Histoire

Actuel Moyen Âge : le Crac des Chevaliers,
histoires d’un château fort (The Conversation)

La Cité de l’Architecture et du Patrimoine consacre en ce moment une exposition au Crac des Chevaliers, célèbre forteresse édifiée au cœur du Comté de Tripoli au XIIe siècle.

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Le Crac des Chevaliers.
Wikipédia

Florian Besson, Université de Lorraine

Le château fort idéal ?

L’exposition retrace rapidement l’histoire de ce lieu : occupé depuis l’Antiquité, le site est fortifié au XIe siècle par une garnison de Kurdes, d’où son nom de Hisn al-Akrad (le château des Kurdes), dont les Latins feront le Crac. La forteresse est prise par Tancrède, alors régent d’Antioche, en 1110, avant de passer sous l’autorité du comte de Tripoli. Celui-ci la concède en 1142 à l’Ordre de l’Hôpital, car elle coûte trop cher à entretenir : ce sont les Hospitaliers qui lui donneront son nom de Crac des Chevaliers. L’exposition passe un peu trop vite sur le contexte historique et géographique de sa création, et on comprend mal notamment l’extrême importance stratégique du lieu : contrôlant la trouée de Homs, qui relie Damas au littoral, il est d’autant plus important qu’il est connecté à d’autres forteresses latines par des réseaux de feux d’alarme.

De cette puissante forteresse, il ne reste, aujourd’hui que le squelette, bien abîmé par les siècles. Les pierres sont érodées, les murs couverts de mousse, le sol de sable. Quand on se rappelle que le château accueillait une garnison de plusieurs centaines d’hommes, on est pris d’un vertige : où sont ces vies d’antan ? Une inscription célèbre, en latin, orne la galerie : « à toi la richesse, la sagesse et la beauté, mais garde-toi de l’orgueil qui gâte tout ce qu’il touche ». L’inscription parle-t-elle de l’ordre religieux, rappelant à ces chevaliers-moines la nécessaire humilité, ou du Crac lui-même ?

Une inscription latine au Crac des chevaliers.
Wikipédia

Un squelette, donc ; mais quel squelette ! Les maquettes, les photographies et les plans présentées dans l’exposition mettent en évidence l’ampleur des fortifications : une triple enceinte, des murs épais de plusieurs mètres, de nombreuses tours…

Le Crac tel qu’il était au Moyen Âge.
Guillaume Rey: Étude sur les monuments de l’architecture militaire des croisés en Syrie et dans l’île de Chypre (1871)., CC BY-SA

La visite virtuelle proposée à la fin de l’exposition vaut à elle seule le détour. Le regard glisse dans le Crac, s’insinue par les fenêtres, fait le tour des salles voûtées, porté par une invisible caméra. On relève notamment une parenté évidente avec le complexe des Hospitaliers à Acre, qui souligne l’existence d’une archéologie proche-orientale clairement distincte de celle qui existe en Occident au même moment.

Ce que l’exposition montre bien, c’est que Le Crac est un château qui n’existe pas, tant il fut transformé, recréé, complété. Chaque génération y ajoute ses tours, son enceinte, y appose sa marque. Au XIIIe siècle, il subit l’influence de l’architecture française : tours rondes philippiques, galerie gothique vers 1250. Les Mamelouks y ajoutent un hammam. Sur les murs, les inscriptions en latin dialoguent avec des phrases en arabe. A l’époque contemporaine, les visiteurs y ajoutent des échafaudages, des poutres, et même, en 1929, une voie ferrée pour déblayer la salle souterraine voûtée.

Le Crac est un château célèbre, y compris à l’époque médiévale. S’il fait rêver, c’est aussi parce qu’il correspond à l’archétype du château. Ses tours altières se détachent sur l’horizon, sa silhouette se découpe sur la crête de la montagne… Les médiévaux auraient été ravis de constater la fascination profonde qu’il exerce encore sur nos imaginaires, car un château est fait pour ça : marquer les esprits, au moins autant que contrôler les territoires.

Un lieu patrimonialisé

Au XIXe siècle, le château est largement oublié : un village s’installe même en plein milieu, réutilisant les pierres pour édifier des maisons. Le Crac va être redécouvert – et réinventé – par des voyageurs occidentaux, à partir des années 1870, en pleine vague orientaliste. Il est par la suite un lieu important de recherches archéologiques et notamment d’expérimentations : le révérend père Antoine Poidebard est ainsi l’un des pionniers de l’archéologie aérienne, notamment autour du Crac.

Ce qui est intéressant, c’est que ce regard fasciné « fige » immédiatement le lieu, qui devient d’un seul coup du patrimoine. Or cette patrimonialisation n’est pas neutre : elle est étroitement connectée à la colonisation du lieu par la France. Paul Deschamps, l’archéologue qui a le plus contribué à faire connaître le Crac, en réalise plusieurs maquettes pour l’Exposition Coloniale de 1931. Dans sa pensée se mêlent une appropriation personnelle – il parle ainsi de « mon Crac des chevaliers » – et une appropriation nationale du lieu : c’est lui qui persuade la France d’acheter le château.

Maquette exécutée au 1/100e sur les plans de François Anus, par le sculpteur M. Prévost. Elle fut présentée à l’Exposition coloniale internationale de Paris en 1931 dans le pavillon de la Syrie et du Liban. Elle fut ensuite déposée au Musée de sculpture comparée du Trocadéro à Paris.
Site du ministère de la Culture

L’entremêlement des enjeux archéologiques, touristiques et patriotiques souligne à quel point l’exploitation économique et culturelle des colonies vont de pair : en 1931, une affiche invite par exemple à « visiter la Syrie » en utilisant l’image du Crac.

La Syrie et le Liban, Pays de tourisme et de villégiature, Le Krak des Chevaliers.
Jean Picart le Doux (1902-1982), Imprimeur Fernand Mourlot, Paris, 1935 © Paris, Musée des Arts Décoratifs © Adagp, Paris, 2018

Une note du ministère des Affaires étrangères rappelle que ce patrimoine peut pousser les « hommes cultivés » à visiter la Syrie, et que « les hommes cultivés sont quelquefois riches ». Le patrimoine archéologique fonctionne clairement comme une ressource dans laquelle la métropole vient puiser, pour son propre enrichissement.

Un savoir colonial

La provenance des documents s’avère, à cet égard, tout aussi instructive que leur nature. Photos de l’Ecole Biblique de Jérusalem, photos et plans des archéologues occidentaux mandatés sur place, tableau fait pour le général Henri Gouraud, haut-commissaire de la France au Levant entre 1919 et 1923 : c’est tout l’empire colonial, dans la diversité de ses acteurs et de ses rouages, qui se donnent à voir en creux, en bas des cartels de l’exposition. On distingue bien, en particulier, le rôle clé de l’armée. C’est le général Weygand qui fait appel à Jean-Charles Dural, le général Henri Gouraud à Camille Enlart. La fabrique du savoir archéologico-historique est indissociable de la colonisation.

Le regard porté sur le Crac participe pleinement de la fabrication de cette « plus grande France » que l’on fait rayonner non seulement dans l’espace mais aussi dans le temps. Car c’est bien ce que l’on s’approprie avec le Crac : un lieu, mais aussi, et probablement surtout, une histoire. Ce n’est pas un hasard si René Grousset publie le premier tome de son Histoire des croisades et du royaume franc de Jérusalem en 1934 : l’ouvrage, qui connaît un vif succès, fait des croisades le prélude d’une colonisation française présentée comme bonne et efficace. Selon une citation apocryphe, le général Gouraud, entrant à Damas en 1920, aurait déclaré, devant la tombe de Saladin, « Nous voici de retour, monsieur le sultan ! ». Les photos montrant des soldats français posant fièrement dans le Crac, ou ce film les montrant en train d’y défiler lors de la procession des Rameaux, sont extrêmement symboliques : se joue là une revanche de l’histoire.

Soldats des troupes spéciales du Levant affectés au déblaiement du Crac des Chevaliers.
Paul Deschamps, autochrome, 1929 © Charenton-le-Pont, Médiathèque de l’architecture et du patrimoine/ Dist. RMN-Grand Palais

Le Crac est célébré comme un chef d’œuvre français, dont l’existence souligne la grandeur éternelle de la civilisation française, en même temps que comme un signe presque prophétique, venant, à des siècles de distance, légitimer la colonisation du Proche-Orient.

Et aujourd’hui, que reste-t-il du Crac ? Une photographie présentée à la fin de l’exposition met en évidence, sur le mode avant/après, l’ampleur des destructions subies durant le conflit syrien.

Orthophotographie : la galerie gothique avant et après les bombardements de 2013-2014.
Image élaborée par Iconem sur la base de données fournies par l’Unesco © Unesco.

Ces dommages sont immédiatement resémantisés comme des « dégradations » qu’il s’agit d’effacer au plus vite – alors même que l’histoire du Crac souligne bien qu’il n’existe pas d’état idéal vers lequel il conviendrait de le « restaurer ». Cette présence discrète du conflit est assez révélatrice : comme s’il suffisait de remonter un mur, de reconstruire une arche pour panser les blessures d’une société déchirée par elle-même, dans l’indifférence totale de l’Occident. Indifférence aux hommes, en tout cas, car nous nous soucions des pierres : les temples de Palmyre, les murs du Crac semblent nous toucher davantage que les hommes et les femmes qui souffrent tout autour. Notre compassion est pétrifiée, au sens propre du mot. Cette fascination exclusive pour les pierres, les médiévaux l’auraient probablement moins comprise : car ces coquilles de pierre que sont les châteaux sont faites avant tout pour protéger les hommes et les femmes qui vivent dans les vallées et peuvent y trouver refuge. Il faut dire qu’il sera plus simple de restaurer le Crac que de reconstruire la Syrie ; mais il conviendrait peut-être de ne pas oublier que l’essentiel de l’histoire d’un pays réside dans son peuple, plus que dans ses ruines.


Pour aller plus loin, retrouvez la thèse de Florian Besson sur
« Les barons de la chrétienté orientale. Pratiques du pouvoir et cultures politiques en Orient latin (1097-1229) »
The Conversation

Florian Besson, Docteur en histoire médiévale de l’Université Paris-Sorbonne et ATER à l’Université de Lorraine (Metz), Université de Lorraine

This article is republished from The Conversation under a Creative Commons license. Read the original article.

Octobre 1988 : les secrets d’un « printemps ­algérien »

| Par - envoyé spécial à Alger

Une édition enrichie de l’ouvrage référence de Sid Ahmed Semiane sur les événements d’octobre 1988 paraît à la fin du mois. En voici, en exclusivité, les bonnes feuilles.

Octobre 1988. Des émeutes d’une extrême violence secouent plusieurs régions de l’Algérie, obligeant le président Chadli Bendjedid, au pouvoir depuis dix ans, à faire sortir l’armée des casernes pour rétablir l’ordre. Le bilan est lourd. Le traumatisme l’est tout autant. Révolte spontanée ou complot ourdi par un clan au pouvoir ? Tortures ordonnées et couvertes par l’État ou simples dépassements d’agents devenus incontrôlables ? Trente ans plus tard, toutes les vérités n’ont pas été dites sur cet épisode qui signa la fin du système du parti unique – le FLN – et ouvrit la voie au pluralisme.

Les protagonistes sont aujourd’hui décédés, âgés ou astreints à un devoir de réserve en vertu d’une loi de 2016. L’écrivain et journaliste Sid Ahmed Semiane (SAS) a eu accès à ces témoins privilégiés. Une première fois pour un ouvrage de référence publié en 1998, intitulé Octobre. Ils parlent, dans lequel il confessait responsables politiques et militaires, acteurs de l’opposition et victimes.

Une nouvelle édition sortira fin octobre chez Barzakh, enrichie de témoignages, d’éclairages et de documents. L’ouvrage original n’aurait pas vu le jour sans le concours de l’avocat Miloud Brahim, dont l’entregent et le carnet d’adresses ont permis d’entrouvrir les portes du sérail et de convaincre les responsables civils et militaires de livrer enfin leurs versions des faits. Une gageure tant ces hommes cultivent le secret, la confidentialité et l’omerta.

Voyage au cœur du pouvoir

Le général-major Larbi Belkheir, chef de cabinet de la présidence en octobre 1988, et le général-major Lakehal Ayat, chef du renseignement à l’époque, ont accepté de revenir sur le contexte entourant ce « printemps ­algérien ». EI-Hadi Khediri, alors ministre de ­l’Intérieur, sur les accusations de torture. Le général Khaled Nezzar, commandant des forces terrestres, chargé du maintien de l’ordre durant l’état de siège décrété le 6 octobre, fut le premier à témoigner en 1998.


Sachez que si vous ne faites pas l’Histoire, elle se fera contre vous, lance Sid Ahmed Semiane  à Nezzar

Nezzar se prêta alors au jeu des questions-réponses pendant sept heures. Mais le 25 juin 1998, l’assassinat du chanteur Matoub Lounès manque de faire capoter le projet du livre. Au lendemain de ce crime qui embrase la Kabylie, Nezzar décide de retirer son témoignage. « Le pays va mal, explique-t-il à son confesseur. Ce n’est pas le moment de parler. » Le journaliste insiste. Le témoignage de Nezzar, dont l’ascendant moral sur les civils et les militaires est évident, est la clé de voûte de l’ouvrage. Si lui se défile, personne n’acceptera plus de parler.

« Sachez que si vous ne faites pas l’Histoire, elle se fera contre vous », lance SAS. Nezzar se laisse convaincre. D’autres personnalités firent le choix du silence, comme le président Chadli, impossible à approcher après qu’il eut quitté ses fonctions avec fracas en janvier 1992, et qui emporta ses secrets dans la tombe vingt ans plus tard. Mouloud Hamrouche, secrétaire général de la présidence en 1988, refusa aussi de témoigner. Le ­général Mohamed Bétchine, chef de la direction centrale de la sécurité de ­l’armée ? Il posa une condition : ne pas évoquer la ­torture contre les manifestants et opposants.

Octobre. Ils parlent est un voyage saisissant et documenté – 500 pages –  dans les arcanes du pouvoir. Une plongée fascinante et bouleversante au cœur de ces événements qui changèrent le cours de l’histoire de l’Algérie.


Combien de morts ?

Selon le bilan établi le 12 octobre 1988 par la gendarmerie nationale, 169 personnes – 144 civils et 25 membres des services de sécurité – ont perdu la vie durant les événements. La vox populi évoque, elle, de 500 à 1 000 morts. C’est ce chiffre qui est repris partout, ce que déplore Khaled Nezzar, chef du commandement terrestre à l’époque des faits.

Selon lui, l’armée avait communiqué aux médias un bilan officiel lors d’une réunion tenue sur les hauteurs d’Alger. « Aucun journaliste n’a rapporté le contenu de notre conférence », déplore le général-major.

La date du 18 octobre est importante
pour les Missionnaires d'Afrique qui célébrent
le 150ème anniversaire de leur fondation, car les premiers candidats sont arrivés à cette date
avec l'ouverture le 19 octobre 1868 du premier noviciat.

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[Tribune] Thomas Sankara,
la construction médiatique d’un mythe

|

Par

Cheikh Ahmadou Tidiane Mané est étudiant à l'Université Cheikh Anta Diop de Dakar et à l'Université Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines de Paris, respectivement dans le domaine de l'égyptologie et de l'histoire des médias.

Les médias ont fortement participé à l'émergence du mythe de Thomas Sankara, président du Burkina Faso assassiné dans des conditions qui demeurent en partie obscures, le 15 octobre 1987.

L’accaparement des pouvoirs par « une bourgeoisie locale incarnée par les dirigeants » (1), l’apparition des dérives, des dictatures un peu partout en Afrique post-indépendance, ont inauguré l’ère des coups d’État et de la « nécro-politique » (2).

Mais un homme émergea dans cette jungle pour prêcher l’espoir : « Il s’appelait Sankara », président du Burkina Faso de 1983 à 1987, élevé au rang de mythe par la jeunesse panafricaine à côté des Patrice Lumumba, Kwamé N’krumah, Nelson Mandela, etc.


>>> À LIRE : « Captain Africa » : le mythe Sankara sur un continent en panne de héros


Les médias ont joué un rôle très important dans la construction du mythe Sankara. Les archives médiatiques conservées à l’Institut national de l’audiovisuel français (INA) sont devenues des sources incontournables pour comprendre cette construction mémorielle. Les bases de données de l’INA, entre la date du 5 août 1983 (accession de Sankara à la tête du Burkina) et celle du 29 novembre 2017 (visite officielle du président Emmanuel Macron au Burkina), renferme 81 sujets télévisés et 279 sujets radio sur Sankara.

Sankara incarnait l’espoir d’un nouveau type de dirigeant africain qui allait changer le cours de l’histoire et mener l’Afrique vers les sommets

France 2 pour la télé (37 sujets) et RFI pour la radio (204 sujets) ont produit l’essentiel de ces représentations médiatiques. 35 des sujets de France 2 se situent entre le 5 août 1983 et le 15 octobre 1987 (assassinat de Sankara). RFI a produit l’essentiel des sujets radio entre 1983 et 2017. Le 29 août 2008, les révélations de l’ancien chef de guerre libérien Prince Johnson sur le rôle que ce dernier a joué avec Charles Taylor (avec l’aval, dit-il, de Houphouët-Boigny) dans la mort de Sankara marquaient le départ d’une intense décennie de représentations médiatiques du « Che africain » par RFI.

À côté de ces médias audiovisuels, la presse écrite, notamment grâce à Jeune Afrique, a également joué un rôle incontournable dans cette construction mémorielle. Des médias qui se sont intéressés à Thomas Sankara avant et après sa mort, Jeune Afrique reste le seul à avoir tenu un discours cohérent et fidèle sur le capitaine. Béchir Ben Yahmed a d’ailleurs immédiatement présenté la mort de Sankara comme « un rêve brisé » (cf ci-dessous) car celui-ci incarnait l’espoir du nouveau type de dirigeant africain qui allait changer le cours de l’histoire et mener l’Afrique vers les sommets. (3)

revebrise

La vision panafricaine avait fait naître un réel amour entre Sankara et Jeune Afrique (cf ci-dessous les deux numéros spéciaux de JA sur la mort de Sankara). Les nombreux sujets de Sennen Andriamirado attestent de la confiance qui existait entre lui et le président révolutionnaire. Parmi les journalistes, nul ne le connaissait mieux que celui qui fut le premier à écrire des livres sur Sankara de son vivant et juste après sa mort : Sankara le rebelle, en 1987, et Il s’appelait Sankara, en 1989, tous deux publiés par Jeune Afrique.

L’auteur comparait Sankara à ces grands leaders panafricains, Patrice Lumumba et Kwame Nkrumah, qui l’avaient précédé. « Le rêve, la foi, l’éloquence et peut-être aussi la prescience. Si la sincérité de Sankara ne fait aucun doute et séduit, son message est cependant celui d’un autre âge, à venir », affirmait Sennen.


>>> À LIRE : Thomas Sankara : derniers instants, derniers témoins, derniers secrets… par Sennen Andriamirado


Cet autre âge est venu, le mythe Sankara inspire aujourd’hui plus que jamais la jeunesse panafricaine qui s’est approprié son combat et vivifie son mythe à travers la musique, le théâtre, le cinéma, les bandes dessinées, la photographie, les tags, etc.

L’impact médiatique de Sankara sur la jeunesse a donné raison à Sennen Andriamirado, qui avait prophétisé la victoire du capitaine après sa mort. La rapidité avec laquelle il voulait changer les conditions de vie de son peuple l’avait conduit au milieu de la jungle, à la merci des fauves. Mais ses idées ont survécu, en partie grâce aux médias et aux journalistes. Ses prophéties se sont réalisées : « Tuez Sankara, des milliers de Sankara naîtront ».

De fait, des milliers de Sankara ont renversé le régime de Blaise Compaoré et portent aujourd’hui le combat contre l’impérialisme pour l’indépendance et la dignité de l’Afrique.


  1. L’Afrique noire de 1800 à nos jours, Coquery-Vidrovitch et Moniot
  2. Notion faisant référence aux formes de pouvoir et de souveraineté qui ont pour caractéristique la production de la mort à grande échelle, cf Achille Mbembe in Nécropolitique
  3. Jeune Afrique, Une expérience panafricaine. Entretien avec Béchir Ben Yahmed, Le Temps des médias, Dakhlia J. et Robinet F.

Nous célébrons en 2018 le 150èe anniversaire de la fondation
de la Société des Missionnaires d'Afrique.
Pour plus de précisions à ce propos, un article
paru dans Voix d'Afrique du mois de septembre 2018

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