Témoignages

 

Une «relation de travail» qui fonctionne !
(Une collaboration qui marche bien)
(PE n°1092 – 2018/06)


"S’il te plaît, pourras-tu écrire comment toi, en tant que Secrétaire général, tu perçois les relations entre le Conseil général (CG) et les confrères" . C’est la demande qui m’a été faite par l’éditeur du Petit Echo. Quand j’ai commencé à y réfléchir, deux objections principales me sont venues à l’esprit : comment une telle question peut-elle être résolue par quelqu’un qui a passé les six dernières années dans un bureau, à regarder un écran et à traiter des documents, papiers et autres ? En effet, aux antipodes des autres membres du CG, je n’ai jamais fait de longs voyages à travers les provinces, sections ou secteurs, écoutant et partageant avec les confrères. Mais alors une pensée m’est venue à l’esprit: n’existe-t-il pas des mots écrits, sous quelque forme que ce soit, souvent plus fiables que les paroles qui visent souvent à plaire à l’auditeur «  surtout quand ce dernier est un provincial ou un membre du CG ? Ensuite, j’ai dû faire face à une deuxième objection : comment quelqu’un, lié par la règle stricte de la confidentialité, peut-il répondre à cette question ? Peut-être que j’essayais d’esquiver et d’échapper ! Certes, on ne peut entrer dans les détails des cas individuels, mais on peut toujours donner des impressions générales ! Et c’est ce que je vais essayer de faire dans ce qui suit. L’un des dictons les plus connus de certaines personnes âgées est : plus on vieillit, plus le temps semble s’écouler rapidement. Les horloges semblent défier la « limite de vitesse » et tournent sans relâche leurs aiguilles à toute vitesse ! Il est en effet incroyable que, lorsque vous lirez cet article après le 1er juillet, mes six années en tant que Secrétaire général de la Société seront déjà conjuguées « au passé » et un « bon matériel » pour les archives de la Société. Frappez à la porte du bureau du secrétaire général à Rome, et un autre André, pas moi, vous souhaitera la bienvenue ! Ces six années, dont quatre avec Richard Baawobr et son équipe, et deux avec l’équipe actuelle, me semblent avoir été plus courtes, que le noviciat d’un an au milieu des années soixante qui, je dois l’admettre, ne futt, pour le dire modérément, pas l’année la plus heureuse de ma vie !

Je regarde avec gratitude ces six dernières années qui m’ont aidé à apprécier encore plus ma vocation missionnaire et les merveilleux services que notre Société et ses membres rendent à l’Afrique et  « partout où notre charisme est nécessaire » (CA 2016, p. 17). Une partie de ma tâche consistait à « traiter » tous les documents entrants et sortants, comme les lettres adressées au Conseil général (de la part des confrères, des évêques, du Vatican et autres), les procès-verbaux des réunions des Conseils provinciaux, les rapports des Institutions, etc. Ceci faisant, j’ai réalisé que notre Société ressemble beaucoup à notre Fondateur, le cardinal Lavigerie, à la fois très héroïque et généreux, mais aussi frêle et humain. Je suis impressionné par le dévouement des confrères aux ministères qui leur sont confiés, que ce soit dans le leadership, la formation, le travail paroissial ou les services rendus à l’Église locale. La plupart des confrères qui écrivent au CG partagent leurs joies et leurs soucis, souvent de manière proactive, en proposant des solutions à des problèmes existants ou en suggérant des moyens de traiter des questions souvent épineuses, mais aussi en acceptant volontiers, à la fin du dialogue qui s’ensuit, que le « dernier mot » revienne au Conseil général.  Tous les confrères ne suivent cependant pas les procédures appropriées et ne passent pas par la direction locale. Je suis impressionné de voir comment ce Conseil respecte le leadership local et invite doucement le confrère à discuter d’abord avec son provincial ! Il y a sans aucun doute une grande confiance mutuelle.

Il n’est cependant pas surprenant que des confrères se plaignent parfois que les décisions ne soient pas prises aussi rapidement qu’ils le souhaitent. Ils peuvent parfois avoir un point valable, mais je peux vous assurer que le CG prend très au sérieux tout ce qui lui est présenté et essaie d’y faire face sans retard. Ils manque parfois cependant, certaines informations essentielles ou l’agenda est si chargé qu’un certain retard est inévitable. Au demeurant, tous les confrères ne connaissent pas le rythme de rencontres du CG à Rome : deux fois de suite, trois fois dans l’année (janvier-février, mai-juin, septembre-octobre) et les autres mois sont principalement dédiés aux visites dans les provinces, sections ou secteurs.


André Schaminée avec Pello Sala, ancien secrétaire administratif


Comme je l’ai écrit plus haut, la Société est aussi fragile et humaine. Le CG doit également faire face à des problèmes douloureux, voire embarrassants. Certaines questions, qui dépassent l’autorité de la direction locale, sont référées au Conseil général, qui doit trouver le temps de s’occuper d’elles, que cela plaise ou non ! Quand les confrères quittent le droit chemin et deviennent victimes des nombreuses tentations que la vie procure, le CG avec la direction locale, fait tout son possible pour les aider à affronter leur situation souvent désespérée avec honnêteté, courage et détermination. Certains ne veulent pas accepter  « qu’ils ont un problème » , d’autres, grâce à l’approche douce et miséricordieuse des dirigeants locaux et du CG retrouvent le bon chemin.

André Schaminée assurant le secrétariat au Conseil général.


Ce n’est pas un secret que la Société diminue en nombre, mais il y a une augmentation significative de nombreux nouveaux jeunes membres, pour lesquels nous remercions Dieu. L’âge moyen actuel des confrères est d’un peu plus de 67 ans. Je mentionne ceci pour souligner que les demandes de travailleurs pour la vigne dépassent l’offre disponible. Une telle situation pourrait facilement provoquer des tensions entre le CG et les dirigeants locaux. Au moment des nominations, par exemple, une province peut demander quinze stagiaires et huit jeunes confrères mais ne recevra peut être que sept et quatre respectivement, car « personne ne peut donner ce qu’il n’a pas » . Je suis toujours surpris et impressionné qu’à la fin. tout le monde semble être content de ce qu’il a reçu, même si cela n’a été que la moitié de ce qu’il avait demandé. Cela montre qu’il y a un haut degré de réalisme et un bon esprit de coresponsabilité à tous les niveaux.

André Schaminée avec Odon Kipili, le nouveau secrétaire administratif

Un regard global me permet de conclure que la relation entre le CG et les confrères est généralement saine et heureuse. La clef de ce succès tient à cette formule : « Montre, autant que se peut, le plus grand respect pour les autres ! »

André Schaminée,
ex-Secrétaire Général

Ce confrère de 91 ans est décédé à Bry-sur-Marne. Il a vécu la mission au Mali et en France.

Pour avoir accès à son parcours, lire la suite

Séminaire résidentiel de Sedos :
Jeunesse et mission (PE n° 1092 – 2018/06)


Combien d’entre nous savent qui sont les « millénaires » populairement connus comme la génération Y ? A quelle génération appartiens-tu ? Es-tu membre de la génération perdue G ou de la génération I ou encore de la génération silencieuse, baby-boomers, ou génération X, ou Y ou encore génération Z ? Ce serait un sujet intéressant de faire une recherche en ligne pour en savoir plus sur ces classifications. Pour de nombreux participants au séminaire, c’était quelque chose de nouveau à découvrir : des classifications modernes.

En préparation du prochain synode sur la Jeunesse en octobre 2018 au Vatican, SEDOS (Centre de Documentation et de Recherche sur la Mission globale) a organisé un séminaire résidentiel de cinq jours sur le thème « Jeunesse et Mission » à la maison du Divin Maître à Ariccia (Rome) du 30 avril au 4 mai 2018. Plus d’une centaine de personnes représentant les quatre coins du monde ont été invitées à y participer, entre autres 4 confrères : André Schaminée (Rome), Daniel Ntumba Kabuya (Toulouse), Dieudonné Bulambo Amani (Ghana) et Leo Laurence Maria Joseph (Belgique) et une SMNDA, Sr Anafrida Biro (Pologne). La plupart des participants étaient des supérieurs majeurs, des animateurs vocationnels, des administrateurs ou des agents pastoraux travaillant avec les jeunes dans les paroisses et dans les centres spécialisés pour l’apostolat des jeunes.

Les principaux thèmes discutés pendant le séminaire étaient : « La culture contemporaine des jeunes : Entre le bien et le mal » par Emilia Palladino, professeur à l’Université pontificale grégorienne ; « Générée par la vie pour correspondre à l’amour » par Sr Bruna Zaltron (SCM) professeur à l’université Claretianum ; « Le rôle et les défis de l’évangélisation pour les jeunes dans le monde multiculturel et pluraliste d’aujourd’hui » par le Fr Paul Raj FSG, assistant général de la Congrégation des Frères Montfortains de Saint-Gabriel ; « Les évangélisés vont évangéliser : le rôle des laïcs missionnaires aujourd’hui » par M. Michael Papenkordt, professeur à l’Institut d’Évangélisation mondiale (ICPE-Allemagne) ; «Apprendre du ministère vocationnel aux Etats-Unis» par le Fr Paul Bednarczyck CSC, Vicaire général de la Congrégation de la Sainte Croix. La présentation du cardinal Lorenzo Baldisseri intitulée « Le Synode sur la jeunesse : les jeunes, la foi et le discernement vocationnel » a conclu notre séminaire.

Les participants à la rencontre du SEDOS

Un des points forts du séminaire a été la table ronde en séance plénière avec quatre jeunes religieux qui ont ingénieusement partagé leurs expériences personnelles, en particulier leur cheminement vocationnel. Ce fut une découverte pour la plupart des participants d’entendre ce que ces jeunes religieux ont partagé concernant la formation. Un des éléments marquants a été la référence constante aux moyens modernes de communication, si importants autant dans l’animation vocationnelle que pendant la période de formation de nos candidats. Il est nécessaire d’avoir la liberté d’utiliser les téléphones et Internet pendant la période de formation pour apprendre à utiliser ces outils de manière responsable. Un Supérieur général nous a informé que dans leur congrégation, même les novices sont autorisés à utiliser le téléphone et Internet (bien sûr avec prudence et de manière responsable).

 
M.Afr. et SMNDA à la rencontre du SEDOS : Amani B. Dieudonné, Maria J. Léo Laurence, Sr Anafrida Biro, André Schaminée et Daniel K. Ntumba.


Quelle animation vocationnelle ?

Un autre élément important qui a attiré mon attention a été le mot « passion » dans l’apostolat avec les jeunes. Nous ne devons pas rester dans nos maisons et attendre que les jeunes viennent nous visiter. Il est temps que nous sortions de nos zones de confort (maisons religieuses et couvents) pour aller aux endroits où se trouvent les jeunes aujourd’hui. Si les jeunes ne rejoignent pas la vie religieuse, c’est précisément parce que notre mode de vie ne les attire pas. Nous avons perdu la passion pour le Christ, notre charisme et notre engagement missionnaire et nous sommes devenus trop à l’aise derrière des structures. L’un d’entre nous a même fait ressortir l’idée de « suicide collectif » parce qu’il n’avait pas d’espoir pour l’avenir. Cette tendance doit être fermement combattue.

Nous utilisons encore des brochures vocationnelles imprimées en 1920, a mentionné une Sœur en plaisantant et, en plus, une méthode d’animation vocationnelle qui n’attire plus la jeunesse d’aujourd’hui. Est-ce que les pamphlets sont destinés aux membres déjà existants ou aux futurs candidats potentiels ? Sont-ils attrayants pour la jeunesse d’aujourd’hui ? Combien d’entre nous saisissent tout le potentiel des moyens modernes de communication dans notre animation vocationnelle ? Les jeunes d’aujourd’hui sont en ligne 24 heures sur 24 et sont connectés au monde. Imaginez, si nous pouvions créer une application et la commercialiser dans Google Play Store, nous serions probablement les premiers sur le net à avoir une application. Nous pourrions aussi avoir notre propre application M. Afr. afin que les membres soient plus facilement connectés que par le biais d’un site Web.

Un autre élément qui m’a frappé dans les discussions est le fait que l’animation vocationnelle pour certaines congrégations est un travail à temps partiel, bien que l’avenir de la congrégation en dépende entièrement. Par conséquent, un engagement renouvelé de tous les membres à s’engager dans l’animation vocationnelle est nécessaire partout où cela est possible. Un promoteur vocationnel à temps plein est une nécessité absolue si nous voulons recevoir de nouveaux membres dans notre Société. Nous sommes tous appelés à faire la différence et à attirer les jeunes vers la vie religieuse par notre témoignage de vie.

Dans la période de formation, nous ne devons pas considérer les jeunes comme un objet à former, mais comme des sujets actifs capables de contribuer à leur propre formation et croissance. Par conséquent, une attitude plus ouverte et attentive est nécessaire dans les maisons de formation afin d’actualiser constamment notre méthode de formation en fonction des besoins de l’époque. On nous a demandé : Faites-vous confiance aux jeunes ? À notre grande surprise, tous les membres de l’assemblée ont affirmé que nous avons confiance et croyons en la jeunesse qui a un immense potentiel et est l’espoir pour l’avenir. Tout ce que nous devons faire est de les attirer par notre témoignage personnel, aller à leur rencontre et s’approcher d’eux avec espoir. Le prochain Synode sur la jeunesse pourrait apporter des conclusions radicales en raison de la participation active des jeunes qui ont répondu au questionnaire et participé à la préparation du document de travail.

Puissions-nous continuer à prier pour que le Saint-Esprit continue de nous guider dans la prise de bonnes décisions concernant les jeunes, non pas pour eux mais avec eux ! Dans l’ensemble, le séminaire a été instructif, stimulant et engageant. Merci à SEDOS et à la Société de nous avoir invités à participer à cette rencontre qui fut un succès.

Maria Leo Laurence, M.Afr.

Charles Sarti (1932 – 2017) (PE n°1092 – 2018/06)


Charles est né en Italie, le 15 Mai 1932, sur les rives du lac Majeur, dans une humble famille profondément chrétienne. Son père était carreleur, et sa mère « femme au foyer » comme on dit pudiquement pour cacher une vie entièrement consacrée au service de ses trois enfants, deux garçons et une fille. C’est sa maman qui le marquera le plus et l’accompagnera jusqu’à l’autel ; sa sœur l’accompagnera jusque sur son lit de mort.

Peu après sa naissance, toute la famille émigre en France, à Vitry-le-François ; c’est au petit séminaire de Châlons qu’il fera ses études secondaires, déjà titillé qu’il était par un désir profond de vie sacerdotale, envieux de son curé qu’il admirait. A vingt ans il se fera naturaliser Français, et s’engagera Outre-Mer pour tester et sa vocation, et sa santé, car entre-temps il avait contacté et soigné une tuberculose tenace. C’est ainsi qu’il se trouve dans un premier temps au Camp Militaire d’Abidjan, avant d’être muté à Bobo-Dioulasso, fin décembre 1952. C’est un Père Blanc, le père Gilles de Rasilly, alors aumônier militaire et directeur de l’enseignement catholique, qui le poussera après sa démobilisation à rester un peu plus au Burkina Faso (alors Haute-Volta) comme responsable du CM2 à Tounouma. C’est là qu’il attrapera « le virus Pères Blancs » qui le conduira tout naturellement vers une formation classique à l’époque : noviciat à Maison-Carrée en 1954, suivi logiquement d’une longue formation philosophique et théologique dès l’année suivante à Thibar puis à Carthage (formation interrompue six mois pour rappel sous les drapeaux). C’est à Carthage donc qu’il va prononcer son serment missionnaire le 2 février 1958, pour y être ordonné prêtre le 18 juin 1958.

Pendant ses années de formation, il fera l’unanimité auprès de tous ses formateurs pour ses qualités de futur « bon » missionnaire. Parmi tous les témoignages qui nous restent de cette époque, l’un d’entre eux peut les résumer tous : « Ce qui me frappe au premier abord, c’est son calme, son sérieux, sa mesure. On a pu constater ses qualités d’organisateur, son adaptation aux autres dans leur diversité, en même temps que son zèle dynamique et inventif. Poli, aimable, il est aussi franc et direct : il se caractérise par une simplicité qui va tout droit au but, sans détours inutiles. Très ouvert à ses supérieurs et à ses confrères, il se révèle spécialement apte au travail en commun. Homme de règle et d’obéissance, il a compris le sens et les exigences de sa vocation, et on le sent sincèrement  donné à sa formation. Il est modeste, et prend des initiatives d’une grande délicatesse qu’il prend soin de cacher. Le Fr. Sarti est un de nos meilleurs sujets : pas un intellectuel, mais un homme intelligent et pratique, vraiment mûri, capable de penser son activité, d’une profonde vie spirituelle, fait pour la vie de communauté : bref, un bon Père Blanc sur toute la ligne. » Lequel de tous les confrères qui l’ont côtoyé tout au long de sa vie active ne le reconnaîtrait pas dans cette description ?

Sa première nomination le renvoie tout naturellement en Haute-Volta, à Dedougou, où son évêque lui demande d’étudier d’abord la langue locale, le bwamou. Laissons-le raconter lui-même, avec son humour et son autodérision qui lui seront propres toute sa vie, sa première expérience d’étude d’une langue africaine : « Dieu m’a doté de grandes oreilles, mais je ne sais guère distinguer les différents tons qui donnent des sens différents aux mots. Au bout de deux mois et demi, j’étais complètement découragé, et un après-midi je me suis retrouvé à pleurer toutes les larmes de mon corps devant le Saint-Sacrement. Jésus ne m’est pas apparu, il ne m’a pas parlé non plus comme dans les films de Don Camillo, mais je crois que c’est lui qui m’a inspiré ceci au fond de mon cœur : « Pour qui te prends-tu ? Moi, le Verbe de Dieu, la Parole du Dieu vivant, j’ai appris l’araméen avec Marie et Joseph et les gens de Nazareth pendant trente ans, et toi tu voudrais apprendre le bwamou en trois mois… Tu te crois plus malin que moi, ou quoi ? » Cette sorte de relation familière avec Dieu, empreinte d’une foi et d’une confiance très profondes, ne le quittera jamais plus de la vie. Charles était un « pauvre » !

Dès lors, les nominations vont se succéder. De 65 à 66, il sera économe au petit séminaire de Tionkuy. De 66 à 67, le voilà à l’école de langue de Guilongou pour apprendre le mooré, ce qui l’amène dans le secteur de Toma-Tougan-Kiembara auprès des nombreux mossis qui y vivent. Il s’autorise alors une halte spirituelle à Villa Cavaletti à Rome pour les grands exercices avec le P. Deltijk. De 1974 à 1979, il œuvre auprès des mossis toujours à Dedougou, et de 1979 à 1987, le voilà curé de Toma pour « l’africanisation » de la paroisse comme il aime à le dire. Que retenir de ces années pastorales-là, celles qu’il a, et de loin, préférées ? Son zèle pastoral en étonnera plus d’un, mais c’est surtout sa proximité intelligente avec ‘ses’ gens qui le fera aimer et de ses ‘ouailles’, de ses responsables et de ses confrères, pour sa faculté d’écoute, son attention aux autres religions, surtout animistes, avec un souci respectueux d’adapter les coutumes à l’évangile. Ses relations avec le clergé local diocésain seront aussi d’une telle qualité (contre l’avis parfois de certains confrères), qu’il se sentira obligé de s’en expliquer à son évêque d’alors dans une lettre : « De 1967 à 1987, j’ai vécu et travaillé avec des prêtres du diocèse ; j’étais en symbiose avec eux à 100%. Je n’ai jamais approuvé ce repli sur soi des Pères Blancs. Pour moi, nous avons le même sacerdoce et nous sommes attelés à la même mission. Bien sûr, nos sensibilités et nos façons de réagir sont différentes, mais nous devons être capables d’aller au-delà. C’est en même temps un témoignage aux yeux de nos communautés chrétiennes, des musulmans, des animistes… Comment parler d’amour et d’unité si nous, consacrés par le même sacerdoce, nous faisons tous bande à part ? » Du Charles Sarti tout craché !

Pour mieux comprendre la proximité de Charles avec les gens, et surtout l’extrême délicatesse et compréhension qui marquait ses contacts, il est bon de lire un petit livret qu’il écrira plus tard en France à la demande de son diocèse d’origine, intitulé : « Joies et peines d’un missionnaire ». Il le présentera d’ailleurs lui-même ainsi : « Il ne s’agit pas d’une biographie ni d’une réédition, revue et corrigée, des « Mémoires d’un âne » ; il ne s’agit pas non plus d’une page d’histoire de l’Eglise du Burkina Faso. Simplement quelques faits de vie d’un missionnaire d’Afrique, « père blanc moyen » : le vécu de ceux à qui il a été envoyé, et où il a discerné l’Amour de Dieu pour ces gens-là et pour lui-même. Celui qui sème n’est rien, celui qui arrose n’est rien, seul Dieu compte. Merci à Lui. »

Mais il faut bien souffler un peu, et de 87 à 88 il fera une année sabbatique à la rue Friant, dont il deviendra le responsable jusqu’en 1992. L’Afrique demeure sa raison de vivre, et fin 92 c’est le retour au Burkina Faso, à Solenzo, comme vicaire jusqu’en 2001. Il est alors nommé à Ouagadougou à la maison provinciale comme économe provincial, responsabilité et service qu’il va remplir scrupuleusement jusqu’en 2008. Ce ne fut pas son meilleur souvenir missionnaire, mais il était remarquable par sa délicatesse à l’égard de tous les nombreux confrères qui venaient le voir ‘pour des problèmes d’argent’, et par sa vie de communauté pleine d’humour, de simplicité et de sagesse pour arranger à l’amiable tous les petits conflits qui agitaient parfois la communauté. Quant à la pastorale il ne l’oubliera jamais, rendant de nombreux services soit aux paroisses, soit aux communautés religieuses. Personne n’oubliera sa mobylette asthmatique ni sa sacoche en cuir pourri qui lui permettait d’aller en toute sécurité à la banque tous les matins. Un missionnaire comme on les aime, parce qu’il a marqué les esprits par sa simplicité et sa piété.

Mais la maladie (cancer de la peau au visage) va commencer à l’handicaper et le faire souffrir (même s’il ne se plaignait jamais) ;  il devra rentrer définitivement en France en 2008, décision qu’il accueillit avec sérénité. Il faut dire que cette acceptation a été facilitée par son esprit légendaire d’obéissance comme il va le prouver à travers un mail qu’il a fait parvenir alors à son provincial en France : « En tant que responsable, vous êtes mieux à même d’apprécier les priorités, moi j’obéis. C’est pour cela que j’ai fait le Serment d’obéissance. Vous savez  comment je définis le ‘ Père Blanc moyen’ : pas très malin, mais discipliné ». Il demeurera une petite année rue Verlomme pour s’occuper des archives, puis rue du Printemps pour la gestion de l’économat de la maison et de « Voix d’Afrique ».

Les soins qu’il reçoit se révèlent de plus en plus contraignants et handicapants ; alors, c’est à Tassy, dans un premier temps, qu’il sera envoyé officiellement comme responsable de la communauté, mais surtout pour y recevoir des soins, et même les premières opérations au visage qui petit à petit vont le défigurer. Ce dernier poste de responsabilité, il va l’accueillir avec un grand sens missionnaire  comme il l’expliquera à sa famille et ses amis dans une circulaire : « J’ai toujours eu beaucoup d’admiration pour ces ‘anciens’ qui ont usé le ‘burnous’ et qui se sont usés, durant des décennies en Afrique et au service des africains… d’Alger au Cap et de Dakar à Dar-es-Salaam. Je n’ai donc pas trop de peine à accepter ce nouvel envoi en mission. Priez l’Esprit-Saint pour moi : qu’il me donne suffisamment de délicatesse, de patience et d’écoute pour être au service de mes aînés… 7 jours sur 7 et 24 heures sur 24. » Le souvenir qu’il a laissé à Tassy restera profondément gravé dans le cœur de tous ses confrères, mais aussi de l’ensemble des résidents de l’EPHAD et du personnel ; il les comprenait : il subissait dans sa chair, mais en pire, les souffrances propres à toute fin de vie, d’autant plus que les opérations vont se succéder (16 au total), qui vont l’obliger à aller terminer sa vie à Bry-sur-Marne, car il était l’avant dernier Père Blanc encore résident à Tassy. Au début de 2017 il rejoindra sa chambre du deuxième étage à l’EPHAD de Bry-sur-Marne où le Seigneur finira enfin (car il le suppliait chaque jour de le prendre) par l’appeler comme il l’avait appelé une première fois lorsqu’il était enfant.

Ses derniers jours ont été un véritable calvaire, admirablement vécu grâce au chapelet qui ne quittait jamais son poignet ; et plus son visage ressemblait à celui du ‘Serviteur Souffrant’, plus son regard reflétait le calme,la paix et l’espérance en Celui qui l’a tout de même abandonné une dizaine de jours dans un semi-coma avant de le prendre enfin dans sa demeure éternelle. On dit : ‘qui aime bien châtie bien’ ; personne ne pouvait imaginer que Charles était autant aimé de Dieu. La messe des funérailles fut toute simple comme il le souhaitait, lui qui disait « vouloir être enterré dans une natte et porté sur une charrette tirée par un âne ». Sa sœur était présente ainsi que quelques neveux et petits-neveux, donc entouré par sa famille dont il avait été si proche toute sa vie. Nombreux aussi les confrères venus des environs, sans oublier quelques connaissances africaines qui ne sont pas près de l’oublier. La chapelle était pleine comme pour tout « père blanc moyen », et la lecture des « Béatitudes » ne détonnait pas dans le concert de louanges sincères qui l’ont accompagné jusqu’au cimetière des Pères Blancs, à Bry-sur-Marne.

« Heureux les pauvres de cœur, ils verront Dieu. »

Clément Forestier, M.Afr.

Helmut Kaiser, R.I.P.

Le Père Rudi Pint, Délégué Provincial du secteur d’Allemagne,
vous fait part du retour au Seigneur du Père

Helmut Kaiser

 

le dimanche 8 juillet 2018 à Trêves (Allemagne)
à l’âge de 86 ans dont 58 ans de vie missionnaire
au Mali et en Allemagne.

Prions pour lui et pour ceux qui lui étaient chers.

Helmut Kaiser

Jalons de vie du Père Helmut Kaiser

Helmut est né le 14 juillet 1931 à Rapperath, dans le diocèse de Trêves, en Allemagne. Il entra au noviciat (Année Spirituelle) des Missionnaires d’Afrique le 27 septembre 1956 à Maison-Carrée, en Algérie. Il continua ensuite sa formation théologique à Carthage (Tunisie) où il prononça son serment missionnaire le 25 janvier 1960. Il fut ordonné prêtre le 3 juillet 1960 à Francfort (Allemagne).

 

10/08/1961 Vicaire Dire, P.Gao (Mopti) Mali
20/11/1963 Vicaire Barapireli mali
01/11/1967 Vicaire Pel Mali
30/06/1971 Vicaire Barapireli, D.Mopti Mali
01/10/1978 Session-Retraite Jérusalem Israël
01/01/1979 Vicaire Barapireli Mali
01/04/1994 Retour en Province Trier Deutschland
22/06/1994 Econome Linz Deutschland
20/10/1994 Nommé Deu.(PE.94/10) Deutschland
01/10/1995 Ministère Linz Deutschland
01/08/2008 Ministère Trier Deutschland
01/09/2012 Residence Trier Deutschland
08/07/2018 Retour auprès du Père Trier Deutschland

Sous-catégories

Les informations sur nos maisons de formation datent de quelques années, et nous avons demandé aux responsables de ces maisons de nous donner des nouvelles plus récentes.
La première réponse reçue vient de Samagan, le noviciat près de Bobo-Dioulasso (lire la suite)

 

La deuxième réponse nous a été donnée par la "Maison Lavigerie", notre maison de formation à la périphérie de Ouagadougou, où les candidats ont leurs trois premières années de formation (lire la suite)