Vu au Sud - Vu du Sud

Le G5 Sahel se penche sur les conflits
communautaires et la scolarisation

Un soldat de l'armée malienne garde l'entrée du G5 Sahel le 30 mai 2018.
© AFP/Sebastien Rieussec

Au Burkina Faso, un conseil des ministres du G5 Sahel se tient à Ouagadougou ce dimanche en prélude à la cinquième session de la conférence des chefs d’Etat membres, prévue pour mardi prochain dans la capitale burkinabè.

Les ministres du G5 Sahel réfléchissent sur les stratégies pour la mobilisation effective des fonds annoncés pour la force conjointe et le programme d’investissement prioritaire dans les domaines de l’agriculture, l’élevage et l’hydraulique. Ils se pencheront également sur le cas des conflits communautaires et les fermetures d’écoles.

« Nous allons effectivement aborder les questions liées aux conflits communautaires et à la scolarisation, à la question de l'éducation dans notre espace. Chacun de nos Etats a fait des réflexions à son niveau et nous allons mettre en commun ces réflexions et proposer des solutions concrètes à la conférence des chefs d'Etat », a précisé à RFI Kané Aichatou Boulama, présidente du conseil des ministres du G5 Sahel.  

Sur le plan militaire, les opérations ont commencé et se poursuivent dans tous les fuseaux. Malgré ces actions militaires, des détachements militaires du Burkina Faso ont subi des attaques terroristes. Le général Hanena ould Sidi, commandant de la force conjointe du G5 Sahel, précise cependant que ces attaques ont eu lieu en dehors de la zone d'action de la force conjointe. 

« Dans le fuseau où la force a travaillé, il n'y a pas eu d'attentats, il n'y a pas eu d'actions terroristes. Les actions se sont passées en dehors en dehors de la zone d'action de la force conjointe. Nous sommes en train d'étudier les moyens mes mieux adaptés, les plus pertinents pour une coopération plus forte et plus accentuée entre les forces armées et de sécurité et la force conjointe », a déclaré à RFI le général Hanena ould Sidi.

Les ministres du G5 Sahel soumettront aux chefs d’Etat les conclusions de leurs travaux et la feuille de route pour l’année 2019.

Sur le plan militaire, depuis le 15 janvier 2019, la force conjointe du G5 Sahel a mené déjà trois opérations dans tous les fuseaux selon le commandant de la force le général mauritanien Hanena ould Sidi. D’autres opérations seront lancées dès ce lundi.

[PORTRAIT 5/5] Présidentielle au Sénégal:
Idrissa Seck, le silencieux

L'ancien Premier ministre sénégalais Idrissa Seck.
© AFP/George Gobet

Au Sénégal, ils sont cinq dans la course à la présidentielle : le président sortant Macky Sall, Idrissa Seck, Madicke Niang, Issa Sall et Ousmane Sonko. A moins d'un mois du scrutin du 24 février, RFI vous présente chaque jour l’un des candidats à la présidentielle. Ce vendredi 1er février, portrait d’un routier de la politique sénégalaise qui a débuté sa carrière il y a plus de trente ans : Idrissa Seck. Il a choisi une stratégie particulière pour cette campagne : le silence.

Dans un pays ou la diatribe est un sport national, le silence d’Idrissa Seck, 59 ans, dont quarante de politique, étonne. Cela fait presque un an qu’Idrissa Seck n’a pas accordé d’interview. Pour « Ndamal Kadior », (le « petit de Thiès ») la priorité c’est le terrain, ses rares déclarations sont donc pour ses partisans.

Parcourir le Sénégal pour essayer de convaincre les électeurs que son heure est venue, la méthode est connue, parfois payante. Pour ses partisans comme l’enseignant Makhfou Faye, la stratégie du terrain, celle de donner la priorité aux électeurs, va payer : « Le silence est d'or. Il a rencontré des milliers et des milliers de Sénégalais. Il est devenu le principal challenger du candidat Macky Sall. »

Depuis des mois, Idrissa Seck réserve donc sa parole à ses soutiens et seules quelques vidéos fuitent sur les réseaux sociaux. Le candidat espère obtenir le soutien des exclus de cette présidentielle, notamment Khalifa Sall, qu’il ira « chercher à la prison s’il est élu », et de Karim Wade, avec qui les échanges se multiplient. Il a obtenu mercredi 30 janvier le ralliement de Malick Gakou.

De la prison à la primature

Il veut rétablir la vérité avec la population. « Moi, je n'ai aucune envie d'être le président d'un peuple que je trompe ou qui me trompe. Je ne cours derrière rien du tout. Il faut que ce soit très clair [rires étouffés]. »

En plusieurs décennies de carrière, Idrissa Seck, économiste respecté, a tout connu : Premier ministre d’Abdoulaye Wade à 43 ans, en prison trois ans plus tard durant cent quatre-vingt-dix-neuf jours, soupçonné de détournements de fonds publics puis blanchi. Second à la présidentielle de 2007, cinquième en 2012 avec 8% des voix, Idrissa Seck est « fini pour la politique », car il a laissé passer sa chance et n’a plus aucun poids, estiment ses détracteurs. « Idrissa Seck est là depuis très longtemps. Il a raté son coup en 2012. Je ne vois aucune chance pour lui d'être président de la République », dit un Dakarois interrogé.

La campagne électorale débute officiellement ce dimanche. Silencieux, Idrissa Seck va sans aucun doute donner de la voix pour expliquer comment il compte faire chuter Macky Sall, et répéter à nouveau qu’il veut « restaurer la confiance avec le peuple ». Difficile de dire aujourd’hui si le peuple l’a entendu.

Hydrocarbures : le document qui dévoile la stratégie
du Niger pour profiter de la manne pétrolière

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Développement de la production d’hydrocarbures et gestion durable des revenus pétroliers sont les deux piliers de la nouvelle politique nigérienne, qui vise à faire du pétrole un des leviers du développement du pays.

Le 11 janvier, le Conseil des ministres de la République a adopté le projet de décret portant approbation de la Politique pétrolière nationale. « La vision qui sous-tend la Politique pétrolière nationale est la suivante : faire du secteur pétrolier nigérien un moteur majeur de développement économique et social pour les populations actuelles et les générations futures, en gérant les ressources de façon responsable et respectueuse de l’environnement. », détaille le compte-rendu du conseil des ministres.

Jeune Afrique a pu consulter le document de 90 pages, rédigé à la demande du ministère du Pétrole par le cabinet Okan Partners, spécialisé dans l’accompagnement des politiques publiques en Afrique*, qui détaille cette politique.

Son objectif : que le secteur pétrolier soit, à l’horizon 2025, le « moteur » de l’économie du Niger, « en représentant près d’un quart de la richesse du Niger, près de la moitié des ressources fiscales, l’essentiel des exports du pays et une partie très significative de l’emploi formel qualifié », note le Premier ministre, Brigi Rafini, dans la préface. Pour le ministre nigérien du Pétrole, Foumakoye Gado, il était nécessaire d’avoir un document d’orientation du secteur, alors que les dernières années ont été marquées par de nouvelles découvertes.


>>> À LIRE : Découverte d’un nouveau bassin pétrolier à la frontière entre le Niger et l’Algérie


Selon le nouveau texte, les revenus pétroliers futurs doivent être utilisés pour le développement du pays.

Un oléoduc passant par le Bénin paraît plus sûr qu’un passage par le Tchad

Diversifier les partenaires

La hausse de la production d’hydrocarbures passe avant tout par une meilleure exploration du territoire nigérien. Des actions doivent également être entreprises pour mieux promouvoir les blocs pétroliers auprès des opérateurs. « L’enjeu est de diversifier nos partenaires dans le domaine pétrolier », confie le ministre nigérien du Pétrole, selon lequel seules trois entreprises sont pour l’instant présentes : le chinois CNPC, le britannique Savannah Petroleum et l’algérien Sipex (Sonatrach).

Un autre enjeu important est celui de l’évacuation du brut nigérien. Si un passage par le Tchad est envisagé, l’option d’un oléoduc passant par le Bénin « paraît plus favorable en termes de critères de modularité, de risques politiques et sécuritaires et de développement régional ». La construction de cette infrastructure permettrait accroître la compétitivité du brut nigérien, dont le coût actuel d’évacuation est estimé  à 15 à 20 dollars (13 à 17 euros) par baril. Les négociations sont bien avancées pour ce projet estimé à 1 à 2 milliards de dollars, et des annonces pourraient être faites dans les mois qui viennent, nous confie une source proche du dossier.

Autre point soulevé : celui du climat des affaires, pour lequel « il est nécessaire de fluidifier les processus administratifs afin de faciliter les opérations des pétroliers ». Plus globalement, la gouvernance du secteur pétrolier, marquée par « l’absence de cadre définissant des règles précises régissant l’utilisation des revenus pétroliers », va devoir évaluer, afin de devenir plus cohérente et fonctionnelle.

Politique de contenu local

« L’État nigérien doit s’engager dans une gestion durable de ses revenus pétroliers, encourageant le développement économique et social du pays et assurant l’équité intergénérationnelle », souligne le document. Pour Foumakoye Gado, « la décision du Niger de reprendre sa place dans l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives (Itie) [annoncée fin janvier] va permettre d’assurer un contrôle sur ces recettes ».

Deux autres axes de réformes secondaires sont envisagés : améliorer le fonctionnement du secteur de la distribution pétrolière et mettre en place une politique de contenu local, afin de maximiser l’impact de la production d’hydrocarbures sur l’économie du Niger.

Au niveau de la distribution pétrolière, « le mécanisme de fixation des prix tout au long de la chaîne de valeur pétrolière (du producteur de brut à la pompe) doit […] être revu en profondeur ». Autre réforme à mettre en place, une politique de lutte contre la fraude aux hydrocarbures, « pour préserver les recettes fiscales et limiter la dégradation de la situation de la Sonidep et des distributeurs privés ».

Pour « maximiser » l’impacts des découvertes pétrolières sur l’économie du Niger, il faut un renforcement du contenu local, afin d’accroître la participation des entreprises nigériennes à l’industrie pétrolière. Mais cela passe par l’amélioration de « l’offre de compétences locales nécessaires au développement de l’amont et l’aval pétrolier », à travers la création de programme de formation à tous les niveaux, en collaboration avec les opérateurs pétroliers et les acteurs de l’éducation.

« Le document validé en conseil des ministres donne les grands axes stratégiques de cette politique de contenu local. Il reste maintenant à en définir les modalités de mise en œuvre opérationnelle, qui seront fixées par décret », précise Amaury de Féligonde, associé d’Okan.

Le pétrole : un quart du PIB nigérien en 2025

Au total, si les investissements en matière d’export du brut par oléoduc sont mis en place à l’horizon 2021-2022, le secteur pétrolier nigérien pourrait représenter 24 % du PIB en 2025 (contre 4 % en 2017), 45 % des recettes de l’État (contre 19 % en 2017), 68 % des exportations (contre 16 % en 2016), et 8 à 12 % des emplois salariés formels (contre 5 à 8 % en 2012).

Le coût de la mise en œuvre de cette politique atteint 60-70 millions de dollars, estime le rapport, excluant les dépenses liées au travaux d’exploration, aux infrastructures de production et au transport, qui devraient être prises en charge par les opérateurs privés. 35 % de cette somme doit servir à réaliser des études permettant une meilleure connaissance du sous-sol. « Le reste du budget concerne essentiellement l’amélioration de l’offre de compétences locales (15-20 % du budget), l’opérationnalisation de l’oléoduc vers le Bénin (15-20 % du budget) et la réforme du cadre institutionnel (5-10 % du budget) », indique le document.

*Okan a notamment accompagné la politique ivoirienne de soutien aux PME baptisée Plan Phoenix, en 2016.

[PORTRAIT 4/5] Présidentielle au Sénégal: Madické Niang, le dissident

Madické Niang, ministre sénégalais des Affaires étrangères, à Moscou le 8 février 2011.
© Alexander Natruskin / Reuters
 

Au Sénégal, ils sont cinq dans la course à la présidentielle : le sortant Macky Sall, Idrissa Seck, Madicke Niang, Issa Sall et Ousmane Sonko. A moins d'un mois du scrutin, RFI dresse chaque jour le portrait de l’un des candidats. Aujourd’hui, jeudi 31 janvier : Madické Niang, du Parti démocratique sénégalais, parti qui a toujours désavoué sa candidature, la jugeant dissidente face à celle de Karim Wade.

Devant une des nombreuses mosquées de Dakar, Ibrahima Faye porte un gilet orange. C’est pour mieux être vu sur les routes : l’homme est mécanicien et répare bénévolement les voitures qui vont dans la ville sainte de Touba. « C'est quelqu'un de bien. Il a un caractère ferme, et il aide les gens. La chose la plus importante dans la vie, c'est aider. Il aide. C'est quelqu'un de superbe », affirme-t-il.

Touba est la destination préférée de Madické Niang pour faire campagne. Le candidat bénéficie d’une grande popularité dans ce bastion historique du PDS. Mais Madické Niang manque d’appui sur le territoire, estiment ses détracteurs. Le candidat assure qu’il est loin d’être seul : « La réalité est là pour apporter un démenti cinglant. J'ai des représentants partout. »

Pour le pays, il souhaite s’inspirer de son mentor : l’ancien président Abdoulaye Wade. « Ma vision est aujourd'hui celle que le président Wade avait déclinée en libéralisme social qui peut encourager la concurrence tout en soutenant les couches les plus défavorisées », dit-il.

Un exercice d'équilibriste

Mener son aventure revendiquant sa filiation avec Abdoulaye Wade mais sans le PDS, c’est l’équation que doit encore résoudre le candidat. En effet, début octobre 2018, Madické Niang se porte candidat à la présidentielle. Un coup d’éclat rapidement désavoué par la majorité du Parti démocratique sénégalais. Désavoué surtout par Abdoulaye Wade. L’ancien président signe un communiqué au vitriol dans lequel il accuse le dissident d’être téléguidé par le pouvoir, directement par Macky Sall.

Pourtant, Madické Niang a toujours assuré s’être positionné comme le plan B, le recours en cas d’invalidation de la candidature de Karim Wade. L’homme a vu juste. Le candidat investi par le PDS a bien été exclu du scrutin par le Conseil constitutionnel. La ligne du parti, elle, n’a pas bougé : c’est Karim Wade ou rien.

Né à Saint-Louis, Madické Niang est un fidèle parmi les fidèles d’Abdoulaye Wade. Ministre des Affaires étrangères en 2009, il est encore l’avocat de l’ancien président lors de l’affaire Babacar Seye. A 65 ans, l’homme assure qu’il sera la surprise de l’élection.

Papis Lo, étudiant, est quant à lui mitigé sur les chances de Madické Niang. « C'est vrai qu'il a pris ses responsabilités. Il veut partir tout seul. Pour moi, il ne sait pas ce qu'il veut. Je pense que c'est ça son problème. »

Reste à savoir si le vote des électeurs du parti est conditionné par le soutien d’Abdoulaye Wade. Un geste que le candidat n’a toujours pas obtenu.

Chronologie et chiffres clés

Procès Gbagbo et Blé Goudé:
leurs avocats réclament leur libération

Charles Blé Goudé (g.) et Laurent Gbagbo (dr.)
© Photos : AFP/Reuters/Montage RFI

L'ancien président de Côte d'Ivoire, Laurent Gbagbo, et l'ex-leader des Jeunes patriotes, Charles Blé Goudé, ont été tous deux acquittés le 15 janvier de crimes contre l'humanité commis lors des violences post-électorales de 2010-2011. Mais ils ne sont pas libres pour autant : au lendemain de leur jugement, la procureur Fatou Bensouda a fait appel pour demander leur maintien en détention. Ce mardi 29 janvier, les avocats de la défense ont rendu leur mémoire : ils réclament la libération immédiate de leurs clients.

Dans ce document, la défense rappelle que Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé ont été acquittés de crimes contre l'humanité, le 15 janvier dernier. Ce jugement en fait des hommes libres, qui ont le droit de se déplacer, poursuit la défense. Il faut des « circonstances exceptionnelles » pour restreindre leur liberté. Or, ces conditions ne sont pas réunies, insiste la défense.

D'abord parce que cela reviendrait à violer les principes établis par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme.

« Risque de fuite » ?

Ensuite, parce que le procureur évoque un « risque de fuite » en ne s'appuyant que sur des hypothèses, sans jamais fournir d'éléments concrets, souligne la défense.

Critique également de la démarche du procureur qui, dans son mémoire, soulève des « erreurs de droit » commis par les juges de première instance. Me Emmanuel Altit, l'avocat principal de l'ex-président ivoirien, demande aux cinq juges d'appel de renvoyer le dossier à la chambre de première instance pour qu'elle se prononce.

En cas de remise en liberté conditionnelle, la défense souhaite pouvoir déposer ses propositions en temps utile.

Un appel sur le fond du dossier

La procureur Fatou Bensouda a fait appel pour demander leur maintien en détention, le temps qu'elle puisse faire appel sur le fond du dossier dans quelques mois. Elle estime qu'il y a de réels risques que ces deux anciens responsables politiques ivoiriens ne prennent la fuite et ne répondent pas aux éventuelles convocations de la Cour.

Vendredi, la chambre d'appel tient une audience publique pour discuter avec chaque partie de la remise en liberté de Laurent Gbagbo et de Charles Blé Goudé.