Dialogue interreligieux

« Lorsque nous travaillons pour les âmes, nous ne pouvons user que de persuasion et d'amour... Nous ne pouvons rien faire tant que nous n'avons pas persuadé les gens autour de nous qu'ils sont aimés... » (Cardinal Lavigerie, 1885)

« Nous croyons qu'en toute religion il y a une secrète présence de Dieu, des semences du Verbe qui reflètent un rayon de sa lumière... » (Chapitre 1967)

« Nous célébrons et partageons cette vie avec Dieu lorsque nous allons à la rencontre des cultures et des religions... nous réjouissant de la foi vivante de ces croyants et les rejoignant dans leur quête de la Vérité, cette Vérité qui nous rend tous libres. » (Chapitre 1998)

Missionnaires, nous sommes appelés à faire les premiers pas pour rencontrer les personnes, qu'elles que soient leurs convictions, leur religion.

Au Burkina Faso, cette réalité se traduit surtout dans la rencontre respectueuse et évangélique avec les adeptes des religions traditionnelles et avec les musulmans.

Dans cette rubrique, nous étudierons divers aspects de ces religions, particulièrement de l'islam.

Sikhs et chrétiens invités à promouvoir ensemble
« une culture de la tendresse » (ZENIT)

[…]Le Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux a publié un message à l’occasion de l’anniversaire de Guru Nanak, fondateur du Sikhisme, qui sera célébré le 23 novembre 2018, jour férié en Inde. Le message est signé par le numéro 2 du Conseil pontifical, Mgr Miguel Ángel Ayuso Guixot, MCCJ.

Voici la traduction par Hélène Ginabat du message écrit en anglais.

Message du Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux

Chers amis sikhs,

Le Conseil pontifical pour le Dialogue interreligieux vous présente ses chaleureuses félicitations et vous adresse ses meilleurs vœux à l’occasion de la célébration de Sri Guru Nanak Prakash Diwas, cette année le 23 novembre. Puissent ces festivités qui marquent cette célébration renouveler et renforcer les liens de respect et d’amour mutuels dans vos familles et communautés, afin d’augmenter parmi vous le bonheur, l’harmonie et la paix !

Notre précieuse tradition de partager avec vous quelques pensées à cette occasion veut attirer votre attention, cette année, sur le développement et la promotion d’une culture de la tendresse, puisqu’une culture où l’on est centré sur soi et indifférent les uns à l’égard des autres, semble prendre racine presque partout. De plus, une augmentation alarmante du nombre des personnes, dans nos quartiers et dans nos communes, qui se sentent mal-aimées et négligées est révélatrice d’un indice de tendresse bas sans précédent dans le monde. Notre réflexion se concentre donc aussi sur la manière dont les chrétiens et les sikhs peuvent promouvoir la culture de la tendresse pour le bien-être de tous les êtres humains.

La ‘tendresse’, telle qu’on l’expérimente et qu’on l’explique en général, est un geste de la part de quelqu’un, qui fait preuve de gentillesse et de douceur, d’attention et de sollicitude à l’égard de l’autre. C’est une démonstration de la capacité des êtres humains à sentir avec et à sentir pour les autres. Il s’agit de regarder, d’écouter, d’être avec et de réconforter les autres de tout son cœur, en particulier les plus vulnérables de la société, et de faire tout son possible, quitte à prendre des risques, pour leur bien-être. Le pape François aime la décrire comme « un mouvement qui commence dans notre cœur et qui rejoint les yeux, les oreilles et la main » (Vidéo Talk, TED Conference, Vancouver, Canada, 25 avril 2017).

Le fondement de la ‘tendresse’ est sans aucun doute Dieu lui-même, qui est « infinie tendresse ». Cependant, nous faisons l’expérience de la tendresse, du soin et de la providence  divine lorsque nous sommes dans le besoin, surtout à travers les instruments humains, comme si c’était la voie privilégiée de Dieu. Ainsi, ayant nous-mêmes besoin de tendresse de la part de Dieu et des autres, et étant membres d’une même famille humaine, nous avons besoin aujourd’hui, dans notre monde, de ce que le Saint-Père appelle une « révolution de la tendresse » (Pape François, Evangelii gaudium, Exhortation apostolique, 2013, n.88) menée à travers des gestes authentiques de soin et des actions concrètes de compassion à l’égard de nos frères et sœurs, en particulier des pauvres, des faibles, des malades, des personnes âgées ou handicapées et des migrants, quelle que soit la tradition religieuse à laquelle ils appartiennent. La plus grande « tendresse » se manifeste par nos mots et nos actions, la meilleure façon pour la culture de la tendresse de déployer ses racines loin et amplement. La tendresse doit aussi s’étendre à l’ensemble de la création parce que le soin de la terre et le soin de l’autre vont de pair ; ne pas prendre soin de la nature signifierait ne pas prendre soin des êtres humains et vice versa (Cf. Pape François, Message pour la Journée mondiale de la prière pour le soin de la création, 1er sept, 2016, n.1).

La formation à la ‘tendresse’ doit évidemment commencer dans les familles elles-mêmes où les enfants, guidés par l’exemple de leurs parents et des membres plus âgés, apprennent à manifester leur amour, leur soin et leur préoccupation pour les autres, en particulier pour les personnes faibles et démunies, les servant et étant un soutien pour elles. Les enseignements religieux, les institutions éducatives et les moyens de communication sociale jouent un rôle décisif et vital en inculquant chez les fidèles, les étudiants et les autres citoyens un comportement altruiste, bienveillant et respectueux à l’égard des autres. Si un tel modèle de vie est adopté par des fidèles de toutes les religions, on devrait assister à une plus grande harmonie et paix dans notre monde. Entretenir la « culture de la tendresse » peut ainsi être le nouveau modèle y compris pour les engagements interreligieux et les réalisations communes et pour construire un monde meilleur par une vision partagée et une action commune.

Nos deux religions croient dans la paternité de Dieu et la fraternité entre tous les êtres humains. En vivant ces convictions religieuses et en encourageant les autres à vivre les mêmes, puissions-nous, chrétiens et sikhs, travailler main dans la main avec les croyants d’autres traditions religieuses et avec toutes les personnes de bonne volonté, faire tout notre possible, dans l’humilité et la solidarité humaine, pour promouvoir une « culture de la tendresse » pour le bien-être de tous les êtres humains et pour le bien de tout le monde créé !

Je vous souhaite à tous, une fois encore, un joyeux et serein Prakash Diwas of Guru Nanak Dev Ji!    

© Traduction de Zenit, Hélène Ginabat

Source : Sikhs et chrétiens invités à promouvoir ensemble « une culture de la tendresse » – ZENIT – Francais, Hélène Ginabat, 22/11/18.

Liban : le pape encourage à maintenir « l’équilibre » entre chrétiens et musulmans (ZENIT – Francais)

La Fondation Maronite au Vatican


Fondation Maronites et autorités du Liban © Vatican Media

Le pape François a remercié le Liban de « maintenir l’équilibre… entre chrétiens et musulmans, sunnites et chiites ; un équilibre de patriotes, de frères », en recevant les membres de la “Fondation Maronite” et des autorités du Liban, ce 20 novembre 2018, au Vatican.

La délégation était accompagnée du cardinal Béchara Boutros Raï, patriarche d’Antioche des maronites, à l’occasion de la visite “ad Limina Apostolorum” de l’Eglise patriarcale. Le pape a salué devant eux la « générosité » du pays au « cœur accueillant avec les réfugiés ».

Voici notre traduction des paroles prononcées par le pape lors de cette rencontre.

 

Salutations du pape François

Bonjour !

Je vous remercie de votre visite. C’est intéressant ce qu’a dit le patriarche [Card. Raï], que la visite ad Limina est accompagnée par les fidèles. C’est une bonne idée, on peut l’officialiser, afin qu’ils puissent critiquer les évêques ! Cela pourrait se faire ! Comme cela nous connaissons les éléments les plus concrets de la communauté.

Cela me rappelle aussi le miracle de la multiplication des pains, parce qu’on m’a dit : “Il y aura une quarantaine [de personnes] à saluer”, mais j’ai assisté à la multiplications des Libanais ! Mais merci d’être venus si nombreux ! Merci.

Je voudrais remercier la communauté libanaise pour tout ce qu’elle fait au Liban. Pour deux choses : maintenir l’équilibre – cet équilibre créatif, fort comme les cèdres – entre chrétiens et musulmans, sunnites et chiites ; un équilibre de patriotes, de frères. Je remercie avant tout pour cela. Et je voudrais aussi remercier pour autre chose : votre générosité, votre cœur accueillant avec les réfugiés : vous en avez plus d’un million. Merci, merci beaucoup !

Et à présent je demanderai que le Seigneur vous bénisse tous. Que le Seigneur bénisse vos familles, votre patrie, vos enfants, vos réfugiés. Qu’il vous bénisse tous. Amen.

Source : Liban : le pape encourage à maintenir « l’équilibre » entre chrétiens et musulmans – ZENIT – Francais, Anne Kurian, 20/11/18.

Les « sans religion » : la nouvelle religion ? (T.C.)

 

Dans les pays où l’on demande aux citoyens d’indiquer leur religion dans les recensements, ou bien dans les sondages questionnant sur l’appartenance religieuse, il a longtemps été courant de proposer une liste de réponses possibles, le dernier item de la liste étant « aucune de ces réponses » (en anglais « none of the above »).

Anne-Laure Zwilling, Université de Strasbourg

Dans les pays où l’on demande aux citoyens d’indiquer leur religion dans les recensements, ou bien dans les sondages questionnant sur l’appartenance religieuse, il a longtemps été courant de proposer une liste de réponses possibles, le dernier item de la liste étant « aucune de ces réponses » (en anglais « none of the above »).

C’est donc en tant que nones que ceux qui ne déclaraient pas d’appartenance religieuse ont d’abord été désignés ; en français, on parle de « sans religion ».

Ce groupe a longtemps été un peu laissé de côté par les sociologues des religions. D’abord parce que le nombre de nones n’était, jusque vers les années 1970 environ, pas très élevé, mais aussi parce que ces sociologues s’intéressaient avant tout aux croyances, et que les nones semblait être un ensemble de personnes sans convictions. Jusqu’à récemment, on concevait en effet ce groupe un peu en creux : c’était le groupe de ceux qui étaient « sans » religion, qui « n’avaient pas » de croyances, qui « n’étaient pas » membres d’une Église. Bref, on le pensait en négatif, par rapport à une appartenance religieuse : le terme « non-religion » fait alors référence à tout ce qui n’est pas « religieux ».

Deux éléments ont conduit désormais les chercheurs à s’intéresser davantage à ces « non-religieux » : l’augmentation du nombre de personnes se déclarant sans religion (plus de 23 % de personnes, en moyenne, déclaraient ne pas appartenir à une religion, dans l’enquête européenne de 2008), mais aussi la prise en compte croissante de la diversité de ce groupe.

Map des « sans religion » par aires géographiques selon des données de 2006 selon pourcentage de la population, basée sur le Dentsu Communication Institute et Zuckerman.
Emilfaro/Wikimedia

La religion, un ensemble d’éléments

En effet, lorsqu’on s’intéresse à la religion des personnes, on voit qu’il faut prendre en compte un ensemble d’éléments. Selon le lieu et le temps, les sociologues ont pu inclure dans cette définition les convictions, les visions du monde, les pratiques religieuses individuelles et collectives, l’engagement dans des activités liées à la religion, ou encore ce que les personnes disent d’elle-même. Soit, en termes plus techniques : les croyances, les dogmes, les pratiques et rituels, la militance, l’autodéclaration.

S’il est vrai que ces différents éléments sont souvent liés, on constate de plus en plus souvent des variations importantes : on peut être très pratiquant sans avoir des convictions très fortes, on peut être très engagé sans être pratiquant, etc. Ainsi, on va rencontrer de plus en plus fréquemment telle personne se disant chrétienne mais n’étant pas baptisée, très engagée dans sa paroisse mais n’étant pas sûre de l’existence de Dieu ; ou encore telle autre convaincue que Dieu existe et priant régulièrement, mais n’appartenant à aucun groupe religieux.

En France, par exemple, selon un sondage Ipsos de 2010, 2 % de non-croyants affirment lire la Bible au moins une fois par semaine. On a pu également lire récemment le manifeste de Hendrikse Klaas, un « pasteur athée », Croire en un Dieu qui n’existe pas.

Dans la religion, toutes les modalités de combinaison de ces différentes dimensions existent, et on retrouve dans la non-religion les mêmes variations. Cela fait donc en définitive de la non-religion un groupe peu homogène et mal connu. Voilà pourquoi la non-religion a été le sujet principal du colloque annuel de notre réseau de recherche sur les religions en Europe et au-delà, Eurel.

Un large éventail de visions du monde

Comme la religion, la non-religion inclut un large éventail de visions du monde, incluant des nouveaux athées qui « militent » contre la religion, aussi bien que des personnes affirmant qu’on ne peut rien savoir de l’existence ou de la non-existence de Dieu (agnostiques) mais qui peuvent être des pratiquants, ou encore des personnes totalement indifférentes à la religion et à la religiosité.

Pourtant, le plus souvent, la non-religion tend à se former en relation, en opposition et dans différents dialogues avec les formes dominantes de religion. De ce fait, celles-ci prendront aussi des formes différentes. De même, la place que la société accorde à la religion va influer sur la façon dont s’exprime la non-religion.

Dans certains pays comme la France ou l’Espagne par exemple, la non-religion peut être une forme de combat contre la domination d’un groupe religieux très fortement présent, elle est donc assez militante ; alors que dans d’autres sociétés, plus indifférentes sur le plan religieux (comme au Royaume-Uni actuellement), c’est presque la position « par défaut ».

Une majorité silencieuse

Dans de nombreuses sociétés européennes, le groupe des non-religieux est en train de devenir une majorité. Cette majorité est souvent silencieuse puisqu’il ne s’agit que rarement de groupes constitués, et qu’il n’y a que très peu de revendications collectives.

Ainsi, en 2016, Linda Woodhead a affirmé qu’au Royaume-Uni, « “no religion” is the new religion » (« la nouvelle religion, c’est la non-religion »).

Cette affirmation devient vraie en France également, pays qui se place au 4e rang par l’importance de l’athéisme avec 29 % de personnes se déclarant « athées convaincues », et où l’on enregistre entre 2005 et 2010 une baisse de 21 % du nombre de personnes se disant religieuses, selon un sondage RedGallup de 2012.

Certains chercheurs pensent également qu’il pourrait y avoir une part importante de « non-religieux » parmi les personnes qui déclarent appartenir à une religion majoritaire historiquement bien implantée, comme l’Église luthérienne dans les pays scandinaves, ou l’Église catholique en France, en Espagne ou en Italie. Le politologue Yann Raison du Cleuziou parle ainsi des « catholiques passagers » en France dans Qui sont les cathos aujourd’hui ? (2014) et le sociologue Jörg Stolz des « distanciés » en Suisse, Religion et spiritualité à l’ère de l’ego (2015).

Il faudrait cependant étudier de près cette question, pour déterminer à quel point l’appartenance peut aller au-delà de l’adhésion formelle au groupe religieux.

Impacts culturels, sociaux et… économiques

Notre colloque d’Oslo a également cherché à analyser comment les différents contextes nationaux peuvent influer sur ce rapport au croire, et notamment en quoi et comment le cadre social, historique et culturel de la religion dominante dans un espace géographique donné va contribuer au « formatage », à la définition de la non-religion (voir ainsi les interventions d’Ethan Quillen ou Chris Cotter).

On cherche également comment la non-religion joue sur la perception sociale de la minorité et de la majorité religieuses (comme l’expliquent Cristiana Cianitto et Rossella Bottoni ou encore Atko Remmel.

Par ailleurs, quel sera l’impact social et culturel lié à la présence croissante de ces groupes, comme l’analyse Stéphane Papi pour le Maroc par exemple ? Comment cela se manifestera-t-il selon les pays ?

Certains, comme Jorge Botelho Moniz, vont s’interroger sur le rapport entre non-religion et religion : y a-t-il dialogue ou conflit entre les deux, et si oui qui s’exprime, et au nom de qui ? Plus largement, comment la non-religion est-elle représentée sur les plans politique, culturel et social (voir Anne Lancien notamment), quelle place peut-elle tenir et, comme le souligne Nóra Lengyel, quelle influence peut-elle avoir ?

Enfin, l’existence de la non-religion a également des implications juridiques. Il existe en Europe de nombreux pays dans lesquels l’appartenance religieuse a une importance légale ou administrative. Par exemple, cette appartenance a une incidence sur les impôts en Allemagne ; dans plusieurs pays, les groupes religieux qui bénéficient d’une reconnaissance juridique bénéficient de certaines facilités financières ou juridiques.

Comment la non-religion s’inscrit-elle dans ces configurations, par exemple dans le cas du Brésil étudié par André Luiz Pereira Spinieli ou de l’Italie décryptée par Francesco Alicino ?

Cerner les convictions (non)-religieuses

La diversité du groupe, son manque apparent de visibilité, le rendent d’autant plus difficile à cerner pour les chercheurs. Il faut alors se demander comment il est étudié et pris en compte, par exemple comment la population non-religieuse est analysée dans les recensements, comment elle est exposée dans les statistiques sur l’appartenance religieuse, et s’il y a éventuellement des zones d’ombre, des lieux non explorés. C’est notamment ce qu’explorent Teemu Taira, Tatiana Podolinska et Juraj Majo ou Sivert Urstad.

En retour, l’étude de la non-religion questionne la façon dont sont saisies et définies les modalités de l’appartenance religieuse (voir les travaux de Sofia Nikitaki ou de Timothy Stacey).

Pas plus que le « croire », en définitive, le « ne pas croire » n’est facile à mesurer par des enquêtes.


Le colloque Formatage de la non-religion dans la société post-moderne, perspectives institutionnelles et juridiques, coorganisé par Eurel et le projet « Good Protestant, Bad Religion ? Formatting Religion in Modern Society » (GOBA) de l’Université d’Oslo, s’est tenu à Oslo les 26 et 27 septembre 2018.

Anne-Laure Zwilling, Anthropologue des religions, CNRS, Université de Strasbourg

This article is republished from The Conversation under a Creative Commons license. Read the original article.

20 novembre 2018 Fête de la Naissance du Prophète :
Mawlid an Nabi, 12 Rabi’ Al Awal 1440 H

Date et origine du Mawlid

Livre de prières au Prophète Mahomet
Livre de prières au Prophète Mahomet (rstml / CC-by-sa)

Dates d'Al Mawlid

Al Mawlid est prévu aux dates suivantes :

  • mardi 20 novembre 2018
  • dimanche 10 novembre 2019
  • jeudi 29 octobre 2020

La date peut être décalée d'une journée, selon la prise en compte ou non du croissant de lune marquant le début du mois.

Al Mawlid

Aussi orthographié : Maoulid , Mouloud, Mawloud , Maouloud, Maoulide, Mouled.

La fête du Mawlid an-nabaoui ou Naissance du Prophète est célébrée le 12 rabîʿ al awal (troisième mois du calendrier musulman). Absente des textes canoniques, car elle ne se fonde ni dans le Coran ni dans la Sunna, tradition prophétique, l’anniversaire de Mohamed n’a jamais été célébré de son époque, ni par ses compagnons, ni par les musulmans des premiers siècles.

Une fête et des pratiques « controversées »

Fête extra-canonique et tardive, la commémoration du Mawlid serait d’inspiration chiite. Elle a vu le jour au sein de la cour des califes fatimides (909-1174), chiites appartenant à la branche ismaélienne. Cette célébration palatine entre dans le cadre des six mawlids qui commémorent Ahl al bayt (proches du Prophète). En plus de la naissance du Prophète, les Fatimides célèbrent aussi les naissances de Fatima (fille du Prophète, épouse de ʿAli qui est aussi le cousin du Prophète), de ʿAli (cousin et gendre du Prophète et époux de Fatima), d’al Hasan (fils de Fatima et ʿAli et petit fils du Prophète) et enfin d’al Husayn (fils de Fatima et ʿAli et petit fils du Prophète).

La fête du Mawlid est absente des livres des ʿibâdât (études sur les pratiques cultuelles). La première mention de sa célébration daterait du XIIe siècle. D’après le théologien et juriste Ibn Khallikan (1211-282) et l’historien Ibn Kathîr (1301-1373), cette fête fut instaurée bien plus tard, vers 1207, par Moudhaffar ad-Din Gökburi (m.1233), prince d’Erbil (ville du Kurdistan actuel) et beau-frère de Salâh ad-Dîn, Saladin, qui organisait tous les ans une fête caractérisée par une procession de cierges, un grand banquet et une grande veillée religieuse.

Néanmoins cette pratique a engendré de nombreuses controverses et continue encore à susciter des divergences au sein des savants musulmans. Pour les opposants, elle relève d’une bidʿa, innovation blâmable, qui intègre des pratiques polythéistes comme l’imploration du secours du Prophète mais aussi des pratiques réprouvées comme le chant dans les cérémonies qui accompagnent la fête. Par ailleurs cette commémoration s’appuie sur une date n’ayant aucun fondement du point de vue historique. L’année de la naissance du Prophète est fort controversée. Les historiens ont répertorié de nombreuses dates différentes renvoyant à la naissance du Prophète.

Le 20e siècle verra son officialisation. Depuis 1910, il est devenu fête nationale dans l’Empire ottoman. Dans la grande majorité des pays musulmans, c’est un jour férié et une cérémonie officielle, à laquelle assiste le chef du gouvernement, est célébrée dans l’une des mosquées de la capitale.

Poèmes, pèlerinages et processions

Il n’y a pas de prière spécifique à cette fête comme celle de ʿÎd al-Fitr ou ʿÎd al-Adhâ. Néanmoins des rencontres et des conférences, qui rappellent la vie du Prophète, sont organisées au sein des mosquées ou des zaouias (édifice religieux musulman tenu par une confrérie). Au centre de ces cérémonies se situe la récitation d’un mawlid. La célébration du Mawlid met à l’honneur des poèmes relevant du genre littéraire arabe le panégyrique, al madh. En référence à cette fête, on les appelle aussi mawlidiyyat (sing. mawlidiyya, poème composé en l’honneur du Prophète à l’occasion de l’anniversaire de sa naissance). Ces récits suivent généralement une même séquence : louanges à Dieu comme introduction, invocations, avant de passer à la naissance du Prophète qui est précédée d’un récit de l’annonce miraculeuse faite à sa mère, Âmina qu’elle porte en son sein un Prophète.

L’un des poèmes les plus connus est Qasidat al-Burda (Le poème du manteau), écrit sous la plume de Sharaf Muhammad al-Din al-Busîri (1211-1294) à la gloire du Prophète. Al Busîrî était atteint de paralysie quand il vit le Prophète en rêve plaçant son manteau sur les épaules ; quand il s’éveilla il était guéri de son mal. Il est de coutume de réciter ce burda, ou « poème du Manteau » d’al Busîrî qui se compose de dix chapitres, dans les mosquées pendant le Mawlid. Au Sénégal, où ce poème s’appelle Bourdou, on déclame un chapitre de ce poème durant les dix jours qui précèdent al Mawlid.

L’un des mawlids en arabe les plus largement récités actuellement est celui qu’a composé Jaʿfar b. Hasan al-Barzanjî (m.1119/1765) connu sous le titre ʿÎqd al-jawâhir. Le plus populaire des mawlids en turc (appelé Mevlid) est celui de Süleymân Celebi (m.825/1421) qui est toujours récité dans les mosquées de toute la Turquie lors de la célébration de l’anniversaire du Prophète. On retrouve ces récits dans les différents pays musulmans où le Mawlid se décline en plusieurs langues : arabe, peul, persan, wolof, bengali, swali, albanais…

Cheikh Khaled Bentounès: «Le Coran est un joyau
que nous n’utilisons pas» (El Watan)

BentounèsCheikh Khaled Bentounes, guide spirituel de la confrérie soufie Alawiyya et initiateur de la journée mondiale du vivre-ensemble

– Vous avez déclaré dernièrement qu’il y avait un problème de définition et de notion…

En effet. Nous avons un véritable problème de définition que nous faisons hériter de génération en génération. Il faut que nos historiens revoient les termes qu’ils utilisent. Chaque chose a son nom. La guerre et le combat ne sont pas synonymes. Une guerre est agressive. Elle est fondée sur le principe de spolier les droits et les libertés d’autrui. Un combat est juste son opposé. Contrairement à la guerre, le combat est légitime.[…]

– Entre islam et islamisme, il y a juste 3 lettres et une grande déviance des principes de paix de la religion. Quelle est votre explication ?

[…] On a fait main basse sur l’islam pour servir des intérêts particuliers, d’un groupe, d’une dynastie, d’un pouvoir ou d’un objectif. Une finalité tout à fait horizontale, qui n’a aucune verticalité, aucune transcendance. Dès qu’un message perd sa transcendance et ses valeurs, il est alors manipulé. Chacun s’en empare pour accéder à ses objectifs personnels.

L’islamisme à transformé la religion en un protocole avec des actions qui mènent à un résultat. Comme dans une règle mathématique 1+1=2. La vie est sans âme, sans sa verticalité qui nous mène à ce bel agir et donne un sens à la vie qui ne peut s’accomplir qu’avec les autres. Lorsque le chacun pour soi s’installe, toute la société se disloque ou se clientélise en faveur d’une tribu, d’un courant, d’un système…

– Qu’en est-il du wahhabisme et du salafisme ?

Lorsque Mohamed Ben Abdelwahhab est apparu en Arabie au XVIIIe siècle, le monde musulman était bien endormi. Nous aurions dû en prendre conscience à travers le wahhabisme. Un courant qui nous a bousculés, ainsi que nos habitudes de cette époque par son intransigeance et son refus de la liberté de penser.[…] … Lire la suite : «Le Coran est un joyau que nous n’utilisons pas» | El Watan, Isma Bersali, 08/11/18.