Dialogue interreligieux

« Lorsque nous travaillons pour les âmes, nous ne pouvons user que de persuasion et d'amour... Nous ne pouvons rien faire tant que nous n'avons pas persuadé les gens autour de nous qu'ils sont aimés... » (Cardinal Lavigerie, 1885)

« Nous croyons qu'en toute religion il y a une secrète présence de Dieu, des semences du Verbe qui reflètent un rayon de sa lumière... » (Chapitre 1967)

« Nous célébrons et partageons cette vie avec Dieu lorsque nous allons à la rencontre des cultures et des religions... nous réjouissant de la foi vivante de ces croyants et les rejoignant dans leur quête de la Vérité, cette Vérité qui nous rend tous libres. » (Chapitre 1998)

Missionnaires, nous sommes appelés à faire les premiers pas pour rencontrer les personnes, qu'elles que soient leurs convictions, leur religion.

Au Burkina Faso, cette réalité se traduit surtout dans la rencontre respectueuse et évangélique avec les adeptes des religions traditionnelles et avec les musulmans.

Dans cette rubrique, nous étudierons divers aspects de ces religions, particulièrement de l'islam.

Rome : déclaration conjointe de chrétiens
et de religions du Dharma – ZENIT – Francais

Il faut intensifier le dialogue et la collaboration

« Manifester que le dialogue et la collaboration sont possibles », rechercher « le bien-être pacifique de tous », s’appuyer sur « les trésors spirituels de nos traditions religieuses et de la commune solidarité humaine » : telles sont certaines des intentions communes exprimées par les représentants des religions chrétiennes et des religions du Dharma réunis à Rome.

En effet, une déclaration conjointe des participants à la Conférence intitulée : « Dharma et Logos. Dialogue et collaboration à une époque complexe. Bouddhistes, chrétiens, hindous, jaïnistes et sikhs », a été signée à Rome, le 15 mai 2018.

Les signataires de la déclaration conjointe ont aussi souligné « l’importance et la nécessité d’augmenter » leur « engagement dans un dialogue commun et dans la collaboration réciproque, dans un esprit d’amour et de vérité » tout en « restant profondément enracinés » dans leurs traditions religieuses respectives.

Voici notre traduction de la déclaration conjointe publiée par le Saint-Siège le lendemain, après la rencontre du pape avec les participants à la conférence.

HG

Déclaration conjointe

Nous, responsables, universitaires et disciples pratiquants du christianisme et des religions du Dharma (bouddhisme, hindouisme, jaïnisme et sikhisme), provenant de l’Italie et de l’étranger, nous nous sommes réunis le 15 mai 2018 pour une conférence intitulée : « Dharma et Logos. Dialogue et collaboration à une époque complexe. Bouddhistes, chrétiens, hindous, jaïnistes et sikhs ». Il s’agit de la première conférence de ce type, qui se tient en Italie et qui a été préparée par une série de rencontres qui se sont tenues pendant une longue période de temps avec la participation de membres du Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux, de l’Union hindouiste italienne, de l’Union bouddhiste italienne, de la Sikhi Sewa Society et de l’Institut des Études jaïnistes de Londres et du Bureau national pour l’œcuménisme et le dialogue interreligieux de la Conférence épiscopale italienne.

Le congrès s’est tenu dans un climat cordial et s’est articulé en différents moments : l’inauguration, quatre sessions académiques et un acte conclusif. Il s’est agi d’une expérience d’enrichissement et d’apprentissage.

Encouragés par les résultats positifs de la Conférence de ce jour, nous, tous les participants, nous voulons affirmer d’un commun accord ce qui suit :

  1. Nous reconnaissons que le fait même de nous rencontrer dans un esprit d’amitié et de respect est un signe de notre désir commun de manifester que le dialogue et la collaboration sont possibles en cette époque complexe.
  2. Nous sommes conscients que la recherche du bien-être pacifique de tous est un témoignage de nos credo religieux respectifs et, en même temps, une conviction que nous partageons.
  3. Nous nous accordons sur le fait que des questions complexes et de graves défis affligent notre monde actuel.
  4. Nous croyons que les trésors spirituels de nos traditions religieuses et de la commune solidarité humaine doivent représenter une aide pour surmonter les épreuves de notre temps.
  5. Nous affirmons que cette conférence interreligieuse a contribué de manière significative à approfondir le respect, la compréhension et la coopération réciproques.
  6. Nous soulignons l’importance et la nécessité d’augmenter notre engagement dans un dialogue commun et dans la collaboration réciproque, dans un esprit d’amour et de vérité, en restant profondément enracinés dans nos traditions religieuses respectives pour être en mesure d’affronter efficacement les défis de notre temps et de construire une culture de la rencontre et du dialogue.
  7. Nous faisons appel aux responsables religieux, aux universitaires et aux disciples de nos religions pour construire des ponts, unir nos mains avec toutes les personnes de bonne volonté pour contribuer et construire la paix dans le monde d’aujourd’hui et de demain.

© Traduction de Zenit, Hélène Ginabat

Source : Rome : déclaration conjointe de chrétiens et de religions du Dharma – ZENIT – Francais

Message du Conseil Pontifical pour le Dialogue interreligieux aux musulmans du monde entier, à l’occasion du début du Ramadan et
de la fête de l’Aïd El-Fitr, qui clôturera ce mois de jeûne.
Chrétiens et Musulmans: de la compétition à la collaboration

 
 Vatican - Le cardinal Jean-Louis Tauran


Vatican – Le cardinal Jean-Louis Tauran (Photo: Paval Hadzinski/Flickr/CC BY-NC-ND 2.0)

Chers frères et sœurs musulmans,

Dans sa Providence, Dieu le Tout-Puissant vous a donné à nouveau l’occasion d’observer le jeûne du Ramadan et de célébrer ‘Id al-Fitr.

Le Conseil pontifical pour le Dialogue interreligieux sait l’importance de ce mois et les efforts déployés par les musulmans à travers le monde pour jeûner, prier et partager les dons du Tout-Puissant avec les pauvres.

Conscients des dons du Ramadan, nous, chrétiens, nous vous rejoignons dans votre action de grâce au Dieu Miséricordieux pour sa bienveillance, sa générosité, et nous vous présentons, en cette occasion, nos meilleurs vœux.

En la circonstance, les pensées que nous aimerions partager avec vous, chers frères et sœurs musulmans, concernent un aspect essentiel des relations entre chrétiens et musulmans: la nécessité de passer de la compétition à la collaboration.

En effet, l’esprit de compétition a trop souvent marqué les relations passées entre chrétiens et musulmans. Ses conséquences négatives sont évidentes: jalousie, récriminations et tensions. Dans certains cas, celles-ci ont parfois conduit à des affrontements violents, notamment lorsque la religion a fait l’objet de manipulations motivées par des intérêts particuliers et des desseins politiques.

Une telle concurrence interreligieuse blesse l’image des religions et leurs adeptes. Elle renforce aussi l’idée que les religions ne sont pas source de paix, mais génératrices de tensions et de violence.

Pour prévenir et surmonter les conséquences négatives qui en dérivent, il est important que nous, chrétiens et musulmans, nous rappelions les valeurs religieuses et morales que nous partageons, tout en reconnaissant nos différences. En témoignant de ce que nous avons en commun et du respect de nos légitimes différences, nous pouvons établir une base solide pour des relations pacifiques, loin de la compétition et de la confrontation, pour fonder une coopération efficace en vue du bien commun. Cette attitude positive constitue une aide à l’égard de ceux qui se trouvent dans le besoin et nous permet d’offrir un témoignage crédible de l’amour du Tout-Puissant pour l’humanité tout-entière.

Tous, nous avons le droit et le devoir de témoigner du Tout-Puissant que nous adorons, de partager nos croyances avec les autres, tout en respectant leur religion et leurs sentiments religieux.

Afin de poursuivre nos relations pacifiques et fraternelles, travaillons ensemble et honorons-nous les uns les autres. Ainsi, nous rendrons gloire au Tout-Puissant et favoriserons l’harmonie dans nos sociétés, toujours plus multiethniques, multi-religieuses et multiculturelles.

En vous renouvelant nos vœux les meilleurs pour un jeûne fructueux et un ‘Id joyeux, nous vous assurons de notre solidarité priante.

Du Vatican, le 20 avril 2018

Jean-Louis Cardinal Tauran

Président

+ Miguel Ángel Ayuso Guixot, M.C.C.I.

Secrétaire

Interview de Mustapha CHERIF, anthropologue, cofondateur musulman du Groupe d'Amitié Islamo-Chrétienne (GAIC), le 16 mai 2018, journée internationale du vivre ensemble

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Interview de Mustapha CHERIF, anthropologue, cofondateur musulman du Groupe d'Amitié Islamo-Chrétienne (GAIC), le 16 mai 2018, journée internationale du vivre ensemble
Interview de Mustapha CHERIF, anthropologue, cofondateur musulman du Groupe d'Amitié Islamo-Chrétienne (GAIC), le 16 mai 2018, journée internationale du vivre ensemble

 Une interview du cofondateur musulman du Groupe d'Amitié Islamo-Chrétienne (GAIC), Mustapha CHERIF (°), qui mérite d'être écoutée, voire diffusée pour semer l'ouverture à l'altérité, respectueuse des diversités comme autant de manières d'exprimer et de vivre des valeurs communes, condition sine qua non d'estime et de paix entre les Humains. L'amour de son pays est dépassé dans le souci de leur entente planétaire.

Béatrix

(°) Docteur d'état ès Lettres en philosophie de l'Université de Toulouse, et docteur en Sociologie de la Sorbonne. Professeur à l'Université d'Alger, il est également Directeur scientifique du Master en Civilisation musulmane à l'Université Ouverte de Catalogne. Spécialiste du dialogue des cultures, des religions et des civilisations. Lauréat du prix UNESCO 2013 dialogue des cultures. 
Il est l'auteur d'une centaine d'articles scientifiques et de nombreux livres traduits en plusieurs langues dont "Rencontre avec le pape" (édit. Albouraq, Paris 2013. 

 
 

À Oran, la chapelle de Santa Cruz rassemble les Algériens (La Croix-Africa)

La bénédiction de l’église Notre-Dame de Santa Cruz, vendredi 11 mai, a permis un petit miracle en réunissant, l’espace d’une journée, une foule multicolore, multilingue et multireligieuse. (Photo Anne-Bénédicte Hoffner)

Après quatre ans de travaux, la communauté chrétienne d’Oran s’est retrouvée pour l’Ascension à la chapelle Notre-Dame de Santa Cruz restaurée. Des amis algériens et de nombreux curieux se sont joints à eux et ont redécouvert ce sanctuaire que l’Église d’Algérie souhaite dédier au « vivre-ensemble ».

Étudiants africains, religieux, religieuses et prêtres venus d’à peu près tous les continents, migrants, expatriés, chrétiens algériens mais aussi « pieds noirs » venus de France et amis algériens musulmans ou simples curieux… Dans une Algérie qui garde les séquelles d’une décennie de violences et qui, aujourd’hui encore, manque cruellement d’occasions et de lieux pour se rassembler, la bénédiction de l’église Notre-Dame de Santa Cruz, vendredi 11 mai, a permis un petit miracle en réunissant, l’espace d’une journée, une foule multicolore, multilingue et multireligieuse.

Un condensé de l’histoire de l’Église d’Algérie

Chose incroyable dans ce pays majoritairement musulman, ce sanctuaire et la statue de la vierge qui le domine – tous deux construits en 1850 pour remercier Notre-Dame du Salut d’avoir mis fin à une épidémie de choléra – sont aujourd’hui encore l’emblème de la ville. Plus incroyable encore, l’ensemble, qui tombait en ruine, vient d’être entièrement rénové par le diocèse avec le soutien des autorités algériennes et d’autres mécènes, et un nouvel autel consacré dans la chapelle.

Rythmée par les chants africains, les applaudissements et les youyous, la messe célébrée dans ce sanctuaire perché sur une colline dominant Oran était un condensé d’histoire de l’Église d’Algérie, « une Église toute petite, qui ne représente presque rien, mais qui rassemble presque tous les continents », a souligné dans son homélie Mgr Jean-Paul Vesco, évêque d’Oran. Une Église capable aussi, malgré ses fragilités, de jeter des ponts au-dessus des « lignes de fracture de l’histoire ».

Une tradition vivace […]

Lire la suite de : « À Oran, la chapelle de Santa Cruz rassemble les Algériens » par Anne-Bénédicte Hoffner, La Croix-Africa, 14/05/18.

Musulmans & non-musulmans. Rencontres et expériences inédites (Compte-rendu)

 

Couverture Musulmans & non-musulmans


Laila AMAHJOUR, Vanessa DELLA PIANA et Véronique HERMAN, Musulmans & non-musulmans. Rencontres et expériences inédites. Préface de Felice DASSETTO.
Edit. CEFOC, Namur décembre 2015, 123 p.

Ce petit ouvrage raconte un certain nombre de relations entre musulmans et non-musulmans dans le cadre des changements profonds qui marquent la société multiculturelle d’aujourd’hui. Il s’agit d’activités et d’expériences de rencontres, vécues et menées par le Cefoc (Centre de formation Cardijn) et « Sagesse au Quotidien » (Association de femmes musulmanes). Ces deux associations belges travaillent déjà ensemble depuis plus de cinq années et veulent, par la formation qu’elles donnent, contribuer à construire « une société nouvelle, qui cherche la voie d’une cohabitation et qui réinvente des modes de vie commune au sein des grands bouleversements que l’on ne voit pas toujours, tant que nous y sommes immergés« , écrit le Prof. Felice Dassetto dans la Préface ( p. 11 ).

Ces rencontres analysent les possibilités, les difficultés, les questionnements et les cheminements au sein de ces groupes de formation en éducation permanente, et essaient ainsi de relever les défis contemporains, que posent aujourd’hui le vivre-ensemble réciproque et la cohésion sociale.

Les échanges, les critiques et les autocritiques, accomplis dans le respect de l’autre et la confiance mutuelle, demandent aux participants un grand travail sur soi, mais c’est, sans doute, la seule voie pour dépasser les controverses et arriver à une société interculturelle faite d’une cohabitation plus juste et plus fraternelle. C’est ensemble que ces hommes et ces femmes sont appelés à bâtir la société de demain.

Chacun des chapitres du texte s’ouvre sur des récits d’expériences, qui mettent en évidence des sources de tensions dans les rapports entre musulmans et non-musulmans. Ces tensions sont ensuite analysées et suivies par une réflexion ancrée dans le concret et le vécu de ces débats et enrichies par des apports plus théoriques.

Plusieurs sujets sont abordés. Ainsi le premier chapitre traite les questions de sens et de spiritualité. On part d’un photolangage sur les convictions . On discute sur les rites de prière quotidienne. On regarde un film sur le sens de la mort au Japon et ses rites. Enfin, on se rend ensemble en visite d’une mosquée et d’une église.

Le deuxième chapitre explore la tension entre un regard réducteur et un regard qui prend en compte la complexité et s’ouvre à autrui. Ainsi on échange sur le voile islamique, sur la sécularisation et l’identité de la personne.

Le troisième chapitre s’ attarde sur la tension, dans la prise en compte du vivre-ensemble, entre un modèle communautariste et une approche interculturelle. On analyse ainsi deux projets interculturels : un repas commun, projet qui provoque l’enthousiasme, mais quand il s’agit de décider si on va servir oui ou non du vin à table, on est loin d’une réponse commune (problème des interdits alimentaires); puis le projet d’une journée de réflexion et de débat sur le vivre-ensemble dans une commune.

Le dernier chapitre – en guise de conclusion – propose une série de réflexions quant à la manière d’aborder les défis et les conflits qui émergent dans les contacts et les rencontres entre musulmans et non-musulmans. En effet, la conflictualité est au cœur de ces démarches.

Les formateurs concluent : « Depuis une cinquantaine d’années, la présence numérique significative de l’islam dans l’espace européen et belge engendre de nouvelles relations entre les individus de culture et de religion musulmane et d’autres issus de l’histoire européenne plus ancienne. Il s’agit d’une nouveauté importante, pour les uns comme pour les autres » (p. 104). Il n’est pas étonnant que cette « nouveauté historique majeure » engendre frottements, tâtonnements et contradictions.

D’une part, on constate que des processus d’insertion, d’intégration et de mixité sont en cours, et c’est heureux et nécessaire. Mais d’autre part, il faut reconnaître que les dernières années une multitude d’éléments ont perturbé cette évolution, aussi bien du côté de l’islam que du côté de la mentalité et de la politique dans les pays européens. Ainsi l’islam est de plus en plus présenté comme un problème, une menace, engendrant l’angoisse et la peur.

Il faut, pourtant, résister absolument à l’affolement, à la peur et à l’exclusion réciproque. Il faut continuer à se rencontrer, à s’écouter et à travailler ensemble, car, individu ou peuple, on se construit avant tout par métissage.

L’étude se termine par un appel aux religions et aux associations pour qu’elles continuent à prendre des initiatives concrètes d’action commune s’adressant à l’ensemble de la société civile, pluraliste et sécularisée. et qu’elles cherchent à stimuler les consciences pour aller ensemble de l’avant et briser la défiance et la méfiance mutuelles. Entre-temps, dans le bouillonnement actuel, ces petits groupes de formation sont déjà comme des laboratoires d’un avenir meilleur.

Hugo Mertens.