Le 31 janvier 2018, la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a rendu un arrêt de chambre (non définitif) dans l’affaire Sekmadienis Ltd. c. Lituanie (n°69317/14) portant sur des publicités commerciales attaquant le christianisme et la moralité publique. La Cour a considéré que les juridictions lituaniennes, en condamnant le fabricant de vêtements à une amende, avaient violé son droit à la liberté d’expression.[…]
D’après le rapport du CCDH – EXP, les « devoirs et responsabilités » de ceux qui exercent la liberté d’expression semblent avoir un poids de plus en plus faible dans la jurisprudence récente de la Cour européenne.[…]
Les devoirs et responsabilités constitutifs de la liberté d’expression sont négligés et les choix religieux « anticonformistes » sont privilégiés. Le relativisme religieux et moral n’est donc pas un constat mais un choix politique et idéologique imposé par le Conseil de l’Europe et l’ONU à des peuples réticents. […]
Même si c’est au christianisme que les publicités portent atteinte, le contexte plus général de la contestation de la liberté d’expression par des communautés musulmanes permet de mieux comprendre l’approche de la CEDH. C’est en réalité la crainte d’un verrouillage de la liberté d’expression par l’islam qui semble conduire la Cour à ne pas tenir compte de l’offense vécue par les chrétiens lituaniens et à dégager des principes généraux permissifs. En effet, les juges de Strasbourg doivent trancher de plus en plus de litiges concernant la liberté d’expression sur la religion musulmane et veulent à juste titre protéger la faculté de provoquer pour briser des idoles et susciter le débat. Cette liberté doit en effet être protégée même lorsque des communautés musulmanes tentent d’imposer une censure par la violence, pouvant aller jusqu’à des assassinats comme le 7 janvier 2015 dans les locaux de Charlie Hebdo à Paris. L’actualité de l’islam perturbe l’appréciation de la Cour européenne et les réactions disproportionnées de croyants musulmans refusant toute critique de leur religion incitent les juges à ignorer de manière générale l’avis des communautés religieuses, même les plus pacifiques.
Or, il est difficile (voire impossible) d’appliquer les mêmes règles à des religions n’ayant pas du tout la même relation au débat fondé sur la raison et la recherche sincère de la vérité. En effet, alors que les communautés chrétiennes se plaignent parfois d’offenses visant à blesser gratuitement et ayant un impact négatif général sur l’ensemble de la société et sur la morale, des communautés musulmanes tendent à réagir fortement et systématiquement afin de faire obstacle à tout débat, ce dont témoignent deux affaires pendantes à la CEDH.[…]
Dans un objectif de paix, les différentes institutions et juridictions doivent favoriser les droits et libertés permettant la recherche sincère de la vérité, y compris religieuse, et les débats contradictoires fondés sur la raison et mêlant fermeté et courtoisie.
Lire l’article complet: « Comment concilier les libertés d’expression et de religion ? » par Nicolas Bauer, ECLJ, fév. ’18.