Justice et Paix

" Je suis homme, l'injustice envers d'autres hommes révolte mon coeur. Je suis homme, l'oppression indigne ma nature. Je suis homme, les cruautés contre un si grand nombre de mes semblables ne m'inspirent que de l'horreur. Je suis homme et ce que je voudrais que l'on fit pour me rendre la liberté, l'honneur, les liens sacrés de la famille, je veux le faire pour rendre aux fils de ces peuples l'honneur, la liberté, la dignité. " (Cardinal Lavigerie, Conférence sur l'esclavage africain, Rome, église du Gesù)

 

NOS ENGAGEMENTS POUR LA JUSTICE T LA PAIX
S'EXPRIMENT DE DIFFÉRENTES MANIÈRES :

En vivant proches des pauvres, partageant leur vie.
Dans les lieux de fractures sociales où la dignité n'est pas respectée.
Dans les communautés de base où chaque personne est responsable et travaille pour le bien commun.
Dans les forums internationaux pour que les décisions prises ne laissent personne en marge.

Dans cette rubrique, nous aborderons différents engagements des Missionnaires d'Afrique, en particulier notre présence auprès des enfants de la rue à Ouagadougou et la défense du monde paysan.

 

Racisme et populisme : Kaïs Saïed et les boucs émissaires – Par Marwane Ben Yahmed

Les propos aussi inexplicables qu’inacceptables du président tunisien sur les migrants subsahariens ont gravement terni l’image de la Tunisie en Afrique. Et au-delà.

Mis à jour le 20 mars 2023 à 09:31



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Par Marwane Ben Yahmed

Directeur de publication de Jeune Afrique.

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ÉDITORIAL – Habib Bourguiba doit se retourner dans sa tombe. Le 21 février, le chef de l’État tunisien, Kaïs Saïed, a affirmé que la présence de « hordes » d’immigrés clandestins subsahariens était source « de violence, de crimes, de pratiques inacceptables », et relevait d’une « entreprise criminelle » visant à « modifier la composition démographique » du pays, et, partant, son « identité arabe et islamique ».

 

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Après ce discours lunaire aux accents complotistes, on a assisté à une recrudescence des violences contre des ressortissants subsahariens, qui se sont précipités par dizaines à leurs ambassades pour être exfiltrés. Des pays tels que le Mali, la Guinée ou la Côte d’Ivoire ont donc affrété des avions pour rapatrier leurs citoyens. Surréaliste…

Le « grand remplacement » : une ineptie

Quelle mouche a donc piqué le président ? Comment en est-il arrivé à reprendre à son compte la fétide théorie du « grand remplacement » et à se muer en caisse de résonance des fantasmes de sa base. Alors qu’il s’était attelé jusque-là à désigner un ennemi intérieur – les spéculateurs, les suppôts de l’étranger, les affidés de l’ancien régime, les profiteurs, les corrompus –, voilà qu’il pointe une nouvelle cible, un ennemi de l’extérieur cette fois : les migrants, lesquels viendraient manger le pain des Tunisiens et saper l’identité de la nation. Une dérive populiste qui mène tout droit à la xénophobie.

Mais ne nous leurrons pas, certains adhèrent hélas à son discours. Le racisme, en Tunisie comme au Maroc ou en Algérie, n’est pas une vue de l’esprit. Mais, s’il est vrai que la société tunisienne a effectivement marginalisé sa propre communauté noire, certains progrès avaient été accomplis depuis la révolution, notamment avec la promulgation, en 2018, d’une loi pénalisant la discrimination raciale et permettant aux victimes de racisme d’obtenir réparation pour les violences physiques ou verbales subies.

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Quelle ironie : les concitoyens de Saïed sont eux-mêmes la cible d’une rhétorique identique en Europe – après avoir traversé au péril de leur vie la Méditerranée – et accusés de tous les maux de l’enfer, boucs émissaires commodes désignés à la vindicte populaire par les Marine Le Pen, Éric Zemmour (lequel s’est empressé de féliciter Saïed pour sa « lucidité »), Giorgia Meloni et consorts…

Carton jaune de la Banque mondiale

Depuis, le président a essayé de réparer sa faute, sans vouloir pour autant s’excuser, mais le communiqué publié, les mesures censées calmer les esprits ou le rétropédalage du ministre des Affaires étrangères, Nabil Amar, n’ont eu que peu d’effets. Trop tard, trop peu, mal ficelés. Les dégâts pour l’image de la Tunisie, celle de ses citoyens comme celle de ses entreprises, sont considérables. Et certainement durables. La Banque mondiale, un des principaux bailleurs, a suspendu son partenariat cadre, des campagnes de boycott des produits tunisiens ont essaimé un peu partout sur le continent…

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Kaïs Saïed était tout à fait en droit de tirer la sonnette d’alarme sur l’immigration illégale, sujet sensible mais réel qu’aucun dirigeant responsable ne peut occulter. Mais pas d’ethniciser ses propos, par ailleurs ineptes sur le fond comme sur la forme. Quelque part, c’est aussi le signe que l’Afrique subsaharienne ne l’intéresse guère, lui qui n’y a effectué aucune visite officielle et qui regarde plus volontiers vers le Moyen-Orient. Dommage, car cela représente des débouchés et des marchés potentiels pour les entreprises du pays…

Comment en est-on arrivé là ? L’élection de Kaïs Saïed en 2019 est la conséquence de vieux dysfonctionnements politiques devenus presque structurels. Après la chute de Zine el-Abidine Ben Ali, en 2011, le pays a été paralysé par la grande querelle entre islamistes et laïcs. Mais ni les uns ni les autres ne se sont montrés particulièrement aptes à résoudre les principaux problèmes : une économie atone, une corruption endémique, de profondes inégalités. Plus de huit ans après le déclenchement de la révolution, dégoûtés par l’indigence de leur classe politique, 73 % des électeurs se sont donc jetés dans les bras de ce professeur de droit réputé intègre mais sorti de nulle part, au programme électoral des plus flous.

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Kaïs Saïed a passé une bonne partie de sa présidence à démanteler une démocratie balbutiante mais réelle, la seule qui soit née des printemps arabes. En 2021, il s’est accaparé tous les pouvoirs, ou presque. Exit l’Assemblée nationale, dissoute, les conseils municipaux et le gouvernement. Une nouvelle Constitution, adoptée à la hâte lors d’un référendum sans queue ni tête, lui a permis de gouverner en autocrate. Un choix pas vraiment éclairé… L’inflation a dépassé la barre des 10 % en janvier, le taux de chômage s’élève à 15 % (selon les chiffres officiels, mais c’est sans doute plus). Un tiers des diplômés universitaires et une part plus élevée de jeunes ne trouvent pas d’emploi. La monnaie nationale a perdu 55 % de sa valeur depuis 2011.

Opération de diversion ?

Croulant sous une montagne de dette publique, représentant 89 % du PIB, la Tunisie peine à payer ses importations. On a assisté à des pénuries de sucre, de pâtes et d’autres produits de base. Les pourparlers de sauvetage avec le FMI sont dans l’impasse. Alors, évidemment, nombre de Tunisiens rêvent d’ailleurs. Une enquête menée l’année dernière par l’Institut arabe des chefs d’entreprise a révélé que 71 % des diplômés souhaitent émigrer. Les plus nantis lorgnent l’Europe, le Golfe ou, autre ironie du sort, l’Afrique subsaharienne. Quant aux plus modestes, eux, ils tentent leur chance en Méditerranée. En 2019, année de l’arrivée au pouvoir de Kaïs Saïed, plus de 2 600 personnes ont rejoint l’Italie par bateau. En 2022, ils étaient près de 18 000 à tenter la traversée…

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Les Subsahariens jetés en pâture à la population par un président visiblement soucieux de faire diversion, eux, ne font que colmater les brèches d’un système économique à bout de souffle. La population active a diminué de 150 000 personnes l’an dernier. Les migrants occupent les emplois dont les Tunisiens ne veulent plus en raison des salaires trop bas pratiqués dans le BTP, la restauration, l’agriculture ou les services, entre autres. Le modèle tunisien, bâti depuis cinquante ans sur les bas coûts de production et donc sur les bas salaires, n’est plus qu’une relique.

De la haine de classe à la haine de l’Autre

Les prix et le coût de la vie flambent, le pouvoir d’achat de la population, dont les attentes sont considérables depuis 2011, fond comme neige au soleil. Ce n’est plus tenable, et c’est ce qui explique en grande partie l’émigration massive. Quant à l’immigration illégale, la Tunisie n’étant finalement qu’une étape vers l’eldorado supposé qu’est l’Europe, on est loin du « grand remplacement » : le Forum tunisien pour les droits économiques et sociaux (FTDES) estime à 21 000 le nombre de migrants sans papiers originaires d’Afrique subsaharienne. Même sous-estimé, même en multipliant ce chiffre par deux ou trois, on est loin de l’invasion décrite dans un pays de 12 millions d’habitants !

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Racisme et populisme ont toujours fait bon ménage et ont, de tout temps et sous toutes les latitudes, représenté des leurres efficaces pour des dirigeants sans solutions. La haine de classe, qui cible les puissants ou les riches d’hier, ces « ennemis du peuple », est une autre arme que Saïed utilise volontiers. Tout comme ce souverainisme compulsif qui fustige les « ingérences » et les « diktats » de l’étranger et rencontre un écho favorable auprès d’une population soucieuse de trouver des coupables à ses difficultés croissantes. Que se passera-t-il quand il aura épuisé ses réserves de boucs émissaires et d’artifices ? Le roi sera nu… Ainsi va la Tunisie de 2023, sous la férule d’un homme supposé providentiel, qui regarde ailleurs alors que les problèmes s’accumulent sous son nez. Douze ans après une révolution censée mettre fin aux règnes des zaïms omnipotents et omniscients, c’est un véritable crève-cœur.

Insécurité dans le Centre-nord du Burkina : La commune de Tougouri se vide de sa population, alertent les ressortissants

Accueil > Actualités > DOSSIERS > Attaques terroristes • Lefaso.net • jeudi 16 mars 2023 à 22h25min 
 
Insécurité dans le Centre-nord du Burkina : La commune de Tougouri se vide de sa population, alertent les ressortissants

 

Les ressortissants de la commune de Tougouri réunis au sein du Conseil communal des OSC (Organisation de la société civile) de Tougouri ont animé une conférence de presse, ce jeudi 16 mars 2023 à Kaya, dans la région du Centre-nord.

Le vendredi 10 mars 2023, la commune de Tougouri a connu la deuxième attaque terroriste de son histoire, après celle du 13 mars 2019. « Suite à cette attaque, une médiatisation dont nous ignorons la véracité, selon laquelle plusieurs terroristes en fuite auraient été abattus a été diffusée. Nous nous disons que c’est suite à cette médiatisation que les HANI sont revenus le 13 mars 2023 commettre encore une fois de plus leur forfaiture sans être inquiétés et donner un ultimatum de sept jours à la population de quitter les lieux », a expliqué Roland Lallogo, le président du Conseil communal des OSC de Tougouri.

Selon Benjamin Koudougou, le coordonnateur de MPAP (Mouvement pour la culture de la paix et l’amour de la patrie) du Centre-nord, les lanceurs d’alertes et autres internautes doivent préserver la vie des zones à fort défi sécuritaire. « Tout ce qui se passe sur les réseaux sociaux, eux [les terroristes] aussi les suivent comme nous. Et ils viennent pour témoigner que tout ce qui se racontent sur les réseaux sociaux est faux », a-t-il insisté.

 

Au lendemain de cette menace, c’est-à-dire le 14 mars, la population a entrepris des démarches auprès de l’autorité en vue d’obtenir un renfort de FDS et VDP sur place. « C’est ainsi que nous avons été informés de l’arrivée imminente d’un détachement dans les heures qui suivaient. Malheureusement, cette bonne nouvelle n’a jamais abouti et la nuit du 14, les ennemis du peuple sont revenus autour de 23h faire des tirs d’armes lourdes et ont sommé la population de quitter la ville avant l’aube », a déploré Roland Lallogo.

 

« Si nous somme aussi Burkinabè, alors nous demandons
une intervention immédiate afin de sauver Tougouri »,
a déclaré Roland Lallogo.

« Des tirs d’armes lourdes encore »

Impuissante face à cette situation, la ville a commencé donc à se vider les minutes qui ont suivi. « Dès que nous avons encore reçu l’information, nous avons encore une fois de plus interpelé l’autorité afin d’empêcher le départ des populations mais hélas, rien ne se fit, et ce, jusqu’à l’heure où nous vous parlons », a confié le président du Conseil communal des OSC de Tougouri.

A écouter les conférenciers du jour, malgré la fuite de la population, les hommes armés sont revenus encore : « Comme pour montrer leur bravoure et leur victoire, ces hommes sont revenus la nuit du 15 mars alors que la ville s’est vidée, faire des tirs d’armes lourdes encore ». [ Cliquez ici pour lire l’intégralité ]

Cryspin Laoundiki
Lefaso.net

Au Mali, une Cour suprême sous influence ?

Chargée de poursuivre plusieurs personnalités du régime d’Ibrahim Boubacar Keïta, la Cour suprême est critiquée par certains magistrats et avocats qui dénoncent une juridiction « caporalisée », aux ordres de la transition d’Assimi Goïta.

Mis à jour le 16 mars 2023 à 18:36
 
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Le colonel Assimi Goïta au milieu de juges de la Cour suprême, lors de sa cérémonie de prestation de serment, le 7 juin 2021, à Bamako. © ANNIE RISEMBERG/AFP

Le ton tranche radicalement avec le devoir de réserve qu’observent généralement les magistrats. Désormais coordinateur des organisations de l’Appel du 20 février, plateforme de l’opposition initiée par Issa Kaou N’Djim, Cheick Mohamed Chérif Koné enchaîne les déclarations au vitriol contre la transition.

Il n’y a pas si longtemps, cette robe noire était pourtant le premier avocat général de la Cour suprême du Mali, poste duquel il a été révoqué en septembre 2021 après le « coup dans le coup » d’Assimi Goïta et de son quarteron de colonels.

À LIREMali : ce que la justice reproche à Soumeylou Boubeye Maïga

Le voilà désormais qui multiplie les attaques en règle contre les autorités de la transition. Revenant récemment sur l’affaire qui a mené l’ex-Premier ministre Soumeylou Boubèye Maïga (SBM) en prison, le magistrat s’en est pris aux tenants de l’exécutif et de l’autorité judiciaire. « [Boubèye] a exprimé son souhait de voir la transition prendre fin à date. Il a été ciblé. Les tenants de la transition […] voulaient une transition sans fin », a déclaré Chérif Koné au sujet de la mort du « Tigre » en détention, en mars 2022.

L’affaire Boubèye, une machination ?

Pour comprendre comment cet ancien cadre de la Cour suprême est devenu un fervent opposant, il faut remonter au mois d’août 2021. Amorcée trois mois plus tôt, la « deuxième phase de la transition » malienne s’est ouverte sur une kyrielle d’arrestations de figures de l’ancien régime. « La fin de l’impunité », promettent alors les nouveaux hommes forts de Bamako.

Tête d’affiche des personnalités poursuivies, Soumeylou Boubèye Maïga est placé sous mandat de dépôt le 26 août 2021. L’ancien Premier ministre est soupçonné de « faux, usage de faux », « d’escroquerie » et de « favoritisme » dans le cadre de l’achat d’un avion présidentiel en 2014, alors qu’il était ministre de la Défense.

À LIREMali : la mort de Soumeylou Boubeye Maïga, un « assassinat » politique ?

À l’époque, c’est la Cour suprême malienne qui place l’homme politique sous mandat de dépôt. Et c’est bien là que le bât blesse. Car selon la Constitution malienne, les procédures visant les hautes personnalités de l’État, ministres inclus, relèvent de la Haute Cour de Justice et non de la Cour suprême.

Or, cette juridiction d’exception est une composante de l’Assemblée nationale, laquelle a été dissoute lors du coup d’État d’août 2020. « Faute d’une Haute Cour de Justice, la Cour suprême s’est auto-saisie des dossiers concernant d’anciens ministres, bien que cela ne relève pas de sa compétence », estime un avocat malien. Présidée par Wafi Ougadeye, qui deviendra en mars 2022 le conseiller spécial d’Assimi Goïta, la Cour suprême, elle, se défend en invoquant une jurisprudence qui lui permettrait de juger les grands commis de l’État.

Pressions politiques et lutte contre la corruption

Mais tout le monde ne l’entend pas de cette oreille. « Lorsque la Cour suprême a relancé le dossier Boubèye Maïga, tout le monde a pensé à une collusion entre la justice et les tenants de la transition. D’autant que le dossier avait déjà été classé par le parquet économique et financier », dénonce un juge malien.

« Les pressions ont commencé avant le deuxième coup d’État, du temps où Mahamadou Kassogué [qui deviendra ministre de la Justice] était procureur de la République  », assure Cheick Mohamed Chérif Koné. « Les autorités voulaient des résultats dans la lutte contre la corruption et ont fait pression au plus haut niveau de la Cour suprême. Je me suis contenté de rappeler que la Cour suprême n’était pas un organe de la transition », ajoute l’intéressé.

À LIREMali : « Air IBK », la querelle des magistrats et l’ombre de Goïta

Chérif Koné engage alors un bras de fer avec Wafi Ougadeye et Mahamadou Timbo, respectivement président et procureur général de la Cour suprême. Ces derniers auront la tête du premier, accusé d’avoir « violé son obligation de réserve ». Une sanction qui marquera la fin du premier épisode de la lutte d’influence au sein de la plus haute juridiction du pays.

Les dessous d’une grève

Le second acte interviendra un an plus tard, en novembre 2022. À l’époque, l’actualité fait la part belle à la visite au Mali du capitaine putschiste burkinabè Ibrahim Traoré pour son premier déplacement officiel, aux manifestations monstres contre le blasphème ou encore à la détention des 46 soldats ivoiriens à Bamako. Au point que la grève, entamée au même moment par les magistrats, passe relativement inaperçue.

Officiellement, leurs syndicats protestent contre un projet de loi repoussant l’âge de départ à la retraite des magistrats de la Cour suprême. Mais à huis clos, un autre match se joue, certains étant convaincus que le report « visait à maintenir à leur poste des magistrats favorables à la transition », affirme un juge.

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Résultat, « la Cour suprême est désormais totalement caporalisée », dénonce un cacique du barreau malien. « La lutte est déjà perdue en interne, souffle notre avocat. Le ministère de la Justice a la main sur certains syndicats, et les hauts responsables de la Cour suprême ont décidé de se ranger du côté de la transition. »

Reste le terrain politique, sur lequel s’est engagé Cheick Mohamed Chérif Koné. « Je ne suis pas du côté des politiques, rétorque l’intéressé. Les magistrats ont, comme les autres, si ce n’est davantage, le droit de se dresser contre les violations de la loi lorsqu’il en va de l’intérêt général. »

Les sorties du magistrat ont en tout cas été remarquées par le procureur général de la Cour suprême qui a réagi par voie de communiqué, ce jeudi 16 mars. Ce dernier promet des « poursuites légales » contre des magistrats « en mal d’inspirations conformes aux bonnes mœurs », qui portent « de graves accusations à l’endroit des magistrats en charge » des dossiers d’instruction de la Cour suprême. Des mots qui visent notamment, sans le citer, Cheick Mohamed Chérif Koné.

Au Mali, l’activité d’Orange et de Malitel en péril après une lourde sanction judiciaire

La Cour suprême du Mali a confirmé la condamnation d’Orange Mali et de Malitel, filiale locale de Maroc Telecom, à indemniser une association de consommateurs à hauteur de 175 milliards de francs CFA (plus de 266 millions d’euros).

Mis à jour le 15 mars 2023 à 18:17

 

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Implantation d’une boutique Orange à Tombouctou, Mali. © Daniel Riffet/Photononstop/AFP

 

C’est une décision qui pourrait tout simplement mettre en péril les activités des deux principaux opérateurs télécoms du Mali. Le 13 mars, la Cour suprême du Mali a confirmé une décision formulée par la cour d’appel de Bamako en novembre 2021, condamnant Orange Mali –  contrôlé à 70 % par le sénégalais Sonatel et le groupe français Orange – et Malitel – filiale à 51 % de Maroc Telecom – à payer environ 175 milliards de francs CFA (soit plus de 266 millions d’euros) d’indemnités au Réseau malien des consommateurs de téléphonie mobile (Remacotem), qui accusait les deux opérateurs de facturer les minutes d’appel sur répondeur.

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« C’est une action en réparation du préjudice subi, explique Me Mangara Tidiane, l’avocat du Remacotem, joint par Jeune Afrique. Sur les 193 pays membres de l’Union internationale des télécoms, il n’y a qu’au Mali que cette pratique se faisait encore », s’alarme-t-il, tout en s’étonnant que le caractère contraignant – parce qu’exécutoire – de la décision de la cour d’appel n’ait pas été respecté. Selon des informations publiques communiquées par Maroc Telecom, au cours de l’année 2022, la Cour suprême a annulé les procès-verbaux des arrêts en appel et a accordé un délai de grâce aux opérateurs.

Délai de grâce

Cette fois-ci, un second délai de grâce de deux mois a été donné aux opérateurs « pour réfléchir à la suite à donner à cette décision », indique pour sa part à Jeune Afrique une porte-parole d’Orange. En d’autres termes, les opérateurs concernés, qui se partagent environ 23 millions d’abonnés, étudieraient l’opportunité d’un ultime recours auprès d’un autre juridiction dont la nature n’a pas été précisée. Orange s’estime néanmoins « choqué » par cette décision qui, si elle doit être appliquée, « met en difficulté tous les opérateurs », reconnaît sa porte-parole.

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Premier opérateur du pays avec 12,4 millions d’abonnés au troisième trimestre de 2022, Orange a réalisé un chiffre d’affaires de 695 millions d’euros en 2021. Ses résultats au cours des trois premiers trimestres de 2022 ont oscillé entre 175 millions et 176 millions d’euros. Pour sa part, Malitel, qui compte près de 9 millions d’abonnés sur le mobile, ne communique pas le détail des résultats pour ses filiales.

Protestation des syndicats

Ce litige relatif à la facturation abusive de la boîte vocale court depuis 2011. Il a été classé sans suite une première fois au civil par le tribunal de grande instance de la commune III de Bamako, puis au pénal sept ans plus tard par le tribunal de grande instance de la commune IV de la capitale malienne. Cette même année 2018 voit un nouveau procès en appel engagé au civil, lors duquel les plaignants réclament 400 milliards de F CFA à Orange et 160 milliards de F CFA à Malitel. Ce dernier procès débouche sur la décision de novembre 2021.

À LIREMali, Burkina : comment les opérateurs télécoms font-ils face à la menace sécuritaire ?

Des questions demeurent quant à la façon dont l’argent sera redistribué aux consommateurs. « Remacotem est une association de droit malien bien structurée avec ses adhérents, disposant d’une adresse et d’un président. Il revient au réseau d’organiser comme il le souhaite la répartition des indemnités », indique sans plus de détail Me Mangara Tidiane.

À ceux qui accusent le Remacotem de mettre en péril le secteurs malien des télécoms – en premier lieu les syndicats des opérateurs, qui ont respecté une grève de cinq jours en février 2022 en signe de protestation –, l’avocat de l’association formule une réponse musclée : « Ce sont des sociétés prédatrices. Si cette décision les met en péril, d’autres opérateurs prendront le relai. »


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Bonjour,

En lien avec la Fondation de recherche Omega, nous avons mené un travail de recherche sur les 5 dernières années. Sur les 30 pays couverts, nous avons constaté une utilisation abusive de projectiles à impact cinétique par les forces de l'ordre. Ce travail se base sur des preuves visuelles vérifiées, des témoignages, des rapports médicaux, des décisions judiciaires et administratives et des rapports d’ONG locales, des Nations unies et des Etats.

Nous en avons tiré un rapport « Mon Œil a explosé », que nous avons publié hier. Il documente l’usage abusif des armes à létalité réduite, notamment des projectiles à impact cinétique, par les forces de l’ordre notamment au Chili, en Colombie, en France, en Israël, au Liban, en Espagne et aux Etats-Unis.

Partout dans le monde, l’utilisation abusive et illégale de ces armes est à l’origine de milliers de blessures graves et irréversibles dont des mutilations, et de dizaines de décès... Il y a quelques jours, nous vous parlions justement de Zineb Redouane, 80 ans, tuée par une grenade lacrymogène à Marseille en 2018. Cette tendance mondiale alarmante souligne la nécessité d’agir pour mettre en place un encadrement de ces armes à létalité réduite en manifestation !

EN SAVOIR PLUS

L’arsenal d’armes à létalité réduite est de plus en plus varié et accessible aux forces de sécurité. Leur utilisation indiscriminée et disproportionnée pose la question du manque d'encadrement de leur production, de leur usage et de leur commerce. Avec 30 autres organisations de la société civile, nous demandons l'adoption d’un traité international contre le commerce des instruments de torture . L’objectif ? Interdire la production d’équipements de maintien de l’ordre dont le seul but est d’infliger la souffrance, et contrôler ceux qui peuvent avoir un objectif légitime mais qui sont susceptibles d’être utilisés par des autorités pour réprimer des manifestations pacifiques.

Aidez-nous à demander aux autorités françaises l’adoption de ce Traité international pour que ces armes ne puissent plus être utilisées comme outils de répression !

JE SIGNE LA PÉTITI
ON

 
Merci pour votre mobilisation,
 
Quitterie Berchon
Chargée de campagne "Libertés"
chez Amnesty International France