Dialogue interreligieux

« Lorsque nous travaillons pour les âmes, nous ne pouvons user que de persuasion et d'amour... Nous ne pouvons rien faire tant que nous n'avons pas persuadé les gens autour de nous qu'ils sont aimés... » (Cardinal Lavigerie, 1885)

« Nous croyons qu'en toute religion il y a une secrète présence de Dieu, des semences du Verbe qui reflètent un rayon de sa lumière... » (Chapitre 1967)

« Nous célébrons et partageons cette vie avec Dieu lorsque nous allons à la rencontre des cultures et des religions... nous réjouissant de la foi vivante de ces croyants et les rejoignant dans leur quête de la Vérité, cette Vérité qui nous rend tous libres. » (Chapitre 1998)

Missionnaires, nous sommes appelés à faire les premiers pas pour rencontrer les personnes, qu'elles que soient leurs convictions, leur religion.

Au Burkina Faso, cette réalité se traduit surtout dans la rencontre respectueuse et évangélique avec les adeptes des religions traditionnelles et avec les musulmans.

Dans cette rubrique, nous étudierons divers aspects de ces religions, particulièrement de l'islam.

Élections en Europe: Daesh souhaite la victoire des mouvements populistes

Nous vous invitons à lire un article d’Alain Rodier qui doit nous encourager d’une part à promouvoir et consolider les relations entre chrétiens et musulmans, et d’autre part à lutter contre le populisme anti-musulman, « qui est, de toutes façons, appelé de ses vœux par Daesh« (A. Rodier).

« Les salafistes-djihadistes (mais qu’il serait plus juste de nommer des « takfiris »(1)) dont la doctrine religieuse est basée sur un retour à l’islam des origines et à l’application stricte de la charia, veulent d’abord renverser tous les dirigeants politiques et religieux du monde musulman. » Puis s’attaquer aux pays non-musulmans.

logo atlanticoAlain Rodier nous livre ici son analyse des événements de l’année qui se termine et ses sombres prédictions pour 2017: « 2017, l’année de la « révolution islamique« , Atlantico, 26/12/16.

France - Belgique : « Inscrire la laïcité dans la Constitution risque de dénaturer le principe »

Rédigé par Hanan Ben Rhouma | Vendredi 9 Décembre 2016

 

De la France à la Belgique, le concept de laïcité ne renvoie pas aux mêmes compréhensions et expériences. La France plus laïque que son voisin, dites-vous ? C'est à cette question que répond l'ouvrage « La laïcité dans l’ordre constitutionnel belge », dont est l'auteur Mehmet Alparslan Saygin, spécialiste belge du droit public, du droit du travail et de la laïcité. Ce conseiller juridique alerte sur le risque d'une constitutionnalisation du principe dans les deux pays et adresse ses préconisations. Interview.

 


France - Belgique : « Inscrire la laïcité dans la Constitution risque de dénaturer le principe »
 

Saphirnews : Vous partez du postulat que la Belgique est un Etat plus laïque que la France. En quoi est-ce le cas ?

Mehmet Alparslan Saygin : La France affirme ne pas reconnaitre ni ne subventionner les cultes. En réalité, elle fait les deux, non seulement en Alsace-Moselle mais aussi dans les départements d’outre-mer. Elle le fait également sur l’ensemble du territoire métropolitain à travers toute une série de dispositifs qui contredisent l’esprit de la laïcité telle qu’elle veut bien la définir comme la loi (Debré) de 1959 permettant à l’enseignement privé sous contrat – confessionnel compris – d’obtenir des subsides de l’Etat.

De son côté, la Belgique assume son système de reconnaissance et de subventionnement mais, de surcroit, elle reconnait une plus grande pluralité de cultes puisque six (+ un) cultes sont reconnus et financés : les cultes catholique, israélite, protestant, anglican, orthodoxe, islamique et une « conviction philosophique non confessionnelle », qui s’apparente à l’athéisme mais qui est souvent abusivement appelée « laïcité organisée ». Ajoutons que la reconnaissance du bouddhisme est en route. L’Etat belge s’inscrit ainsi dans un plus grand esprit de transparence que la France : les règles du jeu sont plus claires s’agissant de la définition de la laïcité.

La Belgique s’inscrit dans un plus grand esprit de pluralisme et donc de plus grande égalité de traitement que la France. Par ailleurs, de façon générale, la Belgique est plus respectueuse de la liberté religieuse, notamment de son exercice public. Par exemple, on y trouve moins d'entraves à la liberté de porter un signe convictionnel, même s'il y en a aussi.

Mehmet Alparslan Saygin
Mehmet Alparslan Saygin

La Belgique finance l’organisation des cultes reconnus. Sur quels principes se fonde cette spécificité ? En quoi le caractère laïque de l’Etat est-il préservé ?

Mehmet Alparslan Saygin : Comme on le voit, l’affirmation de départ concernant la France est discutable, voire tout simplement fausse. Cela étant, la spécificité belge se fonde sur le contexte dans lequel l’Etat belge est né, à savoir une union entre catholiques et libéraux face à la domination néerlandaise (tandis que la laïcité à la française est née d’une rupture douloureuse avec l’Eglise catholique, ndlr).

Contrairement à une idée fort répandue, la reconnaissance et le financement de cultes ne sont pas, en soi, contraires au principe de laïcité. C’est se méprendre sur la signification du concept de « séparation ». La séparation n’implique pas nécessairement que l’Etat ne puisse reconnaitre et financer des cultes. Elle implique que, sous prétexte de reconnaissance et de financement, l’Etat ne s’ingère pas dans le fonctionnement des institutions religieuses. L’inverse est vrai aussi : les institutions religieuses ne doivent pas s’ingérer dans le fonctionnement des institutions publiques. En ce sens, il faudrait plutôt parler de « non-ingérence réciproque » entre l’Etat et les Eglises. Tant que ce principe est observé, la laïcité est garantie.

Considérez-vous que l’égalité de traitement entre les religions dites anciennes et nouvelles est assurée en Belgique ?

Mehmet Alparslan Saygin : Non. Il s’agit d’ailleurs d’une des améliorations possibles et souhaitables de la « laïcité belge ». En effet, actuellement, et malgré une véritable crise des vocations (ainsi qu'une désaffection continue avec des églises de plus en plus vides mais toujours très bien entretenues), 85 % du financement public est alloué à l’Eglise catholique. La répartition est donc à tout le moins inéquitable, ce qui pose problème au regard du principe d’égalité de traitement des cultes et philosophies reconnus. Il faut que la répartition des moyens corresponde à la réalité sociologique du pays. Elle sera ainsi plus juste d’autant que c’est le contribuable qui finance ces moyens et qu’il serait donc normal que leur redistribution soit plus fidèle à la diversité convictionnelle inhérente à la société, en prenant en compte la part des incroyants.

Vous formulez le vœu de créer une institution publique compétente pour recevoir des plaintes pour « violation du principe de laïcité ». Pouvez-vous en donnez les contours ?

Mehmet Alparslan Saygin : Il s’agirait de s’inspirer de l’expérience de l’Observatoire français de la laïcité, mais d’aller au-delà, en octroyant à une institution publique de protection de la laïcité un pouvoir de contrôle et de sanction.

Pourquoi son existence serait-elle nécessaire, à vos yeux ?

Mehmet Alparslan Saygin : Dans un contexte où l’importance du principe de laïcité est systématiquement et massivement soulignée, il est quand même interpellant qu’il n’y ait aucune instance qui puisse rappeler les règles du jeu en la matière, aussi bien d’ailleurs aux particuliers qu’aux institutions.

« Quand la France éternue, la Belgique s’enrhume. » Quelles influences ont les débats publics français autour de la laïcité - et de ses dérives – en Belgique ? Diriez-vous que cette influence est forcément négative ?

Mehmet Alparslan Saygin : J’observe en France une - inexorable ? - régression des libertés fondamentales, rythmée par des débats publics populistes. L’influence négative sur la Belgique, en tout cas la Belgique francophone (en Flandre, cela se ressent moins), n’est pas négligeable. De la question du port de signes convictionnels à l’école publique aux ingérences dans le fonctionnement du culte islamique, en passant par le port du voile intégral dans l’espace public, le cas absurde du port du « burkini » à la plage ou encore, récemment, l’introduction en catimini d’une disposition dans la loi El Khomri ouvrant la voie à l’interdiction du port de signes convictionnels dans les entreprises privées, ces débats rejaillissent quasi automatiquement sur le plat pays.

Comment percevez-vous les tentatives d’interdiction des signes religieux dans l’enseignement public ? L’idée d’une loi comme celle de 2004 en France creuse-t- elle son sillon dans les partis traditionnels belges ou existe-t-il des résistances fortes ? Et par qui ?

Mehmet Alparslan Saygin : Dans l’enseignement public, il faut distinguer élèves et enseignants. Les élèves sont des usagers du service public et, à ce titre, ils ne sont tout simplement pas concernés par le principe de laïcité. Les enseignants, eux, sont concernés et sont tenus de respecter ce principe. En revanche, la laïcité, à savoir la neutralité, ne porte pas sur l’apparence (car il n’existe aucune apparence objectivement neutre), mais sur le service rendu. Par conséquent, s’il est légitime d’exiger des enseignants qu’ils soient neutres, il est excessif d’élargir cette exigence à leur tenue vestimentaire.

Cela étant, la loi de 2004 est une réalité dont s’inspire régulièrement une série de politiques en Belgique, à défaut de pouvoir la transposer. L’enseignement étant communautarisé depuis 1988, chacune des trois communautés (française, flamande et germanophone) a son propre système éducatif et aucune n'a adopté une norme similaire à la loi française de 2004. Une norme d’interdiction serait largement contestable auprès de la Cour constitutionnelle. Mais, sur le terrain, il y a déjà presque une interdiction générale, sans qu’il faille l’officialiser. Par exemple, actuellement, entre 95 et 100 % des écoles publiques à Bruxelles interdisent le port de signes convictionnels. Une interdiction de fait non contestable auprès de la Cour constitutionnelle mais contestable, en revanche, notamment auprès du Conseil d'Etat.

Depuis plusieurs mois, on observe une remise en cause de l’enseignement des religions dans les écoles publiques. Que dites-vous de ce débat ?

Mehmet Alparslan Saygin : C’est un faux débat, et ce pour deux raisons. La première, c’est qu’on prétend qu’une série de problèmes sociétaux (radicalisation, repli identitaire, discrimination, racisme, etc.) sont dus à l’existence de cours philosophiques (qui comprennent les cours de religion et de morale non confessionnelle, ndlr) dans l’enseignement public. Or, en France, où pareils cours ne sont pas dispensés dans l’enseignement public, on voit bien que tous ces problèmes sociétaux sont aussi manifestes que prégnants.

La seconde, c’est qu’on présente l’existence de ces cours comme contraire au principe de laïcité. Ce faisant, on se méprend à nouveau sur ce qu’implique ce principe. La question pertinente n’est pas de savoir s’il y a ou non des cours philosophiques dans l’enseignement public, mais, dans l’hypothèse où il y en a, de savoir si les pouvoirs publics s’ingèrent ou non, sur une base théologique, dans le contenu des cours ou dans le choix des personnes en charge de ces cours.

France - Belgique : « Inscrire la laïcité dans la Constitution risque de dénaturer le principe »

La laïcité n’est pas inscrite - expressis verbis selon vos mots - dans la Constitution belge. Quels risques voyez-vous à la constitutionnalisation de ce principe, aussi bien en France qu’en Belgique ?

Mehmet Alparslan Saygin : La laïcité est un plat composé d’une série d’ingrédients : l’égalité, la non-discrimination, la liberté (notamment religieuse) et la non-ingérence réciproque entre l’Etat et les Eglises. À partir du moment où un Etat consacre dans sa Constitution ces principes, il est - fût-ce imparfaitement - laïque, comme la France et la Belgique. Sur le principe, il n’y a donc aucun problème dans l’inscription du mot « laïcité » dans la Constitution. Je dis simplement que ce n’est pas une condition sine qua non. D’ailleurs, le mot démocratie ne figure pas dans la Constitution belge, ce qui ne l’empêche pas d’être une démocratie - certes très imparfaite, comme toutes les démocraties.

S’il n’y a pas de problème de principe dans l’inscription de la laïcité dans la Constitution, il est en revanche interpellant de constater que, pour certains, cette inscription rime avec interdiction du port de signes convictionnels et ingérence dans le fonctionnement des institutions religieuses. S’il n’est pas bien compris, ce principe peut par ailleurs faire l’objet d’applications totalement incohérentes. Ainsi, dernièrement, le Conseil d’Etat français a conseillé d’admettre l’établissement de crèches de Noël dans les bâtiments publics et ce, dans un pays où l’obsession pour les signes convictionnels va jusqu’à faire entraver le quotidien des nounous. Le risque, c’est donc de dénaturer le principe de laïcité et de l’instrumentaliser dans l’optique de politiques discriminatoires et attentatoires aux droits et libertés fondamentaux. Il revient à tous les laïques, croyants ou athées, de s’y opposer.

Mehmet Alparslan Saygin, La laïcité dans l’ordre constitutionnel belge, Editions Academia, avril 2015, 120 p., 13,50 €.

OSCE: le Saint-Siège plaide pour le « dialogue constructif » dans la promotion de la tolérance

Conférence sur la lutte contre la discrimination des chrétiens (Traduction intégrale)

Assise, Journée pour la paix, 20 septembre 2016 © L'Osservatore Romano

Assise, Journée pour la paix, 20 septembre 2016 © L'Osservatore Romano

Le Saint-Siège souligne « le rôle clé » du « dialogue constructif » et de l’éducation dans la promotion de la tolérance et de la non-discrimination.

Mgr Janusz Urbanczyk, représentant permanent du Saint-Siège à l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), est intervenu à la conférence sur la lutte contre l’intolérance et la discrimination contre les chrétiens, le 14 décembre 2016.

« Pour que l’éducation soit en mesure d’assurer le développement humain intégral, a-t-il dit, elle doit être utilisée comme un moyen de construire des ponts. »

En rappelant que « l’une des plus grandes tentations de nos jours est de construire des murs plutôt que des ponts », Mgr Janusz Urbanczyk a cité les paroles du pape François sur le danger d’éduquer « à l’intérieur de murs ». Que ce soient « les murs d’une culture sélective, a expliqué le représentant permanent du Saint-Siège, les murs d’une culture de la sécurité », ou « les murs d’un secteur social qui est riche et ne va pas plus loin ».

Mgr Janusz Urbanczyk a aussi souligné « le rôle crucial du dialogue constructif » dans la promotion de la tolérance et de la non-discrimination envers les chrétiens. « L’utilisation abusive du dialogue peut créer et renforcer des modèles d’intolérance et de discrimination, a-t-il averti. Au contraire, son utilisation judicieuse peut contribuer à humaniser les relations entre les peuples … et peut favoriser et développer une opinion publique correcte, mûre et respectueuse. »

Voici notre traduction intégrale de l’intervention du représentant du Saint-Siège.

MD

Intervention de Mgr Janusz Urbanczyk

Monsieur le Modérateur,

La délégation du Saint-Siège tient tout d’abord à remercier les intervenants pour leurs présentations intéressantes et perspicaces.

Dans nos sociétés pluralistes, nous reconnaissons la contribution des religions à la formation de la culture, à l’encouragement au dialogue et à la compréhension mutuelle. Pourtant, nous sommes parfois témoins de la marginalisation et de l’hostilité envers les religions et les croyants qui peuvent constituer de l’intolérance et de la discrimination et peuvent mener à la haine et à des actes de violence.

Un principe fondamental de la vision chrétienne des choses est de rechercher le bien commun plutôt que le simple caractère personnel. Pour les chrétiens, comme l’a écrit le pape François dans son Exhortation apostolique Evangelii Gaudium, « le tout est plus grand que la partie, mais il est aussi plus grand que la somme de ses parties… [Les chrétiens] doivent constamment élargir leurs horizons et voir le plus grand bien qui nous sera bénéfique à tous ». Cette approche, par exemple, a permis à l’Europe, basée sur ses racines religieuses, de concilier diverses traditions culturelles et cette approche permet encore aujourd’hui aux chrétiens de rechercher une compréhension mutuelle, ouverte à un partage accru des valeurs de chacun.

Je voudrais souligner en particulier deux aspects du sujet proposé à la discussion au cours de cette session.

Le premier est le rôle clé de l’éducation dans la promotion de la tolérance et de la non-discrimination puisqu’il aborde les causes profondes du phénomène. À cet égard, il faut espérer que les gouvernements et les dirigeants s’engagent à faire en sorte que tous puissent avoir les moyens matériels et spirituels nécessaires pour vivre dans la dignité, y compris le droit à l’éducation et à la liberté religieuse. Pour que l’éducation soit en mesure d’assurer le développement humain intégral, elle doit être utilisée comme un moyen de construire des ponts. En fait, l’une des plus grandes tentations de nos jours est de construire des murs plutôt que des ponts, et cela est même parfois réalisé par l’éducation. Comme l’a dit le Pape François, « le plus grand échec […] est d’éduquer« à l’intérieur de murs ». Éduquer à l’intérieur des murs : les murs d’une culture sélective, les murs d’une culture de la sécurité, les murs d’un secteur social qui est riche et ne va pas plus loin.

Tenant compte du fait que cette « tentation » est souvent répandue, les États participants ont reconnu dans la Décision 13/06 du Conseil ministériel de Bruxelles la valeur de la diversité culturelle et religieuse comme source d’enrichissement mutuel des sociétés et l’importance de l’intégration comme élément clé pour promouvoir le respect et la compréhension mutuels. En effet, les valeurs religieuses doivent être considérées comme une composante intégrale enrichissante d’une société plutôt que comme l’expression d’une sous-culture qui n’est pas liée à la vie publique.

En outre, dans la décision 10/05 du Conseil ministériel de Ljubljana, les États participants ont encouragé les programmes publics et privés qui promeuvent la tolérance et la non-discrimination et sensibilisent le public à l’existence et au caractère inacceptable de l’intolérance et de la discrimination, en luttant contre les préjugés, l’intolérance et la discrimination contre les chrétiens ainsi que les musulmans et les autres religions. Le Saint-Siège croit fermement que l’éducation est un outil à notre disposition pour construire des ponts pour la paix et la stabilité et pour élever nos jeunes en tant que pacificateurs et promoteurs de la véritable tolérance et de la non-discrimination.

Le deuxième aspect est le rôle crucial du dialogue constructif dans le débat public pour promouvoir la tolérance et la non-discrimination envers les chrétiens. L’utilisation abusive du dialogue peut créer et renforcer des modèles d’intolérance et de discrimination. Au contraire, son utilisation judicieuse peut contribuer à humaniser les relations entre les peuples, mais aussi entre les gouvernements, et peut favoriser et développer une opinion publique correcte, mûre et respectueuse. Comme l’a écrit le Pape François dans son Exhortation apostolique Evangelii Gaudium, le dialogue social est une contribution à la paix. À cet égard, le dialogue interreligieux pourrait aussi être un outil qui renforce la compréhension mutuelle et construit la confiance afin de réduire l’intolérance et la discrimination.

Enfin, pour citer de nouveau le Pape François, « dans son dialogue avec l’État et avec la société, l’Église n’a pas de solution pour chaque question particulière. Avec les divers secteurs de la société, elle soutient les programmes qui répondent le mieux à la dignité de chaque personne et au bien commun. Ce faisant, elle propose de manière claire les valeurs fondamentales de la vie humaine et des convictions qui peuvent alors s’exprimer dans l’activité politique ».

Merci, Monsieur le Modérateur.

© Traduction de Zenit, Constance Roques

Pourquoi continuer le dialogue avec les musulmans?
Réponses du cardinal Tauran

 
card. tauran

 

Cardinal Jean-Louis Tauran © L’Osservatore Romano

«Le dialogue avec les musulmans doit continuer», explique le card. Tauran. Le dialogue est « essentiel pour toute l’humanité » titre C. Roques pour sa traduction (Zenit, 20/12/16) de l’interview du cardinal Tauran par Gianluca Biccini: « Il dialogo non è debolezza. Siamo sconvolti ma dobbiamo resistere alla tentazione del disfattismo« , Osservatore Romano, 21/12/16, p.8 (fichier pdf)

Extraits:

« dialogue de l’espérance, pour répéter que les religions ne sont pas le problème mais qu’elles font partie de la solution« 

« nous avons pu aussi apprécier – en particulier après l’homicide du vieux prêtre Jacques Hamel – comme un réveil de l’identité religieuse de la majorité des Français ainsi que la solidarité exprimée par les musulmans d’outre-Alpes« 

« Tout le monde doit approfondir la connaissance de sa propre religion et comprendre que le dialogue n’est pas réservé aux « spécialistes »« 

Lire la suite de la traduction de l’article

Dépasser la division par la prière, le service du bien commun et le dialogue

« Seuls la prière, le travail pour le bien commun et le dialogue peuvent nous permettre de dépasser la division », écrit le pape François au patriarche œcuménique de Constantinople Bartholomée Ier. Dans un message à l’occasion de la fête de saint André, patron du patriarcat orthodoxe, le 30 novembre 2016, le pape appelle à dépasser les attitudes « du passé ».

Message du pape au patriarche Bartholomée pour la Saint-André (traduction intégrale)

De gauche à droite, le patriarche Bartholomaios, le pape François, l'archevêque Hiéronyme - Capture CTV

De gauche à droite, le patriarche Bartholomaios, le pape François, l'archevêque Hiéronyme - Capture CTV

« Seuls la prière, le travail pour le bien commun et le dialogue peuvent nous permettre de dépasser la division », écrit le pape François au patriarche œcuménique de Constantinople Bartholomée Ier. Dans un message à l’occasion de la fête de saint André, patron du patriarcat orthodoxe, le 30 novembre 2016, le pape appelle à dépasser les attitudes « du passé ».

Comme chaque année pour la fête de l’apôtre André, une délégation du Saint-Siège, conduite par le cardinal Kurt Koch, président du Conseil pontifical pour la promotion de l’unité des chrétiens, s’est rendue au Phanar, à Istanbul (Turquie), pour prendre part aux célébrations. Le cardinal a remis au patriarche Bartholomée un message du pape François, accompagné d’un cadeau.

Le pape y salue notamment le récent document de la Commission mixte internationale sur Synodalité et primauté. Il rend hommage au patriarche orthodoxe qui « ne s’est jamais lassé de soutenir des initiatives de soutien à la rencontre et au dialogue ».

Message du pape François

A Sa Sainteté Bartholomée
archevêque de Constantinople
Patriarche œcuménique

Je me réjouis, Votre Sainteté, de renouveler la tradition de l’envoi d’une délégation à la célébration solennelle de la fête de l’Apôtre saint André, patron du Patriarcat œcuménique, afin de vous transmettre mes meilleurs vœux, bien-aimé frère en Christ, ainsi qu’aux membres du Saint Synode, au clergé et à tous les fidèles rassemblés en mémoire de saint André. De cette façon, je suis heureux de répondre à votre coutume d’envoyer une délégation de l’Eglise de Constantinople pour la fête des saints Pierre et Paul, saints patrons de l’Eglise de Rome.

L’échange de délégations entre Rome et Constantinople à l’occasion des jours de fête honorant respectivement les frères apôtres Pierre et André est un signe visible des liens profonds qui nous unissent déjà. C’est également une expression de notre désir ardent d’une communion plus profonde, jusqu’au jour où, quand Dieu voudra, nous témoignerons de notre amour les uns pour les autres en partageant la même table eucharistique. Dans ce voyage vers la restauration de la communion eucharistique entre nous, nous sommes nourris par l’intercession non seulement de nos saints patrons, mais par la pléiade de martyrs de tous les temps, qui « malgré le drame de la division … ont gardé en eux-mêmes un attachement si radical et si absolu au Christ et au Père qu’ils ont pu aller jusqu’à l’effusion du sang » (saint pape Jean Paul II, Ut unum sint, 83).

C’est pour les catholiques une source de réel encouragement que le solide engagement pour le rétablissement de l’unité des chrétiens ait été confirmé lors du grand et saint Concile qui a eu lieu en juin dernier en Crète. Fidèle à votre tradition, Votre Sainteté est toujours restée consciente des difficultés existants pour l’unité et vous ne vous êtes jamais lassé de soutenir des initiatives de soutien de la rencontre et du dialogue. L’histoire des relations entre chrétiens a cependant été tristement marquée par des conflits qui ont laissé une empreinte profonde dans la mémoire des fidèles. Pour cette raison, certains s’accrochent à des attitudes du passé. Nous savons que seuls la prière, le travail pour le bien commun et le dialogue peuvent nous permettre de dépasser la division et de nous rapprocher les uns des autres.

Grâce au processus de dialogue, durant ces dernières décennies les catholiques et les orthodoxes ont commencé à se reconnaître les uns les autres comme frères et sœurs et à estimer les dons les uns des autres, et ensemble ils ont proclamé l’Evangile, servi l’humanité et la cause de la paix, promu la dignité de l’être humain et la valeur inestimable de la famille, prodigué des soins aux plus nécessiteux, ainsi qu’à la création, notre maison commune.

Le dialogue théologique entrepris par la Commission mixte internationale a aussi apporté une contribution significative à la compréhension mutuelle. Le récent document Synodalité et primauté pendant le premier millénaire : vers une compréhension commune du service de l’unité de l’Église, est le fruit d’une étude longue et intense par les membres de la Commission mixte internationale, auxquels j’étends ma sincère gratitude. Bien que de nombreuses questions demeurent, cette réflexion commune sur la relation entre la synodalité et la primauté durant le premier millénaire peut offrir un fondement sûr pour discerner des façons d’exercer la primauté dans l’Eglise lorsque tous les chrétiens de l’Est et de l’Ouest seront enfin réconciliés.

Je me souviens avec grande affection de notre récente rencontre à Assise avec d’autres chrétiens et représentants de traditions religieuses rassemblés pour offrir un appel unifié à la paix dans le monde entier. Notre rassemblement était une joyeuse occasion d’approfondir notre amitié, qui trouve son expression dans une vision commune des grandes questions qui affectent la vie de l’Eglise et de toute la société.

Votre Sainteté, j’ai voulu partager quelques-unes de mes espérances profondes dans un esprit de sincère fraternité. En vous assurant de mon souvenir quotidien dans la prière, je renouvelle mes meilleurs vœux de paix, de santé et de bénédictions abondantes sur vous et sur tous ceux qui sont confiés à vos soins. Avec des sentiments d’affection fraternelle et de proximité spirituelle, j’échange avec Votre Sainteté une accolade de paix dans le Seigneur.

Du Vatican, le 30 novembre 2016

FRANCOIS

© Traduction de Zenit, Anne Kurian