" Je suis homme, l'injustice envers d'autres hommes révolte mon coeur. Je suis homme, l'oppression indigne ma nature. Je suis homme, les cruautés contre un si grand nombre de mes semblables ne m'inspirent que de l'horreur. Je suis homme et ce que je voudrais que l'on fit pour me rendre la liberté, l'honneur, les liens sacrés de la famille, je veux le faire pour rendre aux fils de ces peuples l'honneur, la liberté, la dignité. "(Cardinal Lavigerie, Conférence sur l'esclavage africain, Rome, église du Gesù)
NOS ENGAGEMENTS POUR LA JUSTICE T LA PAIX S'EXPRIMENT DE DIFFÉRENTES MANIÈRES :
En vivant proches des pauvres, partageant leur vie. Dans les lieux de fractures sociales où la dignité n'est pas respectée. Dans les communautés de base où chaque personne est responsable et travaille pour le bien commun. Dans les forums internationaux pour que les décisions prises ne laissent personne en marge.
Dans cette rubrique, nous aborderons différents engagements des Missionnaires d'Afrique, en particulier notre présence auprès des enfants de la rue à Ouagadougou et la défense du monde paysan.
Griotte discriminée
Sénégal : une griotte discriminée jusque dans la tombe ?
Au Sénégal, la fin de l’année a été agitée par une polémique sur la tentative d’inhumation d’une griotte dans un village de la région de Thiès. Friction entre tradition et modernité ou provocateurs mal intentionnés ?
Dans toute société, l’heure de l’amendement doit-il un jour sonner pour les traditions ? Faut-il, au contraire, craindre des malédictions, à trop bousculer les us et coutumes ?
Ces débats ne sont parfois que des prétextes à tensions entre communautés. Les usages ancestraux ont souvent bon dos lorsque y déroger rompt le fragile équilibre entre communautés. Depuis le 25 décembre, une affaire d’inhumation fait polémique, conduisant les défenseurs sénégalais des droits humains à mettre le doigt entre l’arbre des croyances et l’écorce des convictions contemporaines…
Région de Thiès. Commune de Notto-Diobass. Village de Pout-Diack. Hameau de Pout-Dagne. Le jour de Noël, Khady Faye décède. Sa famille demande à ce qu’elle soit enterrée dans le cimetière de Pout-Diack, mais on lui répond qu’elle devrait chercher une concession ailleurs, au motif que la défunte appartenait à la caste des griots. Selon certains, une sépulture attirerait « le malheur » sur la localité.
Provocation ou discrimination ?
La vidéo virale d’une habitante ulcérée de Pout-Dagné met le feu aux poudres. La parente en deuil y interpelle le président Macky Sall. Les langues s’enveniment. Rapidement, dénonçant une discrimination flagrante entre citoyens, plusieurs organisations de défense des droits humains s’en prennent au chef de village, qui refuserait l’autorisation d’inhumer. Le 28 décembre, Amnesty International Sénégal, la Rencontre africaine pour la défense des droits de l’homme (Raddho), la Ligue sénégalaise des droits humains (LSDH) et Africa Jom Center « exhortent les autorités religieuses, musulmanes et chrétiennes à continuer la sensibilisation en vue de l’éradication de la discrimination basée sur les castes et l’ascendance, qui est contraire aux préceptes prônés par ces religions et les lois de la République ».
DES VOIX ACCUSENT UNE FRANGE DE LA COMMUNAUTÉ DES GRIOTS DE TENTER UNE PROVOCATION
Dans certains médias sénégalais, des voix dédouanent le chef et accusent à mots couverts une frange sectaire de la communauté des griots de tenter une provocation en refusant le principe informel qui aurait jusque-là garanti sa cohabitation apaisée avec, notamment, les Sérères. Pour certains, cette caste gagnerait à se satisfaire de son « propre » cimetière, présent à moins de 2 kilomètres des habitations de Pout-Dagné.
Compromis
La gestion sociale doit-elle rester soumise au système de castes ? Le débat mérite d’être posé lorsque, selon des croyances résiduelles, certains citoyens sont « impurs » au seul motif de leur ascendance. Rappelant que le cas de la griotte décédée récemment n’est pas isolé – un fait similaire s’était déroulé en 2019 –, les organisations des droits humains appellent « les autorités étatiques compétentes à trouver sans délai une solution définitive à cette situation ». Et « que force reste à la loi ».
Une délégation du ministère de l’Intérieur et de la Sécurité publique s’est déplacée à Pout-Diack et le sous-préfet, diplomate, promet de couper la poire en deux : fournir aux griots un site dans le village, mais spécifique. En attendant la « solution définitive », la défunte de Pout-Dagné a été inhumée à Kissane.
Contre l'excision
Comment le Mali, le Burkina et le Nigeria luttent contre l’excision
Mis à jour le 4 janvier 2022 à 10:53
Par Argentina Matavel Piccin
Directrice du bureau régional du Fonds des Nations unies pour la population (UNFPA) en Afrique de l’Ouest et en Afrique centrale
Malgré un recul sensible depuis les années 1990, les mutilations génitales féminines sont toujours un fléau en Afrique de l’Ouest et en Afrique centrale. Focus sur le Burkina Faso, le Mali et le Nigeria, qui abordent le problème de façons très différentes.
En 2022, les mutilations génitales féminines (MGF) et leurs justifications culturelles – conformisme, pression sociale – subsistent malheureusement en Afrique de l’Ouest et en Afrique centrale. On y enregistre toujours les plus forts taux d’excision au monde. Mais ces pratiques sont en recul progressif : dans les 30 pays où les MGF sont les plus répandues, moins d’un tiers des filles les subissent aujourd’hui, contre près de la moitié en 1994.
Un progrès permis par des actions conjointes menées par les pays touchés, leurs sociétés civiles et un important programme conjoint du Fonds des Nations unies pour la population (UNFPA) et de l’Unicef lancé en 2009 et financé par l’Espagne, la France, l’Islande, l’Italie, la Norvège, la Suède et l’Union européenne (UE). En 2020, en dépit de la pandémie de Covid-19, des résultats probants ont été obtenus en vue de l’élimination des MGF d’ici à 2030, notamment au Burkina Faso, au Mali et au Nigeria. Tour d’horizon.
Au Burkina Faso, les MGF concernent 68 % des femmes, mais reculent de génération en génération : 87,4 % des 45-49 ans ont subi cette pratique, contre 42,4 % des 15-19 ans. Ce progrès s’explique par un programme national de prévention et de sanction exemplaire dans la sous-région, porté par une volonté politique forte. Les autorités se sont engagées à éliminer les MGF à l’horizon 2030. Entre 2009 et 2015, 223 dossiers ont été portés en justice, aboutissant à la condamnation de 384 personnes, dont 31 exciseuses. En 2020, sur 40 personnes poursuivies, 31 ont été jugées et condamnées à des peines allant de 6 mois fermes à 24 mois avec sursis et des amendes conséquentes de 760 à 1 370 euros.
128 567 FILLES DE MOINS DE 14 ANS ONT ÉTÉ IDENTIFIÉES COMME POTENTIELLES VICTIMES EN 2020
L’exemple burkinabè montre que le combat doit se faire de manière à la fois préventive et par un suivi institutionnel, sur plusieurs fronts : l’appropriation politique et plus largement sociale de cet enjeu collectif, ainsi que le respect effectif de la loi. Voilà pourquoi 128 567 filles de moins de 14 ans ont été identifiées comme potentielles victimes en 2020, et leurs parents, 24 506 personnes, sensibilisés au respect de leur intégrité. En outre, 4 135 relais d’influence, chefs religieux et coutumiers, directeurs de structures de santé et d’établissement scolaires ont été engagés dans la promotion des droits de l’enfant et de l’abandon des MGF dans les villages ciblés.
Les jeunes servent aussi de vecteur puissant pour faire passer le message : 46 255 garçons au Burkina ont été sensibilisés comme acteurs de changement en faveur de l’élimination de la pratique au sein de leurs communautés, tandis que 91 082 filles se sont déclarées disponibles comme relais pour la prévention des MGF. Enfin, l’effort de sensibilisation mené auprès de 1 215 militaires, dont 950 femmes, a conduit l’armée à engager une campagne de réparation des séquelles de l’excision en 2021.
Le Mali, en revanche, reste avec la Sierra Leone l’un des rares États sans texte de loi contre les MGF. Ce pays, où 83 % des femmes sont excisées, affiche le plus fort taux de prévalence avec la Guinée, la Gambie et la Sierra Leone. Un avant-projet de loi sur les Violences basées sur le genre (VBG), en préparation depuis 2017, reste à adopter.
LA COUR DE JUSTICE DE LA CEDEAO A IMPOSÉ EN 2021 UN MORATOIRE DE DEUX ANS AU MALI
En raison du contexte sécuritaire et de la résistance des leaders religieux et traditionnels, la loi pénalisant les MGF et les mariages d’enfants est reléguée au second plan. La plainte déposée par des organisations de la société civile contre l’État malien auprès de la Cour africaine des droits de l’homme et du peuple (CADHP) en vue de relever l’âge du mariage de 16 à 18 ans et l’adoption d’une loi contre les MGF a abouti à une interpellation du gouvernement. La Cour de justice de la Cedeao a par ailleurs imposé en 2021 un moratoire de deux ans au Mali, pour harmoniser la législation nationale en lien avec les textes ratifiés par le pays.
En attendant, 888 filles et femmes survivantes des complications des MGF ont été identifiées et prises en charge en 2020. La sensibilisation se fait sans relâche, même durant la pandémie de Covid-19 : en 2020, 317 communautés de Kayes, Koulikoro et Ségou ont rejoint le mouvement national d’abandon des MGF et mariages d’enfants, et signé une convention. Pas moins de 235 660 personnes ont participé aux activités de communication sur les MGF, mariages d’enfants et violences basées sur le genre.
Au Nigeria, des avancées vers l’élimination des MGF à l’horizon 2024
Au Nigeria, où un quart des femmes du Nigeria a subi des MGF, ces pratiques sont en recul. Une nouvelle politique nationale chiffrée en vue de l’élimination de l’excision a été adoptée sur la période 2020-24 par deux ministères (Santé, Affaires féminines et développement social). Un grand pas en avant, qui mérite d’être salué. L’État fédéré d’Oyo, qui affiche l’une des plus fortes prévalences, s’est prononcé en faveur de leur éradication. Dans l’État d’Osun, l’UNFPA, en collaboration avec Action Health Incorporated et le ministère local de la Santé et des Affaires féminines, a invité des dirigeants communautaires, des policiers et d’autres agents des forces de l’ordre à participer à une réunion de concertation. Celle-ci a abouti à la signature d’un document pour œuvrer collectivement à l’élimination des MGF.
501 COMMUNAUTÉS ONT DÉCLARÉ L’ABANDON DE CES PRATIQUES ET 233 AUTRES ONT MIS EN PLACE DES SYSTÈMES DE SURVEILLANCE
En 2020, 501 communautés ont déclaré publiquement l’abandon de ces pratiques, couvrant une population estimée à environ 2,8 millions de personnes. Par ailleurs, 233 communautés ont mis en place des systèmes de surveillance qui ont protégé 2 462 filles. Des actions de plaidoyer et de concertation se sont tenues avec les chefs religieux (chrétiens, musulmans et traditionnels) dans plus de 600 communautés. Le réseau de jeunes hommes EndFGM Jingles a produit des messages dans les langues de cinq États fédérés, touchant 3,6 millions de personnes. Le Nigeria a entrepris un grand nombre d’actions en ce sens, prouvant qu’avec de la volonté politique, l’engagement des leaders traditionnels, religieux et des communautés elles-mêmes, l’évolution des mentalités va dans le bon sens.
Homosexualité au Sénégal
Sénégal : pourquoi l’opposition veut durcir la loi contre l’homosexualité
Une proposition de loi criminalisant les actes jugés « contre-nature » a été déposée par des députés de l’opposition. Dans un pays où les relations entre personnes de même sexe constituent déjà un délit, le camp présidentiel évoque un « faux débat » à visées électoralistes.
Mais pour le groupe de onze députés, majoritairement de l’opposition, à l’initiative de la proposition et à la tête duquel se trouve Mamadou Lamine Diallo, la démarche se fait « l’écho des légitimes inquiétudes de l’écrasante majorité des croyants de ce pays et de nombreuses autorités religieuses du Sénégal ».
Déposée mercredi 22 décembre au Parlement, la proposition de loi modifie l’alinéa 3 de l’article 319 du code pénal en punissant « d’une peine de cinq à dix ans d’emprisonnement ferme et d’une amende d’1 million à 5 millions de FCFA (environ 7 600 euros) sans possibilité d’accorder des circonstances atténuantes, quiconque aura été reconnu coupable d’actes contre-nature ».
La démarche s’inscrit dans un mouvement beaucoup plus large impulsé par le collectif « And Samm Jikko Yi » (Ensemble pour la sauvegarde des valeurs, en wolof) qui regroupe plusieurs associations islamiques dont la très influente et conservatrice Jamra qui s’est érigée en gardienne des mœurs et des valeurs religieuses. Fin mai, à l’appel de cette dernière, une marche avait rassemblé à Dakar plusieurs milliers de manifestants favorables à une plus grande criminalisation de l’homosexualité.
« Protéger la nation sénégalaise »
Car le code pénal rend déjà délictuel « les actes impudiques ou contre-nature entre deux individus de même sexe » en les condamnant à une peine d’emprisonnement « d’un à cinq ans et d’une amende de 100 000 à 1 500 000 francs de CFA (environ 2 300 euros) ». « La législation du Sénégal qui date de 1966 est claire et nette à ce sujet. Il n’est point besoin d’y ajouter ou d’en retirer une virgule », affirme Aymérou Gningue dans son communiqué.
LE PEUPLE SÉNÉGALAIS A CHOISI UN MODE DE VIE QUI SEMBLE ÊTRE LE PLUS CONFORME À SES CONVICTIONS MORALES, RELIGIEUSES ET HISTORIQUES
Ce n’est visiblement pas assez pour Mamadou Lamine Diallo et ses collègues qui, dans leur exposé, présentent l’homosexualité, le lesbianisme, la bisexualité ou la transsexualité comme des « déviances sexuelles ». Rangées dans la même catégorie que la nécrophilie et la zoophilie, ces pratiques [qui ] heurtent « la morale et les croyances, frisent l’indécence, sapent la cohésion sociale et détruisent les fondamentaux de ce pays de valeurs », disent-ils.
« Le code pénal dans son état actuel est évasif. Il n’est pas précis, se justifie Cheikh Bamba Dieye, député signataire de la proposition de loi. Et ce dont il s’agit, ce n’est pas simplement de la criminalisation de l’homosexualité. Il s’agit de donner un sens à un projet national selon lequel le peuple sénégalais a choisi un mode de vie qui semble être le plus conforme à ses convictions morales, religieuses et historiques ». Selon lui, le Sénégal est menacé par les valeurs d’une société occidentale qui « veut s’imposer à tous les citoyens du monde ». D’où l’urgence de « protéger la nation sénégalaise », écrivent les députés.
L’influence des confréries musulmanes
Toutefois certaines personnalités s’interrogent sur l’opportunité de cette loi à moins d’un mois des élections locales du 23 janvier, dans un pays majoritairement musulman et où la vie politique et sociale est influencée par les confréries musulmanes. « On doit se questionner sur le dessein politique qui se cache derrière cette initiative. Le débat sur les questions religieuses est en train d’être instrumentalisé. Alors qu’il y a d’autres priorités qu’une loi criminalisant l’homosexualité », affirme un député de la majorité présidentielle.
L’OPPOSITION VEUT SE SERVIR DE CELA POUR RALLIER À SA CAUSE DES MARABOUTS, DES IMAMS, DIT ME DJIBRIL WAR
« L’opposition veut se servir de cela pour rallier à sa cause des marabouts, des imams dans un seul intérêt électoraliste, en prêchant le faux et le mensonge », renchérit Me Djibril War, député de l’APR, le parti présidentiel. « C’est très facile d’y voir un dessein électoraliste alors qu’on pose un débat de fond sur notre société. Cela n’a aucun sens. La loi vient juste d’être déposée. Et elle ne sera examinée que bien après les élections. Où est le gain politique en terme électoral ? », répond Cheikh Bamba Dieye.
« Valeurs de culture et de civilisation »
En Afrique, les relations entre personnes de même sexe sont interdites dans plus de la moitié des pays africains. En février, le président Macky Sall, interrogé sur la question, avait estimé que « les normes, qui sont le condensé de nos valeurs de culture et de civilisation », ne favorisaient pas une dépénalisation de l’homosexualité. Tout en précisant que « ceux qui ont l’orientation sexuelle de leur choix ne [faisaient] pas l’objet d’exclusion ».
Toutefois, dans la foulée des manifestations de mai dernier, plusieurs cas d’agression avaient été signalés par des membres de la communauté LGBTQ+. Et début juin, quatre vidéos avaient émergé sur les réseaux sociaux, montrant de supposés homosexuels être pris à partie en raison de leur orientation sexuelle.
LE SÉNÉGAL N’ACCEPTERA JAMAIS L’HOMOSEXUALITÉ. PERSONNE NE POURRA NOUS L’IMPOSER, A DÉCLARÉ AÏSSATA TALL SALL
Selon l’émission Les Observateurs de la chaine française France 24, les hommes agressés dans les différentes vidéos avaient ensuite été arrêtés et détenus par la police. Le 21 décembre, Aïssata Tall Sall, la ministre des Affaires étrangères, a réitéré devant les députés de l’Assemblée nationale, l’opposition du Sénégal à reconnaître l’homosexualité. « Le Sénégal n’acceptera jamais l’homosexualité. Personne ne pourra nous l’imposer ».
La proposition de loi doit faire l’objet d’un examen par le bureau de l’Assemblée nationale. Elle sera ensuite communiquée au président de la République pour avis. Elle pourra alors être débattue en plénière et soumise au vote si elle est jugée recevable. Mais le Parlement étant dominé à une majorité écrasante par la coalition au pouvoir, il y a de fortes chances que le projet n’aboutisse pas.
« Un groupe parlementaire n’a aucune compétence pour rejeter, de surcroît avec un simple communiqué de presse politique, une proposition de loi, a pour sa part mis en garde l’ONG islamique Jamra, le 25 décembre. C’est la séance plénière, qui est publique, que les électeurs attendent avec impatience ».
Transitions Afrique de l'Ouest ?
Au Tchad, en Guinée et au Mali, le retour des transitions à durées indéterminées
Les Forces soécuakes guinéennes célèbrent la chute d'Alpha Condé en septembre 2021
On croyait les juntes passées de mode, les voilà de retour. Dans trois pays aux trajectoires à première vue similaires, la prise du pouvoir par les militaires souligne l’impuissance de la communauté internationale.
Ils sont trois militaires au verbe rare, en battle dress, bérets rouges ou verts des unités d’élite, lunettes fumées, rangers couleur sable, à avoir fait irruption sur l’avant-scène entre avril et septembre 2021. Tous trois sont nés au début des années 1980 et se sont formés sur le terrain plutôt que dans de prestigieuses écoles militaires étrangères, chacun ayant une expérience du combat. Un général et deux colonels, qui ont en commun d’être parvenus au pouvoir par des voies extra-démocratiques et de s’être proclamés présidents de transitions à durées pour l’instant indéterminées. Trois ovnis politiques, dont nul ne peut prédire le destin en cette année 2022.
MAHAMAT IDRISS DÉBY ITNO FAIT FIGURE DE BON ÉLÈVE FRÉQUENTABLE
Aux yeux de la communauté internationale, le Tchadien Mahamat Idriss Déby Itno, 37 ans, est sans doute le plus acceptable. Même si son accession à la tête de l’État n’a pas suivi le cursus constitutionnel, on ne saurait lui reprocher d’avoir renversé son prédécesseur – lequel était son propre père, tué sur le front. Quant au processus de dialogue et de réconciliation interne, mantra obligé de toutes les transitions, il est incontestablement plus avancé à N’Djamena qu’à Bamako ou à Conakry.
Dans les règles de l’art
Corollaire de ce qui précède : ni « Kaka », ni aucun membre du comité militaire n’a fait l’objet de sanctions. Là où ses collègues malien et guinéen sont persona non grata, lui voyage, participe aux sommets et déjeune à l’Élysée. En comparaison d’un Assimi Goïta, 38 ans, ou d’un Mamadi Doumbouya, à peine quadragénaire, colonels putschistes dans les règles de l’art, lesquels ont placé leurs « victimes » en résidence étroitement surveillée avant d’afficher leur volonté de « refonder » l’État (ce qui ne veut rien dire, sauf à signifier le caractère indéfini de la transition), Mahamat Idriss Déby Itno fait figure de bon élève fréquentable.
Alors que l’on croyait les juntes passées de mode, les voilà donc de retour. Malgré toutes les tentatives pour en neutraliser la capacité de nuisance via la distribution de privilèges et le recours aux promotions ethniques, les armées malienne et guinéenne n’ont jamais cessé de jouer un rôle clé en coulisses, ni de disposer d’une marge de manœuvre et d’intervention dans le champ politique.
À l’instar de Blaise Compaoré, de Robert Mugabe et d’Omar el-Béchir, c’est la perte du soutien de l’armée qui a été le facteur clé de la chute d’Ibrahim Boubacar Keïta et d’Alpha Condé. Mais si voir dans ces coups d’État une régression démocratique au sens strict du terme relève de l’évidence, ils n’en permettent pas moins de mettre le doigt sur une décennie d’impuissance, de la part de l’Union africaine et des organisations régionales comme la Cedeao, à en prévenir les causes.
L’APPLICATION DE LA CHARTE AFRICAINE DE LA DÉMOCRATIE, DES ÉLECTIONS ET DE LA GOUVERNANCE S’EST PARTOUT HEURTÉE AU PRINCIPE D’INERTIE
La Charte africaine de la démocratie, des élections et de la gouvernance adoptée en 2012 fait pourtant figure de table de la loi, elle qui prévoit de « sanctionner les moyens illégaux d’accéder au pouvoir ou de rester en fonction ». Mais son application, face aux révisions constitutionnelles portant atteinte aux principes de l’alternance qui ont concerné une douzaine de pays à partir de 1998 (on oublie souvent que le coup d’envoi de ces révisions a été donné en Namibie par Sam Nujoma), s’est partout heurtée au principe d’inertie. Et lorsqu’en Zambie, au Malawi, au Burkina, au Niger ou au Sénégal, des chefs d’État ont dû renoncer au fameux troisième mandat, c’est à la mobilisation populaire et démocratique qu’ils ont cédé, non aux pressions de l’extérieur.
Dindons de la farce
Impuissantes face aux « mandats de trop », les organisations continentale et régionales africaines le sont a fortiori face aux coups d’État, si ce n’est en décrétant à l’encontre de leurs auteurs des sanctions chroniquement inefficaces, voire contreproductives lorsqu’elles renforcent le ressentiment de la rue à leur encontre, comme on le voit à Bamako et à Conakry.
Ces acteurs extérieurs en sont donc réduits à une exigence minimale : des transitions militaires courtes, débouchant dès que possible sur des élections auxquelles les membres des juntes au pouvoir sont priés de ne pas se présenter. La question du retour à l’ordre démocratique et constitutionnel est restreinte à sa seule dimension électorale, laquelle est elle-même limitée au fait de savoir si ces élections contiennent un niveau acceptable de fraudes. Si oui, le brevet sera délivré.
Autre impuissance corollaire de l’irruption des militaires au pouvoir : le constat d’échec des partis d’opposition traditionnels, pris de court par les putschs et dindons de la farce des transitions sur lesquelles ils n’ont aucune prise. Leur vieillissement, ainsi que celui de leurs leaders aux tendances autocratiques, apparaît au grand jour de Conakry à N’Djamena via Bamako, au point de ne plus constituer une offre attractive aux yeux d’une population en quête de nouveaux acteurs contestataires, plus en phase avec l’époque.
Mouvements citoyens, formations religieuses, néo-partis urbains actifs sur les réseaux sociaux : les cadets de la politique prospèrent à l’ombre des treillis, dont ils constituent souvent les principaux soutiens. Enthousiastes, sensibles aux rhétoriques anti-françaises, anti-onusiennes voire anti-Cedeao – perçue comme l’instrument de chefs d’État à la botte de l’Occident – mais aussi aisément manipulables du fait de leur déficit organisationnel, ces munitions des militaires au sein de la société échappent largement à l’emprise de leurs aînés en politique. Et sans doute incitent-elles un Assimi Goïta ou un Mamadi Doumbouya à prolonger leur bail au pouvoir, bien au-delà de sa date hypothétique de péremption.
UN NARRATIF VOLONTIERS POPULISTE QUI MASQUE LA CAPTATION DES RESSOURCES FINANCIÈRES
Les juntes version 2021-2022 ressemblent finalement beaucoup à celles des années post-coloniales, à la grande époque des coups d’État en série. Tout en préparant les conditions de leur propre pérennisation, elles développent un discours de rupture avec le passé, dénonçant les turpitudes d’une classe politique usée, appuyée sur des partis clientélistes et élitistes, corrompue et discréditée. Un narratif volontiers populiste et nationaliste qui masque – tout au moins pour un temps – la captation des ressources financières, ainsi que la mise en place d’un réseau et d’un capital politiques destinés à consolider leurs assises.
Face aux pressions venues de l’extérieur, les militaires – en particulier ceux de Conakry et de Bamako – font le dos rond, « refondent » l’État, entretiennent le flou sur leurs intentions et glissent de délais non tenus en échéances non respectées. Jusqu’au jour, inéluctable, où ils deviendront eux aussi impopulaires.
Mahamat Idriss Déby Itno, de la transition aux ambitions ?
Dans l’hélicoptère qui le ramène à N’Djamena dans la nuit du 18 au 19 avril, Mahamat Idriss Déby a-t-il déjà conscience qu’une page de l’histoire du pays s’est tournée ? Depuis de longues minutes, il sait son père dans un état critique. Touché par balles lors des combats face aux rebelles du Front pour l’alternance et la concorde au Tchad (FACT), victime d’une hémorragie impossible à contenir sur le terrain du Kanem, Idriss Déby Itno ne survivra pas.
Le 20 avril, neuf jours après la présidentielle qu’il a remportée dès le premier tour, son décès est annoncé. La stupeur est totale mais Mahamat Idriss Déby a déjà pris les rênes. En accord avec les siens ainsi qu’avec le président de l’Assemblée nationale, Haroun Kabadi, successeur constitutionnel en cas de décès du chef de l’État, le voilà à la tête d’un Conseil militaire de transition.
Depuis, les regards sont braqués sur lui. Soucieux de satisfaire à une relative ouverture politique, il a nommé Albert Pahimi Padacké à la primature et offert à l’opposition plusieurs postes de ministre, quitte à provoquer du mécontentement au sein de l’ancien parti au pouvoir, le Mouvement patriotique du salut (MPS). À ses interlocuteurs, notamment au sein de l’Union africaine, ou au Français Emmanuel Macron, il a réitéré son engagement de tenir une nouvelle présidentielle au plus tard dix-huit mois après le début de la transition, soit avant le mois de novembre 2022. Mahamat Idriss Déby Itno (il a ajouté « Itno » à son patronyme depuis son accession au pouvoir) a également initié un dialogue national, dont il a confié les préparatifs à un ancien rebelle, Acheikh Ibn Oumar.
L’ancien patron de la Direction générale de la sécurité intérieure et des services de l’État a en outre entamé des discussions avec les mouvements rebelles et leurs chefs, notamment Timan Erdimi, cousin en résidence surveillée au Qatar, Mahamat Nouri ou Mahamat Mahdi Ali, chef de file du FACT. À l’heure où nous écrivions ces lignes, ceux-ci étaient, comme près de 300 autres opposants et ex-opposants armés, sur le point d’être amnistiés. Des négociations continuaient de se dérouler, sous l’égide de l’ex-président Goukouni Weddeye, mais l’organisation de pourparlers entre Mahamat Idriss Déby Itno et les chefs rebelles était actée. L’événement devrait avoir lieu au Qatar, Doha ayant accepté de prendre en charge une partie de son financement. Le véritable dialogue national devrait ensuite suivre à N’Djamena au milieu de l’année 2022.
Quelle en sera la teneur ? L’opposition espère en faire un grand débat, à l’instar de ce qu’avait été la conférence nationale de 1993, tandis que le gouvernement insiste sur la nécessité de travailler à un nouveau « vivre-ensemble ». Les questions autour de la forme de l’État doivent également y être abordées, notamment celle du fédéralisme, idée qu’Idriss Déby Itno avait toujours combattue. Surtout, les participants devront se prononcer sur la possibilité ou non pour les acteurs de la transition de se présenter à la présidentielle. Albert Pahimi Padacké, déjà candidat en 2021, ne fait pas mystère de ses ambitions. Quant à Mahamat Idriss Déby Itno, il n’a ni fermé la porte ni affiché de volonté claire de se maintenir à la tête de l’État. Écoutera-t-il les conseils d’un clan angoissé à l’idée de perdre sa place au sommet ? Succombera-t-il lui-même aux sirènes du pouvoir ? À N’Djamena, il a toujours été plus difficile de lâcher les rênes que de les prendre.
Lorsque Mamadi Doumbouya se déplace à l’aéroport de Conakry pour y accueillir Nana Akufo-Addo et Alassane Ouattara, ce 17 septembre, ceux-ci ne sont pas encore tout à fait ses homologues. Le putschiste n’a pas encore endossé le costume de chef d’État qui sera le sien pour une durée à ce jour indéterminée. Face aux présidents ghanéen et ivoirien, il se montre tout à la fois ferme et déférent. Il a pris le pouvoir depuis une dizaine de jours, et c’est déjà la deuxième délégation de la Cedeao qu’il reçoit. La veille, l’organisation a finalement décidé de les sanctionner, lui et ses proches : gel des avoirs et interdiction de voyager pour les membres de la junte, sommés d’organiser des élections sous six mois.
Le convoi qui file à vive allure dans la capitale quadrillée ne peut toutefois pas éviter les attroupements de Guinéens venus apporter leur soutien au commandant des Forces spéciales et brandir des slogans hostiles à la Cedeao. Mamadi Doumbouya savoure-t-il cet enthousiasme alors qu’il conduit la délégation auprès d’Alpha Condé ? Sans doute, même s’il sait que la partie s’annonce serrée.
Trois mois plus tard, le 12 décembre, la Cedeao a décidé de maintenir les sanctions, en dépit des gages de bonne volonté concédés par la junte. Le dernier en date ? Un déménagement. Fin novembre, le président déchu, Alpha Condé, a été transféré à la résidence de son épouse en banlieue de Conakry. Officiellement, en « homme libre », selon l’entourage de Doumbouya. En vérité, en résidence étroitement surveillée.
DOUMBOUYA A RÉUSSI À S’ENTOURER DE SES PROCHES, TOUT EN OFFRANT LA VITRINE D’UN GOUVERNEMENT CIVIL
D’autres garanties ont été données par les autorités de transition : nomination d’un Premier ministre dont le profil est à même de rassurer la communauté internationale (le technocrate Mohamed Béavogui), et d’un gouvernement ; élaboration d’une Charte de la transition interdisant formellement aux membres de la junte de participer au processus électoral à venir. En plaçant certains militaires à la retraite pour mieux les intégrer dans son équipe – en l’occurrence, le général Aboubacar Sidiki Camara, à la Défense, et le général Bachir Diallo, à la Sécurité –, Doumbouya a même réussi à s’entourer de ses proches, tout en offrant la vitrine d’un gouvernement civil.
Un bémol subsiste, et il est de taille : la durée de la transition, que les voisins régionaux et les partenaires de la Guinée voudraient évidemment la plus courte possible, n’a toujours pas été fixée. « Attendez la nomination du CNT [Conseil national de transition] », répètent les autorités de transition, qui évoquent une nécessaire « refondation de l’État », préalable à l’établissement de tout calendrier électoral. Pas question non plus de qualifier de « crise » la situation politique guinéenne : Doumbouya a rejeté la nomination, jugée « inopportune », du Ghanéen Mohamed Ibn Chambas comme médiateur de la Cedeao. Tandis que la pression s’accentue sur son homologue malien Assimi Goïta, sommé d’organiser des élections d’ici à février 2022, Mamadi Doumbouya reste de marbre. Depuis le 5 septembre 2021, c’est lui qui impose son rythme.
Assimi Goïta, indéchiffrable président
Des coups d’État, le Mali en a connus. Mais jamais encore le pays n’avait eu un président de transition de l’acabit d’Assimi Goïta. Un colonel taiseux, difficile à cerner, que personne ne connaissait avant le 18 août 2020 et qui, à 38 ans seulement, se retrouve à la tête d’un pays stratégique. Un pays qui, depuis 2012, n’en finit pas de sombrer, menaçant d’entraîner avec lui toute une partie de la sous-région.
En mai dernier, alors que depuis des mois Bamako – et toutes les chancelleries de la place – se perdait en conjectures, il est subitement sorti de ses gonds. Furieux après la mise à l’écart de l’un de ses proches, Sadio Camara, du ministère de la Défense qui lui avait été confié, Goïta a rappelé à tout le monde qu’il était le seul maître à bord, mettant fin aux fonctions du président de la transition, Bah N’Daw, et de son Premier ministre, Moctar Ouane. Ce jour-là, peu lui importait la désapprobation de la Cedeao et de l’ensemble de la communauté internationale. Pas sûr qu’il y soit aujourd’hui plus sensible.
Après ce deuxième coup de force, ils ont été nombreux à penser que Goïta avait pris goût au pouvoir et qu’il allait (enfin) se révéler. Mais il n’en a rien été. Des mois après avoir officiellement endossé le costume de président de transition, il est toujours aussi absent de la scène politique et reçoit très peu. « Il est pourtant impératif qu’il sorte de son silence pour jouer son rôle de rassembleur », s’impatiente Moussa Sey Diallo, cadre l’Union pour la République et la démocratie (URD).
Effacé
La transition était censée s’achever en février 2022, mais il n’en sera rien, Goïta lui-même en a pris acte, mi-novembre. Que veut-il réellement ? La question se pose avec d’autant plus d’acuité que ce président auto-proclamé semble n’avoir que peu de vision, déléguant beaucoup et se rangeant facilement derrière les stratégies qu’esquissent des barons de son gouvernement.
Charge à son Premier ministre, Choguel Maïga, de planifier les assises nationales, de mettre sur pied l’organe unique qui devra organiser les élections et de gérer le mécontentement exprimé par l’opposition et jusque dans les rangs du Mouvement du 5-juin-Rassemblement des forces patriotiques (M5-RFP), dont le chef du gouvernement est issu.
On ne le voit pas davantage sur la scène internationale. Goïta a fait d’Abdoulaye Diop, son ministre des Affaires étrangères, son VRP et c’est lui qui effectue tous les déplacements et « porte le message du président de la transition » aux partenaires étrangers.
Pour la transition malienne, 2022 sera une année cruciale. Un nouveau calendrier doit être proposé d’ici le 31 janvier, une fois que les assises auront eu lieu. Assimi Goïta acceptera-t-il de transmettre le flambeau à un civil ? Isolé, avec la seule perspective d’un soutien russe qui suscite un tel tollé qu’il tarde à se concrétiser, le jeune colonel va devoir assumer ses choix et faire preuve de clarté. Aujourd’hui, la confiance entre lui et ses homologues est rompue. Parviendra-t-il à inverser la tendance ?
Mahamadou Bonkoungou
Togo : financement de projets et clientèle traditionnelle, le double pari de Bonkoungou avec IB Bank
En reprenant la Banque togolaise pour le commerce et l’industrie (BTCI), le magnat burkinabè Mahamadou Bonkoungou veut répliquer dans le secteur bancaire la réussite qu’il a bâtie avec Ebomaf dans le domaine du BTP.
C’est dans les locaux du ministère togolais des Finances que l’argentier du pays, Sani Yaya, et les équipes de IB Holding, dirigé par le banquier marocain Nabil Tahari, ont conclu le 20 décembre le contrat de cession de l’historique Banque togolaise pour le commerce et l’industrie (BTCI).
Une signature réalisée sous le regard attentif de Mahamadou Bonkoungou, fondateur d’IB Holding, mais loin des caméras des journalistes.
Ce passage de témoin consacre la prise de contrôle à hauteur de 90 % de la BTCI par le magnat burkinabè du BTP entré dans le monde bancaire ; le reliquat de 10 % du capital restant dans les mains de l’État togolais.
Force historique
Dans un communiqué conjoint, ce dernier se félicite de cette cession qui vise in fine à « consolider la structure financière de l’institution dont le capital social sera porté à 27 milliards de F CFA par apport en fonds propres de IB Holding, censé renforcer sa solvabilité et sa liquidité afin de permettre à la banque de mieux jouer son rôle dans le financement de l’économie nationale ».
En acquérant la BTCI, IB Holding entend, de son côté, augmenter ses parts de marché au Togo en se différenciant de la concurrence et en diversifiant son portefeuille clients tout en travaillant à améliorer le service offert à ces derniers.
BTCI intègre donc IB Holding et devient ainsi IB Bank Togo. « Malgré le changement de dénomination sociale, ce qui a fait la force historique de la banque sera préservé, assure le repreneur. Nous voulons garder la clientèle traditionnelle et développer de nouveaux produits axés sur la digitalisation. »
Ni l’exécutif togolais ni IB Holding, entité qui chapeaute les filiales bancaires du groupe de Bonkoungou, n’ont communiqué le montant de la transaction.
NOUS ALLONS LANCER DE NOUVEAUX PRODUITS COMME L’EXPÉRIENCE DIGITALE SÉCURISÉE
Sur ce dossier, le patron du groupe Ebomaf a été conseillé par le cabinet Africa Development Consulting appuyé par les équipes d’IB Bank sur le volet due diligence et de l’avocat d’affaires burkinabè Dramane Sanou sur le volet juridique.
Du côté de Lomé, la Commission de privatisation, supervisée par le ministre des Finances, s’est attachée les services de la compagnie financière Cadmos, du cabinet KPMG Côte d’Ivoire et du cabinet d’avocats ENSafrica, représenté par Sébastien Thouvenot.
Apport de 20 milliards de F CFA
Dans la foulée du closing de l’opération, Mahamadou Bonkoungou a annoncé son intention de renflouer la banque publique, qui était jusqu’ici placée sous administration provisoire. « Sur instruction du PDG, nous avons décidé de porter le capital à 27 milliards de F CFA, soit un apport de 20 milliards, explique le banquier marocain Nabil Tahari, patron de IB Holding. En devenant l’une des plus importantes capitalisations de la place financière de Lomé, nous voulons montrer le niveau d’engagement de IB Holding et tirer profit du potentiel de croissance de l’ex-BTCI. »
IB Bank Togo, qui reprend un réseau d’une vingtaine d’agences totalisant plus de 70 000 clients, entend mettre en œuvre un plan de transformation prévoyant notamment le financement des grands projets inscrits dans la feuille de route gouvernementale 2020-2025.
NOUS SOMMES OUVERTS À TOUTES OPPORTUNITÉS DANS LA ZONE UMOA, EN PRIORITÉ EN AFRIQUE CENTRALE
« Nous allons lancer de nouveaux produits comme l’expérience digitale sécurisée afin de conserver notre clientèle historique mais aussi d’en conquérir une nouvelle », assure-t-on dans l’entourage du patron du groupe de construction.
Dans cet optique, IB Bank Burkina doit être rattachée à la holding courant 2022 et les participations de l’unique actionnaire transférées vers l’entité centrale.
L’appétit de Bonkoungou pour la finance a démarré en 2017 dans son pays par la prise de contrôle pour 7 milliards de F CFA de la Banque de l’habitat du Burkina Faso, transformée en International Business Bank (IB Bank). Le groupe Ebomaf a ensuite créé ex nihilo IB Bank Djibouti l’an dernier.
Selon nos informations, Mahamadou Bonkoungou étudierait de près la possibilité d’ouvrir le tour de table de IB Holding à de nouveaux partenaires. En attendant, il demeure à l’affût. « Nous travaillons sur de nouvelles acquisitions et nous sommes ouverts à toutes opportunités dans la zone Umoa en priorité en Afrique centrale », confie ainsi Nabil Tahari.