Justice et Paix

" Je suis homme, l'injustice envers d'autres hommes révolte mon coeur. Je suis homme, l'oppression indigne ma nature. Je suis homme, les cruautés contre un si grand nombre de mes semblables ne m'inspirent que de l'horreur. Je suis homme et ce que je voudrais que l'on fit pour me rendre la liberté, l'honneur, les liens sacrés de la famille, je veux le faire pour rendre aux fils de ces peuples l'honneur, la liberté, la dignité. " (Cardinal Lavigerie, Conférence sur l'esclavage africain, Rome, église du Gesù)

 

NOS ENGAGEMENTS POUR LA JUSTICE T LA PAIX
S'EXPRIMENT DE DIFFÉRENTES MANIÈRES :

En vivant proches des pauvres, partageant leur vie.
Dans les lieux de fractures sociales où la dignité n'est pas respectée.
Dans les communautés de base où chaque personne est responsable et travaille pour le bien commun.
Dans les forums internationaux pour que les décisions prises ne laissent personne en marge.

Dans cette rubrique, nous aborderons différents engagements des Missionnaires d'Afrique, en particulier notre présence auprès des enfants de la rue à Ouagadougou et la défense du monde paysan.

 

[Chronique] En Gambie, la reconquête du « droit à la dépigmentation » ?

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Par  Damien Glez

Damien Glez est dessinateur-éditorialiste franco-burkinabè

(@d.glez)

Damien Glez

La dépigmentation est-elle un droit de l’homme ? En Gambie, son interdiction pourrait cacher d’autres maltraitances faites aux femmes. Les députés en débattent…

Faut-il vraiment souffrir pour être beau ? Mais qu’est-ce qu’être « beau » ? La femme, en particulier, doit-elle disposer de son corps, y compris lorsqu’il s’agit de mutiler celui-ci ? Les autorités médicales n’ont de cesse d’alerter sur les risques de la dépigmentation volontaire qui fait toujours fureur dans des pays comme le Togo, le Sénégal ou le Mali.

En fonction des produits employés – qui vont de la cortisone à l’eau de javel –, le « khessal » ou le « tchatcho » peuvent conduire à des dermatophytes, de la gale, des folliculites, des vergetures, de l’acné, voire à un cancer de la peau.

C’est cet état de fait qui avait conduit un gouvernement de Yahya Jammeh à réprimer la décoloration artificielle de la peau. En 1996, une loi introduisait dans la législation gambienne une interdiction d’importation et d’usage de produits éclaircissants. Depuis lors, des amendes de 400 et 100 dollars frappent respectivement les importateurs et les usagers.

Le drapeau du féminisme

Presque un quart de siècle plus tard, pourquoi les députés gambiens ont-ils ouvert un débat, le 16 juillet dernier, sur un texte visant à abroger la loi de 1996 ? Avant tout argument, certaines femmes, comme la députée Sainey Touray, refusent de « soutenir quelque chose qui est néfaste à la santé ». Elles dégainent des arguments sanitaires de bon aloi, mais aussi le discours sur le néfaste complexe de jeunes filles mues par le fantasme de peaux en apparence métissées. La quête de la peau diaphane confinerait, sur le plan moral, à un reniement identitaire lui-même résidu d’un traumatisme postcolonial et du phénomène de colorisme.

Pour éteindre des accusations de conflits d’intérêt présumé ou de libéralisme aveugle, les tenants de la modification de la loi gambienne brandissent, eux aussi, le drapeau du féminisme. Tout autant qu’elle va dans le sens d’une certaine sécurité de la femme, l’interdiction du blanchiment de la peau ferait courir des risques à celle-ci. Comme l’argumente le député Halifa Sallah, des hommes abuseraient de certaines demoiselles, après avoir menacé de les dénoncer parce qu’elles se seraient éclairci la peau.

Double peine ou triple peine ? Déjà physiquement meurtries par les produits de dépigmentation, des femmes se retrouvent entre le marteau du chantage à la délation et l’enclume d’interpellations elles-mêmes sources de corruption sexuelle. La dépigmentée présumée n’échapperait à la pression de l’un que pour tomber dans la gueule d’un prédateur…

Quel que soit l’avenir des législations africaines réglementant la vente de produits de dépigmentation, le commerce de la peau « blanche » pourra continuer au… noir, des prétextes pathologiques divers pouvant être opposés au flagrant délit d’acné ou de vergeture. Seule l’éducation pourra durablement résoudre la source du phénomène : les canons de beauté pervertis.

 

France: vers un projet de loi prévoyant la restitution d’œuvres au Sénégal et au Bénin

Le sabre d'El Hadj Omar Tall, un trésor de guerre ramené en France en 1894 par le colonel Louis Archinard.
Le sabre d'El Hadj Omar Tall, un trésor de guerre ramené en France en 1894 par le colonel Louis Archinard. RFI/Charlotte Idrac
Texte par : RFI
2 min

La France poursuit le processus de restitution des oeuvres d'art à l'Afrique. Emmanuel Macron en avait fait une promesse, à Ouagadougou en 2017. Le président avait alors souhaité que d'ici cinq ans, les conditions soient réunis pour des restitutions temporaires ou définitives des oeuvres pillés à l'Afrique par l'ancienne puissance coloniale.

Le gouvernement français a présenté ce mercredi matin en Conseil des ministres un projet de loi prévoyant la restitution d’œuvres au Sénégal et au Bénin.

Jusqu’à présent, la loi n’autorisait pas ces restitutions, car les œuvres des collections publiques sont considérées comme inaliénables et imprescriptibles. Il fallait donc faire évoluer le cadre juridique. À une loi générale pour l’ensemble des demandes, le gouvernement a donc préféré une loi spécifique pour ces deux restitutions.

La première concerne le Sénégal et le sabre dit d’El Hadj Oumar Tall, remis en novembre dernier par l’ancien Premier ministre français Édouard Philippe au président Macky Sall. Ce texte va acter le transfert de propriété de ce sabre, alors qu'à l'époque, il avait été restitué sous forme de prêt. Cette loi va également permettre la restitution au Bénin de 26 œuvres dérobées au roi Béhanzin durant la conquête coloniale.

Pour l’instant, d’autres restitutions à des pays africains ne semblent pas à l’ordre du jour. Il faut dire que cet engagement, pris en 2017 par Emmanuel Macron, de restituer des œuvres d’art à l’Afrique a provoqué de nombreuses résistances en France, au sein de l’administration et des musées concernés. À tel point qu’aujourd’hui, du côté des autorités françaises, le discours semble avoir un peu évolué. On parle désormais moins de restitutions que de circulation des œuvres, ce qui n’est pas la même chose.

Dans ce dossier, l’Élysée a donc une priorité : mener à son terme le processus béninois, parce que c’est celui sur lequel le président français s’est directement engagé. Et c’est aussi, précisait-on récemment au sein du palais présidentiel, « le processus le plus emblématique de ce qu’on veut faire, c’est-à-dire pas seulement restituer des objets mais aussi en faire le support d’un partenariat culturel renouvelé ».

Reste donc maintenant à faire adopter ce texte par le Parlement, peut-être d’ici la fin de l’année, puis ensuite à restituer les 26 œuvres à Cotonou. Mais ce ne sera pas avant 2021, car le musée d’Abomey qui doit les accueillir est encore en cours de construction.

« Cette étape pour moi elle est historique à plusieurs titres, a réagi Marie-Cécile Zinsou, historienne de l’art et présidente de la Fondation Zinsou. Sur la question du temps qui s’est écoulé entre la demande du Bénin en 2016 et le projet de loi qui a été présenté mercredi, il faut se rappeler que le temps des lois n’est pas le même que le temps des médias et des réseaux sociaux. »

Côte d'Ivoire: une cour africaine juge les commissions électorales «déséquilibrées»

Le siège de la Commission électorale indépendante (CEI) à Abidjan, le 26 octobre 2015 (image d'illustration).
Le siège de la Commission électorale indépendante (CEI) à Abidjan, le 26 octobre 2015 (image d'illustration). REUTERS/Thierry Gouegnon
Texte par : RFI
3 min

La Cour africaine des droits de l'homme (CADH), qui avait été saisie par l'opposition ivoirienne, a estimé ce mercredi que la mise en place des commissions électorales locales en Côte d'Ivoire était déséquilibrée en faveur du parti au pouvoir, à trois mois de la présidentielle.

La Cour africaine des droits de l’homme et des peuples (CADHP) a rendu un nouvel arrêt au sujet de la Commission électorale indépendante (CEI) ivoirienne. Il est sévère à l'endroit de l'État de Côte d'Ivoire qui n’a pas « pleinement rempli les obligations qui lui incombent de garantir la confiance du public et la transparence dans les affaires publiques », selon la Cour.

Cela ressemble à un nouveau camouflet pour le pouvoir à 100 jours de l'élection. Les juges ont notamment estimé que la mise en place des commissions électorales locales était déséquilibrée en faveur du parti au pouvoir, le Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP).

Une victoire donc pour le Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), parti d’opposition, à l’origine de la requête. Pour l’avocat du PDCI, Me Blessy, cette décision exige une refonte complète de la Commission électorale indépendante. Il appelle les principaux partis à se remettre rapidement autour de la table pour renégocier la composition de la CEI. « Nous avons la force, si les deux partis veulent vraiment s’asseoir pour discuter, de faire cette réforme en moins de 15 jours, en moins de 20 jours puisque tous les points qui sont développés, qui sont récusés, sont connus de l’ensemble des partis, explique-t-il. Et donc, plaise à ces partis-là de vouloir aller à des élections sincères pour des résultats authentiques. Je rêve toujours d’élections en Côte d’Ivoire qui finissent à 18h et à 18h30, le vaincu donne un coup de fil au vainqueur pour dire : "Tu as gagné, je calme mes militants. Dans cinq ans, on se retrouve". Or, avec ce texte, on ne pouvait pas arriver à cela. Il faut qu’on épargne à notre jeunesse toutes ces palabres. »

Dans leur décision, les juges estiment que la grande majorité des commissions électorales implantées localement sont présidées par des membres du parti au pouvoir, le Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP). Mais la Cour a également précisé que les partis d’opposition, qui l’ont saisie en août dernier, n’ont pu prouver la partialité et le manque d’indépendance de la CEI. Pour l’État ivoirien, cela ne change pas grand-chose, car il ne reconnaît plus la compétence de la Cour depuis avril dernier. Pour l’avocat de l’État de Côte d’ivoire, Me Abdoulaye Ben Méïté, la décision de Cour africaine ajoute un flou inutile. « Pour faire simple, la Cour a dit que les griefs formulés à l’encontre de la loi n’étaient pas avérés. Elle a dit aussi avoir noté que les présidents des commissions locales penchaient plus en faveur du parti au pouvoir. Mais elle a pris le soin d’indiquer que cela n’est pas du fait de la loi, mais plutôt de son application. C’est pour cela que j’ai dit que cette décision crée un front inutile parce que la Cour avait à répondre à la question de savoir si la loi est conforme ou pas aux instruments internationaux. Et même au-delà, cette décision pour moi est une réponse aux allégations fantaisistes des requérants. »

Côte d'Ivoire: les victimes de la crise post-électorale de 2011 se sentent abandonnées

Crise politique au Mali: les questions constitutionnelles et politiques à l’agenda de la Cédéao

L'ancien président du Nigeria, Goodluck Jonathan, conduit la délégation de la Cédéao missionnée au chevet du Mali
L'ancien président du Nigeria, Goodluck Jonathan, conduit la délégation de la Cédéao missionnée au chevet du Mali Reuters/Tiksa Negeri/Files
Texte par : RFI
2 min

À Bamako, la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (Cédéao) poursuit sa mission de médiation pour tenter de faire retomber les tensions déjà, puis trouver une issue à la crise.

C'est Goodluck Jonathan, l'ex-président du Nigeria qui emmène cette importante délégation. Ce mercredi, l'ancien président a notamment rencontré l'imam Dicko, personnalité incontournable au sein du M5, le mouvement de contestation qui annonce qu'il annule le rassemblement à haut risque de demain, un rassemblement de recueillement pour les 11 victimes du week-end dernier. 

Les leaders de la contestation ont fait ce geste pour donner des gages à la médiation ouest-africaine, analyse notre correspondant à Bamako Serge Daniel. Il y a déjà eu plusieurs interventions, notamment celles des représentants de l’ONU et de la Cédéao, mais également celles des chefs d’Etat de la sous-région, par exemple le président ivoirien Alassane Ouattara. Le rassemblement de l’opposition, annoncé pour ce vendredi, a été annulé, mais il y aura des prières dans toutes les mosquées du Mali pour honorer la mémoire des victimes tuées lors des derniers évènements.

L’un des points clés de cette crise, c’est l’invalidation d'une trentaine de sièges par la Cour constitutionnelle, que la Cour avait donnés entre autres au parti au pouvoir. Des experts de la Cédéao, notamment constitutionnalistes, sont là pour parler des problèmes soulevés par l’arrêt de la Cour décrié. Les députés maliens recalés, qui s’estiment victimes de la Cour, vont être reçus et auront un quart d’heure de parole. L’idée, d’après nos sources, est de voir comment les remettre dans leurs droits sans tout bouleverser : sur les 147 députés de l’Assemblée nationale, 30 députés se disent « victimes » de la Cour constitutionnelle.

La délégation de la Cédéao comporte également des groupes d’experts uniquement chargés des questions politiques. Les questions de gouvernance, les revendications politiques de l’opposition et plus globalement, la future architecture gouvernementale pour le Mali sont à l’agenda de la délégation.

Dans les rues de Bamako, les tensions ont baissé pour le moment, rapporte Serge Daniel. La nuit a été calme. C’est la première nuit véritablement calme depuis près d’une semaine.

Sahel: le chef de Barkhane alerte sur le recrutement d'enfants soldats par les jihadistes

Soldats français dans l'opération Barkhane au Mali (image d'illustration)
Soldats français dans l'opération Barkhane au Mali (image d'illustration) Reuters
Texte par : RFI
2 min

Le général Pascal Facon, chef de la force Barkhane, va d'ici la fin du mois de juillet rendre son mandat. Avant son prochain départ, le général Facon, ce jeudi lors d'une visioconférence, a souhaité faire le bilan des activités militaires au Sahel. Si la multiplication des offensives de Barkhane et de ses partenaires du G5 a permis ces derniers mois d'affaiblir les groupes armés terroristes, ces derniers ont désormais recours aux enfants soldats pour compenser les pertes, s'inquiète le général Facon.

Une meilleure synchronisation sur le terrain de tous les acteurs et une lutte efficace contre l'influence terroriste auprès des populations ont permis de saper les capacités matérielles et humaines des terroristes.

Ces derniers mois, la France a augmenté les effectifs de Barkhane de 500 militaires pour les porter à 5 100. Elle et ses partenaires du G5 ont multiplié les offensives dans la zone des trois frontières, revendiquant la « neutralisation » de centaines de jihadistes.

Le récent sommet de Nouakchott a ainsi permis d'acter les progrès réalisés dans le combat mené notamment contre l'Etat islamique au grand Sahara. Il y a pourtant une ombre au tableau, l'attrition des groupes terroristes a aussi pour effet de favoriser le recrutement d'enfants soldats, dénonce le général Facon.

« Ce que j’ai pu observer au cours de ce mandat, c’est que l’ennemi s’est durci. Il n’hésite plus à recourir à des enfants soldats. Ces derniers sont endoctrinés et entraînés au maniement des armes. Il s’agit d’une préoccupation très important pour la France et cette exploitation abjecte nous met en difficulté dans le cadre de nos opérations. Bien évidemment, la robustesse de nos procédures d’engagement nous permet de nous prémunir quasi-systématiquement de dommages collatéraux. Pour autant, il arrive que l’on constate lors des opérations de neutralisation la présence de mineurs. »

Pour la plupart ce sont des adolescents peuls, et même si ces situations demeurent extrêmement rares, « il faut en avoir conscience », martèle le général Facon, assurant qu’il a toujours fait du respect du droit international sa ligne directrice.