Vu au Sud - Vu du Sud

Togo: pouvoir et opposition
se mobilisent

Lomé, le 5 octobre 2017. La coalition des quatorze partis de l'opposition manifeste dans les rues depuis cinq mois (image d'illustration).
© MATTEO FRASCHINI KOFFI / AFP
 

Les positions sont bien tranchées, tous les protagonistes parlent de dialogue, mais restent campés sur leurs positions. Le gouvernement, le parti au pouvoir et ses militants vont plus loin, il faut avoir recours au référendum, ce qui n'est du goût de l'opposition. Ce samedi, de part et d'autre, on a mobilisé à travers le pays pour tenter de montrer qui peut compter sur le peuple.

A Tsévié, Atakpamé, Sotouboua, Tchamba, Kara et Dapaong, le parti au pouvoir a mis les moyens pour montrer que le peuple ne s'arrêtait pas qu'à Lomé. A Tsévié notamment, chef-lieu de la région maritime, pas très loin de la capitale, nous avons vu les militants, ils sont  sortis de tous les hameaux.

L'unique message pour cette marche, dite « de la paix » : siffler la fin de la récréation et exhorter Faure Gnassingbé à aller à l'essentiel. Emmanuel Kodzo Adedze, vice-président de l'Union pour la République dans la région maritime (Unir), a les mots pour le dire : « Nous disons que, aujourd’hui, la logique voudrait qu’on aille au référendum. Nous, militantes et militants des grands partis unis, nous disons au président de la République, allons au référendum pour que l’essentiel soit conservé pour le pays. »

 

Une discussion préalable au référendum

La coalition des quatorze partis de l'opposition manifeste dans les rues depuis cinq mois. Elle appelle aux réformes constitutionnelles et de façon consensuelle, elle n'entend pas aller à un référendum sans une discussion préalable, Jean-Pierre Fabre, chef de file de l’opposition : « On va voir dans les jours qui vont venir s’ils feront le référendum, ou si nous, nous surestimons parce que nous pensons que nous ferons en sorte qu’il n’y ait pas de référendum. On verra s’ils atteindront leurs objectifs. »

De part et d'autre, les positions restent bien tranchées. Le pouvoir gagne du temps, la coalition de l'opposition se dit toujours mobilisée pour répondre du tac au tac. A Kara, ville natale du président, les choses ne sont pas allées jusqu'au bout : les militants ont été dispersés quand certains se sont mis à réclamer la libération de Kpatcha Gnassingbé (accusé d'avoir fomenté un coup d'Etat en avril 2009 contre son demi-frère, le président Faure Gnassingbé), incarcéré pour atteinte à la sûreté de l'Etat.

 

Un article paru dans le journal "La Croix" du 10 janvier 2018
Au Burkina Faso,

la famille élargie
est une richesse

La communauté familiale constitue une sphère de solidarité. Elle offre un socle sur lequel construire la société.

Une partie de la famille Bikienga, dans la cour familiale, à Ouagadougou.
ZOOM 


Une partie de la famille Bikienga, dans la cour familiale, à Ouagadougou. / Erwan Rogard pour La Croix.


Ce matin-là, au réveil, une brume sèche enveloppe Ouagadougou. Dans les rues en damiers de la capitale du Burkina Faso, des cohortes de petites motos se faufilent entre les files de voitures. Alignés le long des rues en terre battue et sans trottoir, qu’on appelle ici les « six-mètres » – par opposition aux axes goudronnés –, les magasins se succèdent, surmontés d’enseignes rétro, souvent en français. « Quincaillerie »« Vente d’amortisseurs« Élégance couture »… Des bâtiments un peu déglingués avec leurs vitrines d’un autre âge, ouvertes sur l’extérieur, constellent l’espace urbain d’articles en tout genre.

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Du coup, on remarque à peine ces portails métalliques aux couleurs défraîchies, entrebâillés de temps à autre pour laisser passer un ou deux enfants, cartable au dos, suivis d’un adulte enfourchant son deux-roues. Derrière de hauts murs, à l’abri des regards et du vacarme de la chaussée, se niche une cour familiale bordée de petites maisons basses, en banco (briques rouges), coiffées d’un toit rudimentaire.

Au milieu de la cour, à même le sol, des récipients finissent de sécher au soleil, des seaux, des bassines remplies d’eau savonneuse témoignent d’une vaisselle récente. Dans un coin, un transat et un canapé invitent à faire une sieste ombragée. Quelques poules, une chèvre en liberté, qui serviront, en cas de besoin, de monnaie d’échange sur le marché. Sur une même parcelle vivent en commun plusieurs générations d’une famille élargie bien au-delà de ses liens biologiques : la communauté.

Dans la société africaine traditionnelle, le groupe l’emporte sur l’individu. Chaque membre de la famille a le devoir de le sécuriser. Chacun tient une place fondamentale et complémentaire, chacun joue sa partition au sein de la maison commune. « La communauté autour d’une même natte, d’une même table est la première richesse du pays. Elle est une force à valoriser pour créer des projets durables », affirme Simon Nacoulma. Cet entrepreneur social, sociologue de formation, a pris appui sur cette énergie collective pour créer à Cissin, un quartier pauvre de Ouagadougou, une bibliothèque (lire l’article p. 14), une maison de la femme, un centre de santé, etc.

Au sein de la famille, l’union fait la force. Ainsi, dans les campagnes, tous les membres du foyer participent à la construction de la case. L’homme monte les murs, l’enfant porte l’eau, la femme prépare les repas… À la fin, ils soulèvent de terre, tous ensemble, le toit de chaume et le posent sur les briques, dans un même mouvement solidaire.

Cela étant, complémentarité ne signifie pas égalité. La place des anciens est au sommet de la pyramide, selon une vision ascendante de l’honneur. Plus on est âgé, plus on a de la valeur. Le « vieux » est le pilier de la famille, son historien aussi, celui qui va transmettre les us et coutumes, les interdits. Il est le garant de la cohésion familiale. En accordant sa confiance aux membres de la communauté, l’ancêtre donne à chacun la motivation, le propulse en avant. « En cela, il est l’architecte de la famille », analyse le sociologue.

Dans la cour familiale, c’est l’esprit de partage et d’entraide qui domine. Ainsi, dans l’ethnie des Mossis, la belle-mère suit la grossesse de sa belle-fille, l’aide à accoucher, s’occupe du bébé pour que la jeune maman puisse se reposer ou aller faire ses courses. Les petits-enfants s’attachent peu à peu aux grands-parents qui tiennent un vrai rôle éducatif. Ce qui conduit parfois les parents à renoncer à déménager !

L’amour familial est lui aussi partagé. De fait, l’enfant appartient à toute la communauté. « Chez les Mossis, il est de bon ton que les parents biologiques n’éduquent pas leurs propres enfants après un certain âge », témoigne Simon Nacoulma. La mission revient alors à l’oncle, qui a autorité sur son neveu ou sa nièce. Cette forme d’échange (« je te confie mon enfant et tu me confies le tien ») renforce l’esprit de communauté familiale. On estime aussi que les liens d’autorité, moins chargés affectivement, sont de nature à mieux guider le jeune. Ainsi, le garçon ou la fille se confie d’abord à son oncle, qu’il ou elle appelle « papa ». Et c’est encore l’autre « père » qui prend les grandes décisions concernant le mariage de l’enfant de son frère.

Certains liens de parenté peuvent être imaginaires, à portée symbolique, et se transmettent de génération en génération. Les « parentés à plaisanterie » sont des pratiques répandues en Afrique de l’Ouest. Ainsi, une grand-mère peut prétendre que son petit-fils est son « mari ». Un jeune homme joue à traiter son oncle maternel en « rival », comme si son épouse était aussi « la sienne ». Sous couvert de moqueries, de blagues et de fous rires, ce mécanisme social permet de faire passer un message, de faciliter le dialogue, d’apaiser d’éventuelles tensions au sein de la famille ou entre différentes ethnies.

Si un fils peut exprimer le souhait d’aller vivre chez son oncle, il peut aussi y être envoyé sur décision parentale, en raison, par exemple, de ses mauvaises fréquentations. Une fois que le gamin « bandit » se sera assagi, il pourra retourner chez lui. De façon générale, le « confiage » est une pratique très répandue au Burkina Faso. « Qui n’a pas de maman n’a pas cherché », dit le dicton africain. Pour des raisons pratiques, on confie son enfant à un autre foyer ou à des amis qui deviendront, de facto, membres de la communauté.

Dans le village d’Oumarou ­Traoré, il n’y avait pas de collège. « À l’âge de 13 ans, je suis parti dans une autre ville à 17 km de chez moi, raconte-t-il, le regard embué. J’ai vécu, de la classe de sixième à la seconde, dans une autre famille, qui avait neuf enfants. Je retournais chez moi seulement pendant les vacances. Mes parents d’adoption ne recevaient aucune rétribution. Une fois, je leur ai apporté un sac de maïs. J’ai gardé des liens d’amitié avec mon tuteur, mes frères et mes cousins. On se rend des services. Si un jour l’un d’entre eux demande à me confier l’un de ses enfants, je l’accueillerai avec joie. »

France Lebreton (à Ouagadougou)

 

Tchad: le gouvernement recule sur une baisse des salaires des travailleurs

La place de la Nation, dans le centre de Ndjamena.
© Wikimedia Commons
 

Au Tchad, le gouvernement marque le pas dans son projet de réduire les salaires des fonctionnaires. Confronté à une crise financière, le gouvernement, qui a réduit de moitié les indemnités des fonctionnaires, voulait réduire sur une proportion allant de 5 à 45% les salaires des travailleurs. Mais, face à la bronca, il a décidé de suspendre son projet, le temps de négociations.

Quelques jours après une première rencontre au ministère des Finances qui n’a abouti à rien, c’est au tour du Premier ministre Albert Pahimi Padacké de convoquer le Comité national du dialogue social (CNDS) parce que la situation persiste : « Cette situation persiste, ce qui demande de notre part et réciproquement, un dialogue de tous les instants, parce qu’il s’agit en effet de notre pays ».

Ensuite, patronat, syndicats et gouvernement s’enferment, mais sans parvenir à faire évoluer la situation, selon le président du Conseil national du dialogue social, Ali Abbas Seitchi : « Le Premier ministre nous a demandé, au comité technique, de travailler en profondeur et dans le meilleur délai, lui faire une proposition idoine. Si on a une autre variante qui permet au gouvernement d’obtenir les 30 milliards d’économies, en attendant, le statu quo est maintenu, c’est-à-dire le décret 187 continue de courir ».

 

C’est dire qu’il n’y aura pas d’abattements de salaires en attendant la suite du dialogue. Mais pour le président de l’Union des syndicats du Tchad, Michel Barka, le gouvernement sait où faire des économies : « Les solutions sont dans ce qui se passe aux impôts, à la douane, comme vous savez, le pillage que les gens font sur les recettes de l’Etat ».

Selon les informations de RFI, malgré la suspension des abattements, les fonctionnaires du public auront des surprises en découvrant leur fiche de paie à la fin du mois de janvier.

 

Côte d’Ivoire: débrayage des services administratifs dans le pays

Vue d'Abidjan le 31 août 2015 (photo d'illustration).
© Jose Cendon/Bloomberg via Getty Images
 

Depuis lundi, un mouvement de grève est observé dans différentes préfectures, sous-préfectures, conseils généraux, mairies et autres services administratifs de Côte d'Ivoire. Un débrayage d'une semaine des agents du ministère de l'Intérieur à l'appel de leur syndicat qui dénonce la non-application de certaines résolutions concernant leurs conditions de travail.

Selon le syndicat qui a lancé ce mouvement de grève, ils sont près de 18 000 fonctionnaires concernés par une petite dizaine de revendications dans tout le pays. Cela va d'indemnités d'astreintes réclamées, au paiement d'indemnité de logement pour les cadres des préfectures et sous-préfectures. Plus étonnant, le syndicat réclame aussi la tarification des actes lorsque leurs concitoyens viennent chercher en préfecture un certificat de naissance ou de mariage par exemple.

« Les gens ne disent rien »

 

« Quand vous partez dans une sous-préfecture pour établir un extrait de naissance, en plus du timbre que vous achetez, on vous fait payer encore de l’argent parallèle et il n’y a même pas de reçu. Et là, cela prouve que cet argent passe dans la poche d’un individu. Les gens ne disent rien parce qu’ils se disent peut-être que c’est normal que ça se passe. Les gens ne savent pas qu’ils sont en train d’être grugés. Que ce prix soit uniformisé sur le territoire national et que l’argent rentre dans la caisse de l’Etat », justifie en effet Yves Désiré Séry, le secrétaire général du Syndicat national des agents du ministère de l'Intérieur de Côte d'Ivoire (Synamici).

Autre revendication, la cotisation à la sécurité sociale pour les employés de maison au service du corps préfectoral : « Ils sont les cuisiniers, le blanchisseur, le serveur, ceux-là marchent sur le budget général de l’Etat, et ils ont même un bulletin de salaire, ils ont un matricule. Mais malheureusement quand ils vont à la retraite, ils n’ont pas de pension. C’est déplorable ».

Des anomalies soulevées

Par cette grève et leurs revendications, les syndicats soulèvent un certain nombre d'anomalies pour le moins étonnantes pour des fonctionnaires de l’Etat. Les fonctionnaires en grève jusqu'à dimanche attendent toujours de rencontrer un représentant du ministère de l'Intérieur dont ils relèvent.

 

Sénégal : 13 jeunes tués dans une forêt en Casamance

Par AFP
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Après des années d'accalmie, la Casamance, région du sud du Sénégal où est active une rébellion depuis 35 ans, a connu samedi un regain de violence inattendu lorsque 13 jeunes qui coupaient du bois ont été tués sans sommation par une bande armée.

« L’attaque a également fait sept blessés et un jeune a réussi à s’échapper », a indiqué à l’AFP le colonel Abdou Ndiaye, porte-parole de l’armée sénégalaise.

Elle s’est produite dans l’après-midi dans une forêt proche de la frontière avec la Guinée-Bissau, à une vingtaine de kilomètres de la capitale, Ziguinchor, région agricole et touristique séparée du reste du Sénégal par la Gambie.

« Ils étaient sortis chercher du bois quand ils sont tombés sur une bande armée d’une quinzaine d’individus, qui ont directement fait feu », a précisé le colonel Abdou Ndiaye. L’armée sénégalaise a déployé une compagnie de quelque 150 parachutistes munis de véhicules pour évacuer les victimes et « traquer » les auteurs de l’attaque.

Les corps sans vie ont été transportés à la morgue de l’hôpital régional de Ziguinchor, où ont également été acheminés les blessés et où de nombreuses familles se sont réunies, selon l’Agence de presse sénégalaise APS (officielle).

« Ils auraient dépassé la zone tampon séparant les positions de l’armée sénégalaise de celles des combattants du MFDC (Mouvement des forces démocratiques de Casamance), la rébellion indépendantiste armée », a expliqué l’APS, sans citer de source.

« Pas de signes avant-coureurs »

« Il est trop tôt pour dire si les assaillants font partie du MFDC, l’enquête le dira », a expliqué le colonel Ndiaye, alors que la rébellion est divisée en plusieurs factions.

Cette attaque survient au lendemain de la libération de deux combattants du MFDC, libérés par l’armée à la suite d’une médiation lancée par la communauté de Sant’Egidio de Rome entre l’État du Sénégal et les combattants du MFDC.

La rébellion pour l’indépendance de la Casamance, qui dure depuis décembre 1982, a fait des milliers de victimes civiles et militaires, ravagé l’économie de la région et poussé de nombreux habitants à fuir.

Une accalmie perdure sur le terrain depuis plusieurs années alors que les tractations de paix se sont multipliées depuis l’arrivée au pouvoir du président Macky Sall, en 2012.

« Il n’y avait pas de tensions ces derniers temps, pas de signes avant-coureurs », a assuré samedi le porte-parole de l’armée.

« Consolider la paix »

Dans ses vœux de fin d’année dimanche, le chef de l’État sénégalais avait lancé un appel aux rebelles pour la poursuite des pourparlers en vue d' »une paix définitive ».

« Consolidons la paix, car nos progrès sont déjà substantiels, par le dialogue confiant que nous avons poursuivi toutes ces années avec le soutien constant des facilitateurs, que je salue et apprécie », avait-il ajouté.

« Consolidons la paix pour que les mesures d’accompagnement déjà initiées par le gouvernement soit confortées et produisent leurs pleins effets. Faisons le pas décisif vers la paix définitive, une paix sans vainqueur ni vaincu », a poursuivi le dirigeant sénégalais.

Le gouvernement sénégalais a mis en œuvre un programme de reconstruction de la Casamance avec plusieurs projets dans l’agriculture, les infrastructures, le tourisme et l’éducation.

Les pourparlers pour la paix en Casamance entre le gouvernement sénégalais et le MFDC se poursuivent. Des discussions entre les deux parties se sont tenues en octobre à Rome sous l’égide de Sant’Egidio, médiatrice dans le conflit.

Toujours discrète, la communauté catholique a joué un rôle clé pour négocier un accord de paix au Mozambique. Elle est aussi impliquée dans des médiations en Centrafrique, au Soudan du Sud et en Libye.