Par Solène Leroux
Histoire
Hydrocarbures d'Algérie en 1971
Ce jour-là : le 24 février 1971,
Houari Boumédiène annonce la nationalisation
des hydrocarbures
Suite au refus des compagnies pétrolières françaises de renégocier les prix, le président Houari Boumédiène prend la décision, déjà amorcée, de nationaliser les hydrocarbures algériens. Retour sur ce tournant de l'histoire algéro-française, neuf ans après l'indépendance.
« Il serait plus équitable, pour les investissements dans la recherche pétrolière, que les profits réalisés dans notre pays soient au moins dépensés sur place ! » Ces paroles, prononcées le 24 février 1971 par Houari Boumédiène amorcent la « décolonisation pétrolifère », selon les termes de Benjamin Stora, professeur d’histoire du Maghreb contemporain dans son ouvrage Histoire de l’Algérie depuis l’indépendance (éd. La Découverte, 1994).
À compter de cette date, l’ensemble des gisements naturels de gaz et de pétrole, tout comme les oléoducs et les gazoducs, sont nationalisés.
Un monopole pour la Sonatrach
En devenant le propriétaire exclusif des richesses du sol et du sous-sol, l’État algérien abandonne le système des concessions au profit d’une prise de contrôle à 51 % des deux sociétés pétrolières françaises présentes, Elf (anciennement Erap) et Total (CFP). Suite à cette décision, seul Total, implanté sur le territoire algérien depuis 1952, y reste.
La Société nationale pour la recherche, le transport, la transformation et la commercialisation des hydrocarbures (Sonatrach) détient le monopole sur l’exercice des activités pétrolières à travers l’exclusivité des permis de recherche et concessions d’exploitation. Benjamin Stora voit dans cet acte « une radicalisation des choix stratégiques du pouvoir au plan politique ».
Nationalisation des activités américaines
À l’indépendance, en 1962, la souveraineté de l’Algérie sur le Sahara et ses richesses naturelles est reconnue par des accords de concessions, renouvelés par l’accord d’Alger, le 29 juillet 1965. Ces accords stipulent que les sociétés Total et Elf doivent reverser à l’État algérien une partie de leurs bénéfices sous forme d’investissements ou d’impôts directs.
À LIRE – Algérie – Accords d’Évian : les archives de Jeune Afrique
La création de la Sonatrach, le 31 décembre 1963, ouvre un nouvel horizon aux intérêts français. Alger détient alors 4,5 % des périmètres d’exploration, quand les valeurs françaises atteignent 67,5 %.
"La souveraineté de l’Algérie sur le Sahara et ses richesses naturelles
est reconnue par des accords de concessions"
Après la guerre des Six-Jours en juin 1967, l’Algérie prend la décision de nationaliser les activités américaines de raffinage-distribution de Mobil et Esso. En août 1968, la Sonatrach bénéficie d’une série d’opérations qui lui donne le monopole de la commercialisation des produits pétroliers et le contrôle de l’ensemble du secteur pétrochimique.
Chute des investissements français
Subséquemment, la compagnie algérienne signe un accord le 19 octobre 1968 avec Getty Oil (américaine) qui restitue à la Sonatrach 51 % de ses intérêts en Algérie. Suite à cette entente, « les revendications à l’encontre des compagnies françaises se font plus pressantes » remarque Benjamin Stora.
D’autant plus qu’en 1969 le pétrole algérien représente 20% de la production de Total, et 79 % de la production d’Elf. Près du tiers du pétrole utilisé par l’économie française provient des gisements sahariens, avec 25,4 millions de tonnes, ce qui fait de l’Algérie le premier fournisseur de la France, loin devant l’Irak et la Libye.
Après l’accord avec Getty Oil, Alger dénonce le non-respect des accords algéro-français, chiffre à l’appui : les investissements français chutent de 363 millions de dinars en 1965 à 198 millions en 1968.
Au 30 janvier 1969, la redevance de l’impôt pour les sociétés françaises doit faire l’objet d’une révision, mais est repoussé. Un fait que Boumédiène ne manque pas de rappeler lors de son discours du 24 février 1971 : « les Français ne voulaient pas rediscuter les prix. Nous avons donc pris la décision en tant qu’État souverain et libre, de fixer les prix nous-mêmes. À partir de ce jour, le prix [du baril] passe de 2,08 dollars à 2,85 dollars. »
"Nous avons pris la décision, en tant qu’État souverain et libre,
de fixer les prix nous-mêmes"
Hausses des redevances et impôts
Après l’annonce de la nationalisation, les entreprises étrangères, quelle que soit leur nationalité, ne peuvent plus investir dans des activités de recherche et de production des hydrocarbures liquides sans y associer la Sonatrach. Pour des raisons fiscales, les entreprises doivent également créer une société de droit algérien afin de bénéficier de ces avantages.
Des hausses sur les redevances et les impôts se font graduellement en 1974 et 1975, pour atteindre 20 % sur les hydrocarbures liquides, 5 % pour les hydrocarbures gazeux, et 85 % pour le taux d’impôt direct pétrolier sur les bénéfices de la Sonatrach.
Le prix de référence, base de calcul de la redevance et des impôts, est désormais dicté par l’État algérien, ce qui crée un lourd contentieux avec la France.
Un exemple inspirant
Depuis les années 1970, la dépendance de l’Algérie aux hydrocarbures n’a cessé d’augmenter. La part de la Sonatrach dans la production de pétrole passe de 31 % en 1970 à 56 % en 1971 pour atteindre 82 % en 1980. Dans le courant des années 2000, le secteur représente 40 % du PIB algérien.
>>> À LIRE – Algérie: les revenus pétroliers ont baissé de 70% en deux ans
"L’étatisation des hydrocarbures est la continuité
du recouvrement de l’indépendance nationale"
En 2013, Youcef Yousf,i alors ministre de l’Énergie, revient sur cet acte fondateur, qui constitue « la continuité du recouvrement de l’indépendance nationale. Il y a une indépendance politique acquise en 1962, [qui] devait se traduire par une révolution dans le domaine du développement économique et social. Les nationalisations des ressources naturelles, que ce soit [par] les mines puis ensuite les hydrocarbures, [qui] ont donné au pays les moyens de se développer. »
Embaucher des mossis pour la guerre
Fort de son expérience sénégalaise (voir chapitre 1) et guinéenne (voir chapitre 2), Blaise Diagne part en campagne pour enrôler de nouveaux soldats dans la boucle du Niger. Afin de mettre toutes les chances de son côté, le député s’appuie sur une méthode incompréhensible par certains fonctionnaires du ministère de la Guerre. En effet, Blaise Diagne n’enrôle pas directement les nouvelles recrues. Il vient à leur rencontre lors de grandes palabres orchestrées par ses lieutenants. L’enjeu est de les convaincre de leur nécessaire implication : les enfants de l’Empire français doivent porter secours à la patrie à l’agonie. Et pour gagner leur confiance, et surtout celle de leurs familles, Blaise Diagne a des arguments, auxquels il croit. La République n’a-t-elle pas publié les décrets de sa nouvelle politique à l’adresse des indigènes en janvier 1918 ? C’est ce que souligne le député de la Guadeloupe Gratien Cambace en vantant « la manière » dont Blaise Diagne entreprend sa mission, dans un article pour le Petit Parisien du 12 juin 1918 :
« Pour effectuer dans les colonies ce recrutement, il y a comme en tout, la manière : inspirer confiance aux indigènes, montrer aux chefs d’abord, et par leur intermédiaire aux populations, que la France saurait leur prouver sa reconnaissance, non seulement en paroles, mais surtout par des actes, par l’octroi d’avantages pécuniaires, par l’amélioration des conditions d’existence des indigènes, de leur statut. On ne saurait trop le répéter, les décrets du 14 janvier 1918 inaugurent une politique indigène nouvelle. »
La nouvelle de l’arrivée de la mission Diagne se répand de villes en villages en Afrique occidentale française : Bamako, Bougouni, Sikasso, Bobo-Dioulasso, Diébougou, Boromo, Koudougou, Ouagadougou et encore vers le nord Yako et Ouahigouya. Les populations convergent en direction de leurs cercles respectifs, conduites par leurs chefs et leurs marabouts. Et attendent parfois plusieurs jours celui que l’on surnomme « La voix de l’Afrique ».
Blaise Diagne télégraphie le 16 avril au gouverneur Gabriel Angoulvant, gouverneur général de l’AOF et de l’AEF, qu’il est retardé par l’assemblage des pièces détachées des Ford T. Les voitures sont finalement montées à Bakel, près de la frontière sénégalaise, puis acheminées à Bamako avant la fin du mois… la traversée des anciennes contrées rebelles se fera donc à quatre roues !
L’arrivée de la mission Diagne est spectaculaire. Pour la première fois, un convoi d’automobiles sillonne les pistes africaines de la boucle du Niger. Avec à sa tête un député africain, en costume blanc trois pièces, secondé par plusieurs officiers noirs décorés de médailles. À la vue des populations africaines, Blaise Diagne est reçu comme le plus haut représentant de la République par les autorités coloniales, mais aussi par la chefferie, prête à collaborer si les usages sont enfin respectés. Et c’est toute la stratégie politique du député sénégalais, élaborée grâce aux rapports de ses émissaires envoyés sur le terrain dès 1917. D’après le lieutenant Abd el Kader, fils du fama de Sansanding, missionné officieusement dans les anciennes zones de révoltes situées au nord de Bobo-Dioulasso, c’est moins le principe du recrutement qui est rejeté par les chefs, que la violence de sa méthode, présente à tous les esprits.
Ce sont donc les intermédiaires, les chefs religieux et coutumiers, que les officiers noirs de la Mission vont solliciter. C’est avec eux qu’il s’agit de négocier avant l’arrivée du fameux commissaire de la République.
À chaque palabre, Blaise Diagne en appelle à la responsabilité des chefs et les rappelle à leurs devoirs s’ils veulent prétendre à un nouveau statut.
« En versant le même sang, vous obtiendrez les mêmes droits », c’est la formule qu’il répète avec conviction.
Mais Blaise Diagne ne recrute pas en personne. Ganté de blanc et ceinturé de son écharpe tricolore, il met en scène le recrutement. Une grande opération de propagande comme en attestent ces photographies oubliées et redécouvertes à la faveur de cette enquête.
Palabre à Diébougou
Danses Lobi à Diébougou
Informés par les autorités coloniales du recrutement des tirailleurs décidé par Georges Clemenceau, dont la politique extérieure et intérieure est totalement dédiée à l’effort de guerre, les Pères blancs du village de Réo, situé entre Boromo et Koudougou, savent qu’ils pourront disposer de 50 francs pour gratifier chaque fournisseur de l’enrôlement d’une unité de soldats. Comme toutes les autorités locales, ils sont invités à se déplacer pour accueillir le commissaire de la République Blaise Diagne.
Réo - 9 mai 1918
Extrait du diaire des Pères blancs, dans lequel sont relatés les évènements au jour le jour.
Les Pères Préfets François et Viguier se rendent à Koudougou à l'occasion de l'arrivée de M. Blaise Diagne. Le Commissaire et sa nombreuse suite font leur entrée à Koudougou à 2h30 de l'après-midi en automobiles, neuf en tout, pour eux et leurs bagages. Le gouverneur du Haut Sénégal Niger, M. Brunet, fait partie de la Mission. La circonscription de Koudougou doit recruter 1500 hommes.
M. Diagne fait un long palabre aux chefs de canton et leur fait comprendre qu'il est de leur devoir et de leur intérêt de donner l'exemple en offrant spontanément des membres de leur propre famille (enfants ou frères). On demande des volontaires et M. Diagne fait miroiter à leurs yeux tous les avantages pécuniaires et moraux qu'ils ont à fournir un nombreux contingent de soldats
À la lecture de ces archives religieuses, on peut vérifier que le recrutement à proprement dit ne commence que le mois suivant, alors que Blaise Diagne et son aéropage sont presque arrivés au terme de leur mission. Un recrutement sans vague, alors qu’il se déroule dans une zone particulièrement sensible où vivent un million d’Africains sur 100 000 km². C’est là que l’armée française avait dû concentrer la puissance de ses troupes afin de mettre fin aux révoltes de 1915 et 1916. Mais les Français auraient-ils repris le contrôle de cette zone sans l’appui du royaume Mossi de Ouagadougou et le renfort de sa cavalerie ?
Halte sur la route de Ouagadougou
Sur la route pour Ouagadougou, les neuf automobiles de la mission Diagne font halte, dans l’attente d’une audience au palais du Mogho Naaba. Le commissaire de la République se doit de saluer l’ami des Français, mais il souhaite également exprimer tout son respect à l’autorité d’un roi puissant choisi par l’administration coloniale pour asseoir son pouvoir dans le vaste territoire difficilement contrôlable du Haut-Sénégal-Niger. Comme les autres chefs Mossi, le roi Koom II se doit de montrer l’exemple. Mais comment va-t-il exprimer sa supériorité sur les autres chefs ? Jusqu’où engagera-t-il son peuple ?
Le roi Mossi Koom II et ses ministres
Sur ce cliché unique du Mogho Naaba Koom II, dont on ne connaissait aucune représentation photographique au sein du palais de Ouagadougou, on distingue au centre le Roi en habit de guerre, traditionnellement de couleur rouge, chargé de nombreuses amulettes.
Le Mogho Naaba est entouré de ses Kug Zindba, ses « ministres ». Le deuxième à sa droite est le Baloum Naaba Tanga, en poste depuis 1910, grand conseiller du souverain et proche de la Mission catholique. Au premier plan, prosternés : les sogone (ou soronés) du roi, c’est-à-dire ses serviteurs palatins. On voit aussi un joueur de bendre (tambour royal) et un autre serviteur tenant la Cane du roi.
À sa droite sur l’image, son ministre de la Guerre, le Naaba Pawitraogo à la réputation extrêmement autoritaire.
À gauche, nous voyons un marabout enturbanné. Il est possible qu’il soit le marabout de la cour. Les marabouts qui fréquentaient le royaume Mossi de Ouagadougou étaient le plus souvent des Peuls ou assimilés aux peuls.
Blaise Diagne et le roi Koom II
L’officier Abd el Kader Mademba seconde Blaise Diagne
Ouagadougou - 26 avril 1918
Extrait du diaire des Pères blancs, dans lequel sont relatés les évènements au jour le jour.
« Arrivée à Ouagadougou du lieutenant Mademba, fils du fama de Sansanding, décoré de la Légion d'honneur, de la fourragère, de la croix de guerre avec palmes. Ce jeune homme qui a passé quelques années à la mission de Ségou a tenu à nous rendre visite dès son arrivée. Il fait partie de la mission de recrutement qui a à sa tête le commissaire de la république, M. Diagne, député du Sénégal. Il est envoyé pour préparer le terrain au Commissaire qui doit arriver sous peu à Ouagadougou. »
Ouagadougou - 28 avril 1918
« Le lieutenant Abd el Kader Mademba a commencé son travail et il inaugure bien du recrutement. Il a rendu visite au Mogho Naaba, tous les chefs de canton étant réunis au palais. Le Naaba a écouté avec placidité son discours. Sur l'invitation du lieutenant à lui dire ce qu'il pensait, il a répondu :
"Il y a longtemps que j'ai donné mon coeur à la France et comme je n'en ai qu'un, je ne puis lui en donner un autre."
Pour bien montrer qu'il disait vrai, il (Le Naaba) a donné son frère Djiba Naaba comme tirailleur.
Cet exemple n'a pas tardé à porter ses fruits. Tous les grands naabas, tous les chefs de canton se croient obligés d'en faire autant et ils viennent présenter qui leurs fils, qui leur frère. C'est presque de l'enthousiasme.
Nous recommandons aux chrétiens de ne pas rester en retard et de s'offrir s'ils prévoient qu'ils seront pris. La chose étant ce qu'elle est, nous jugeons que l'intérêt de la mission le demande.
Le Gounga Naaba a présenté son fils Michel, et le Ballom Naaba un des frères, Étienne ou Georges, au choix. »
L’héritier du Mogho Naaba engagé volontaire entre le commissaire de la République et le gouverneur de la Colonie
Allant jusqu’à sacrifier son propre frère, héritier du trône des Mossi, le Mogho Naaba va bien au-delà des précédents recrutements dans son engagement aux côtés de la France combattante. Il implique ses ministres et sa cour et son comportement oblige les autres rois à également sacrifier leurs fils. Mais pour quelles raisons Koom II et ses ministres font-ils ce choix ? Comment le royaume de Ouagadougou peut-il être récompensé d’un tel engagement ?
Guerre 1914-1918 recrutement en Afrique
Blaise Diagne salue les autorités coloniales
Le tout nouveau gouverneur de l’Afrique occidentale française (AOF), Gabriel Angoulvant, accueille Blaise Diagne en soulignant « l’enthousiasme évident suscité dans un grand nombre de milieux autochtones par la présence d'un frère de race parvenu à une haute situation dans le pays ». Un enthousiasme qui fait peur au général Mangin, le théoricien de la « Force noire ». L’initiateur de la mobilisation des Africains depuis le début du conflit mondial se méfie du discours émancipateur de Blaise Diagne. La nomination de ce dernier par Georges Clemenceau, président du Conseil depuis 1917, a déclenché une polémique dans la presse où s’affiche l’hostilité du lobby colonial. Ce à quoi le député Diagne a répondu, le 24 janvier 1918, dans le journal L'Homme Libre :
Ceux qui tombent sous la mitraille ne tombent ni en blancs ni en noirs. Ils tombent en Français et pour le même drapeau. En quoi un noir, membre du Parlement, serait-il moins qualifié qu'un blanc pour parler à des noirs ?
Georges Clemenceau est déterminé. Anticolonialiste, il est prêt à améliorer le statut des Africains, mais le Tigre (le surnom de Clemenceau) est pragmatique, son seul objectif est la guerre et il lui manque 200 000 hommes.
C’est dans cet état d’esprit que Clemenceau relance les recrutements en Afrique ; et s’il désigne Blaise Diagne pour cette mission, c’est justement parce qu’il a conscience de la nécessité de changer de méthode.
Bain de foule dans les rues de Bamako
C’est par la voie du chemin de fer Dakar-Niger, reliant Dakar à Bamako en passant par Thiès, Kayes et Kita, qu’il faut imaginer les premiers déplacements de Blaise Diagne pour organiser les recrutements. Si la ligne n’est pas construite jusqu’à Koulikoro en 1918, elle le sera en 1924 afin de désenclaver la boucle du Niger pour acheminer les matières premières de la colonie vers la métropole via le port de Dakar.
Blaise Diagne est accueilli à Kita
Kita - 20 mars 1918
Extrait du diaire des Pères blancs, dans lequel sont relatés les événements au jour le jour.
« Arrivée à Kita à treize heures de M. Diagne, commissaire de la République, avec sa suite. Il y a aussi parmi eux Abd El Kader, fils du Fama de Sansanding, actuellement lieutenant et décoré de la Légion d’honneur, de la Croix de guerre. Le Père Decottignies a été heureux de revoir ce jeune officier qu’il avait autrefois sous ses ordres au commencement de la guerre, lorsqu’il était chargé des écuries du 2e régiment de tirailleurs à Kati. C’est Abd el Kader qui a été auprès des populations de Kita l’interprète du commissaire Diagne. Le commissaire a donné aux anciens tirailleurs des gratifications variant entre 100 francs et 10 francs. Le Père Bazin et le Père Decottignies ont été présentés à Monsieur le commissaire et Monsieur le gouverneur à la gare, puis à la résidence par Monsieur l’administrateur Sicamois. Vers 15h, le commissaire et sa suite ont repris le train spécial pour Toukoto, où ils avaient l’intention de faire une palabre dans la soirée. »
La foule à Kita attend la palabre
L’arrivée de la mission Diagne, savamment orchestrée, impressionne. Composée de 350 membres, l’escorte incarne toutes les expressions du pouvoir et de la puissance du commissaire de la République.
Trois officiers noirs entourent Diagne : Galandou Diouf, figure politique de Saint-Louis du Sénégal, Dousso Ouologen, originaire de Bandiagara, et le lieutenant Mademba Abd el Kader, fils du fama (roi) de Sansanding.
Au centre, l’officier Mademba Abd el Kader
L’administration coloniale est réquisitionnée. Les commandants de cercle ou les gouverneurs, qu’ils soient militaires ou civils, tous dépendent du député sénégalais, comme en témoignent ces photographies inédites découvertes aux Archives nationales, des photographies dont on ne connaît toujours pas l’auteur, un siècle après…
Bamako, 14 mars 1918. Arrivé par le chemin de fer, le commissaire de la République, mandaté par le président du Conseil Georges Clemenceau, est chargé de recruter de nouveaux tirailleurs par dizaines de milliers. Il se nomme Blaise Diagne et sa réputation le précède. Seul député africain du Parlement, il s’est distingué par l’éloquence de son discours égalitariste. Si le député Diagne entend obtenir le statut de citoyen français pour les indigènes de l’Empire, c’est avec les mêmes droits et les mêmes devoirs. D’où son engagement pour la mobilisation des Africains dans l’ultime recrutement de la Grande Guerre.
Bamako - 17 mars 1918
Dépêche de Blaise Diagne
« Aujourd'hui / Bamako / important palabre.
Mille chefs indigènes des régions / Bamako/ Dédougou / Bobo-Dioulasso et Dori – ces trois dernières provinces révoltées en 1916 – prêtèrent serment fidélité France/ Affirment solennellement leur loyalisme / se déclarent prêts à donner tous les soldats qui leur seraient demandés/ partiraient eux-mêmes si nécessaire.
Ce résultat obtenu après que j’ai défini but mission / précisé politique généreuse inaugurée par décrets janvier 1918.
Tous chefs interprètent geste Gouvernement comme symbole nouvelle politique / justice et confiance à l'égard race noire. »
Le ministère des Colonies transmet les dépêches au ministère de la Guerre. Mais la méthode Diagne suscite de l’incompréhension au sein de la 8e direction du ministère qui se plaint auprès de Clemenceau. Depuis plus d’un mois qu’il est arrivé en AOF, pourquoi n’a-t-il pas commencé à recruter ?
Une première réponse est à trouver dans la façon dont il a fait sensation à Paris dès sa nomination…
24 janvier 1918
Entrefilet dans Le Journal : « La garde noire de M. Diagne »
« Hier, dans la salle des pas perdus, à la Chambre, irruption inattendue d’une théorie de soldats noirs. Cela fit impression.
Ils étaient bien une quinzaine, adjudants et sous-officier, qui suivaient M. Blaise Diagne, député du Sénégal, considérant le lieu avec une curiosité amusée, et riant de toutes leurs dents blanches. »
N’en déplaise aux autres députés, Diagne a choisi de s’entourer de soldats noirs, élevés dans la hiérarchie militaire pour leurs faits d’armes et décorés par la République. Selon l’écrivain Amadou Hampâté Bâ , l’état-major de la mission Diagne de 1918 est composé de jeunes officiers africains « galonnés d’or, gantés de blancs, bardés de médailles et de fourragères ». C’est ainsi que le recrutement est précédé d’une vaste opération de communication.
Une véritable flotte est affrétée pour Blaise Diagne et sa suite. La mission embarque sur d’immenses barges à Bamako sur le fleuve Niger. Mais à Kouroussa, c’est par le chemin de fer de Guinée, nouveau symbole du génie français, que le commissaire de la République poursuit son voyage jusqu’à Conakry. Les gares deviennent les théâtres dans lesquels Blaise Diagne met en scène le faste de ses arrivées.
Fort de sa popularité réaffirmée à Dakar et à Bamako, Blaise Diagne part confiant pour la Guinée française le 27 mars 1918. Il atteint Kouroussa par le fleuve puis reprend le train à partir de Dabola, traverse Mamou et Kindia pour arriver à Conakry le 8 avril 1918. Mais d’après nos sources religieuses, la campagne de Guinée est loin d’être gagnée !
Extrait du diaire des spiritains, dans lequel sont relatés les événements au jour le jour
Kouroussa - 4 avril 1918
« Dans la matinée, arrivée de Diagne, député du Sénégal, commissaire général de la République en Afrique française. La raison du voyage de ce distingué personnage est d’engager les Noirs à se faire tirailleurs pour la défense de notre patrie. Il paraîtrait que sa parole ne produit pas un extraordinaire effet. »
Kouroussa - 11 avril 1918
« Le commissaire de la République, de retour de Conakry, arrive à Kouroussa vers sept heures du matin. L’impression générale de cette visite, auprès des Noirs, n’est guère en faveur de ce représentant de notre gouvernement. L’un ou l’autre griot clamait bien que M. Diagne était désormais le grand « fama » (roi) de la France ; mais quand la population a vu qu’il ne tranchait pas les palabres qu’on lui soumettait, il y a eu des mécontentements et les réclamations n’ont pas manqué. D’abord les femmes des tirailleurs qui sont à la guerre ; ces braves personnes ont trouvé en effet surprenant que M. Diagne, ayant soi-disant pouvoir sur le Gouverneur ‘’jusqu’à le mettre à la porte de la Colonie’’ ne leur fasse pas rendre les allocations qu’elles avaient reçues depuis le début des hostilités. Puis c’était, paraît-il, le tour des anciens tirailleurs valides ou invalides, qui demandaient au député du Sénégal le prix de leur dévouement à la patrie. On comprend facilement que tous ces gens, n’ayant rien obtenu, n’aient pas en odeur de sainteté le commissaire de la République ainsi que les Sénégalais. »
Les notes des pères spiritains traduisent l’époque. Commencée en 1914, la Grande Guerre épuise l’Afrique depuis cinq ans, sur le front et à l’arrière. Si les fils sont enrôlés, leurs familles sont également soumises à l’effort de guerre. Elles sont contraintes de fournir les porteurs et puisent dans leurs récoltes pour nourrir les contingents.
Faut-il encore que la France fasse appel à l’Afrique ? C’est cette exaspération qui s’exprime à travers les revendications des mères et des anciens soldats.
Mais on peut également lire dans ces lignes toute l’hostilité des pères spiritains de Guinée face à l’autorité d’un Africain franc-maçon promu commissaire de la République. Blaise Diagne est en effet un citoyen français, car il est né à Gorée en 1872, l’une des quatre communes françaises du Sénégal. De surcroît, la loi Diagne du 29 septembre 1916 étend à tous les habitants de ces communes (Saint-Louis, Gorée, Rufisque et Dakar) l’exercice de plein droit à la citoyenneté. Et en 1918, devenu commissaire de la République, Blaise Diagne incarne la puissance et le pouvoir de l’État. De fait, il se situe au-dessus de toutes les autorités coloniales de l’Afrique occidentale française, dans un contexte où les relations entre l’Église et l’État sont encore houleuses (à la suite de la loi de 1905 séparant les Églises et l’État). Une provocante remise en question de l’ordre établi dont témoignent ces photographies inédites à la gloire de la campagne africaine de Blaise Diagne.
Diaire des spiritains de Sainte-Marie de Conakry
8 avril 1918
« À 10 h, M. Blaise Diagne, député du Sénégal, commissaire du gouvernement de la République, arrive en gare. Il est accompagné du gouverneur qui est allé à sa rencontre jusqu’à Kouroussa, car il descend du Soudan. Il est reçu avec les honneurs dus au gouverneur général : c’est le maire qui lui souhaite la bienvenue à la gare. Puis il reçoit tous les chefs de service à l’Hôtel du gouvernement. Dans l’après-midi, il fait un long palabre devant l’Hôtel aux chefs indigènes sur l’objet de sa mission : le recrutement de nouvelles troupes noires. Auparavant, il a parlé aux Européens, et il n’est point tombé dans le ridicule, au contraire. Sans doute l’élément blanc est en général froissé dans son amour propre ; mais ce Noir est loin d’être dépourvu, et il est arrivé avec de très grands pouvoirs. »
9 avril 1918
« Nos jeunes gens nous demandent la fanfare pour rehausser le vin d’honneur qu’ils offrent avec les Sénégalais au député du Sénégal. Le révérend père Préfet essaie de leur faire comprendre que les idées politiques de cet homme ne nous permettent pas de le fêter comme s’il était l’un des nôtres. La cérémonie est à 5 h du soir : presque tous les Européens y sont invités par un ‘‘comité indigène’’, qui a été créé à cet effet ; le révérend père préfet et le père supérieur le sont, mais ils ne s’y rendent pas. »
Quelles sont les idées politiques de Blaise Diagne ?
Premier Africain de l’histoire française à siéger au palais Bourbon, il est élu député le 10 mai 1914 dans la circonscription des « Quatre communes » du Sénégal. Surnommé « la voix de l’Afrique », il se pose en représentant de l’ensemble des Africains des colonies françaises.
« Il est pénible pour un indigène comme moi d’entendre, dans cette assemblée, discuter des intérêts et de l’avenir des indigènes, chacun apportant son système et sa conclusion, sans que, jamais, ceux qui auront à subir ou accepter vos décisions puissent faire entendre leur voix ».
Membre du groupe Union républicaine radicale et radicale-socialiste, Blaise Diagne fait partie de la même famille politique que celui qui le choisit pour sa mission de 1918 : Georges Clemenceau. Mais ce n’est pas le seul lien entre les deux hommes. Blaise Diagne est aussi un animal politique. Et tout comme le Tigre (le surnom de Clemenceau), celui que l’on admire ou que l’on moque en l’appelant « la voix de l’Afrique » est profondément attaché à la laïcité et partage les valeurs de la franc-maçonnerie.
C’est ainsi que le combat de Blaise Diagne pour les indigènes de la République est celui d’un intellectuel humaniste, mais assimilationniste. Tout au long de sa campagne africaine, il martèle son appel à rejoindre l’armée française pour la défense de la patrie d’une formule unique :
En versant le même sang, vous gagnerez les mêmes droits.
Diaire des spiritains de Sainte-Marie de Conakry
9 avril 1918
« Deux ou trois jeunes originaires du Sénégal prennent la parole puis c’est Soussou, un ancien de notre mission de Boffa. L’un de ces derniers revendique sottement les grands droits du citoyen français à l’égalité, et s’attire une verte réponse de Diagne, qui lui dit que pour ces droits il faut d’abord les mériter, en remplissant son devoir, et le 1er devoir en ce moment est de servir la France et de verser son sang pour elle. Après ce ‘‘vin d’honneur’’, le député, commissaire du Gouvernement, est reçu à la Loge maçonnique de Conakry. »
Diaire des spiritains de Boffa
12 Avril 1918
« On dit de nouveau nos mers hantées par les sous-marins boches. On dit que la réception de notre député nègre, Diagne, a fait fiasco à Conakry. On dit qu’il y aura un enrôlement général des nègres et des blancs. On dit ! Mais que ne dit-on pas. Dieu bénisse la France et ses armées. »
Génocide au Rwanda
Génocide rwandais: un médecin poursuivi en France
suspendu de ses fonctions
En France, le docteur Twagira a été suspendu de l'hôpital où il travaillait près de Paris, après la protestation de la commission rwandaise de lutte contre le génocide. Ce médecin rwandais avait été condamné, par contumace en 2009 au Rwanda, pour crime de génocide et il est aujourd'hui poursuivi en France pour les mêmes faits, sur la base d'une plainte du collectif des parties civiles pour le Rwanda.
Pour l'avocat du docteur Charles Twagira, la suspension de son client par son employeur est une violation de la présomption d'innocence. Ce médecin rwandais serait, selon lui, accusé à tort par les autorités rwandaises.
« Mon client est mis en examen pour des faits qui sont extrêmement graves, cela est une certitude. Maintenant, il faut regarder le dossier dans son ensemble. Ce sont des plaintes qui sont déposées en France par une association téléguidée par le Rwanda. Le Rwanda est une dictature. En vérité, si vous regardez la plainte qui a été déposée par ce collectif en 2009 contre monsieur Twagira, elle est fondée uniquement sur des documents judiciaires, couverts par le secret, donc normalement, j’imagine aussi au Rwanda, des actions judiciaires, et qui sont des documents officiels, des interrogatoires par des procureurs. Il est encore plus dommage de voir qu’on en arrive à quelques bonnes âmes qui viennent dénoncer la mise en examen de mon client pour pouvoir le faire renvoyer d’un hôpital où il avait été embauché en toute connaissance de cause », estime maître Arthur Vercken.
Pour Alain Gauthier, président du Collectif des parties civiles pour le Rwanda (CPCR), avec ou sans confirmation des accusations, les charges sont trop graves pour laisser Charles Twagira exercer dans un hôpital public français.
« Monsieur Twagira, je ne sais pas dans quelle condition, il a réussi à se faire embaucher. D’après les éléments que nous avons eus, il aurait prétendu qu’il avait été blanchi par la justice. Donc, on estime nous que s’il est poursuivi en justice, mis en examen, quand même pour génocide, il n’a pas de raison qu’il puisse travailler, en tout cas dans des institutions publiques telles qu’un hôpital. Nous avons manifesté un petit peu notre désapprobation lorsque nous avons appris qu’il travaillait dans l’hôpital de Liancourt ».
Et le président du CPCR dément tout un manque de respect de la présomption d’innocence : « C’est le discours que tiennent la plupart des avocats de la défense. Il y a eu trois procès jusqu’à maintenant. Le sérieux de notre travail a toujours été apprécié. Nous, ce que nous souhaitons, c’est que Twagira soit jugé ».
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© REUTERS/RTB via REUTERS TV
L'assaut, donné par les forces spéciales au Splendid Hôtel et au restaurant Le Capuccino, attaqués par des hommes armés depuis vendredi soir, est terminé. Une opération de sécurisation était également en cours dans un second hôtel ce samedi. Le premier bilan fourni par des témoignages recueillis par le directeur du principal hôpital de Ouagadougou fait état d'au moins « une vingtaine de morts ». Les attaques ont été revendiquées par Aqmi. Retour sur l'événement.
Le ministère de l’Intérieur a donc annoncé, ce samedi 16 janvier dans la matinée, la fin de l'assaut au Splendid Hôtel, l'un des principaux établissements de Ouagadougou, la capitale burkinabè. Au même moment, l’opération s’est également terminée au café-restaurant Le Cappuccino, situé en face de l'hôtel et lui aussi ciblé par les tireurs. Le président Kaboré s'est déplacé, ce samedi, à l'hôtel Splendid, principal théâtre de l'assaut jihadiste.
C'est sur la terrasse de ce dernier qu'ont été retrouvés une dizaine de corps par les sapeurs-pompiers. Il s'agit là du premier bilan officiel fourni par les autorités burkinabè. Il n'y a pour le moment pas de chiffre concernant l'hôtel, mais selon des témoignages recueillis par le directeur du principal hôpital de Ouagadougou, il y aurait au moins « une vingtaine de morts ».
Des opérations se poursuivent en revanche dans un hôtel voisin, le Yibi, a affirmé le ministre de la Sécurité, Simon Compaoré.
Pour l'heure, 126 personnes ont été libérées et 33 blessés ont été évacués selon le ministère de l’Intérieur. Il a également confirmé la mort de trois jihadistes, tués au cours des opérations.
Vendredi soir, à 19h30 TU, des tirs multiples et des détonations retentissent. Des véhicules garés devant l'établissement explosent et plusieurs hommes cagoulés, arrivés à bord de 4X4, font irruption dans l'hôtel, situé sur l'avenue Kwame Nkruma.
Le groupe al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) a revendiqué l'attaque, selon SITE, le centre américain de surveillance des sites islamistes.
Un Conseil des ministres extraordinaire aura lieu ce samedi matin avec le président Roch Marc Christian Kaboré.
L'assaut a duré plus de sept heures
Les assaillants, dont on ignore toujours le nombre exact - 3 ou 4 selon des témoins - s'étaient retranchés dans l'hôtel avec des otages. « Le quartier est bouclé et les dispositions sont prises pour lancer l'assaut et libérer les otages », expliquait vers 22h TU Alpha Barry, le ministre des Affaires étrangères burkinabè.
L'assaut a finalement été donné aux alentours d'1h30 (heure locale et TU). La nuit et la configuration du quartier, en construction, ont rendu difficile une intervention rapide, les forces de sécurité avançant lentement vers l'hôtel.
« L'assaut a commencé », avait également indiqué l'ambassadeur de France, Gilles Thibault, sur Twitter. « Les différentes composantes des forces armées et de sécurité se sont réparti les missions », a-t-il affirmé.
Des forces spéciales françaises sont stationnées en banlieue de Ouagadougou dans le cadre de la lutte antijihadiste dans le Sahel. Les Etats-Unis, qui disposent également de 75 militaires dans le pays, ont indiqué apporter un soutien aux forces françaises autour de l'hôtel.
L'ambassade de France a mis en place une cellule de crise pour ses 3 500 ressortissants qui vivent dans le pays. Le président François Hollande a dénoncé une « odieuse et lâche attaque », confirmant par ailleurs le soutien des forces françaises aux forces burkinabè.
"J'ai vu trois ou quatre individus cagoulés et armés qui se sont introduits dans l'hôtel et après ça s'est mis à tirer, et les gens ont commencé à crier et à fuir"
Témoignage
Fréquenté par des Occidentaux
Concernant le déroulé de l'attaque, selon un journaliste joint sur place par RFI, deux véhicules ont explosé devant l'hôtel, à 19h30 TU. Il dit avoir vu deux pick-up prendre feu. Ces deux explosions ont ensuite enflammé une dizaine d'autres véhicules, selon l'AFP.
Le Splendid Hôtel est l'un des principaux hôtels du centre de Ouagadougou, prisé par les Occidentaux et le personnel des agences onusiennes. L'aéroport est tout proche. Des séminaires y ont régulièrement lieu.
On ne sait pas combien de clients et de membres du personnels se trouvaient à l'intérieur au moment de l'attaque.
Qui sont les assaillants ?
Selon les premières informations, trois ou quatre hommes armés et encagoulés se sont ensuite engoufrés dans l'établissement.
Le groupe jihadiste al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) a revendiqué l'attaque, selon SITE, une organisation américaine qui surveille les sites internet islamistes. Selon SITE, Aqmi a posté un message sur la messagerie Telegram, attribuant l'attaque au groupe islamiste al-Mourabitoune qui a récemment rejoint ses rangs.
Alpha Barry
Le restaurant Cappuccino également visé
Outre le Splendid Hôtel, un café-restaurant situé juste en face et également fréquenté par une clientèle étrangère, le Cappuccino, a également été la cible des tireurs. Un employé du restaurant, cité par l'AFP, évoque « plusieurs morts ». Le ministre burkinabè de l'Intérieur fait état d'une dizaine de corps retrouvés sur la terrasse du restaurant.
Le Burkina jusque là épargné
Cette attaque est inédite dans la capitale burkinabè, même si le pays, membre du G5 Sahel consacré notamment à la lutte antiterroriste et « point d'appui permanent » de l'opération française Barkhane, a déjà été la cible d'opérations jihadistes.
Elle survient plus de deux mois après un assaut de jihadistes contre l'hôtel Radisson de Bamako, le 20 novembre, au Mali. La prise d'otage avait fait au moins 21 morts, dont deux assaillants. Elle avait été revendiquée par deux groupes jihadistes : al-Mourabitoune de l'Algérien Mokhtar Belmokhtar et le Front de Libération du Macina. Pendant plusieurs heures, les assaillants avaient retenu en otage quelque 150 clients et employés. Les forces maliennes, appuyées par des forces spéciales françaises et américaines et des agents de l'ONU avaient réussi à exfiltrer 133 personnes.
Cette attaque survient dans un contexte que certains habitants décrivent comme étant pourtant calme. Depuis la mise en place du nouveau gouvernement, la vie reprenait son cours, comme l'explique cette résidente française.
Tout le monde reprenait son train de vie quotidien, on recommençait à apprécier les lieux de vie nocturnes, que ce soit les maquis, les restaurants, les salles de spectacle, les théâtres etc. Et c'est vrai que là je suis meurtrie dans mon corps.
Témoignage d'une résidente française à Ouagadougou
Une attaque à la frontière malienne
Par ailleurs, un communiqué de l'armée burkinabè a indiqué qu'une attaque contre un convoi de gendarmerie avait fait deux morts plus tôt vendredi après-midi, dans le nord à la frontière avec le Mali.