kilo (1,14 €/kg), un niveau similaire à ce qu’ils recevaient en 2010.

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DEPUIS UN PEU PLUS DE DEUX ANS, ALASSANE OUATTARA A FAIT DE L’INCLUSION ÉCONOMIQUE UNE THÉMATIQUE PLUS PRÉSENTE DANS SON ACTION POLITIQUE

Selon le gouvernement, qui s’appuie sur une étude régionale de la Banque mondiale, le taux de pauvreté a pourtant baissé sous la présidence d’Alassane Ouattara, passant de 55 % de la population en 2011 à 39,4 % en 2018. La situation est cependant encore loin de celle du milieu des années 80 où ce chiffre plafonnait à 10 %. À Abidjan, les pouvoirs publics estiment qu’il manque 500 000 logements, tandis que 1,2 million de personnes vivent actuellement dans les 130 bidonvilles recensés de la capitale économique.

Depuis un peu plus de deux ans, le chef de l’État a fait de l’inclusion économique une thématique plus présente dans ses discours. À la fin de 2018, il a confié à la primature la conception et la supervision d’un programme de réduction des inégalités réparti sur deux ans, baptisé PSGouv. « Perçu comme le président des grandes infrastructures, il a voulu donner plus de visibilité à la dimension sociale de son action », indique une source gouvernementale. Pendant la mise en œuvre de ces projets, le Premier ministre en a suivi l’avancement tous les quinze jours et en a rendu compte une fois par mois à Alassane Ouattara.

Émergence en 2030

En mars 2021, le gouvernement a indiqué qu’ils avaient été réalisés à 90,4 %. Près de 2000 villages ont été électrifiés, contre un peu plus de 1500 entre 1994 et 2010. 80% de la population a accès à l’énergie, et le pouvoir vise 100% en 2025. Par ailleurs, 227 000 ménages ont bénéficié des filets sociaux avec un transfert de 36 000 F CFA par trimestre.

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LE POUVOIR AMBITIONNE DE CRÉER 8 MILLIONS D’EMPLOIS ET D’ABAISSER LE TAUX DE PAUVRETÉ À MOINS DE 20 % DE LA POPULATION EN MOINS DE DIX ANS

S’il s’est publiquement félicité des progrès enregistrés, le président sait que le gouvernement devra poursuivre ses efforts avec davantage d’intensité pour prétendre à l’émergence à l’horizon 2030. D’ici là, le pouvoir ambitionne de créer 8 millions d’emplois et d’abaisser le taux de pauvreté à moins de 20 % de la population.

La question est de savoir si l’État favorisera davantage les classes populaires dans les prochaines années, alors que la croissance a fortement ralenti en raison du Covid-19 en 2020 (2 %) et qu’elle devrait atteindre 6,5 % cette année. Les transferts sociaux sont encore peu nombreux. Seulement 3 millions d’Ivoiriens peuvent prétendre à la couverture mutuelle universelle (CMU), dont l’efficacité est bridée par la qualité de l’offre de soins, notamment en milieu rural. À la fin de 2020, ce dispositif avait débouché sur la prise en charge médicale de 143 335 assurés.

Recettes houphouëtistes

Pour faire décoller son pays, l’économiste Alassane Ouattara a largement repris les recettes houphouëtistes en misant beaucoup sur l’agriculture. « Il est difficile de comprendre précisément les ressorts de la performance ivoirienne, car la comptabilité disponible n’est pas très détaillée », regrette Denis Cogneau. Selon le chercheur, les sources de la croissance ont  varié suivant les années depuis 2012. Celle-ci est tantôt portée par les exportations de cacao (2016, 2018), tantôt par le décollage de l’anacarde (2018), auxquels on peut ajouter les cultures vivrières (2014). « Cela met en évidence une grande agilité de la part des agriculteurs ivoiriens, et, dans la mesure où ils font partie des ménages modestes, cela constitue une forme d’inclusivité », estime-t-il.

C’est moins le cas pour la croissance reposant, selon les années, sur l’extraction d’or ou de pétrole, les services (2016), la consommation boostée par la hausse du salaire des fonctionnaires, le BTP et les télécommunications (2018). Malgré des progrès réels, Denis Cogneau ne voit, par ailleurs, pas le signe d’une industrialisation importante de l’économie nationale.

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CELA MET EN ÉVIDENCE UNE GRANDE AGILITÉ DE LA PART DES AGRICULTEURS IVOIRIENS

Les raisons sont multiples. Le coût du travail – toujours élevé comparé avec d’autres pays en développement –, l’insuffisant niveau de qualification de la population, des difficultés à mobiliser les capitaux nécessaires et une monnaie forte comptent parmi les principales explications. Les coupures d’électricité enregistrées depuis le mois d’avril dernier constitueraient un obstacle supplémentaire à ce processus si elles devaient se prolonger.

Pression fiscale faible

Le manque de recettes domestiques fait aussi peser un doute sur la capacité de l’État à offrir un modèle plus inclusif. La pression fiscale de la locomotive de l’Uemoa tourne autour de 15 % du PIB, quand le Maroc est à plus de 20 % et qu’il faudrait atteindre 25 %. « Sur ce point, Alassane Ouattara n’a que marginalement redressé la pression fiscale depuis 2011 », affirme Denis Cogneau.

Selon le chercheur, Abidjan se situait, en 2019, derrière Dakar et ne collectait pas plus d’impôts que ne le faisait l’administration à la fin de la période coloniale, alors que la forte croissance du PIB (observée depuis 2012) aurait dû s’accompagner d’une hausse des taxes prélevées. Cela s’explique sans doute par la baisse du poids du commerce extérieur et une tendance à « l’informalisation » de l’économie. En 2014, seulement 6 % des chefs de famille étaient salariés des secteurs publics et privés, contre 17 %, en 1998.

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EN 2019, ABIDJAN SE SITUAIT DERRIÈRE DAKAR EN MATIÈRE DE PRESSION FISCALE

« Pour élargir l’assiette des contributeurs, il faut convaincre une partie de la population de sortir du secteur informel et, pour cela, revoir les taux de prélèvement de ces ménages à la baisse », estime Koffi Christian N’da.

À l’autre bout de l’échelle sociale, le pouvoir doit mieux taxer les plus riches, dont la plupart, non salariés, ne sont donc pas concernée par la retenue des impôts à la source. La tâche est difficile vis-à-vis d’une élite, qui a largement soutenu Alassane Ouattara depuis 2011. Mais le chef de l’État sait que partager les fruits de la croissance est le meilleur moyen d’éloigner un peu plus les fantômes des crises du passé et d’imprimer aux yeux de tous une marque positive dans l’histoire de son pays.

Mali : pourquoi Canal+ fait l’objet d’une enquête de l’Uemoa

| Par Jeune Afrique
Mis à jour le 02 juillet 2021 à 15h30
David Mignot, directeur général de Canal + Afrique, en juillet 2019 à Paris.

David Mignot, directeur général de Canal + Afrique, en juillet 2019 à Paris. © Vincent Fournier/JA

Serge Dergham, patron de Malivision, a saisi l’institution sous-régionale, qui a ouvert une instruction. Il accuse le groupe français de pratiques anticoncurrentielles… Explications.

Au siège parisien de Canal+, l’équipe Afrique dirigée par David Mignot prend son mal en patience. Ses dirigeants attendent l’installation des nouveaux commissaires de l’Uemoa, nommés en avril, pour donner leur version du différend qui les opposent à Malivision. Le groupe audiovisuel malien commercialise dans ses bouquets plusieurs chaînes éditées par la filiale de Vivendi.

Selon nos informations, son actionnaire, le Malien d’origine libanaise Serge Dergham, accuse le groupe français de pratiques anticoncurrentielles depuis qu’il a reçu mi-janvier une mise en demeure.

Nollywood et BeIN Sports

Canal+ lui intime ainsi d’arrêter la diffusion de Nollywood – éditée par le groupe français –, des chaînes beIN Sports – concurrentes de ses programmes sportifs –, et de fournir, comme il s’y était engagé, un certain nombre d’informations relatives à ses abonnés. Il y a quelques années, après de longues tractations, Serge Dergham avait en effet obtenu le droit de commercialiser les chaînes de Canal + sur son bouquet, sous réserve de reverser le prix des abonnements au groupe français, et de lui communiquer mensuellement la liste des numéros d’identification de ses abonnés.

Selon Serge Dergham, Malivision, qui revend les programmes de Canal + à environ 5 000 foyers, rétrocède chaque mois approximativement 100 000 euros à la filiale de Vivendi. Mais d’après une source au sein de Canal+, le groupe malien aurait cessé en 2020 de fournir les données relatives à ses abonnés, laissant craindre un piratage à grande échelle. Si l’entrepreneur malien confirme avoir eu des difficultés à respecter son engagement de manière temporaire, il l’explique par un changement de logiciel et affirme que tout est depuis rentré dans l’ordre. Il se serait aussi engagé à cesser de diffuser beIN Sports.

« Abus de position dominante » ?

Furieux de la décision du groupe français de lui envoyer malgré tout une mise en demeure, Serge Dergham a décidé de porter l’affaire devant l’Uemoa. Il a obtenu avec son associé, Mamadou Sinsy Coulibaly, PDG et fondateur du groupe Kledu, le soutien de Fily Bouaré Sissoko, ex-ministre de l’Économie et commissaire malienne sortante de l’institution sous-régionale. À quelques jours de la fin de son mandat, cette dernière a envoyé un courrier – que Jeune Afrique a pu consulter – aux filiales ouest-africaines de Canal+ et à leurs ministères de tutelles. Dans cette missive de deux pages, elle avertissait de l’ouverture d’une instruction concernant les pratiques du groupe français à l’égard de son partenaire malien.

Serge Dergham reproche notamment à Canal + de vouloir le contraindre à stopper la diffusion de la chaîne Nollywood, pour laquelle il avait signé en 2014 un contrat avec l’éditeur Thema, avant que celui-ci ne soit racheté par la filiale de Vivendi. Une décision assumée par Canal +, qui souhaite garder l’exclusivité de certaines chaînes, afin de différencier son offre de celle de son partenaire. Le groupe français précise par ailleurs que Nollywood n’est pas la chaîne qui génère le plus d’audience.

Pour le dirigeant de Malivision, la décision de Canal+, leader sur le secteur de la télévision payante en Afrique francophone, serait la manifestation d’un abus de position dominante. Dans son courrier daté du 15 mars, Fily Bouaré Sissoko rappelle que la commission a tout pouvoir pour recueillir, auprès des entreprises comme des États, les informations nécessaires pour juger de la réalité de l’infraction. Selon l’article 88 de son traité constitutif, l’Uemoa peut mettre fin à « toutes pratiques d’une ou de plusieurs entreprises, assimilables à un abus de position dominante sur le marché commun ou dans une partie significative de celui-ci ».

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