Justice et Paix

" Je suis homme, l'injustice envers d'autres hommes révolte mon coeur. Je suis homme, l'oppression indigne ma nature. Je suis homme, les cruautés contre un si grand nombre de mes semblables ne m'inspirent que de l'horreur. Je suis homme et ce que je voudrais que l'on fit pour me rendre la liberté, l'honneur, les liens sacrés de la famille, je veux le faire pour rendre aux fils de ces peuples l'honneur, la liberté, la dignité. " (Cardinal Lavigerie, Conférence sur l'esclavage africain, Rome, église du Gesù)

 

NOS ENGAGEMENTS POUR LA JUSTICE T LA PAIX
S'EXPRIMENT DE DIFFÉRENTES MANIÈRES :

En vivant proches des pauvres, partageant leur vie.
Dans les lieux de fractures sociales où la dignité n'est pas respectée.
Dans les communautés de base où chaque personne est responsable et travaille pour le bien commun.
Dans les forums internationaux pour que les décisions prises ne laissent personne en marge.

Dans cette rubrique, nous aborderons différents engagements des Missionnaires d'Afrique, en particulier notre présence auprès des enfants de la rue à Ouagadougou et la défense du monde paysan.

 

Guinée: le report des deux scrutins pose beaucoup de questions

Une affiche électorale en faveur du «oui» au référendum à Conakry, le 24 février 2020.
Une affiche électorale en faveur du «oui» au référendum à Conakry, le 24 février 2020. Carole Valade/RFI

Beaucoup d'incertitudes en Guinée sur l'organisation des législatives et du référendum sur le projet de nouvelle Constitution. Le président, Alpha Condé, a annoncé vendredi dernier le report du double scrutin. Un report suscite de nombreuses interrogations.

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Avec notre correspondant à Conakry, Carol Valade

En Guinée, la balle est désormais dans le camp de la Céni, la Commission électorale qui doit, en collaboration avec la Cour Constitutionnelle, proposer une nouvelle date au chef de l’État. Il convoquera ensuite de nouveau le corps électoral. Et c’est là que se pose la question des délais légaux puisque pour le référendum, le corps électoral doit être convoqué quinze jours avant le vote. Mais pour les législatives, ce délai passe à 70 jours. On s’achemine donc vers un report certainement plus important que les deux semaines annoncées.

L’objectif de ce report, c’est avant tout de faire revenir l’Union africaine et la Cédéao, l’organisation ouest-africaine, dans le processus. Conakry attend donc l’arrivée imminente de leurs équipes. Leur mission sera de vérifier que le logiciel de la Céni permet d’effacer les doublons, les personnes décédées, les mineurs et de résoudre « conformément au Code électoral » la question des deux millions et demi d’électeurs douteux, évoquée par l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) pour expliquer son retrait.

Problème majeur : le président de la Céni déclarait la semaine dernière être bien conscient des failles dans le fichier, mais qu’il n’avait simplement pas les moyens légaux de les radier. Le second problème, c’est l’aspect inclusif du vote réclamé par les institutions internationales. Puisque ce report ne concerne que les partis politiques déjà en lice. Le président Alpha Condé l’a bien précisé. Les poids lourds de l’opposition qui ont déjà décidé de boycotter sont maintenus hors du jeu électoral. Ce qui fait dire au président de l’UFDG, Cellou Dalein Diallo, que ce report n’apaisera pas les tensions.

La carte nationale d’identité cristallise les débats en Côte d’Ivoire

Des hommes devant un étalage de journaux, dans les rues d'Abidjan.
Des hommes devant un étalage de journaux, dans les rues d'Abidjan. KAMBOU SIA / AFP

Elle sera indispensable à l’obtention d’une carte d’électeur en vue des élections de la fin de l’année. Depuis dix jours, les Ivoiriens sont invités à s’enregistrer pour obtenir cette carte d’identité. Hier, le PDCI a tiré à feu nourri sur ce processus d’enrôlement.

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Avec notre correspondant à Abidjan,  Édouard Dropsy

Depuis le début du processus d’enrôlement, le PDCI dénonce un certain nombre de problèmes : le début tardif des opérations, les défaillances techniques, le manque de sites pour se faire enrôler ou encore les 5000 francs à débourser pour le timbre fiscal.

Sur ce point, Maurice Kakou Guikahué, le numéro 2 du parti a fustigé l’achat de cartes d’identité, par des cadres du RHDP dans certaines régions, à leurs sympathisants. « Le RHDP, sur toute l’étendue du territoire national, paie pour ses militants et ses sympathisants. Ça se passe au nord, partout, de la Bagoué, partout, ils ont de l’argent pour payer pour leurs parents. Donc même si ce n’est pas illégal, c’est inélégant. »

Du côté du pouvoir, on rejette toute notion de clientélisme. « C’est un élan de solidarité de certains cadres et je le dis, M. Guikahué pourrait aussi, avec toutes les ressources qu’il a, aider quelques parents à Ganoua, dans la procédure pour la carte d’identité. Je pense que nous avons affaire à une opposition qui n’a aucun projet politique et qui est obligée d’être réduite à l’intoxication », réplique Mamadou Touré, le porte-parole du RHDP.

Rien d’illégal donc, mais le débat sur la carte d’identité vient s’ajouter aux nombreux autres thèmes polémiques à huit mois de la présidentielle.

La situation humanitaire au Burkina Faso de plus en plus critique

Des déplacés internes venus du nord de Burkina Faso, autour d'une pompe à eau, à Kaya, le 22 janvier 2020 (Photo d'illustration).
Des déplacés internes venus du nord de Burkina Faso, autour d'une pompe à eau, à Kaya, le 22 janvier 2020 (Photo d'illustration). OLYMPIA DE MAISMONT / AFP

De plus en plus de personnes sont contraintes de fuir leur domicile suite à la recrudescence des violences. Le pays a besoin de 312 millions de dollars américains pour venir en aide aux populations en détresse.

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Avec notre correspondant à Ouagadougou,  Yaya Boudani

La recrudescence des attaques contre les populations civiles dans plusieurs provinces ces dernières semaines a fait grimper le chiffre des déplacés interne. À la deuxième moitié du mois de février, selon les chiffres officiels, 766 000 personnes ont fui leur domicile pour se réfugier ailleurs, majoritairement des femmes et enfants.

Aujourd’hui, plus de deux millions de personnes ont besoin d’assistance humanitaire selon Laurence Marchal Ilboudo, ministre en charge de l’Action humanitaire. « Les populations ont besoin d'abri pour se loger, de vivres pour se nourrir, ont besoin de se soigner, ont besoin d'assainissement. Ils ont besoin de renforcer la nutrition des enfants, surtout les enfants de moins de cinq ans », s'alarme-t-elle.

► Lire aussi : Burkina Faso: 1,9 million de personnes ont besoin d’eau en urgence, selon Oxfam

Le plan d’urgence pour répondre aux besoins grandissants des populations a été présenté à tous les partenaires du pays. Le Burkina Faso recherche 312 millions de dollars américains pour apporter une assistance d’urgence aux populations et il faut aller vite selon Metsi Makhetha, coordinatrice résidente du Système des Nations unies au Burkina Faso : « Tout l'avenir d'une génération est en jeu par rapport à l'éducation. Donc vous voyez la complexité : il nous faut agir avec une approche multi-sectorielle. »

Avec la crise sécuritaire, plus de 120 centres de santé sont fermés pendant que  150 autres fonctionnent a minima. 2410 écoles sont également fermées, ce qui affecte 318 000 élèves.

L’Union européenne au chevet des personnes déplacées au Burkina Faso

La commissaire européenne Jutta Urpilainen à Nairobi, le 9 décembre 2019.
La commissaire européenne Jutta Urpilainen à Nairobi, le 9 décembre 2019. TONY KARUMBA / AFP

Après une rencontre avec le président burkinabè Roch Marc Christian Kaboré, les deux commissaires annoncent le renforcement de l’aide humanitaire avec le décaissement d’une première enveloppe de 11,45 millions d’euros pour cette 2020.

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Avec notre correspondant à Ouagadougou,  Yaya Boudani

Environ 715 000 personnes ont dû fuir leur village suite aux attaques des groupes armés. Dans la région du centre nord, où s’est rendu le commissaire en charge de l’aide humanitaire, presque tout manque, abris, centre de santé, alimentation, eau potable et assainissement.

Malgré la générosité et la solidarité des familles hôtes, la situation des personnes déplacées internes devient de plus en plus inquiétante, souligne le commissaire européen à la gestion des crises. Janez Lenarcic annonce une première enveloppe d’environ onze millions d’euros en aide humanitaire pour le Burkina Faso cette année.

Venue directement de la Mauritanie après le sommet du G5 Sahel, Jutta Urpilainen, commissaire européenne aux partenariats internationaux assure qu’en plus des véhicules blindés déjà offerts au Burkina Faso dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, des projets de développement seront également soutenus.

« Pour gagner la guerre, nous avons besoin de gagner la paix. Donc nous devons avoir une approche qui prenne en compte les projets de développement. C’est pourquoi on a décidé de venir au Burkina Faso car les défis sécuritaires sont énormes et en même temps nous constatons une grave crise humanitaire ».

Le chef de la diplomatie burkinabè a précisé que l’Union européenne reste le principal partenaire du Burkina Faso pour les questions de sécurité et de développement avec le financement du programme d’urgence pour le Sahel.

Endettées, les économies subsahariennes s’exposent à un choc financier, avertit Moody’s

| Par
L'agence de notation financière Moody's, à New York.

En se tournant vers la Chine et en s’endettant davantage, plusieurs pays d’Afrique subsaharienne deviennent vulnérables financièrement, analyse l’agence de notation Moody’s.

L’Afrique subsaharienne est la seule région du monde où la politique de gestion de la dette s’est dégradée de 2016 à 2018 aux yeux de la Banque mondiale. Les pays qui ont le plus contribué à ce déclin sont l’Éthiopie, le Kenya, le Nigeria, le Congo-Brazzaville, le Mozambique et la Zambie, souligne Moody’s dans un rapport publié mardi 18 février.

Outre le niveau de l’endettement, l’agence de notation analyse également la structure de cette dette et sa gestion. Selon elle, la vulnérabilité à un choc financier a progressé en Afrique subsaharienne en raison de la dette publique.

Entre autres parce que depuis 2012, l’Afrique subsaharienne est la région où la charge de la dette publique a le plus progressé, passant en moyenne de quelque 27 % du PIB à 52 %.

Des conditions de crédit qui se dégradent

L’explosion des eurobonds en particulier apparaît clairement dans les chiffres des quinze États subsahariens qui y ont recouru de 2010 à 2019, avec une collecte qui s’accélère fortement depuis 2016, passant de près de 6 milliards de dollars à plus de 16 milliards en 2019.

dettes

Cette augmentation majeure a été « permise par des conditions de marché globalement favorables et un appétit prononcé des investisseurs internationaux pour le secteur du haut rendement », décrypte Daniela Re Fraschini, vice présidente adjointe et analyste chez Moody’s.

La dette publique des pays subsahariens doit rester stable en 2020 et 2021 du fait des recettes fiscales et de la croissance, sauf pour l’Afrique du Sud et la Zambie, annonce Moody’s. En cas de fragilité, les grosses entreprises d’État accroissent la vulnérabilité de leur pays : c’est le cas en Afrique du Sud, en Namibie, au Ghana et au Cameroun.

Moody’s relève également une détérioration quasi généralisée des conditions de crédit depuis 2012. Seules la RDC, Maurice et le Botswana y échappent, mais les 21 autres pays subsahariens étudiés voient les intérêts de leur dette s’envoler, particulièrement le Ghana et l’Angola.

Au-delà de ces données purement quantitatives, le rapport de l’agence de notation analyse la composition de la dette. Depuis 2012, un mouvement de privatisation du marché de la dette s’est produit. Ainsi, la dette multilatérale (accordée par les banques de développement et les autres agences multilatérales) a nettement reculé, passant de 51 % à 44 % de l’endettement public des pays, quand les créances privées sont passés de 9 % à 16 %.

Une diversification à double tranchant

La dette concessionnelle (bilatérale et multilatérale) représentait ainsi 97 % de la dette publique de long terme en 2008, mais « seulement » 81 % en 2018. Soit un déclin qui reste relatif, puisque l’Afrique subsaharienne est encore plus dépendante de la dette concessionnelle que n’importe quelle autre région du monde.

Toujours est-il que ce recours accru aux marchés internationaux de capitaux contribue pour beaucoup à cette exposition accrue au risque, versatilité et exigence des créanciers oblige, explique Moody’s. Les prêts sont de maturité plus courte et avec un taux d’intérêt supérieur pour le marché de la dette que les prêteurs institutionnels.

soutenir le développement des marchés obligataires à l’attention des entreprises non financières

« Les États subsahariens se sont tournés vers les marchés obligataires internationaux principalement pour financer l’augmentation de leurs dépenses d’investissement public, mais aussi pour soutenir le développement des marchés obligataires à l’attention des entreprises non financières (comme en Afrique du Sud et au Nigeria) », analyse Daniela Re Fraschini.

D’autant plus qu’en parallèle, les créanciers extérieurs au Club de Paris (groupe de créanciers publics issus des pays les plus riches) comme la Chine, l’Inde et l’Arabie saoudite deviennent incontournables, « notamment pour les pays exportateurs de matières premières », précise Moody’s.

Lors de la réunion des coordinateurs africains du Forum sur la coopération Afrique-Chine (Focac) et les institutions chinoises, organisée les 24 et 25 juin 2019.

Les pays les plus endettés auprès de la Chine sont ainsi, selon l’agence de notation, l’Angola, l’Éthiopie, le Congo-Brazzaville, le Cameroun et la Zambie. Connue pour sa « propension à renégocier les prêts existants » (comme en Zambie), la Chine est en effet un créditeur qui exige souvent la renégociation des dettes existantes, ce qui a un impact sur le niveau de liquidité et de solvabilité des États.

Une situation qui peut s’avérer délicate, puisqu’en 2019 le Congo-Brazzaville a ainsi vu sa participation à un programme du FMI repoussée en raison de sa dette chinoise, là où ses voisins de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac) y ont eu accès plus rapidement.

Mais il y a aussi le risque plus « traditionnel » de liquidité, qui pèse sur les États exposés à une dette à faible maturité. L’Angola, le Ghana, le Kenya et la Zambie sont particulièrement vulnérables de ce point de vue-là dans la région, relève Moody’s. Depuis peu, le Togo également s’expose davantage, « en ayant recours à des prêts en monnaie locale à faible maturité et à des taux d’intérêt élevés », payant là son « manque d’accès aux marchés financiers ».

Moody’s termine en relayant le constat fait par la Banque mondiale que si « de nombreux États à faible revenu ont créé un département de gestion de la dette pour faciliter la cohérence entre la politique d’endettement et la politique fiscale, peu modulent effectivement la stratégie de gestion de la dette à moyen terme avec leurs objectifs en politique fiscale », pointant du doigt de faibles capacités et des lacunes en matière de transparence. Avec au rang des mauvais élèves, le Congo-Brazzaville, le Mozambique, et dans une moindre mesure, le Togo et la Zambie, selon Moody’s, qui salue en revanche les efforts accomplis par la Côte d’Ivoire, le Sénégal et la Namibie.