Dialogue interreligieux

« Lorsque nous travaillons pour les âmes, nous ne pouvons user que de persuasion et d'amour... Nous ne pouvons rien faire tant que nous n'avons pas persuadé les gens autour de nous qu'ils sont aimés... » (Cardinal Lavigerie, 1885)

« Nous croyons qu'en toute religion il y a une secrète présence de Dieu, des semences du Verbe qui reflètent un rayon de sa lumière... » (Chapitre 1967)

« Nous célébrons et partageons cette vie avec Dieu lorsque nous allons à la rencontre des cultures et des religions... nous réjouissant de la foi vivante de ces croyants et les rejoignant dans leur quête de la Vérité, cette Vérité qui nous rend tous libres. » (Chapitre 1998)

Missionnaires, nous sommes appelés à faire les premiers pas pour rencontrer les personnes, qu'elles que soient leurs convictions, leur religion.

Au Burkina Faso, cette réalité se traduit surtout dans la rencontre respectueuse et évangélique avec les adeptes des religions traditionnelles et avec les musulmans.

Dans cette rubrique, nous étudierons divers aspects de ces religions, particulièrement de l'islam.

Dialogue interreligieux. Quel avenir ? (Compte-rendu)

Couv. DialoguePierre Diarra, Michel Younès (dir.):  Dialogue interreligieux. Quel avenir ? Publications Chemins de Dialogue, Marseille, mars 2017, 190 p.

Ce livre réunit les contributions des 17 intervenants au colloque qui s’est tenu à Lyon et Paris les 11 et 12 mai 2016 sur le thème : “Quand le dialogue interreligieux se fait difficile”.

Les auteurs partent du fait que le Dialogue Interreligieux ( D.I.) fait de moins en moins recette, et, pourtant, il est de plus en plus nécessaire, même si les obstacles, qui l’entravent, peuvent paraître parfois difficiles à surmonter.

Depuis 1964, L’Église a beaucoup dialogué, surtout avec les musulmans. Ces rencontres ont connu des succès un peu partout. Pourtant nos communautés n’ont pas suivi, dit Mgr Michel Dubost dans la Préface du livre.

Le D.I. se déroule aujourd’hui en Europe à un moment difficile de son histoire. Les Occidentaux ont vu échouer leur politique à l’égard du monde arabe. Ils sont inquiets pour leur sécurité à cause de la présence d’un islam politique un peu partout dans le monde. Ils ont peur de l’immigrations dans leur propre pays. Ils ne voient pas les musulmans s’intégrer vraiment dans un vivre-ensemble, etc. Mais la société elle-même a tendance à se replier sur elle-même. Les préjugés et l’islamophobie vont grandissants. Tout cela rend plus difficile les bonnes relations aujourd’hui.

Alors comment poursuivre le dialogue, ouvrir des chemins d’amitié et même de fraternité entre croyants ? Quelles pistes peut-on indiquer ?

La première partie du livre revient sur les mutations profondes dans la société actuelle et les difficultés du D.I. dans un contexte surtout de la postmodernité. Notre temps est ainsi caractérisé, selon certains (e.a. par les derniers papes), par “une dégradation de la modernité, le primat de la raison utilitaire (économique et technique), l’égoïsme égocentrique, la séparation du politique et du religieux, le scepticisme et le relativisme” (p. 45). Ces quatre derniers points sont une difficulté pour le D.I. Si la raison est utilitaire, alors de dialogue n’est pas possible. Si l’individu s’enferme dans l’égoïsme, le rapport à l’autre devient difficile, car chacun se renferme dans sa subjectivité. Si la religion est réduite au privé et séparée du politique, alors le dialogue religieux devient aussi impossible. Et si nous sommes dans le relativisme et un scepticisme, tout le monde ne veut comprendre que sa propre particularité. En Europe tout ceci est encore accompagné d’une forte présence de l’athéisme, qui remet en question tout ce qui est religieux. Et si “tout se vaut”, comment opérer encore un D.I. ?

Alors, sommes-nous condamnés à la fatalité ? Une abdication de la rationalité serait un renoncement à notre humanité. Mais, en tout cas, il sera nécessaire de lutter contre nos propres préjugés, nos propres fondamentalismes, l’ignorance et les repliements.

Une intervention au colloque a traité spécialement de la peur, comme l’un des ennemis les plus redoutables du D.I. aujourd’hui. Les croyants des diverses religions découvrent, en effet, des différences parfois radicales entre nos manières de penser et de croire, touchant l’essentiel de la foi et allant aussi jusque dans les détails de la vie quotidienne. Cette peur est certainement quelque chose qui freine les croyants. Il est ainsi nécessaire qu’on possède une bonne connaissance de sa propre religion et une réelle connaissance de l’autre et de sa religion. Autrement on aura toujours peur de mal dire les choses, et peur de blesser l’autre.

La deuxième partie du livre s’interroge sur certains défis à relever, notamment les perceptions mutuelles, l’appel à la conversion et la conception de la vérité. La question de la perception de l’autre est capitale dans les rencontres interreligieuses. Il s’agit de respecter l’autre dans son altérité et de connaître l’autre tel qu’il est. Dans le dialogue avec l’islam, il est important de savoir comment l’islam voit le christianisme à partir de ses sources. Aujourd’hui, en plus, nous assistons à une montée en puissance de l’islam politique et du salafisme, qui ont en commun un exclusivisme radical et une certaine intolérance à l’égard de l’Occident. Face à cet islamisme, on assiste à une montée de la peur de l’islam et même d’un rejet de l’islam chez nombre de chrétiens. Mais le durcissement mutuel n’est pas une solution d’avenir. Il faut continuer à “construire des ponts avec qui on peut construire des ponts” (p. 87). Une reconnaissance mutuelle reste toujours possible “au niveau de la création : reconnaître l’autre comme créé par Dieu, crée à l’image de Dieu, tout comme moi” (p. 88).

L’appel à la conversion est un autre défi pour le D.I. La conversion d’hommes, de femmes et souvent de jeunes, comprise comme un appel à rejoindre une autre religion et une autre communauté, est une réalité à laquelle des imams, des prêtres et aussi des familles sont confrontés.

Le christianisme autant que l’islam connaissent aujourd’hui des courants prosélytes. Ainsi le D.I. est contesté par certains catholiques au nom de l’évangélisation ou de la mission. Ils reprochent au D.I. un renoncement à l’annonce de la foi en Christ. Pour les musulmans, l’appel à l’islam (ad-da’wa) est considéré également comme un devoir pour la communauté musulmane. Mais l’islam admet aussi que Dieu a voulu la diversité des religions, en s’appuyant sur le verset du Coran : “Si Dieu l’avait voulu, Il avait fait de vous une seule communauté” (Cor.48,5).

Le dialogue ne doit cependant pas être perçu comme un obstacle à l’annonce de la foi. Les croyants témoignent de leur foi en paroles et en actes, mais sans rien imposer, en toute liberté. Dans une société sécularisée les chrétiens sont habitués à se tenir à une certaine réserve. Les musulmans sont peut-être plus habitués à montrer et exprimer leurs convictions en public.

Par l’attitude d’ouverture et de bienveillance nous témoignons concrètement de ce que nous sommes et de l’amour de Dieu pour tous. Le dialogue ne doit donc pas être un obstacle à l’annonce de la foi. Le D.I. ne trahit pas nos convictions, mais ne la réduit pas non plus au prosélytisme. En plus, nous sommes convaincus que la voie religieuse de l’autre est un soutien de sa quête de Dieu et nous croyons que Dieu peut nous parler aussi à travers l’autre et ainsi nourrir notre propre cheminement vers Dieu.

Quant à la nécessité de la proclamation de la vérité, certains catholiques intégristes affirment que “le D.I. ne serait qu’un creuset de ‘relativisme’ et de ‘syncrétisme’, donnant le pas à une naïeve générosité sur les droits imprescriptibles de la vérité” ( p. 125). En fait, personne ne possède la vérité. Dieu seul est la vérité. Nous sommes obligés d’aller toujours plus loin dans la quête de Dieu et l’amour du prochain. Le pape François, dans l’encyclique Lumen Fidei, paragraphe 34, a cette belle parole : “Le croyant n’est pas arrogant; au contraire, la vérité le rend humble, car il sait que ce n’est pas lui qui la pssède, mais c’est elle qui l’embrasse et le possède. Loin de le raidir, la sécurité de la foi le met en route, et rend possible le témoignage et le dialogue avec tous”. (p. 78). Elle ne nous dispense pas d’un dialogue nécessaire.

La troisième et dernière partie du livre effectue une réflexion dans le cadre d’un certain nombre d’expériences vécues, comme e.a. le témoignage des moines de Tibhérine, le dialogue vécu entre juifs, chrétiens et musulmans, et aussi celui entre chrétiens de sensibilités différentes. Ces expériences permettent aux différentes communautés de mieux se connaître et, bien souvent, d’admirer la profondeur spirituelle des enseignements de leurs interlocuteurs. Elles sont aussi comme autant de petites gouttes d’eau qui contribuent à enrichir notre vivre-ensemble et notre action pour la paix dans ce monde où les relations humaines deviennent de plus en plus dures et exclusives.

Les différentes contributions de ce livre nous rappellent à chaque page que le dialogue interreligieux n’a rien perdu de son actualiteé, malgré les difficultés et ses exigences. Ces rencontres, dans la mesure où elles sont de vrais partages sur ce qui nous est de plus fondamental, développent une autre image de l’autre, nous rapprochent entre croyants et contribuent à plus de fraternité dans la société.

Hugo Mertens.

Chaldéens : des migrations forcées des chrétiens (traduction complète)

Le pape reçoit les membres du synode réuni à Rome

Synode chaldéen 5 oct. 2017 © L'Osservatore Romano


Synode chaldéen 5 oct. 2017 © L'Osservatore Romano

« Les migrations forcées des chrétiens, la reconstruction des villages, le retour des réfugiés, le droit particulier de l’Eglise, la question liturgique et la pastorale des vocations » : autant de thème abordés par le synode des Chaldéens catholiques et sur lesquels le pape est intervenu, recommandant notamment l’unité des pasteurs entre eux et avec l’Eglise latine.

Le pape François a en effet reçu en audience ce jeudi matin, 5 octobre 2017 au Vatican, les membres du Synode de l’Eglise chaldéenne, qui se tient à Rome du 4 au 8 octobre, sous la houlette du patriarche Louis Raphaël Sako.

« Je vous exhorte à travailler inlassablement comme des bâtisseurs d’unité, avant tout entre vous, pasteurs de l’Eglise chaldéenne, et avec les pasteurs des autres Eglises, et en outre en favorisant le dialogue et la collaboration entre tous les acteurs de la vie publique, pour contribuer à faciliter le retour des réfugiés, et guérir les divisions et les oppositions entre frères », a recommandé le pape.

Il a aussi exhorte à l’unité avec l’Eglise latine en vue de promouvoir l’unité entre chrétiens et le dialogue avec les autres religions : « Le dialogue oecuménique et interreligieux devra toujours repartir de notre unité et de notre communion catholique. »

Pour ce qui est des vocations, le pape a mis en garde contre le recrutement de candidats au sacerdoce ou à la vie religieuse « que le Christ n’appelle pas ».

En cette fête de sainte Faustine, apôtre de la miséricorde divine, le pape a fait cette recommandation d’ « être avec tous miséricordieux comme le Père ».

Voici notre traduction rapide, de travail, du discours prononcé par le pape en italien.
AB

Discours du pape François

Béatitude,

Chers frères dans l’épiscopat,

Je vous accueille avec joie en ces jours où vous êtes réunis en synode, alors que vous vous préparez à affronter des questions de première importance pour l’Eglise chaldéenne, dont les migrations forcées des chrétiens, la reconstruction des villages, le retour des réfugiés, le droit particulier de l’Eglise, la question liturgique et la pastorale des vocations.

Je remercie Sa Béatitude, le patriarche Louis Raphaël, pour la salutation qu’il m’a adressée en votre nom à tous. Je saisis cette occasion pour saluer, à travers vous, les fidèles de la bien-aimée terre irakienne, durement éprouvés, en partageant l’espérance des récentes nouvelles qui parlent d’une reprise de la vie et de l’activité dans des régions et des villes jusqu’ici soumises à une oppression douloureuse et violente. Puisse la miséricorde de Dieu adoucir les blessures de la guerre qui blessent le coeur de vos communautés, afin qu’elles puissent finalement se redresser.

En effet, si une page tragique s’est conclue pour certaines régions de votre pays, il faut signaler qu’il reste beaucoup à faire.

Je vous exhorte à travailler inlassablement comme des bâtisseurs d’unité, avant tout entre vous, pasteurs de l’Eglise chaldéenne, et avec les pasteurs des autres Eglises, et en outre en favorisant le dialogue et la collaboration entre tous les acteurs de la vie publique, pour contribuer à faciliter le retour des réfugiés, et guérir les divisions et les oppositions entre frères.

Cet engagement est plus que jamais nécessaire dans le contexte irakien actuel, face aux nouvelles incertitudes sur l’avenir.

On a besoin d’un processus de réconciliation nationale et d’un effort conjoint de toutes les composantes de la société, pour arriver à des solutions partagées, pour le bien de tout le pays.

Mon voeu c’est que ne viennent jamais à manquer la force d’âme, l’espérance, et les dons d’activité qui vous caractérisent.

Restez fermes dans votre propos de ne pas céder au découragement devant les difficultés qui demeurent encore en dépit de ce qui est fait pour la reconstruction, surtout dans la plaine de Ninive.

Depuis l’Antiquité, cette terre, évangélisée selon la tradition de l’apôtre saint Thomas, est apparue au monde comme une terre de civilisation, terre de rencontre et de dialogue.

Il est par conséquent d’une grande importance que les chrétiens, les pasteurs et les fidèles, forts de telles racines, soient unis dans la promotion de rapports respectueux et le dialogue interreligieux entre toutes les composantes du pays.

Je voudrais aussi vous encourager en ce qui concerne les nouveaux aspirants au ministère sacerdotal ou à la vie religieuse: face au déclin des vocations dont souffre l’Eglise, nous devons éviter d’accueillir dans les séminaires des personnes qui ne sont pas appelées par le Seigneur. Il faut bien examiner la vocation des jeunes et en vérifier l’authenticité. Que les prêtres et les séminaristes puissent sentir votre proximité qui est une vraie bénédiction! Pour les candidats au sacerdoce, que la formation soit intégrale, capable d’inclure les différents aspects de la vie en répondant de façon harmonieuse aux quatre dimensions humaine, spirituelle, pastorale et intellectuelle. Un parcours qui se poursuive naturellement par la formation continue des prêtres en formant avec elle une réalité unie.

Je tiens aussi à vous inviter, et avec vous les pasteurs de l’Eglise latine, à repenser le thème de la diaspora, en tenant compte des situations concrètes dans lesquelles vivent les communautés ecclésiales, que ce soit du point de vue de leur nombre ou du point de vue de la liberté religieuse.

Il faut tout ce qui est possible pour que les souhaits du Concile Vatican II se réalisent, en facilitant le soin pastoral à la fois dans vos propres territoires et là où les communautés orientales se sont établies depuis longtemps, en prouvant à la fois la communion et la fraternité avec les communautés de rite latin, pour donner aux fidèles le bon témoignage sans provoquer de divisions ou désaccords.

Le dialogue oecuménique et interreligieux devra toujours repartir de notre unité et de notre communion catholique. La Congrégation pour les Eglises orientales vous sera en cela un soutien.

Béatitude,

Chers évêques,

Je vous invite enfin à être paternels avec les prêtres, qui sont vos premiers collaborateurs, et à être avec tous miséricordieux comme le Père.

Puisse votre synode In Urbe, sous le regard du Christ Bon Pasteur, être un moment profitable d’échanges et de réflexion fraternelle, pour le bien de la bien-aimée Eglise chaldéenne. J’invoque sur vous l’abondance des bénédictions du Seigneur et la protection de la Bienheureuse Vierge Marie.

Et je vous demande, s’il vous plaît, de ne pas oublier de prier pour moi. Merci.

© Traduction de ZENIT, Anita Bourdin

Le Pardon: dossier de la Maison Islamochrétienne

Nouveau dossier : Le Pardon

http://www.lamaisonislamochretienne.com/dossierpardon.html

Réflexions sur le pardon

L’islam et le pardon, Mustapha Cherif
Le pardon est une notion religieuse qu’on trouve aussi bien en islam qu’en christianisme. Une fois de plus Mustapha Chérif nous fait profiter de sa vaste culture théologique : le pardon, facteur de civilisation, a une place importante dans le Coran et il circule à travers l’histoire : http://www.lamaisonislamochretienne.com/lislametlepardon.html

La faute et le pardon, Michel Jondot
Michel Jondot nous rappelle que, dans la Révélation chrétienne, le pardon ne peut se comprendre sans se référer à la Loi. Le rapport de la Loi au pardon est assez semblable à celui de la Mort à la Résurrection : http://www.lamaisonislamochretienne.com/lafauteetlepardon.html

A l’épreuve de l’impossible… Nibras Chehayed
Le pardon a également sa place dans la philosophie profane. Nibras Chehayed en apporte le témoignage en nous présentant la pensée de Jacques Derrida : http://www.lamaisonislamochretienne.com/alepreuvedelimpossible.html

Le pardon dans les conflits politiques

Pardonner pour être libéré, Sabeel
Au moins depuis 1948, la violence déchire les populations résidant en Terre Sainte. Comment les chrétiens arabes de cette région du monde réagissent-il ? : http://www.lamaisonislamochretienne.com/pardonnerpouretrelibere.html

Comment peut-on pardonner ? Monseigneur Teissier
Le 20ème siècle a été marqué par les graves conflits qui ont traversé l’Algérie après avoir opposé celle-ci à la France. Monseigneur Henri Teissier a vécu depuis la première heure cette période de l’histoire au cours de laquelle l’Eglise, dont il était l’Archevêque, a partagé les souffrances d’un peuple : http://www.lamaisonislamochretienne.com/pardonnerpouretrelibere.html

Appeler les choses par leur nom, Sadek Sellam
La France doit-elle faire acte de repentance à l’égard de l’Algérie pour les « actes de barbarie » qu’elle y a commis ? Un candidat aux élections présidentielles parle de « crime contre l’humanité » : est-ce excessif  ? Saddek Sellam nous fait part de ses réactions : http://www.lamaisonislamochretienne.com/pardonnerpouretrelibere.html

Trust, the road to reconciliation, Luc-André Leproux
Il était impossible de concevoir ce numéro sans faire allusion à la Commission de Réconciliation initiée par Monseigneur Desmond Tutu et Nelson Mendela. Luc-André Leproux nous rappelle la situation : http://www.lamaisonislamochretienne.com/pardonnerpouretrelibere.html

 Figures de pardon

L’islam religion du pardon, des musulmanes de La Caravelle
Le pardon n’est pas d’abord un sujet de réflexion. Il s’incarne dans des figures singulières, quelquefois en des personnes militantes ou héroïques mais le plus souvent d’une manière humble et cachée. On a interrogé des femmes d’une cité ; elles ont bien voulu répondre : http://www.lamaisonislamochretienne.com/lislamreligiondupardon.html

Hommage à Lucien Bitterlin, Jean-michel Cadiot
Un véritable artisan de réconciliation vient de mourir : Lucien Bitterlin ; Jean-Michel Cadiot lui rend hommage en évoquant son action : http://www.lamaisonislamochretienne.com/hommagealucienbitterlin.html

L’émir Abd-El-Kader et le pardon, Loïc Barrière
Bien sûr, parler du pardon dans un contexte islamochrétien, c’est évoquer Abd-El-Kader. Loïc Barrière a accepté de se charger de cette tâche : http://www.lamaisonislamochretienne.com/lemirabdelkader.html

Questions impertinentes : http://www.lamaisonislamochretienne.com/questpo.htm
– D’un musulman à un chrétien : Les musulmans sont méprisés
– D’un chrétien à un musulman : Nourriture, islam et laïcité

La rubrique de Maître Maurice Buttin : http://www.lamaisonislamochretienne.com/buttin.htm
Pardon et réconciliation après 50 ans d’occupation ?

Bonne lecture!
Saad Abssi, Mohammed Benali, Christine Fontaine, Michel Jondot

Laroui: L’insoumise de la Porte de Flandre (Compte-rendu)

 

Laroui-Inconnue

Fouad Laroui: L’insoumise de la Porte de Flandre. Paris: Julliard, 2017, 137 p.

 

L’auteur de ce roman, économiste et écrivain néerlandais, est né dans le Rif marocain en 1958. Formé en France, enseignant à Amsterdam, il a obtenu plusieurs prix, dont le Goncourt de la nouvelle en 2012.

Ce roman est quasiment une étude psychologique d’une jeune femme cultivée à l’esprit libéral, moderne et européen, qui vit à Molenbeek. Tout le roman se joue entre ce quartier de Molenbeek et le centre-ville de Bruxelles. Ils représentent, pour ainsi dire, deux mondes et surtout deux cultures, qui séparent les Belgo-marocains et les Belges de souche.

Fatima, l’héroïne du roman, habite un appartement avec ses parents, un père paralysé et une mère toujours à la maison; ses frères ont déjà formé leur famille et sont partis. Fatima s’est très bien intégrée dans la société belge.

Et pourtant, depuis quelques mois, elle a l’impression “de ne plus être UNE personne, mais trois ou quatre” et elle affirme : “Je suis dans une situation impossible”. Puis, soudainement, elle a décidé elle-même de porter le voile avec une longue djellaba noire, alors qu’elle n’est nullement une musulmane pieuse ou salafiste, elle qui ne fait jamais la prière et qu’on n’a jamais vue à la mosquée. En même temps elle arrête ses brillantes études à l’ULB, malgré qu’elle soit vraiment passionnée de lectures et qu’elle courrait les expositions et les musées de la ville. Sans doute l’immense pression morale, qui s’exerce dans le quartier dont les rues ressemblent davantage à Tanger ou Casablanca qu’à Bruxelles, lui devient insupportable. C’est pour elle comme si son identité et sa riche personnalité se sont réduites et ramenées à la seule appartenance religieuse de la communauté. Sans aucun doute, c’est le début de son malaise profond et de son malheur.

En plus, elle est sans cesse confrontée à un monde d’hommes: ceux de Molenbeek, qui veulent la “revêtir”, quand elle se promène habillée à l’européenne et maintenant ceux du centre-ville, qui veulent la “dévêtir”, quand elle passe dans cet accoutrement islamique, qu’elle s’est achetée. Elle se sent, en fait, à tout instant suivie par ceux qui, dans leur fantasme d’hommes, “la déshabillent du regard et la réduisent à un corps”.

Finalement elle veut se venger de ces deux classes d’hommes : ceux qui lui disent “couvre-toi” sont pour elle des minables; à ceux qui veulent la dévêtir, elle montre son corps dans un ‘peep-show’, mais elle ne leur donne ni son âme ni son corps. Elle leur dit : “Tu me posséderas jamais”. Et elle les maintient dans leur frustration.

Tout le monde en prend pour son compte, du propriétaire incrédule et alcoolique de ce sex-shop de la capitale jusqu’à Fawzi, ce garçon de Molenbeek qui s’est épris d’elle et à la fois veut déjà lui donner quelques leçons sur la manière de se comporter en bonne musulmane. Le tout va finir dans le sang et dans un vrai drame. Mais Fatima, l’héroïne du roman, devient, enfin, elle-même, une personne libre. “Elle veut vivre maintenant et rattraper le temps perdu, reprendre ses études de lettres et aller jusqu’au bout”. Une vraie libération !

Le livre termine par un chapitre qui met en scène quatre experts français venus parler à Bruxelles du terrorisme islamique : Gilles Kepel, Olivier Roy, Rachid Benzine et Pierre-Jean Louizard. Les réponses de ces experts sont intéressantes, mais ne s’appliquent pas à tous les cas. La preuve en est ce jeune Fawzi, qui dans ce roman est jugé erronément comme terroriste. L’auteur a ainsi voulu exprimer aussi qu’en général on donne trop d’importance aux soit-disant “terroristes”, qui sont soit des jeunes qui ont des problèmes psychiatriques soit des jeunes minables frustrés.

L’auteur campe dans ce roman des personnages extrêmes, en les caractérisant, et avec un humour certain. Il décrit par petites touches ce laboratoire qu’est devenu Bruxelles où deux communautés se côtoient et vivent l’une à côté de l’autre.

Un livre qui devait être lu tant à Molenbeek que dans le haut de Bruxelles« , écrit Christophe Lamfalussy dans un interview avec l’auteur dans La Libre Belgique du 1er septembre 2017, article que j’ai largement utilisé dans ce compte-rendu.

Hugo Mertens.

France: laïcité culturellement intolérante? ou obscurantiste?

 

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« Je ne sais s’il faut faire de cet événement le révélateur de tendances profondes dans la société française ou dans l’éducation nationale. Il est trop facile de déplorer la décadence des temps, mais il faut bien reconnaitre que l’on voit revenir une laïcité d’ignorance. À se demander si l’obscurantisme n’a pas changé de côté. On se plaint à juste titre que les élèves n’aient que des idées floues sur l’histoire. Apparemment c’est aussi le cas de certains responsables éducatifs » écrit François Euvé dans l’article « Blasphème à l’envers » posté le 16 sept.’17 sur son blog Terre nouvelle (revue Études)

 L’événement dont il parle

En mars ’17, de « courageux » parents envoient une lettre anonyme pour dénoncer un instituteur qui avait enseigné des passages de la Bible.

« […] Si la charte de la laïcité de 2013 précise les contours de l’étude des textes religieux dans les écoles, la question reste encore sensible. Dans l’Indre, un professeur des écoles d’une quarantaine d’année a été suspendu de ses fonctions au mois de février, pour avoir enseigné plusieurs passages de la Bible à ses élèves, raconte France Bleu Berry. […] Selon Pierre-François Gachet, inspecteur d’Académie de l’Indre, « l’étude de textes religieux n’est pas interdite à l’école ». « Mais elle doit être effectuée avec mesure et discernement de manière à ne choquer personne et en évitant tout prosélytisme.« […] » Lire « Laïcité: un professeur suspendu pour avoir lu la bible à ses élèves« , L’Express, 02/03/17.

Le jour-même de cette parution, était créée une pétition qui a recueilli un certain nombre de commentaires intéressants.

En août, il est « déplacé d’office » dans une autre école.

« « Je vais y prendre mes fonctions à compter du 31 août, précise-t-il, mais ne sais pas avec quelle classe, ni pour combien de temps. » […] J’attends que la justice passe ». Une justice sur le fond rendue par le tribunal administratif de Limoges […] Enfin, l’enseignant exprime sa reconnaissance devant les nombreux soutiens de collègues et parents d’élèves qu’il reçoit, « mais aussi d’intellectuels et universitaires, comme René Nouailhat, professeur d’université, spécialiste du fait religieux ; Jean Carpentier, inspecteur général honoraire de l’Éducation nationale, ou encore, Philippe Joutard, professeur d’histoire moderne et ancien recteur d’académie ». » Extrait de « MALICORNAY L’enseignant nommé à Pellevoisin« , La Nouvelle République, 24/08/17.

Marie Lefebvre-Billiez a recueilli les propos de Matthieu Faucher, dont voici quelques extraits:

  • La culture chrétienne intéresse beaucoup les enfants, les mêmes questions reviennent
  • sans un minimum de culture chrétienne, les jeunes générations risquent de ne pas pouvoir appréhender 1 500 ans de civilisation
  • il semble que le « crime » qui m’est reproché est d’avoir introduit une bible dans une école publique, comme si j’avais commis un blasphème à l’envers, enfreint la sacro-sainte laïcité
  • « S’il est interdit de lire la Bible, à travers quels textes faut-il aborder le christianisme à l’école ? », ont demandé les parents d’élèves au directeur académique de l’Indre. Réponse : l’appel à la croisade d’Urbain II et des chroniques sur les guerres de Religion ! Réjouissant ! Présenter la religion comme une entité obscurantiste et nocive ne me paraît pas relever d’une conception saine de la laïcité.
  • Vous vous dites agnostique, quel est votre rapport personnel avec le texte biblique ? La Bible est un pilier, sans doute le plus massif, de notre civilisation. Mais c’est aussi pour moi un émerveillement littéraire, au même titre que de nombreux textes de l’Antiquité. Sur le plan strictement narratif, la Bible contient suffisamment d’aventures pour passionner nos enfants durant tout l’hiver […] Lire « Matthieu Faucher, un instituteur suspendu pour avoir lu des passages de la Bible à ses élèves« , Réforme, 08/09/17.