Cuivre, lithium, graphite, cobalt… La transition énergétique mondiale a entraîné une augmentation des besoins en minerais. Or, si l’Afrique possède, selon les estimations, 30 % des réserves minérales mondiales, de nombreuses régions restent sous-explorées. Même le cuivre, pour lequel les perspectives à court terme sont mitigées en raison du ralentissement de l’économie mondiale, devrait renouer avec des perspectives solides à moyen terme : la transition énergétique induira 50 % de la croissance de la demande mondiale du minerai au cours des cinq prochaines années, notamment pour l’énergie éolienne et l’amélioration des réseaux nationaux africains, selon les analystes de Fitch Ratings.
L’or, quant à lui, conserve son rang de valeur refuge, et son exploitation reste particulièrement attractive. L’exploration, en revanche, est devenue beaucoup plus précaire, les grandes sociétés minières ayant de plus en plus tendance à confier les travaux à de petites sociétés extérieures, ce qui augmente les risques, déjà considérables, pour les investisseurs. Les exploitants doivent avoir le courage de se retirer rapidement d’une licence si elle ne fonctionne pas, juge Tim Livesey, directeur général de la société d’exploration aurifère Oriole Resources, active notamment au Cameroun. « Trop de petits projets d’exploration ne réussiront jamais vraiment, mais ils continuent à dépenser parce que c’est plus facile que d’assumer son échec », assure-t-il.
• Carburants lourds et énergie solaire pour la plus grande mine d’or de Guinée
L’or est au cœur des ambitions d’Andrew Pardey, directeur général de Predictive Discovery, qui compte soumettre une étude d’opportunité au gouvernement guinéen d’ici à la fin de 2023, ce qui permettrait à l’entreprise de demander un permis d’exploitation minière pour son projet d’extraction d’or à Bankan, dans le bassin de Siguiri, la région la moins explorée de la ceinture de roches vertes birmiennes (riches en minerai) d’Afrique de l’Ouest. Les réserves y sont estimées à 4,2 millions d’onces. Des chiffres qui reposent en grande partie sur des mines à ciel ouvert doivent être réévalués d’ici au début de février, précise Andrew Pardey, lequel argue que les forages souterrains devraient permettre de revoir à la hausse les estimations, faisant de Bankan la plus grande mine d’or de Guinée et l’une des plus importantes en Afrique de l’Ouest.
Pour Predictive Discovery, coté en Bourse en Australie et qui compte BlackRock parmi ses investisseurs, se posera aussi la question de l’énergie. Selon Andrew Pardey, la solution la plus probable sera une combinaison de diesel et de carburants lourds, avec un peu d’énergie solaire. Le manque de puissance des batteries solaires signifie que le diesel et les carburants lourds continuent de dominer en Afrique de l’Ouest, estime en effet Andrew Pardey, anciennement PDG de Centamin, exploitant de la seule mine d’or d’Égypte. « Un camion sur deux roule au diesel ou au carburant lourd », constate-t-il, ajoutant que « le solaire ne fonctionne que lorsque le soleil brille ».
• Un nouveau pacte d’actionnaires pour le fer du Simandou
Le 22 décembre 2022, toutes les parties prenantes au mégaprojet guinéen de Simandou étaient réunies à Conakry pour faire un pas, peut-être décisif, vers l’exploitation du gisement de fer que la Guinée espère lancer depuis plus d’un quart de siècle.
À l’issue de plusieurs mois de travail, l’anglo-australien Rio Tinto et le chinois Winning International Group ont acté avec les autorités guinéennes l’arrivée dans le projet d’un nouvel actionnaire, le chinois Baowu Steel.S’il semble acquis que ce dernier rachète la majorité des blocs détenus par Winning Consortium Simandou (qui réunit Winning, China Hongqiao Group et UMS) et entre au capital de la Compagnie du Transguinéen (CTG, codétenue par WCS, Rio Tinto et l’État guinéen), le détail des prises de participations n’a pas encore été donné. Et pour cause : selon une source de Jeune Afrique impliquée dans ce dossier, les discussions se poursuivent pour définir le pacte d’actionnaires, qui ne devrait pas être arrêté avant plusieurs mois. Selon les termes du contrat signé par le représentant de Baowu Steel, Gongyang Jiang, qui a obtenu l’aval de Pékin, le groupe chinois s’est notamment engagé avec ses nouveaux partenaires à apporter les 15 milliards de dollars de financement nécessaires à la construction d’un chemin de fer de 657 km, ainsi qu’à celle d’un port en eau profonde.
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Totalement enlisé, le projet Simandou a redémarré après l’obligation, faite le 25 mars 2022 par le colonel Mamadi Doumbouya, chef de la junte guinéenne, à Rio Tinto et WCS d’unir leurs efforts pour financer les infrastructures indispensables à l’évacuation du minerai. Dans le même temps, Conakry avait imposé aux groupes miniers de détenir une part gratuite de 15 % dans CTG, finalement créé le 27 juillet.
L’exploitation du gisement, qui contient 8 milliards de tonnes de fer, pourrait démarrer en 2025, selon le calendrier du gouvernement guinée, et représenterait plus de 8 % de la production mondiale de ce minerai pendant plusieurs décennies.
• Technologie CIL pour la mine d’or de Séguéla, en Côte d’Ivoire
En attendant sa convention minière, le canadien Fortuna Silver Mines, qui a acquis en 2021 son compatriote Roxgold, se prépare à démarrer dès cette année la production de sa mine d’or de Séguéla, dans le nordest de la Côte d’Ivoire. Cette dernière devrait être opérationnelle mi-2023 et atteindre sa pleine puissance au cours du troisième trimestre. Selon les premières études, la société minière produira 133 000 onces d’or par an pendant les six premières années, et devrait rester active durant huit ans et demi, le temps d’exploiter un peu plus de 1 million d’onces.
Les travaux de construction de l’usine se poursuivent sur le site, où Fortuna Silver a déclaré investir plus de 173,5 millions de dollars. Pour l’extraction de l’or, l’entreprise a annoncé son intention de déployer le procédé de carbone en lixiviat (CIL, pour carbon in leach), qu’elle assure être plus protecteur pour 146 l’environnement que la méthode traditionnelle, car elle évite un contact direct entre le cyanure et le sol.
• Accélération de la mise en valeur du potentiel algérien
En Algérie, on suivra notamment le mégaprojet de la mine de fer Gara Djebilet (Tindouf), relancé en 2022, qui permettra la production de 2 à 3 millions de tonnes de minerai de fer dans une première phase puis de 40 à 50 millions de tonnes par an à partir de 2026. Le pays attend également beaucoup du Projet de phosphate intégré (PPI) de Tebessa. Fruit d’un investissement de près de 7 milliards de dollars, ce projet doit permettre au pays de devenir l’un des principaux exportateurs d’engrais et de fertilisants, avec une production annuelle prévisionnelle de plus de 6 millions de tonnes de produits phosphatés.
Cette année devrait également voir l’entrée en exploitation du gisement de zinc et de plomb de Oued Amizour (Béjaïa), dont le potentiel minier exploitable est estimé à 34 millions de tonnes, pour une production annuelle de 170 000 tonnes de concentré de zinc. Outre les gisements aurifères du Hoggar, de nombreux projets miniers sont en cours de lancement : bentonite à Hammam Bougrara (Tlemcen), dolomite à Teioualt (Oum El Bouaghi), carbonate de calcium et diatomite à Sig (Mascara), feldspath à Aïn Barbar (Annaba) et baryte à Koudia Safia (Médéa).
Terres rares, fer, potasse, nickel, cuivre, vanadium, lithium, or, diamants… Selon Ali Kefaifi, directeur du complexe pétrochimique de Skikda, et conseiller et directeur stratégie au ministère de l’Énergie sur le dossier pétrole et mines, l’Algérie dispose d’un potentiel exceptionnel, estimé entre 10 % et 20 % des ressources minières mondiales. Des ressources confirmées notamment grâce à des technologies modernes comme la télédétection, l’intelligence artificielle (IA), la modélisation et le calcul économique, assure l’expert, régulièrement cité par la presse algérienne.
• Négociations fiscales entre Rio Tinto et l’État malgache
QMM, filiale de Rio Tinto qui produit de l’ilménite, et l’État malgache doivent renégocier leur convention fiscale avant la fin de février, sous peine de revenir à la fiscalité du code minier, moins avantageuse – et qui pourrait encore augmenter, selon une version intermédiaire d’un nouveau texte de loi.
Ces négociations se déroulent sur fond de conflit social. En décembre 2022, des riverains ont bloqué la route vers la mine. Ils réclament plus d’indemnisations foncières. QMM a déclaré la « force majeure » le 13 décembre, et a baissé sa production électrique pour la grande ville voisine de FortDauphin (Tôlanaro), avant qu’un accord de sortie de crise temporaire soit trouvé, le 18.
L’entreprise, dont le projet approche le milliard de dollars d’investissements, comprend un port et une centrale électrique et génère environ 2 000 emplois, a déjà affronté des manifestations de quelques centaines de personnes en 2022, ainsi qu’en novembre 2021 et en 2018. Mais il est impossible de savoir quelle part de la population soutient ces mouvements.
• En RDC, des attentes dans le cuivre-cobalt et le zinc
Sont notamment attendues par Kinshasa, l’accélération de la production du projet Kamoa-Kakula et le lancement du projet cuivre-cobalt de Kisanfu (KGM), développé par China Molybdenum (CMOC), le grand actionnaire chinois de Tenke Fungurume Mining (TFM). Se prépare aussi la remise en service de la production du gisement de zinc de Kipushi, coentreprise du canadien Ivanhoe Mines et de la Gécamines, après trente ans d’arrêt.
• First Quantum de nouveau à l’offensive en Zambie
Après plusieurs années difficiles entre les autorités zambiennes et les miniers, l’arrivée du président Hakainde Hichilema, élu en août 2021, a été un soulagement pour les industriels du secteur. Au point que Tristan Pascall, directeur général depuis mai 2022 de First Quantum Minerals, le plus grand producteur de cuivre du pays, se dit prêt à demander de nouvelles licences d’exploration.
La société a ainsi annoncé un projet d’expansion de 1,25 milliard de dollars pour sa mine de Kansanshi, qui produit plus de cuivre que tout autre site africain. First Quantum exploite également la mine de cuivre à ciel ouvert Sentinel, à 150 km à l’ouest de Solwezi, dans la province du NordOuest, et le gisement de sulfure de nickel Enterprise à 12 km de là, ce qui lui permet de mutualiser les infrastructures. Enterprise, qui doit commencer à produire du nickel en ce début d’année, est voué à devenir la plus grande mine d’Afrique de ce minerai, avec un potentiel de production annuelle de plus de 30 000 tonnes. De quoi inscrire la société canadienne, déjà sixième producteur mondial de cuivre (816 000 tonnes en 2021), parmi les dix premiers producteurs mondiaux de nickel.
• En Éthiopie, une première depuis 1994
La production à Segele, dans le sud-ouest de l’Éthiopie, près de la frontière avec le Soudan du Sud, commencera au premier trimestre de cette année, a confié à Jeune Afrique et à The Africa Report Jørgen Evjen, directeur général du norvégien Akobo Minerals, qui a mené les travaux d’exploration. Ce sera la première fois depuis 1994 qu’un nouveau gisement est exploité en Éthiopie.
Les ressources minérales sont estimées à 41 000 onces d’or. Présent dans le pays depuis 2010 et sur un permis d’exploration qui couvre 182 km2, Akobo compte utiliser les liquidités générées par la future production pour poursuivre l’exploration, dans l’or et éventuellement dans d’autres minéraux. L’Éthiopie souhaite attirer des entreprises étrangères pour lancer des projets d’exploration de ses ressources : l’or, qui domine l’industrie – le minerai a généré 560 millions de dollars en exportations au cours de l’année fiscale qui s’est terminée le 7 juillet 2022 –, mais aussi la potasse et le tantale. Le gouvernement offre notamment des incitations fiscales dans l’objectif de faire passer la contribution de l’industrie minière au PIB d’un taux pré-Covid de 3 % à 10 % d’ici à 2030.
• De la crypto pour l’uranium de Namibie
Madison Metals, coté en Bourse au Canada, a conclu en septembre 2022 un accord inédit de fourniture exclusive d’oxyde d’uranium U308 pour cinq ans avec l’opérateur blockchain Lux Partners, par lequel il s’engage à livrer jusqu’à 20 millions de livres de minerai provenant de ses gisements en Namibie en échange de jetons non fongibles (NFT), mis à disposition sur toutes les principales blockchains.
Son PDG, Duane Parnham, espère tirer de leur vente « un financement à un prix supérieur aux évaluations de la société par les analystes ». Contrairement aux autres matières premières, l’uranium ne s’échange pas sur un marché ouvert, mais les prix sont négociés directement. Les NFT peuvent donc créer une plus grande transparence du marché, estime Parnham.