Vu au Sud - Vu du Sud

Burkina: des dizaines de morts dans une explosion de dynamite sur une mine d'or artisanale

Au moins une soixantaine de morts sur un site d’orpaillage ce lundi. L’explosion d’un entrepôt de dynamite sur un site d’orpaillage de Gomgombiro à Gbomblora, village situé à une quinzaine de kilomètres de Gaoua dans la région du Sud-Ouest. Parmi les victimes : de nombreux enfants et femmes.

Avec notre correspondant à OuagadougouYaya Boudani

C’est dans l’après-midi qu’un incendie s’est déclenché sur le marché situé sur le site d’orpaillage de Gomgombiro. Très vite, le feu s’est propagé et a touché plusieurs boutiques de fortune, dont un magasin où étaient exposés des explosifs utilisés par les orpailleurs, selon des témoins. De nombreuses personnes sont décédées sur le coup.

« Quand on est arrivé sur le site, les corps étaient éparpillés », explique Antoine Sylvanus Douamba, le haut-commissaire de la province du Poni sur les antennes de la télévision publique. De nombreux blessés ont été transportés dans les centres de santé. L’armée est venue en renfort pour secourir les survivants.

D’importants dégâts matériels ont été enregistrés sur le site également. Les images diffusées par les médias publics montrent des installations de fortune ravagées, des restes de tôles froissées, des arbres déracinés et projetés.

Une enquête a été ouverte pour situer les causes exactes de cette explosion. « On ne sait pas avec exactitude le type d’explosifs, mais la piste terroriste est totalement écartée », dit le procureur. « Plusieurs personnes ont été déjà interpellées », selon le parquet.

Des arbres ont été déracinés et un cratère a été creusé par la violence de l’explosion. C’est un site qui draine beaucoup de monde, peut-être des centaines de centaines d’orpailleurs.

Un témoin raconte

Mali : Assimi Goïta pourra se maintenir au pouvoir jusqu’en 2027

Par Jeune Afrique
Mis à jour le 21 février 2022 à 16:17
 

 

Le colonel Assimi Goïta à Bamako, le 25 septembre 2020. © Habib Kouyate/Xinhua/MAXPPP

 

Ce lundi 21 février, le Conseil national de transition a voté à l’unanimité un projet de révision de la charte de transition. Celle-ci pourra être prolongée de six mois à cinq ans.

120 votes pour, zéro contre, aucune abstention. Sur les fauteuils en velours rouge du Centre international de conférence de Bamako (CICB), les membres du Conseil national de transition (CNT), qui fait office d’organe législatif, ont parlé d’une même voix. Ce lundi 21 février, ils ont adopté le projet de révision de la charte de transition, qui avait été voté en Conseil des ministres début février. Le texte ne modifie pas les objectifs fondamentaux de la transition mais revient sur ses modalités. Parmi les points révisés, le plus épineux est celui qui fixe sa durée. Celle-ci pourrait finalement s’étirer jusqu’en 2027.

« Confiscation » du pouvoir

Initialement, selon un chronogramme établi en accord avec la communauté internationale, les autorités maliennes avaient jusqu’au 27 février 2022 pour organiser des élections générales. Mais ce délai peut désormais être prolongé de six mois à cinq ans. « La transition prend fin après l’élection présidentielle organisée par les autorités de la transition », précise le texte. Ces nouveaux délais ont été fixés « conformément aux recommandations des Assises nationales de la refondation » qui ont eu lieu en décembre 2021, malgré la désapprobation d’une partie de la classe politique malienne et de la communauté internationale.

EN CHOISISSANT DE PROLONGER LA TRANSITION, ON FAIT FI DES SOUFFRANCES DU PEUPLE MALIEN

« Il y a une volonté manifeste de confiscation du pouvoir, tance Modibo Soumaré, président du Cadre d’échange pour une transition réussie, qui regroupe des dizaines de partis politiques. À cause de cela, nous sommes en crise, notamment avec la Cedeao. Le pays est sous embargo depuis quarante jours ! En choisissant de prolonger la transition, on fait fi des souffrances du peuple malien. »

Dans les couloirs du CNT, on promeut au contraire une poursuite des négociations. « La prolongation de six mois à cinq ans est un début de discussion. Les organisations sous-régionales et internationales échangent avec les autorités maliennes et nous espérons qu’ils tomberont d’accord sur la durée de la transition », fait valoir Adama Ben Diarra, dit « Ben le Cerveau », un membre du CNT à l’initiative de nombreuses manifestations de soutien aux autorités transitoires.

Gouvernement et CNT élargis

Au-delà du chronogramme, le texte prévoit la suppression du poste de vice-président – vacant depuis qu’il n’est plus occupé par le colonel Assimi Goïta – afin de « réduire le train de vie de l’État » et permettre aux ministres de la Défense et de la Sécurité, tous deux militaires, de « recouvrer la plénitude de leurs attributions traditionnelles ». Il prévoit également une augmentation des membres du gouvernement et du CNT. « Il s’agit d’inclure ceux qui n’ont pas pu prendre part à la première partie de la transition. Je pense notamment à des représentants religieux, de la société civile, du milieu rural, qui doivent prendre part à la refondation du Mali », justifie Adama Ben Diarra.

Si la taille de la future équipe gouvernementale, jusqu’ici limitée à 25 ministres et secrétaires d’État, n’est pas précisée, le Conseil accueillera en son sein 26 nouveaux visages, désignés par le président de la transition, Assimi Goïta. Il passera ainsi de 121 à 147 sièges.

Pour Modibo Soumaré, dont la plateforme a annoncé qu’elle ne reconnaîtrait plus les autorités à partir du 25 mars, « il s’agit de points de détails ». « 25, 30, 40 ministres… Ce n’est pas la question ! Aujourd’hui, la priorité est de faire des propositions concrètes à la Cedeao pour faire lever les sanctions », estime-t-il. Le médiateur de l’organisation ouest-africaine, Goodluck Jonathan, est attendu le 24 février à Bamako.

Côte d’Ivoire, Burkina, Sénégal, Maroc… Les nouveaux fronts de la bataille du rail en Afrique

Mis à jour le 17 février 2022 à 17:24
 

 


Photomontage JA Bloomberg Pictures Of The Year 2019: Extreme Business. Incomplete rail tracks for the Standard Gauge Railway (SGR) line lay on the ground near Duka Moja, Kenya, on Thursday, May 9, 2019. © Luis Tato/Bloomberg via Getty

Améliorer le réseau ferré local : une nécessité pour le développement du continent. Mais si les projets ne manquent pas, nombre d’entre eux tardent à voir le jour. Qu’en est-il de l’état réel des voies ? Et où en sont les futures lignes prévues ? Décryptage en infographie.

À l’heure où le transport ferroviaire mondial connaît une relance générale, le continent africain, lui, souffre d’un réseau très dégradé. Le rail reste pourtant perçu par nombre de dirigeants comme le meilleur moyen pour désenclaver l’ensemble d’un territoire national ou transnational (comme en témoigne notamment le projet du Transsahélien, qui s’inscrit dans une logique de sécurisation de la région), et pour reprendre la main sur des ressources naturelles souvent difficiles d’accès. Mais qu’en est-il de la situation réelle du secteur ?

La France et la Chine à l’offensive

Un réseau efficient ? Seuls le Nord du continent et l’Afrique du Sud peuvent s’en enorgueillir, en vertu de leur politique ferroviaire volontariste. Avec son Plan Rail Maroc 2040, le royaume veut même doubler son réseau, et compte atteindre les 132 millions de voyageurs annuels. Coût total de l’opération : 35 milliards d’euros. De quoi attirer les investisseurs étrangers… La France a ainsi largement participé à la construction du premier tronçon de la future ligne qui reliera Tanger à Casablanca, marquant la naissance de la première LGV africaine. Quant à la Chine, elle se positionne en coulisse pour la ligne Agadir-Marrakech.

Car dans ce secteur aussi, Pékin est de la partie : via ses nouvelles routes la soie, l’empire du Milieu finance et construit de nouvelles lignes en échange d’un accès favorisé aux matières premières des pays concernés. Après avoir soutenu le développement ferroviaire de l’est du continent, c’est désormais à l’ouest que s’intéresse la puissance asiatique. Qui a d’ailleurs raflé le marché de la réhabilitation de la ligne Cotonou-Parakou, chantier jusqu’alors embourbé dans un conflit entre le groupe Bolloré, Petrolin et l’État Béninois. Un match qui semble définitivement plié pour Bolloré, puisqu’il cède l’ensemble de ses activités en Afrique de l’Ouest.

Dépasser le stade des belles promesses

L’Afrique de l’Ouest : une zone qui regorge de ressources naturelles et où, davantage que l’exploitation de lignes destinées aux voyageurs, c’est surtout le transport de fret qui aiguise tous les appétits. Le nord du Burkina Faso, avec ses mines d’or et de manganèse, gagnerait ainsi à être mieux desservi. Quant au Sénégal, qui peine à trouver les financements pour rénover son réseau, il inclut dans son projet de rénovation de ligne reliant Dakar à Tambacounda des bretelles qui rejoindront différents sites miniers et industriels.

Car qui dit absence de réseau opérationnel existant dit aussi frein au développement. Mais poser des rails n’est pas qu’un enjeu pour la croissance économique du continent. Cela peut aussi, parfois, avoir une haute portée symbolique, à l’instar du projet de ligne transafricaine reliant l’ouest à l’est du continent. Qu’en est-il de l’état actuel du réseau ferré africain ? Quels grands projets sont prévus ? Ont-ils dépassé le stade des belles promesses ? Certains, dont les montants chiffrés s’avèrent astronomiques, ne relèvent-ils pas de simples chimères ? La réponse en infographies.

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La France et ses partenaires confirment un «retrait coordonné» du Mali

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Dans cette photo d'archive du mercredi 9 juin 2021, des soldats français de la force Barkhane, qui ont terminé une période de service de quatre mois au Sahel, quittent leur base de Gao, au Mali. AP - Jerome Delay

Après un dîner de travail à l'Élysée auquel ont pris part une trentaine de dirigeants africains et européens, la France, ses partenaires européens et le Canada ont annoncé, jeudi 17 février, le retrait des forces militaires du Mali après neuf ans d'intervention militaire contre les jihadistes. Quelque 2 500 à 3 000 soldats français resteront déployés dans le Sahel après le retrait du Mali.

C’est après une réunion mercredi soir à l’Élysée entre les partenaires africains et européens pour évoquer la situation au Sahel que la décision a été entérinée. Les forces de Barkhane et Takuba vont donc quitter le Mali lors d'un « retrait coordonné ».

« En raison des multiples obstructions des autorités de transition maliennes », les pays estiment que les conditions politiques, opérationnelles et juridiques ne sont plus réunies pour poursuivre efficacement leur engagement militaire actuel. « Nous restons déterminés à soutenir le Mali et sa population dans leurs efforts pour obtenir une paix durable et la stabilité », précise le texte de cette déclaration conjointe.

« 2 500 à 3 000 » soldats français resteront dans le Sahel

« Ce retrait se traduira par la fermeture des emprises de Gossi, de Ménaka et de Gao, il sera effectué de manière ordonnée, avec les forces armées maliennes et avec la Mission des Nations unies au Mali », a énoncé le chef de l'État français, qui précise que le retrait des troupes françaises prendra 4 à 6 mois. Environ « 2 500 à 3 000 » soldats français resteront présents dans le Sahel après le retrait, a rajouté le porte-parole de l'état-major, le colonel Pascal Ianni.

Interrogé par un journaliste sur ce retrait militaire, le président français a indiqué qu'il « récuse complètement » la notion d'échec au Mali. « Que se serait-il passé en 2013 si la France n'avait pas fait le choix d'intervenir ? Vous auriez à coup sûr un effondrement de l'État malien », a-t-il déclaré.

► À lire aussi : Départ de Barkhane du Mali: retour sur une opération française acclamée puis désavouée

Concernant les mercenaires russes Wagner au Mali, l'un des plus important points de crispation entre les autorités françaises et maliennes, M. Macron a estimé qu'ils « viennent essentiellement sécuriser leurs intérêts économiques et la junte elle-même, c'est ça la réalité de ce que nous voyons ». De son côté, Bamako nie toujours la présence des mercenaires de Wagner sur son territoire.

Étendre le soutien militaire

Les pays signataires ont convenu de poursuivre leur action contre le terrorisme dans la région du Sahel, notamment au Niger et dans le golfe de Guinée - possiblement le Bénin ou le Togo-, des régions devenues des « priorités de la stratégie d'expansion » d'al-Qaïda et du groupe État islamique, a déclaré le président Emmanuel Macron.

Le Niger restera le centre de gravité de l’opération de lutte antiterroriste. Il n’est pas prévu d’augmenter significativement les effectifs au Niger. (…) Le futur est en train de se construire. Le futur, c’est une réflexion commune avec les pays africains et européens pour aboutir à une décision commune sur la façon dont nous allons répondre de manière stratégique à la menace terroriste.

Le colonel Pascal Lanni, porte parole du chef d'état-major des armées françaises

Des consultations politiques et militaires ont été engagées avec les pays concernés pour mettre en place, d'ici à juin 2022, « les paramètres de cette action commune ». Cette action sera donc, c'est ce que l'on comprend, une action internationale, européenne et canadienne avec la France, mais avec une volonté de retirer la France du devant de la scène. « Le rôle de la France n'est pas de se substituer aux États », a rajouté M. Macron.

« Afin de contenir la potentielle extension géographique des actions des groupes armés terroristes en direction du sud et de l'ouest de la région, les partenaires internationaux indiquent leur volonté d'envisager activement d'étendre leur soutien aux pays voisins du golfe de Guinée et d'Afrique de l'Ouest, sur la base de leurs demandes », précisent-ils dans leur déclaration conjointe. Des militaires européens participant au groupement de forces spéciales Takuba « seront repositionnés aux côtés des forces armées nigériennes dans la région frontalière du Mali », a annoncé Emmanuel Macron.

Lors d'une conférence de presse, le président français a également fait part de sa volonté de « mettre davantage les populations civiles au cœur de (la) stratégie », qui sont les « premières cibles des exactions et le premier rempart contre les groupes » jihadistes.

« Nous comprenons cette décision »

Présent lors du diner mercredi à l'Élysée, le chef de l'État sénégalais et président en exercice de l'Union africaine, Macky Sall, a déclaré : « Nous comprenons cette décision ». Il a aussi estimé que les groupes jihadistes au Sahel « ne saurait être la seule affaire des pays africains ». « Nous sommes heureux que l'engagement ait été renouvelé de rester dans la région et de réarticuler le dispositif », a-t-il conclu.

L'engagement a été renouvelé de rester dans la région et de réarticuler le dispositif. Nous espérons que les discussions entre la Cédéao et la Mali permettront d'arriver à un retour normal à des institutions civiles issues d'élection, de façon à pouvoir reprendre le cours normal des choses.

Macky Sall, président du Sénégal et président en exercice de l'Union africaine

De son côté, le président ghanéen et président en exercice de la Cédéao, Nana Akufo-Addo, a rappelé que tous les pays ouest-africains sont vulnérables au terrorisme. « Il est temps que le Conseil de sécurité de l'ONU s'engage plus fermement avec une intensification et, surtout pas, une diminution de l'engagement onusien », a-t-il déclaré.

Sur le sujet du déploiement onusien, le porte-parole de l'organisation a estimé ce jeudi que le retrait français aura un « impact » mais que la mission de l'ONU « s'adaptera ». « Nous prendrons les dispositions nécessaires pour nous adapter au nouveau contexte en vue de pouvoir poursuivre la mise en oeuvre de notre mandat », a-t-il dit.

L'Allemagne va également réfléchir sur son futur engagement dans le pays. La ministre allemande de la Défense s'est dite « sceptique » quant à la prolongation de la mission des soldats allemands au Mali, après l'annonce du retrait français. « Nous avons pris connaissance de la décision de la France de quitter le Mali et de mettre fin à son engagement là-bas, ce qui a bien sûr des répercussions sur les partenaires », a déclaré à Bruxelles Christine Lambrecht.

► À lire aussi : La fin de la présence militaire française au Mali, un vaste chantier 

Or, cuivre, gaz : ce qui attend les pays africains en 2022

Mis à jour le 17 février 2022 à 10:51
 

 

Dans la mine T17 à Kolwezi (RDC), alors que les creuseurs percent patiemment des galeries à la recherche de filons de cuivre ou de cobalt, les bulldozers arrachent en un temps record des tonnes de roches qui seront ensuite triées. © Gwenn Dubourthoumieu

De la RDC au Ghana, en passant par la Zambie et l’Afrique du Sud, découvrez notre panorama des défis du secteur extractif africain, entre gros producteurs en déclin, zones au potentiel sous-exploité et course aux investisseurs…

Avec des milliards et des milliards de dollars de gaz, d’or, de cuivre et de cobalt sur les marchés africains, l’élection d’un nouveau gouvernement en Zambie en août 2021 a suscité un certain espoir chez les investisseurs quant au fait que le pays s’avère désormais un acteur incontournable de l’exploration minière sur le continent.

« Tous les regards sont tournés vers la Zambie », assurait en octobre dernier, au Cap, Peter Major, directeur de l’exploitation minière chez Mergence Corporate Solutions en Afrique du Sud, alors qu’il préparait un voyage d’investissement minier en Zambie. Avec le nouveau président, Hakainde Hichilema, le pays a selon lui « un véritable homme d’affaires » aux commandes.

Outre le cuivre, dont l’exploitation industrielle en Zambie remonte aux années 1930, le pays possède un potentiel important en or, manganèse, émeraudes et charbon. Il y a eu un manque criant d’exploration depuis la nationalisation des mines après l’indépendance, selon Peter Major. Au cours des cinq dernières années, en particulier, il n’y a eu « aucune motivation à prospecter ».

L’approche pragmatique de la Zambie

Un système cadastral fonctionnel donne à la Zambie un avantage crucial sur le Ghana et la RDC, souligne M. Major. Mais le point d’interrogation qui plane sur l’administration Hichilema est la manière dont elle va gérer la révision des licences minières existantes. « Nous avons besoin de voir des gens sortir de l’autre côté du pipeline », expose le responsable Mergence Corporate Solutions . Lorsque cela commencera à se produire, prédit-il, il y aura une « ruée » pour explorer et exploiter les mines en Zambie.

LES PROJETS DE RÉFORME MARQUENT UNE RUPTURE AVEC LA MENTALITÉ DE RAPINE DE L’ANCIENNE ADMINISTRATION

Selon Irmgard Erasmus, économiste financier senior chez Oxford Economics au Cap, Hakainde Hichilema et son ministre des Mines, Paul Kabuswe, sont susceptibles d’adopter une « approche plus pragmatique et axée sur le marché » dans leurs relations avec les sociétés minières, contrairement à la « position interventionniste et dure » de l’ex-président, Edgar Lungu. La Chambre des mines de Zambie a accueilli favorablement les projets de réforme du code fiscal, estimant qu’ils marqueraient une rupture avec l’ancienne « mentalité de rapine ».

L’exploitation minière a été le seul secteur de l’économie zambienne à décliner au deuxième trimestre de 2021, et la production de cuivre a chuté de 9 %, en raison de l’impact du Covid-19 et de la saison des pluies du premier trimestre. Le pays n’a donc pas pu profiter pleinement des prix élevés du cuivre, qui ont atteint un pic en mai 2021, selon l’économiste Yvonne Mhango de Renaissance Capital.

« Battre le cuivre quand il est chaud »

Erasmus prévoit que les prix du cuivre connaîtront à l’avenir une baisse modérée mais soutenue, amplifiée par la normalisation de la politique monétaire aux États-Unis et le risque d’un ralentissement de l’empire du Milieu dû aux tensions dans le secteur immobilier chinois. Ces vents contraires, selon Erasmus, garantiront que Hichilema restera « conscient de l’urgence de renforcer la production de cuivre ».

LA PURGE EST NÉCESSAIRE. MAIS RAMAPHOSA NE PURGE PAS, IL PROMEUT

Peter Major oppose les perspectives zambiennes à celles de l’Afrique du Sud, critiquant l’approche prudente du président Cyril Ramaphosa quand Hichilema se montre, lui, prêt à purger les personnalités associées à l’ancien régime.

« La purge est nécessaire. Mais Ramaphosa ne purge pas. Il promeut. L’Afrique du Sud a besoin d’un changement radical de gouvernance, et la Zambie lui montre la voie.

Le Ghana, des efforts et une amélioration constante

Le Ghana a dépassé l’Afrique du Sud en tant que premier producteur d’or du continent en 2019, et il y a peu de chances que cela s’inverse, car le gouvernement ghanéen « reconnaît les problèmes et prend des mesures pour aider l’industrie », selon Major, qui met en avant les efforts ghanéens pour conserver AngloGold Ashanti dans le pays.

IL N’Y A PAS PLUS D’OR AU GHANA QU’EN AFRIQUE DU SUD, MAIS LE CADRE JURIDIQUE Y EST MEILLEUR

En 2016, le responsable des affaires générales d’AngloGold, John Owusu, a été tué lors d’une émeute de mineurs artisanaux à la mine Obuasi de la société, mais AngloGold a maintenu le projet. « Il n’y a pas plus d’or au Ghana qu’en Afrique du Sud, mais le cadre juridique y est meilleur », affirme Peter Major.

Dans le classement de 2021 du Natural Resource Governance Institute (NGRI), le Ghana est noté 69 sur 100, une amélioration de 13 points depuis 2017. La gouvernance de la fiscalité s’est améliorée, principalement en raison du pouvoir de la Ghana Revenue Authority d’auditer toutes les entreprises, y compris les sociétés minières. En ce qui concerne le respect de l’impact social et environnemental, le Ghana a obtenu un score maximal de 100 sur l’indice NGRI, toutes les sociétés d’extraction d’or divulguant désormais des évaluations et des plans d’atténuation des conséquences écologiques pour les nouveaux projets.

Le secteur minier, moteur du développement industriel ghanéen ?

La gouvernance budgétaire nationale s’est améliorée grâce à l’adoption et au respect de règles fiscales, indique le NGRI. Cependant, le rapport affirme que le secteur extractif est freiné par le manque de portails de données en ligne et la faible adhésion aux normes de données ouvertes. Le gouvernement n’a mis en place, pour le moment, aucune politique visant à  la divulgation des contrats du secteur minier, bien que celle-ci soit obligatoire dans les secteurs pétrolier et gazier.

LES INDUSTRIES EXTRACTIVES NE PEUVENT PAS ÊTRE UN SILO OU UNE ENCLAVE

Sulemanu Koney, PDG de la Chambre des mines du Ghana, est convaincu que le secteur minier du Ghana peut être le moteur du développement industriel du pays. Pour cela, affirme-t-il, le Ghana doit remonter la chaîne de valeur et commencer à raffiner ses matières premières. Il souhaite mettre fin à l’utilisation de caoutchouc importé pour les composants miniers et est en discussion avec une multinationale pour raffiner le caoutchouc ghanéen.

« Les industries extractives ne peuvent pas être un silo ou une enclave », déclare Sulemanu Koney, ingénieur chimiste de formation. « Une réflexion délibérée est nécessaire pour relier les thèmes entre eux. » Selon le PDG de la Chambre des mines du Ghana, le meilleur exemple est l’extraction de la soude caustique de la saumure, utilisée par l’industrie minière mais aussi dans la production d’aluminium et dans les détergents.

Le Ghana, selon Sulemanu Koney, a besoin d’une « stratégie d’industrialisation basée sur les minéraux ». Le défi, dit-il, est de « tirer parti de la présence de l’industrie minière pour le bien du pays » en favorisant la formation et l’investissement dans la technologie. « C’est ma raison d’être. Sinon, j’aurais abandonné depuis longtemps. »


 Mozambique : année décisive pour le futur géant gazier 
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Le mégaprojet gazier mozambicain, mis en pause après les attaques jihadistes de la fin de mars 2021. © Saipem

 

Au Mozambique, l’année à venir sera cruciale pour consolider les progrès réalisés contre l’insurrection djihadiste dans le nord du pays, qui a retardé les plans d’exploitation des ressources en gaz naturel de la région. Les progrès accomplis dans la guerre contre les terroristes islamistes signifient que « le sentiment a changé assez radicalement » pour le mieux au cours des derniers mois, analyse Hermano Juvane, responsable du pétrole, du gaz et de la chaîne de valeur chez Absa Bank au Mozambique.

Le soutien apporté à l’armée mozambicaine, notamment par le Rwanda et la Communauté de développement d’Afrique australe a contribué à cette amélioration, selon Hermano Juvane. Les gens ont pu rentrer chez eux à Palma, dans la province septentrionale de Cabo Delgado. En septembre, TotalEnergies a annoncé le report de deux ans de la première production terrestre de gaz naturel liquéfié (GNL) au Mozambique, la première production étant désormais prévue pour 2026. TotalEnergies a déclaré un cas de force majeure sur son projet de 15 milliards de dollars en avril 2021, mais l’activité du projet devrait maintenant redémarrer cette année. Le cadre d’Absa Bank considère que le nouveau calendrier est réaliste. « Il reste environ quatre ans de travail », dit-il.

LE MONDE ENTIER EST DE PLUS EN PLUS NERVEUX À L’IDÉE QUE LA CHINE CONTRÔLE LA CHAÎNE D’APPROVISIONNEMENT

Au Mozambique, Absa se concentre sur le financement des sous-traitants des industries extractives, indique Hermano Juvane, qui considère le pays comme porteur d’opportunités dans les sables lourds, le titane, le charbon, le lithium, le graphite, l’aluminium et les rubis. L’extraction des minéraux de terres rares, un ensemble de 17 éléments métalliques utilisés pour des applications de haute technologie telles que les téléphones portables, les disques durs d’ordinateurs et les véhicules électriques, pourrait être une industrie africaine de l’avenir.

La Chine domine l’approvisionnement mondial en terres rares avec une part estimée entre 85 % et 90 %, mais les tensions entre la Chine et les États-Unis ont accentué la nécessité pour le monde de trouver des sources non chinoises. »Les États-Unis tentent désespérément de ne pas acheter de terres rares à la Chine », affirme Simon Gardner-Bond, directeur technique de la société TechMet basée à Dublin. « Le monde entier est de plus en plus nerveux à l’idée que la Chine contrôle la chaîne d’approvisionnement ».

TechMet investit dans des projets visant à développer des métaux essentiels pour la transition vers les énergies renouvelables, et compte Rainbow Rare Earths parmi ses investissements. Rainbow, qui est coté sur le marché des investissements alternatifs AIM de Londres, détient la seule mine de terres rares en activité en Afrique, à Gakara, au Burundi. Mais le gouvernement burundais a arrêté la production en avril 2021 parce qu’il souhaite renégocier la convention minière, et les réunions entre le PDG de Rainbow, George Bennett, et le président Évariste Ndayishimiye n’ont pas encore permis de résoudre le problème.

Rainbow prévoit également de produire des terres rares à partir de cheminées de gypse générées par l’extraction de phosphate dur près de Phalaborwa, dans la province sud-africaine de Limpopo, et étudie la viabilité économique d’éventuels gisements de terres rares dans le nord du Zimbabwe. M. Bennett reste confiant quant à la possibilité de parvenir à un accord avec le Burundi. « Il y aura des concessions à faire », dit-il. « Nous parviendrons à une solution gagnant-gagnant ».