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Choguel Maïga peut-il encore se déplacer dans le nord du Mali ?

Arrivé à Gao le 17 février, le Premier ministre malien ne s’est finalement rendu ni à Ansongo – dont il est originaire – ni à Bourem. Une annulation qui fait grand bruit et que l’intéressé peine à justifier.

Mis à jour le 21 février 2023 à 17:19
 

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Choguel Maïga, le Premier ministre malien, ici à New York, le 26 septembre 2021. © Kena Betancur/AFP

 

 

« C’est le couac qui fait l’événement », s’est irrité Choguel Kokalla Maïga à son retour à Bamako. Visiblement agacé, le Premier ministre malien espérait que l’on retiendrait autre chose de sa première visite officielle dans sa région natale de Gao. Le « couac » en question ? L’annulation, à la dernière minute, de son déplacement à Ansongo, à moins de 10 km de chez lui, puis à Bourem, deux localités du Nord où le chef du gouvernement était attendu les 18 et 19 février, après avoir atterri dans la matinée du 17 dans la cité des Askia.

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« Mais, le vendredi 17, aux environs de 20 heures, on nous a fait savoir que le Premier ministre ne viendrait pas, sans explication. On nous a juste dit que nous devions plutôt envoyer une délégation à Gao à sa rencontre », confie un membre de la société civile d’Ansongo.

« Biden à Kiev, Choguel à Bamako »

Ce revirement a vivement fait réagir au Mali. Sur les réseaux sociaux, de nombreux internautes ont raillé le Premier ministre. « [N’est-ce pas] ce même Choguel qui disait que le Mali [avait] retrouvé sa souveraineté sur toute l’étendue du territoire ? », s’interroge un internaute. « Biden à Kiev, Choguel à Bamako », répond ironiquement un autre, faisant allusion à la visite surprise du président américain dans la capitale ukrainienne, le 20 février.

Sans fournir d’explications, Choguel Maïga a assuré que ces annulations relevaient d’une décision du gouverneur de Gao. Mais beaucoup les attribuent à la situation sécuritaire locale : alors que le village d’Ansongo a été à plusieurs reprises le théâtre d’attaques sanglantes, la zone est disputée entre les jihadistes du Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM) et ceux de l’État islamique au Grand Sahara (EIGS), les branches locales d’Al-Qaïda et de Daesh.

« Ce n’est pas une question de peur »

Un argument sécuritaire que Choguel Maïga réfute. « C’est faux et archi-faux. Dans toute sa sagesse, le gouverneur nous a abordés pour nous dire [que nous n’irions pas à Ansongo et à Bourem] pour diverses raisons, qu’on ne va pas toutes citer ici », a-t-il assuré, sans toutefois en mentionner une seule.

« C’est le gouverneur qui a décidé. Ce n’est pas une question de peur, sinon nous [y serions] allés [quand même] », a ajouté le chef du gouvernement pour faire taire les accusations de lâcheté dont il fait l’objet. Par ailleurs, à l’en croire, les hélicoptères chargés d’assurer ses déplacements n’étaient pas suffisamment grands pour transporter son importante délégation.

Des explications qui peinent à convaincre. « Le Premier ministre tient absolument à faire savoir que l’annulation n’est pas liée à des raisons de sécurité. Dans le contexte actuel, où l’on voit la situation se dégrader chaque jour, cela peut sembler surprenant. Mais on ne nous a pas donné l’occasion d’en débattre, et nous nous en tenons donc à la version officielle. Un jour, les langues se délieront », réagit une personnalité qui a participé à la rencontre de Gao.

De la Minusma au groupe Wagner

La suppression des deux étapes de sa tournée est d’autant plus critiquée que le Premier ministre est natif de Tabango, localité voisine d’Ansongo. Elle fait également suite à ses déclarations sur la « montée en puissance » de l’armée malienne et sur « la souveraineté retrouvée du Mali ». « Aujourd’hui, il n’y a pas de portion du territoire où [notre] armée ne peut aller. Ce n’était pas le cas avant la transition. On a retrouvé l’entièreté de notre territoire national », assurait l’intéressé devant la presse, en janvier. De quoi rendre encore un peu plus incompréhensible l’annulation de ses visites.

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Plusieurs forces militaires évoluent pourtant dans cette zone. L’armée malienne dispose d’un camp et tient plusieurs checkpoints à Ansongo et dans la région, où la soutiennent les mercenaires du groupe russe Wagner. La zone est également fréquentée par des Casques bleus de la Minusma, la mission de l’ONU dans le pays, qui, selon des sources locales, patrouillent chaque jour dans le village. Un dispositif qui n’empêche pas les populations de déplorer « de nouveaux incidents tous les jours », concluent nos interlocuteurs sur place.

Aux origines du carnaval, entre fête païenne et début du Carême

Explication 

De festivités païennes pour célébrer la fin de l’hiver aux « jours gras » de bombance précédant le Carême, le carnaval est un temps de transgression des interdits et d’inversion des valeurs. Les habitants se déguisaient lors de défilés en musique et de mascarades avant d’entamer la période de quarante jours de jeûne.

  • Vinciane Joly, 
Aux origines du carnaval, entre fête païenne et début du Carême
 
Une figure carnavalesque devant la lagune de Venise.RICARDOMFF/STOCK ADOBE

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Sacre du printemps et célébration du renouveau de la nature en Mésopotamie antique, fêtes en l’honneur de Dionysos, dieu du vin et de la végétation chez les Grecs, Lupercales à Rome… À la fin de l’hiver, de grands défilés déguisés, représentations théâtrales et mascarades avaient lieu pendant l’Antiquité. Pendant quelques jours, tout était permis, les interdits transgressés : les seigneurs se déguisaient en serviteurs et les esclaves en maître.

L’Église catholique s’est d’abord opposée à ces festivités païennes. Toutefois, dès le VIIIe siècle, le Carême – période de quarante jours précédant Pâques – est entré dans les mœurs. Ce temps de jours maigres est peu à peu précédé d’une période « grasse » pour marquer une pause festive. À partir du XIe siècle, des pratiques carnavalesques variées fleurissent à la fin de l’hiver. Dans la République de Venise, le plus ancien édit conservé mentionnant le carnaval date de 1 094.

« Carnelevare », « enlever la viande »

Du latin carnelevare, « enlever la viande », le carnaval est une semaine de fêtes et de banquets avant le Carême, temps de jeûne durant lequel les chrétiens cessaient de consommer des produits « gras », tels que la viande et les produits laitiers. Pendant la semaine précédant ce temps de pénitence et de conversion, le peuple était autorisé à « faire gras » et à consommer des mets sucrés.

Moments de liberté et d’excès, les « jours gras » donnaient lieu à des défilés en musique, des célébrations et des mascarades. Les habitants pouvaient se déguiser pour estomper les différences sociales et porter des masques afin de se moquer en toute impunité de leurs dirigeants ou de leurs aînés.

De Rio à Dunkerque

Le carnaval était alors un lieu à forte charge politique. Le Mardi gras, dernier jour des festivités, est celui qui est fêté avec le plus d’éclat, avant le mercredi des Cendres marquant le début du Carême. Dans certains pays, des manifestations carnavalesques ont également lieu lors de l’Épiphanie ou à la Mi-Carême. Cet intermède de licence avant un temps d’austérité permettait également aux autorités de se prémunir contre de potentielles révoltes.

Aujourd’hui, le carnaval, s’il a largement perdu sa portée politique contestataire, demeure un temps de festivités populaires et de manifestations déguisées. Parmi les plus célèbres, on peut citer le Carnaval de Rio, l’une des fêtes les plus courues au Brésil, lors des quatre jours qui précèdent le mercredi des Cendres.

Le Carnaval de Venise, pour sa part, s’étend sur dix jours et est célébré depuis le Moyen Âge. En France, le Carnaval de Nice rassemble chaque année en février des centaines de milliers de personnes. Il se clôt le dimanche 26 février 2023. À Dunkerque, les festivités carnavalesques s’étendent sur trois mois.

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Bonjour,

C’est avec une joie immense et beaucoup d’émotions que nous vous annonçons que Yasaman Aryani
et sa mère Monireh Arabshahi ont été libérées avant-hier
, le 15 février 2023.
Lors de leur sortie de prison, elles ont clamé avec ferveur "Femme, vie, liberté".
Un acte symbolique fort qui montre que les autorités iraniennes n’ont pas fait taire leur voix et leur détermination.
Au contraire. Elles continueront leur combat, pour la liberté.

Yasaman est un véritable symbole de la lutte pour les droits des femmes en Iran.
Le 8 mars 2019, à l’occasion de la journée internationale des droits des femmes,
Yasaman et sa mère ont distribué des fleurs blanches dans le métro de Téhéran à plusieurs Iraniennes.
Un acte poétique, une ode à la liberté qu’elles ont courageusement réalisé en retirant leur voile.
Pour cela, Yasaman et sa mère ont été emprisonnées en avril 2019.


EN IRAN, PLUSIEURS FEMMES LIBÉRÉES DE PRISON


La libération de Yasaman a été portée par des années de mobilisation. Rien qu’en France,
plus de 124 000 personnes ont signé la pétition pour exiger sa libération.
De nombreux groupes locaux d’Amnesty International France se sont également mobilisés
pour Yasaman à travers son dossier d’intervention. Ils ont envoyé des lettres d’interpellation
pour exercer une pression constante sur les autorités iraniennes, ainsi que des messages de soutien
pour montrer à Yasaman qu’elle n’est pas seule. 
Un grand merci à vous tous et toutes pour votre mobilisation !

Ces bonnes nouvelles surviennent dans un contexte où la répression se poursuit en Iran.
De nombreuses personnes continuent d’être emprisonnées et risquent la peine de mort
pour avoir participé au soulèvement qui secoue le pays depuis septembre 2022.

Ensemble, soutenons-les, portons leur voix et agissons pour empêcher ces exécutions.

 


J'AGIS


Merci pour votre mobilisation,

Bertille Bertinotti Proust
Chargée d'Animation Réseaux Défendre les Personnes
chez Amnesty International France

P.S : c’est grâce au soutien de nos membres et donateurs et donatrices que nous pouvons remporter
des victoires comme celle-ci ! Nous ne sollicitons aucune subvention : c’est votre générosité qui garantit
notre indépendance.
Vous pouvez vous aussi devenir membre d’Amnesty International France en faisant un don régulier.

 

Quelles perspectives pour l’art africain ?

Du 14 au 19 février, Cotonou, Porto-Novo et Ouidah accueillent le Festival international des arts du Bénin (FInAB). L’occasion, pour Jean-Michel Abimbola, ministre du Tourisme, de la Culture et des Arts, et Ulrich Adjovi, promoteur de l’événement, de plaider pour une meilleure valorisation du secteur culturel.

Mis à jour le 11 février 2023 à 16:42
 
jean michel abimbola
 
 

Par Jean-Michel Abimbola

Ministre béninois du Tourisme, de la Culture et des Arts

 

ulrich adjovi

 

Par Ulrich Adjovi

PDG du groupe Empire et promoteur du Festival international des arts du Bénin

 

 festival
 

 

Carnaval traditionnel au Bénin. © FINAB

 

Longtemps réduit à des objets artisanaux décoratifs et/ou utilitaires, ou encore aux seules expressions culturelles des sociétés et des groupes sociaux du continent, l’art africain est mieux considéré depuis quelques années. Au Bénin, notamment, il représente un enjeu économique majeur, et les initiatives visant à le valoriser foisonnent. Le Festival international des arts du Bénin (FInAB) en est d’ailleurs le dernier exemple. Un regain de dynamisme à saluer, certes, mais qui invite aussi à s’intéresser de plus près à l’écosystème artistique africain.

Records de ventes

Porté par un savoir-faire ancestral, l’art africain n’a jamais été autant mis en lumière. Dans toutes les disciplines (sculpture, peinture, arts plastiques, arts de la scène, cinéma, littérature, mode, etc.) et aux quatre coins du continent, les artistes rivalisent d’idées et de prouesses. En 2021, les ventes des créateurs africains ont atteint un montant record : 72,4 millions de dollars, soit une hausse de 44% par rapport à l’année précédente. En 2017, l’industrie musicale africaine avait rapporté plus de 17 milliards de dollars, hors concerts – un chiffre en augmentation en dépit de la parenthèse liée à la crise du Covid-19.

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Aujourd’hui, les artistes africains se placent régulièrement dans les hits mondiaux, figurent sur les plateformes de streaming les plus cotées, se produisent sur les plus grandes scènes musicales et cinématographiques de la planète, voient leurs œuvres exposées dans les plus grands musées et galeries ou vendues dans les maisons d’enchères les plus reconnues, lesquelles n’hésitent pas à créer des départements et des collections consacrées aux créations du continent. En 2022, Paris est ainsi devenue la première place du marché de l’art africain, devant Londres, New York ou Bruxelles, où un certain dynamisme est également observé.

Elle est loin l’époque où l’évocation même de la notion d’art africain n’était réservée qu’à un certain milieu. L’Afrique, berceau de l’humanité, n’est plus en marge du jeu. Elle en est partie prenante. C’est d’autant plus louable que les artistes sont confrontés à de nombreux défis.

Un chemin d’épines et de ronces

Le parcours est en effet loin d’être aisé pour les acteurs culturels du continent, confrontés, pour la plupart, à une absence de professionnalisation, de structures et de mécanismes de promotion. Leur début de carrière est un chemin jonché d’épines et de ronces, où ils doivent tout autant faire preuve d’opiniâtreté et d’abnégation que d’ingéniosité et d’inspiration.

Absence de plateformes de production, manque de moyens, de couverture médiatique et de considération, quasi absence de formation, protection superficielle des droits d’auteur… L’Afrique a du pain sur la planche, estimait en 2015 un quotidien français, qui reconnaissait tout de même que l’art constitue l’une des principales richesses du continent et que, pour l’obtenir, il n’est pas besoin de faire des forages profonds. Néanmoins, et fort heureusement, des initiatives, aussi bien privées que publiques, ayant vocation à soutenir les acteurs du secteur artistique et culturel émergent régulièrement.

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Elles peuvent émaner des Africains de la diaspora ou des États, qui, soucieux de retrouver leur identité culturelle ou de doper leurs revenus touristiques, se mobilisent, proposent, encouragent ou favorisent de telles initiatives. Parmi elles, la Biennale de Dakar (Dak’art), qui existe depuis plus de deux décennies au Sénégal, le Festival international du film de Marrakech, au Maroc, le célèbre Fespaco au Burkina Faso, les Rencontres de Bamako (Mali), la Triennale de Luanda (Angola), le LagosPhoto Festival (Nigeria), le Miato (Togo) et, enfin, le Festival international des arts du Bénin (FInAB), dont l’une des originalités, en dehors du fait qu’il se déroule dans trois villes du pays (Cotonou, Porto-Novo et Ouidah), est de transformer la capitale en une « galerie à ciel ouvert où les filières d’art s’entrecroisent ». De sept, le nombre des biennales est passé à près de vingt au cours de la dernière décennie.

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Dans le même temps, musées et centres consacrés à l’art africain poussent comme des champignons sur le continent, à l’heure où les États, s’ils ne se dotent pas de législation pour accompagner davantage les artistes et faire de ce secteur « un pourvoyeur de richesses et d’emplois », font pression sur l’Occident pour qu’il leur restitue les trésors pillés au temps de la colonisation.

La création, une économie de marché

Forte de ces avancées, l’Afrique regarde beaucoup plus sereinement l’avenir du secteur culturel. Avec la multiplication des festivals et de bien d’autres initiatives, l’ambition tient en une phrase : « Désormais, il faudra saisir toutes les occasions. » C’est le credo du Bénin, qui, depuis 2016, a mis les arts au service de son rayonnement touristique. Plusieurs centaines de millions de francs CFA ont été ainsi engagés dans la construction et la réhabilitation d’infrastructures. Et les pouvoirs publics ne comptent pas s’arrêter en si bon chemin. Au contraire ! À preuve, dans sa dernière mouture, le Plan d’action du gouvernement (PAG) à l’horizon 2026 consacre 585 milliards de francs CFA à la réalisation d’une douzaine de projets orientés vers le développement des arts, de la culture et du tourisme.

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S’il a pris son temps, le continent a aussi pris la mesure de la situation : la création, c’est aussi une économie de marché, pour paraphraser le photographe ivoirien Paul Sika. L’art africain ne sera plus seulement produit, mais distribué efficacement. Pour y parvenir, le secteur devra se doter d’institutions et de structures fortes pour assurer sa promotion et son rayonnement, capables d’intervenir comme des entreprises multinationales et de s’imposer durablement dans le paysage comme des références incontournables. Une chose est certaine, en Afrique, il y a un passé, un présent et un avenir pour le secteur de l’art.