Fabien Eboussi Boulaga, célèbre philosophe et théologien camerounais, est mort samedi 13 octobre, à l’âge de 84 ans. Depuis cette date, les témoignages sur la vie et l’héritage de cet ancien prêtre jésuite retourné à l’état laïc, affluent.
Trois intellectuels africains, les philosophes camerounais Achille Mbembe et François-Xavier Akono et le théologien jésuite tchadien Rodrigue Naortangar expliquent à La Croix Africa son héritage humain, philosophique et théologique.
« Le premier contact avec Eboussi Boulga, c’était avec sa pensée dans le cours de philosophie que j’ai eu au Petit Séminaire Saint Paul de Nylon de Douala, raconte le prêtre jésuite François-Xavier Akono, docteur en philosophie. Monsieur Ntep, notre professeur d’alors, nous enseignait dans un cours de philosophie, sa pensée et celle d’autres philosophes d’Afrique. »
Comme lui, de nombreuses générations de Camerounais et plus généralement d’Africains ont étudié, au secondaire ou à l’université, l’œuvre d’Eboussi-Boulaga, philosophe et théologien, ancien prêtre jésuite sorti de l’état clérical. « C’était un homme d’une extraordinaire probité et droiture, un véritable esthète, témoigne un autre philosophe camerounais, Achille Mbembe. Il aura mené une vie ascétique, se contentant de très peu, et pratiquant une exigeante hygiène de l’esprit. »
Comme théologien, Fabien Eboussi Boulaga s’est surtout illustré pour ses prises de position qui, parfois, dérangeaient. Il était, en effet, un grand critique de la théologie des missionnaires ce qu’il a exprimé dans son célèbre article « La démission » publiée en 1974 et dans son livre « Christianisme sans fétiche » (1970).
« Quand il parlait de ’’christianisme sans’’ fétiche, il voulait dire qu’il y a, dans le christianisme, quelque chose qui fonctionne comme nos religions traditionnelles. C’est-à-dire, si mon fétiche est plus fort que le tien, alors, j’ai droit à un certain nombre de privilèges et de droits », explicite le père Rodrigue Naortangar, théologien jésuite qui a consacré sa thèse de théologie (1) au modèle christique d’Eboussi Boulaga comme base africaine pour le questionnement sur la théologie de la révélation.
Boulaga n’avait pas perdu sa foi, il la questionnait
Aux yeux du père Rodrigue Naortangar, Boulaga a nourri la théologie africaine de deux apports essentiels. Tout d’abord, il a pensé le concept de Révélation, en contexte africain, de manière radicale. Ensuite, il a lancé l’idée d’un Concile africain exprimant la nécessité d’une réflexion en profondeur sur le christianisme en Afrique, en lien avec les défis qui se posent au continent.… Lire la suite: L’héritage théologique et philosophique d’Eboussi Boulaga, ancien prêtre jésuite retourné à l’état laïc – La Croix Africa, par Lucie Sarr, 17/10/18.