Justice et Paix

" Je suis homme, l'injustice envers d'autres hommes révolte mon coeur. Je suis homme, l'oppression indigne ma nature. Je suis homme, les cruautés contre un si grand nombre de mes semblables ne m'inspirent que de l'horreur. Je suis homme et ce que je voudrais que l'on fit pour me rendre la liberté, l'honneur, les liens sacrés de la famille, je veux le faire pour rendre aux fils de ces peuples l'honneur, la liberté, la dignité. " (Cardinal Lavigerie, Conférence sur l'esclavage africain, Rome, église du Gesù)

 

NOS ENGAGEMENTS POUR LA JUSTICE T LA PAIX
S'EXPRIMENT DE DIFFÉRENTES MANIÈRES :

En vivant proches des pauvres, partageant leur vie.
Dans les lieux de fractures sociales où la dignité n'est pas respectée.
Dans les communautés de base où chaque personne est responsable et travaille pour le bien commun.
Dans les forums internationaux pour que les décisions prises ne laissent personne en marge.

Dans cette rubrique, nous aborderons différents engagements des Missionnaires d'Afrique, en particulier notre présence auprès des enfants de la rue à Ouagadougou et la défense du monde paysan.

 

Bernard Sanou : « Nous voulons faire revivre le souvenir de l’homme du peuple qu’incarnait Thomas Sankara »

 

Le Comité international du mémorial Thomas Sankara lance le 2 octobre prochain une campagne populaire de levée de fonds pour la construction d'un mémorial dédié au capitaine révolutionnaire burkinabè Thomas Sankara.

Le colonel Bernard Sanou, ami et camarade politique du président Sankara, qui préside ce Comité, répond en exclusivité aux questions de JA.

 

Jeune Afrique : Le Comité international du mémorial Thomas Sankara (CIM-TS) lance le 2 octobre prochain une campagne de collecte de fonds pour la construction d’un mémorial dédié au président révolutionnaire. Pourquoi cette intitiative ?

Colonel Bernard Sanou : Je dois préciser avant tout que ce projet architectural fait partie d’un ensemble d’activités élaboré par le Comité internationale du mémorial Thomas Sankara lors du colloque organisé en 2016 à Ouagadougou. Par ce mémorial, nous voulons faire revivre le souvenir de l’homme du peuple qu’incarnait le capitaine Sankara. Raison pour laquelle nous avons voulu que l’activité soit coordonnée en vue d’éviter d’entacher son image. Nous avons ainsi demandé aux camarades d’attendre le lancement officiel de cette campagne pour ensuite répliquer dans leurs pays respectifs.

Le plus important pour nous est de faire en sorte que cette activité participe à faire revivre l’image de père de la révolution burkinabè. Thomas Sankara était un homme du peuple, c’est pourquoi nous avons l’ambition de concrétiser ce projet par l’action populaire comme il l’a fait en mobilisant les masses autour des grands chantiers de la Révolution

Quel lien faut il établir entre le CIM-TS et les autorités ?

Les autorités actuelles sont partie prenante du projet de construction du mémorial Thomas Sankara. À preuve, le lancement de la campagne de souscription est placé sous le patronage du président Kaboré ainsi que le parrainage de l’ancien président ghanéen Jerry John Rawlings, que nous attendons le 2 octobre prochain à Ouagadougou. Nous voulons seulement créer un symbole par cette action. L’État burkinabè contribue au projet.

À ce jour, je peux vous affirmer que le CIM-TS a reçu des promesses de soutien de pays amis comme Cuba, l’Angola, l’Afrique du Sud. Et le mouvement que nous lançons va s’étendre sur une longue période, dans la mesure où le projet de mémorial comprend plusieurs phases comme des réalisations à Gaoua, au Prytanée militaire de Kadiogo (PMK), là où Sankara a fait respectivement ses études primaires et secondaires. À Tema-Bokin, son village d’origine et surtout à Pô, où Sankara a bâti le bataillon « Bailo »qui s’est particulièrement illustré lors du conflit contre le Mali en 1974, nous allons faire des réalisations qu’il appartiendra au ministère en charge du Tourisme d’intégrer dans les circuits touristiques.

Nous attendons donc l’ouverture du procès avec impatience

Où en est l’enquête judiciaire sur le drame du 15 octobre 1987 ?

Nous avons apporté une énorme contribution à la manifestation de la vérité dans cette affaire. Personnellement, j’ai été auditionné par le juge d’instruction. Nous suivons de près l’évolution de la procédure judiciaire. Certes, l’enquête avait quelque peu stagné. Mais avec le juge d’instruction François Yameogo, le dossier a connu des avancées. Ce dernier nous a même assuré de son intention de boucler l’enquête avant la fin de cette année. Nous attendons donc l’ouverture du procès avec impatience.

Quels étaient vos rapports avec le président Sankara et les circonstances de votre rencontre ?

Le président Sankara était pour moi un ami et un camarade politique. En tant que membre du Conseil national de la Révolution, nous nous retrouvions lors des rencontres politiques avec les camarades civils et les organisations de gauche. Étant alors directeur du génie militaire et responsable de la sécurité du secteur ouest de la capitale, j’étais amené à échanger régulièrement avec Thomas Sankara. S’agissant de notre rencontre, je dois dire que nous nous connaissions depuis 1955. Nous avions fréquenté l’école primaire à Gaoua.

Mais nos véritables retrouvailles remontent à l’année 1966, lorsque nous sommes entrés au Prytanée militaire de Kadiogo. C’est là que nos relations ont été intenses, avant de nous séparer encore pour notre formation d’officiers en 1969-1970 – lui à Madagascar et moi à Saint Cyr en France. Je suis rentré en 1974, en pleine guerre avec le Mali. Lorsque l’état-major a lancé la mobilisation générale, nous nous sommes retrouvés encore une fois sur le front. À la fin du conflit, j’ai été stationné à Djibo et lui a Pô, où il avait commencé la mise en place du Centre d’entraînement commando.

Au retour, nos rapports étaient devenus hebdomadaires. Je me rendais tous les weekends à Pô pour pour l’aider à monter son orchestre dénommé « Missile Bande de Pô », et c’était l’occasion de discuter des affaires du pays. En 1980, alors que le climat politique était délétère sur fond de désaccords entre partis politiques, les officiers supérieurs, voyant d’un mauvais œil le regroupement de jeunes officiers, ont décidé de nous disperser. Sankara a alors été muté à l’état-major de l’armée et moi envoyé en stage en Allemagne. Mais nous sommes restés en contact jusqu’aux événements du 4 août 1983 qui ont précipité mon retour au pays.

J’ai senti ce jour-là en Thomas Sankara la solitude du chef

Pouvez-vous nous raconter vos souvenirs les plus forts des années de pouvoir de Sankara ?

(Silence) Je crois, si ma mémoire est bonne, que c’était le dernier dimanche de juillet 1987. Sankara m’appelle au téléphone – « Gringo » (surnom qu’ils se sont donné depuis le PMK) – et demande à me voir. Mais, cette fois c’était différent. L’entretien, qui dure plus de deux heures, est en réalité un monologue. J’ai senti ce jour-là en Thomas Sankara la solitude du chef. Le président Sankara était profondément déçu de n’avoir pas eu l’accompagnement militant des camarades les plus proches – militaires et civils – avec lesquels il avait pris le pouvoir.

Sankara m’a clairement exprimé sa déception vis-à-vis du manque d’honnêteté et de courage politique ainsi que de la mauvaise foi de ses compagnons de lutte qu’il accusait d’avoir travesti les mots d’ordre. J’ai vu alors en Sankara un président à la croisée des chemins. L’exemple que je peux citer est la fameuse guerre qu’on lui a prêté contre la chefferie coutumière. Mais c’est inexact, d’autant que Sankara m’avait dit à Po que les meilleur alliés que nous pourrions avoir dans la gestion du pouvoir de l’État étaient bel et bien les chefs traditionnels. Il fallait seulement que nous trouvions le bon tempo pour les débarrasser de certaines prérogatives rétrogrades. Malheureusement, il n’y est pas parvenu.

Sankara a toujours été un homme pressé. Nous l’avions senti dès le PMK, lorsque élève du jour, il nous faisait passer une journée au pas de course !

La Tunisie abolit l'interdiction du mariage des femmes
avec des non-musulmans

Le ministre de la Justice tunisien, Ghazi Jeribi.
© REUTERS/Zoubeir Souissi
 

Les Tunisiennes de confession musulmane pourront désormais se marier dans leur pays avec des non-musulmans. Les circulaires ministérielles datant de 1973 et empêchant ces unions ont été abolies ce jeudi.

Ce 8 septembre, le ministre de la Justice Ghazi Jeribi a signé une circulaire annulant celle de 1973 et tous les textes qui s’y réfèrent et qui interdisaient le mariage avec des non-musulmans. Dans la nouvelle circulaire, le ministre rappelle la contradiction de celle de 1973 avec la Constitution, tout comme avec les accords internationaux signés par l’Etat tunisien.

Cette annulation fait suite au souhait du chef de l’Etat, qui le 13 août dernier, jour de la fête de la femme en Tunisie, avait promis d’abroger ce texte, adressant une demande dans ce sens au gouvernement.

 

Saida Garrach, la porte-parole de la présidence, qui était à l’origine une avocate et militante des droits de la femme a posté sur Facebook ce jeudi un message de félicitations aux Tunisiennes pour « la consécration du droit à la liberté de choisir son conjoint » a-t-elle écrit.

Plusieurs organisations de la société civile mènent depuis des années un combat pour l’annulation de cette injustice faite aux femmes. D’ailleurs une plainte a été déposée, ces derniers mois, auprès du tribunal administratif en vue de l’annulation de cette circulaire. Ces organisations considèrent que la circulaire 1973 constitue une « violation du droit fondamental de tout être humain ».

Si les instances de l’Etat tunisien parlent des citoyennes « tunisiennes », les extrémistes et les conservateurs accusent Béji Caïd Essebsi de vouloir autoriser le mariage des femmes musulmanes à des non-musulmans, ce qui touche à la charia.

Accueil des migrants: « le cœur toujours ouvert, prudence et intégration » Pape François

Durant son voyage de retour de Colombie, le 11 septembre 2017, le pape François a tenu une conférence de presse comme de coutume. La transcription intégrale par Gianni Cardinale, » Papa Francesco. «Sui migranti grato all’Italia. Clima, uomo cieco e testardo» » pour l’Avvenire est traduite et commentée par Hélène Ginabat pour Zenit. Voici un extrait du 5ème sujet abordé (voir liens et vidéo plus bas):

Pape-Spadaro

Vol Cartagena-Rome, Photo courtoisie du P. Antonio Spadaro SJ (Zenit)

«Le cœur toujours ouvert, prudence et intégration, et proximité humanitaire.» C’est l’attitude que le pape François préconise dans l’accueil des migrants, devant les journalistes qui l’ont accompagné en Colombie. […] Le pape a dénoncé la tentation d’ «exploiter l’Afrique»: «investissons là-bas pour qu’ils se développent… Nous devons renverser cela. L’Afrique est une amie et il faut l’aider à grandir». Chaque gouvernement, a-t-il aussi souligné doit gérer la question des migrants «avec la vertu propre au gouvernant, à savoir la prudence. Qu’est-ce que cela signifie ? D’abord, combien de places j’ai. Deuxièmement, ne pas seulement recevoir, (mais) intégrer».

logo zenit

 

  1. Colombie: la « force du peuple » qui « veut respirer »
  2. La corruption mène à « l’insensibilité », avertit le pape
  3. Conflits: « la sagesse de demander de l’aide »
  4. Climat: faire « marche arrière », plaide le pape
  5. Accueil des migrants: « le cœur toujours ouvert, prudence et intégration »
  6. Venezuela: préoccupation du pape sur la situation humanitaire
  7. États-Unis: « tout ce qui va contre les racines vole l’espérance »
Nous sommes invités à participer à la 3e édition de la Journée Mondiale de Prière pour la Sauvegarde de la Création qui se déroule le 1er septembre. Cette journée a été initiée par le pape François le 6 août 2015.
Selon Pape François, « La Journée Mondiale annuelle de Prière pour la Sauvegarde de la Création offrira à chacun des croyants et aux communautés la précieuse opportunité de renouveler leur adhésion personnelle à leur vocation de gardiens de la création. (lre la suite)

Nouvelles du 22-08- 2017
Texte Pris sur le site Zénit


Message de François
Pour la 104ème Journée mondiale du MIGRANT et du REFUGIE

14 janvier 2018.

« Accueillir, protéger, promouvoir et intégrer
les migrants et les réfugiés »(texte intégral)

Migrants : les indications « très pratiques » du pape
Réflexion du p. Baggio

Le pape François donne des indications « très pratiques » pour l’accueil et l’intégration des migrants, affirme le père Fabio Baggio, sous-secrétaire – « numéro 3 » – de la section « migrants et réfugiés » du Dicastère pour le service du développement humain intégral. Il revient en ces termes sur le message du pape pour la Journée mondiale du migrant et du réfugié qui sera célébrée le 14 janvier 2018, sur le thème « Accueillir, protéger, promouvoir et intégrer ».

Le message, explique-t-il dans un entretien publié le 21 août 2017 par l’agence catholique italienne SIR, donne « des indications très pratiques » notamment sur « des voies légales et sûres » pour tous les migrants. Il adresse « un appel très clair », à l’engagement de l’Eglise, forte de ses « bonnes pratiques ».

Le pape, ajoute le sous-secrétaire, met l’accent sur l’importance de protéger les migrants dès le départ, « en leur offrant toutes les informations nécessaires pour décider de partir ou non, où et comment y aller » ; puis dans le pays de destination, où ils doivent être aidés à « rester en situation régulière ou régulariser leur position ».

Le message demande aussi « la reconnaissance des capacités et des compétences des migrants avec la validation des diplômes d’étude et professionnels, pour que ces personnes puissent offrir le meilleur », puissent « approfondir leur instruction » et puissent être « une contribution et une occasion de développement pour les pays qui les reçoivent ».

Il s’agit pour les migrants et les réfugiés de ne pas avoir seulement « un passeport » en règle, mais aussi de « prendre un engagement avec un lieu, avec un territoire ». Non pas, précise le p. Baggio, de leur dire : « Tu peux ou tu ne peux pas », mais « Si tu veux, rappelle-toi qu’il y a une certaine responsabilité à assumer ».

Il évoque également « la peur de l’invasion » causée par « l’ignorance à l’égard de ceux qui frappent aux portes ». Il estime qu’il faut « énormément travailler sur l’éducation, sur la culture de la rencontre, en fournissant des données réelles ».

« Aller vers l’autre n’est pas nécessairement naturel, fait observer le sous-secrétaire : dans l’enfant c’est beaucoup plus présent mais dans l’adulte il y a souvent un frein parce qu’on craint de perdre quelque chose dans la rencontre avec l’autre ». L’expérience de l’histoire conclut-il, « enseigne que les civilisations sont nées justement de la rencontre entre divers peuples : au moment où ils se sont ouverts, pas quand ils se sont fermés ».

***

Texte intégral

Chers frères et sœurs,

 

« L’immigré qui réside avec vous sera parmi vous comme un compatriote, et tu l’aimeras comme toi-même, car vous-mêmes avez été immigrés au pays d’Égypte. Je suis le Seigneur votre Dieu » (Lv 19, 34).

Durant les premières années de mon pontificat, j’ai exprimé à maintes reprises une préoccupation spéciale concernant la triste situation de nombreux migrants et réfugiés qui fuient les guerres, les persécutions, les catastrophes naturelles et la pauvreté. Il s’agit sans doute d’un ‘‘signe des temps’’ que j’ai essayé de lire, en invoquant la lumière de l’Esprit Saint depuis ma visite à Lampedusa le 8 juillet 2013. En créant le nouveau Dicastère pour le Service du Développement humain intégral, j’ai voulu qu’une section spéciale, placée ad tempus sous mon autorité directe, exprime la sollicitude de l’Église envers les migrants, les personnes déplacées, les réfugiés et les victimes de la traite.

 

Tout immigré qui frappe à notre porte est une occasion de rencontre avec Jésus Christ, qui s’identifie à l’étranger de toute époque accueilli ou rejeté (cf. Mt 25, 35.43). Le Seigneur confie à l’amour maternel de l’Église tout être humain contraint à quitter sa propre patrie à la recherche d’un avenir meilleur (Cf. Pie XII, Constitution apostolique Exsul Familia, Titulus Primus, I, 1er août 1952). Cette sollicitude doit s’exprimer concrètement à chaque étape de l’expérience migratoire : depuis le départ jusqu’au voyage, depuis l’arrivée jusqu’au retour. C’est une grande responsabilité que l’Église entend partager avec tous les croyants ainsi qu’avec tous les hommes et femmes de bonne volonté, qui sont appelés à répondre aux nombreux défis posés par les migrations contemporaines, avec générosité, rapidité, sagesse et clairvoyance, chacun selon ses propres possibilités.

 

À ce sujet, nous souhaitons réaffirmer que « notre réponse commune pourrait s’articuler autour de quatre verbes fondés sur les principes de la doctrine de l’Église : accueillir, protéger, promouvoir et intégrer » (Discours aux participants au Forum International ‘‘Migrations et paix’’, 21 février 2017).

En considérant la situation actuelle, accueillir signifie avant tout offrir aux migrants et aux réfugiés de plus grandes possibilités d’entrée sûre et légale dans les pays de destination. En ce sens, un engagement concret est souhaitable afin que soit étendu et simplifié l’octroi de visas humanitaires et pour le regroupement familial. En même temps, je souhaite qu’un plus grand nombre de pays adoptent des programmes de patronage privé et communautaire et ouvrent des corridors humanitaires pour les réfugiés les plus vulnérables. En outre, il serait opportun de prévoir des visas temporaires spéciaux pour les personnes qui fuient les conflits dans les pays voisins. Les expulsions collectives et arbitraires de migrants et de réfugiés ne constituent pas une solution adéquate, surtout lorsqu’elles sont exécutées vers des pays qui ne peuvent pas garantir le respect de la dignité et des droits fondamentaux (Cf. Intervention du Représentant permanent du Saint-Siège à la 103ème Session du Conseil de l’OIM, 26 novembre 2013).

 

J’en viens encore à souligner l’importance d’offrir aux migrants et aux réfugiés un premier accueil approprié et digne. « Les programmes d’accueil diffus, déjà lancés dans différentes localités, semblent au contraire faciliter la rencontre personnelle, permettre une meilleure qualité des services et offrir de plus grandes garanties de succès » (Discours aux participants au Forum International ‘‘Migrations et paix’’, 21 février 2017). Le principe de la centralité de la personne humaine, fermement affirmé par mon bien-aimé prédécesseur Benoît XVI (Cf. Lettre encyclique Caritas in veritate, 47), nous oblige à toujours faire passer la sécurité personnelle avant la sécurité nationale. Par conséquent, il est nécessaire de former adéquatement le personnel préposé aux contrôles de frontière. Les conditions des migrants, des demandeurs d’asile et des réfugiés, postulent que leur soient garantis la sécurité personnelle et l’accès aux services élémentaires. Au nom de la dignité fondamentale de chaque personne, il faut s’efforcer de préférer des solutions alternatives à la détention pour ceux qui entrent sur le territoire national sans autorisation (Cf. Intervention du Représentant permanent du Saint-Siège à la 20ème Session du Conseil des droits humains, 22 juin 2012).

 

Le deuxième verbe, protéger, se décline en toute une série d’actions pour la défense des droits et de la dignité des migrants ainsi que des réfugiés, indépendamment de leur statut migratoire (Cf. Benoît XVI, Lettre encyclique Caritas in veritate, 62). Cette protection commence dans le pays d’origine et consiste dans la mise à disposition d’informations sûres et certifiées avant le départ et dans la prévention contre les pratiques de recrutement illégal (Cf. Conseil Pontifical pour la Pastorale des Migrants et des Itinérants, Instruction Erga migrantes caritas Christi, n. 6). Elle devrait se poursuivre, dans la mesure du possible, dans le pays d’immigration, en assurant aux migrants une assistance consulaire adéquate, le droit de garder toujours avec soi les documents d’identité personnels, un accès équitable à la justice, la possibilité d’ouvrir des comptes bancaires personnels et la garantie d’une subsistance minimum vitale. Si elles sont reconnues et valorisées de manière appropriée, les capacités et les compétences des migrants, des demandeurs d’asile et des réfugiés, représentent une vraie ressource pour les communautés qui les accueillent (Cf. Benoît XVI, Discours aux participants au 6ème Congrès mondial pour la pastorale des migrants et des réfugiés, 9 novembre 2009).

 

C’est pourquoi, je souhaite que, dans le respect de leur dignité, leur soient accordés la liberté de mouvement dans le pays d’accueil, la possibilité de travailler et l’accès aux moyens de télécommunication. Pour ceux qui décident de retourner dans leur pays, je souligne l’opportunité de développer des programmes de réintégration professionnelle et sociale. La Convention internationale sur les droits de l’enfant offre une base juridique universelle pour la protection des mineurs migrants. Il faut leur éviter toute forme de détention en raison de leur status migratoire, tandis qu’on doit leur assurer l’accès régulier à l’instruction primaire et secondaire. De même, quand ils atteignent l’âge de la majorité il est nécessaire de leur garantir une permanence régulière et la possibilité de continuer des études. Pour les mineurs non accompagnés ou séparés de leur famille, il est important de prévoir des programmes de garde temporaire ou de placement (Cf. Benoît XVI, Message pour la Journée mondiale du migrant et du réfugié, 2010, et S. Tomasi, Intervention du Représentant permanent du Saint-Siège à la 26ème Session ordinaire du Conseil pour les Droits de l’Homme sur les droits humains des migrants,13 juin 2014). Dans le respect du droit universel à une nationalité, celle-ci doit être reconnue et opportunément assurée à tous les enfants à la naissance. L’apatridie dans laquelle se trouvent parfois des migrants et des réfugiés peut être facilement évitée à travers « une législation sur la citoyenneté conforme aux principes fondamentaux du droit international » (Conseil Pontifical pour la Pastorale des Migrants et des Itinérants et Conseil Pontifical Cor Unum, Accueillir le Christ dans les réfugiés et dans les personnes déracinées de force, 2013, n. 70). Le status migratoire ne devrait pas limiter l’accès à l’assistance sanitaire nationale et aux systèmes de pension, ni le transfert de leurs contributions en cas de rapatriement.

 

Promouvoir veut dire essentiellement œuvrer afin que tous les migrants et les réfugiés ainsi que les communautés qui les accueillent soient mis en condition de se réaliser en tant que personnes dans toutes les dimensions qui composent l’humanité voulue par le Créateur (Cf. Paul VI, Lettre encyclique Populorum progressio, n. 14). Parmi ces dimensions, il faut reconnaître à la dimension religieuse sa juste valeur, en garantissant à tous les étrangers présents sur le territoire la liberté de profession et de pratique religieuse. Beaucoup de migrants et de réfugiés ont des compétences qui doivent être adéquatement certifiées et valorisées. Puisque « le travail humain est par nature destiné à unir les peuples » (Jean-Paul II, Lettre encyclique Centesimus annus, n. 27), j’encourage à œuvrer afin que soit promue l’insertion socio-professionnelle des migrants et des réfugiés, garantissant à tous – y compris aux demandeurs d’asile – la possibilité de travailler, des parcours de formation linguistique et de citoyenneté active ainsi qu’une information appropriée dans leurs langues d’origine. Dans le cas des mineurs migrants, leur implication dans des activités productives doit être règlementée de manière à prévenir des abus et des menaces à leur croissance normale. En 2006, Benoît XVI soulignait comment, dans le contexte de migration, la famille est « lieu et ressource de la culture de la vie et facteur d’intégration des valeurs » (Benoît XVI, Message pour la Journée mondiale du migrant et du réfugié, 2007). Son intégrité doit être toujours promue, en favorisant le regroupement familial – y compris des grands-parents, des frères et sœurs et des petits-enfants – sans jamais le soumettre à des capacités économiques. Une plus grande attention et un plus grand soutien doivent être portés aux migrants, aux demandeurs d’asile et aux réfugiés en situation de handicap. Tout en considérant louables les efforts déployés jusqu’ici par de nombreux pays en termes de coopération internationale et d’assistance humanitaire, je souhaite que dans la distribution de ces aides, soient pris en compte les besoins (par exemple l’assistance médicale et sociale ainsi que l’éducation) des pays en développement qui reçoivent d’importants flux de réfugiés et de migrants et, également, qu’on inclue parmi les destinataires les communautés locales en situation de pénurie matérielle et de vulnérabilité (Conseil Pontifical pour la Pastorale des Migrants et des Itinérants et Conseil Pontifical Cor Unum, Accueillir le Christ dans les réfugiés et dans les personnes déracinées de force, 2013, nn. 30-31).

 

Le dernier verbe, intégrer, se place sur le plan des opportunités d’enrichissement interculturel général du fait de la présence de migrants et de réfugiés. L’intégration n’est pas « une assimilation, qui conduit à supprimer ou à oublier sa propre identité culturelle. Le contact avec l'autre amène plutôt à en découvrir le ‘‘secret’’, à s'ouvrir à lui pour en accueillir les aspects valables et contribuer ainsi à une plus grande connaissance de chacun. Il s'agit d'un processus de longue haleine qui vise à former des sociétés et des cultures, en les rendant toujours davantage un reflet des dons multiformes de Dieu aux hommes » (Jean-Paul II, Message pour la Journée mondiale du migrant et du réfugié (2005), 24 novembre 2004). Ce processus peut être accéléré à travers l’offre de citoyenneté dissociée des capacités économiques et linguistiques et l’offre de parcours de régularisation extraordinaire pour des migrants qui peuvent faire valoir une longue présence dans le pays.

 

J’insiste encore sur la nécessité de favoriser, dans tous les cas, la culture de la rencontre, en multipliant les opportunités d’échange interculturel, en documentant et en diffusant les ‘‘bonnes pratiques’’ d’intégration et en développant des programmes visant à préparer les communautés locales aux processus d’intégration. Je dois souligner le cas spécial des étrangers forcés à quitter le pays d’immigration à cause de crises humanitaires. Ces personnes demandent que leur soient assurés une assistance adéquate pour le rapatriement et des programmes de réintégration professionnelle dans leur pays d’origine.

En conformité avec sa tradition pastorale, l’Église est disponible pour s’engager en première ligne en vue de réaliser toutes les initiatives proposées plus haut ; mais pour obtenir les résultats espérés, la contribution de la communauté politique et de la société civile, chacun selon ses responsabilités propres, est indispensable.

 

Durant le Sommet des Nations Unies, célébré à New York le 19 septembre 2016, les dirigeants du monde ont clairement exprimé leur volonté d’œuvrer en faveur des migrants et des réfugiés pour sauver leurs vies et protéger leurs droits, en partageant ces responsabilités au niveau global. À cet effet, les États se sont engagés à rédiger et à approuver avant la fin de l’année 2018 deux accords globaux (Global Compacts), l’un consacré aux réfugiés et l’autre concernant les migrants.

 

Chers frères et sœurs, à la lumière de ces processus engagés, les prochains mois représentent une opportunité privilégiée pour présenter et soumettre les actions concrètes dans lesquelles j’ai voulu décliner les quatre verbes. Je vous invite, donc, à profiter de chaque occasion pour partager ce message avec tous les acteurs politiques et sociaux qui sont impliqués – ou intéressés à participer – au processus qui conduira à l’approbation des quatre accords globaux.

Aujourd’hui, 15 août, nous célébrons la solennité de l’Assomption de la très Sainte Vierge Marie au Ciel. La Mère de Dieu a fait elle-même l’expérience de la dureté de l’exil (cf. Mt 2, 13-15) ; elle a suivi avec amour l’itinéraire de son Fils jusqu’au Calvaire et maintenant elle partage éternellement sa gloire. Confions à sa maternelle intercession les espérances de tous les migrants et réfugiés du monde et les aspirations des communautés qui les accueillent, afin que, selon le plus grand commandement de Dieu, nous apprenions tous à aimer l’autre, l’étranger, comme nous-mêmes.

 

Vatican, le 15 août 2017

Solennité de l’Assomption de la B.V. Marie

FRANÇOIS