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Burkina Faso: le traumatisme des «orphelins de Sankara»

 

 orphelins

 

« Les orphelins de Sankara », un film de Géraldine Berger. © Les Films d'un Jou

 

Alors que l'ex-président Blaise Compaoré, condamné à perpétuité pour l'assassinat de Thomas Sankara, est revenu au pays, les centaines d'adolescents burkinabè qui avaient été envoyés en formation à Cuba dans les années 1980 témoignent du traumatisme que la perte du président a représenté pour eux.

(Rediffusion du 25 octobre 2021)

En 1986, 600 adolescents quittent le Burkina Faso pour partir se former à Cuba, dans un programme d’échange mis en place par l’ancien président Thomas Sankara et son homologue cubain Fidel Castro. Âgés entre 12 et 15 ans, ils sont choisis par le président burkinabè sur des critères sociaux, venant de familles rurales et défavorisées. Mais un an plus tard, le père de la révolution burkinabè est assassiné. Les étudiants terminent leur cursus et reviennent six ans plus tard dans leur pays qu’ils ne reconnaissent plus.

Florence était l'une d'eux. Tous les matins, sur l’île de la jeunesse au large de Cuba, les étudiants burkinabè chantaient l’hymne national cubain. Elle s’en souvient encore aujourd’hui, tout comme elle se souvient de ce 15 octobre 1987, quand elle apprend la mort de Thomas Sankara.

« Quand on nous a dit qu'il y avait eu un coup d'État au Burkina Faso, on savait déjà que notre président était mort. À l'école, le silence était total. Nous sommes restés sans manger. On ne pouvait même pas dormir. On pleurait. Je ne sais pas comment vous le raconter. Il fallait le vivre pour comprendre », raconte Florence.

Des adolescents stigmatisés

À leur retour de Cuba, un emploi dans la fonction publique devait être garanti aux étudiants, afin qu’ils aident au développement du Burkina. Inoussa Dakambari a été formé en génie civil. Rentré en 1993, il déchante.

« Quand nous sommes revenus, nous avons été victimes de préjugés. Certains disaient qu'on venait venger Sankara. Encore aujourd'hui, nous n'avons pas les équivalences réelles à nos diplômes, ce qui a mis un frein à nos carrières professionnelles. » Formé à un travail manuel, Inoussa Dakambari dit s'en sortir « un peu », même si c'est difficile.

Formés aussi militairement, les étudiants partis à Cuba inquiètent le régime de Blaise Compaoré, qui les marginalise.

« Dans les bureaux, on est parfois surnommé "le Cubain". Sankara mort et enterré, on n'a plus rien à faire ici. Certains de nos compatriotes nous traitaient comme des étrangers », témoigne Charles Kaboré, formé en mécanique industrielle, dénonçant l'humiliation, le mépris.

Aujourd’hui, les orphelins de Sankara demandent toujours la reconnaissance de leurs diplômes, la reconstitution des carrières pour ceux de la fonction publique et des indemnités pour les proches de leurs camarades disparus.

Romans, polars, poésie… Notre sélection de livres de poche à lire cet été

Sélection 

La rédaction de L’Hebdo vous propose ses poches coup de cœur. Des livres émouvants et inspirants que l’on a envie de glisser dans le sac de plage ou de randonnée.

L'Hebdo Logo

  • Nathalie Lacube, Marianne Meunier, Christophe Henning, Sabine Audrerie, Alice Le Dréau, Emmanuelle Giuliani, Fabien Vernois, Emmanuel Romer, Cécile Jaurès, Stéphane Bataillon, Isabelle de Lagasnerie, Élodie Maurot, Sabine Audrerie et Marion Torquebiau., 
Romans, polars, poésie… Notre sélection de livres de poche à lire cet été
 
La rédaction de L’Hebdo vous propose une sélection de livres à lire cet été.EZIO GUTZEMBERG - STOCK.ADOBE.CO

► Romans étrangers

♦ L’attrait des monstres

Blackwaterde Michael McDowell

Traduit de l’anglais (États-Unis) par Yoko Lacour et Hélène Charrier, Monsieur Toussaint Louverture, six tomes de 260 p., 8,40 €

Lors d’une crue qui inonde la ville de Perdido, Alabama, une inconnue est retrouvée par un riche propriétaire local. Il épousera l’altière et mystérieuse Elinor Dammert, dont la nature démoniaque est révélée dès l’exergue de Blackwater. Ce n’est pas sur l’identité de la créature surgie des eaux sombres que repose le suspense de cette saga addictive, mais sur le récit de la vie d’une grande famille du sud des États-Unis riche de ses propres monstres.

Mélangeant le surnaturel et le trivial, Michael McDowell (1950-1999) compose une fresque flamboyante et gothique. De 1919 à 1969, les Caskey vont faire tourner leurs scieries, traverser la Grande Dépression, s’enrichir durant la guerre, assister à la lutte de leurs serviteurs noirs pour les droits civiques, construire digues et lotissements, récolter des noix de pécan, exploiter leur pétrole… Mais aussi vivre, tuer et mourir. Des femmes puissantes, qui assassinent leurs victimes la nuit et se disputent les bijoux de famille la journée, dirigent le clan avec férocité. La vision sombre de l’auteur, admiré par Stephen King et scénariste de deux films de Tim Burton, se double d’une ironie cinglante, d’un humour horrifique qui révulse et captive.

Les éditions Monsieur Toussaint Louverture ont réussi un gros coup éditorial en traduisant pour la première fois en France ce roman paru en feuilleton aux États-Unis en 1983. Directement publiés en format poche, les six volumes imprimés en Gironde et dans l’Eure, aux couvertures dorées et gaufrées signées du graphiste Pedro Oyarbide, se distinguent par l’opulence de leur fabrication.

♦ La quête vitale du passé

Poursuitede Joyce Carol Oates

Lelivre de poche, 228 p. 7,40 €

Il s’est passé quelque chose. Quelque 200 pages haletantes, d’une écriture intime et sans détour, permettront de le découvrir. Découvrir ce qui a conduit Abby, « frimousse pâle et candide constellée de taches de rousseur », à se précipiter sous les roues d’un bus. C’était le lendemain même de son mariage, dans la petite ville de Hammond. « Il faut qu’on sache pourquoi. Pourquoi tu as fait ce que tu as fait », lui murmure son merveilleux époux après l’accident. Willem, amoureux sans limites, tiendra sa promesse.

Mais pour savoir pourquoi, il faudra emprunter les méandres souterrains d’un passé macabre, violent, auquel Joyce Carol Oates nous donne un accès direct en adoptant tour à tour le point de vue des parents de l’héroïne. Il y a dans la conscience de son père, Lew, vétéran d’Irak, les traumatismes sans nom de la guerre. Dans celle de sa mère, Nicola, la peur d’un ex-mari. Entre eux gît un secret, enfoui le long d’un ruisseau, qui habite leur fille Abby…

► Roman français

♦ Portraits de femmes

Le Cerf-volant,de Laetitia Colombani

Le Livre de Poche, 228 p., 7,40 €

La vie, parfois, ne tient qu’à un fil… Tout comme un cerf-volant. Léna traverse un drame que l’on découvrira au gré du livre. Pour le surmonter, elle se réfugie en Inde, sur le bord du vaste océan qui a bien failli l’engloutir. C’est une enfant qui l’a sauvée de la noyade. Une fille exploitée, qui ne parle plus. Peut-on longtemps fuir, retenir sa respiration, suspendre le temps ?
« Il faut tenir bon, résister au néant. Ne pas sombrer. » Dans cette histoire de résilience, chaque personnage doit reprendre pied. L’autrice dresse trois beaux portraits de femmes : Léna, l’Occidentale, Preeti, la rebelle, et cette enfant sans nom et sans avenir. C’est bien sûr le choc des cultures qui frappe Léna, le poids des traditions : « Ne demande pas pourquoi, c’est
comme ça. Ici, il ne faut pas chercher de raison aux choses. L’Inde, c’est le chaos »
, avertit Preeti.

♦ Une vie donnée

La Grande Épreuve,d’Étienne de Montety

Folio, 304 p., 8,20 €

Couronné à sa parution en grand format par le grand prix du roman de l’Académie française 2020, ce roman s’inspire de l’assassinat, en juillet 2016, du père Jacques Hamel dans l’église de
Saint-Étienne-du-Rouvray, en pleine messe et en présence de quelques paroissiens. Cette évocation poignante d’un prêtre âgé est une forme d’hommage au mystère et à la beauté d’une vie donnée jusqu’au bout, et tout autant une tentative de décrire, sinon de comprendre, la société dans laquelle le drame est intervenu.

À travers une alternance de portraits, ceux des protagonistes de l’événement, dont les policiers qui y seront confrontés et les assassins dans leur jeunesse, Étienne de Montety met à plat l’entrecroisement des trajectoires et des tragédies, sur fond de montée de l’islamisme. Le titre du roman est extrait de l’Apocalypse de saint Jean : « Ils viennent de la grande épreuve ; ils ont lavé leurs vêtements, ils les ont purifiés dans le sang de l’Agneau. »

 La vie comme sur un paddle

Broadwayde Fabrice Caro

Folio, 208 p., 7,90 €

Rien ne va plus pour Axel, marié, deux enfants. Son fils s’est fait intercepter à l’école avec un dessin scabreux représentant ses professeurs ; sa fille vit son premier chagrin d’amour ; un couple d’amis veut absolument les emmener, lui et son épouse, faire du paddle à Biarritz.
Et voilà que la Sécurité sociale lui envoie par erreur un courrier l’invitant à un examen médical réservé aux plus de 50 ans… alors qu’il en a 46. De quoi remettre en cause toute sa vie, faire surgir beaucoup de questionnements et susciter des envies d’ailleurs. Dans Broadway, Fabrice Caro (plus connu sous le nom de Fabcaro, dans le milieu des amateurs de BD) revisite la fameuse « crise de milieu de vie » traversée par certains hommes. C’est absurde, drolatique (malgré quelques traits d’humour plus patauds) et les failles humaines (gaffes, petites lâchetés…) sont saisies avec justesse
.

► Classique

♦ Richelieu réhabilité

Le Sphinx rouge,d’Alexandre Dumas

10/18, 956 p., 10,90 €

Il est comme cela, Dumas. À peine une phrase et, déjà, nous voici emportés par son souffle romanesque, sa générosité littéraire, sa verve et son élan. Ce Sphinx rouge débute là où se sont achevés Les Trois Mousquetaires. Un « sphinx » qui n’est autre, on l’aura deviné, que le cardinal de Richelieu, l’énigmatique « patron » de la France de Louis XIII. Tout commence par une scène pleine de panache où les épées sortent du fourreau, suivie bien vite d’épisodes hauts en couleur et en saveur. Publié sous forme de feuilleton dans l’éphémère quotidien Les Nouvelles, le roman, initialement intitulé Le Comte de Moret, réhabilite de manière surprenante
et convaincante le « méchant » Richelieu. On lui découvre une grande « idée de la France », une intelligence supérieure déjouant les noirs desseins d’intrigants au mieux avides, au pire pervers, tel Gaston d’Orléans. Un héros passionnant porté par l’ardeur d’un romancier passionné.

► Polars

♦ Sueurs froides pour un bleu du 36

1991de Franck Thilliez

Pocket, 544 p., 8,50 €

Hiver 1991. Franck Sharko a tout juste 30 ans. Il n’est pas encore le héros bien connu des lecteurs de Franck Thilliez. Débarqué au 36, quai des Orfèvres, il est intégré comme numéro 6 dans le groupe de Thierry Brossard. Le « bleu » de l’équipe se voit confier une affaire qui traîne sur les disparues du Sud parisien, quand un samedi soir où il s’attarde au bureau, il reçoit un homme effrayé qui va l’aiguiller vers une terrible aventure. Ici ressurgit le temps de la police à l’ancienne. Les murs du « 36 » sentent le tabac froid, la sueur des longues enquêtes et les vieux papiers des archives. Les machines à écrire crépitent encore, bien avant l’avènement d’Internet et des ordinateurs.

Comme souvent chez l’auteur, pas de temps mort. Le jeune Sharko va devoir se former rapidement à son métier de flic, délaisser un temps la jolie Suzanne, cumuler les heures supplémentaires pour se retrouver ballotté entre les rivalités de service, tiraillé par l’enquête des disparues et la mise en scène macabre du meurtre d’une jeune femme. Le souffle coupé, le lecteur embarque dans sa Renault 21 flambant neuve vers les bas-fonds parisiens, les contrées obscures de la magie et les infernales machines d’Houdini. Sueurs froides garanties entre rite vaudou de « zombification » et animaux venimeux. Et rude apprentissage pour Franck Sharko, au fil d’un roman noir dense et envoûtant, à déguster comme un vieux millésime d’exception.

♦ Lutte à mort au pays du pavot

Pukhtu. Primo et Secundo, de DOA

Folio Policier, 794 p. et 798 p., 9,80 €

Dans ces deux romans, dont le premier tome débute en 2008, DOA (pseudonyme d’Hervé Albertazzi), pour Dead on Arrival (Mort à l’arrivée), film noir américain réalisé par Rudolph Maté en 1950, nous embarque dans les problématiques géopolitiques, militaires, religieuses et géographiques de l’Afghanistan, et dans leurs ramifications internationales. Haletant, réaliste et documenté, le livre est rythmé par des scènes de combat, des virées dans les montagnes à pied, à cheval, dans des véhicules blindés. On crapahute tantôt avec des paramilitaires américains, des agents secrets infiltrés, des guerriers afghans… On se bat de jour comme de nuit aux côtés des uns et des autres… Le danger, la peur, la douleur, l’inconfort sont omniprésents. Comme dans ses précédents romans (Citoyens clandestins, L’Honorable Société…), l’auteur ne nous épargne rien de ce monde corrompu où l’on ne vit pas, mais survit… à la merci de ceux qui tirent les ficelles. Les uns pour le pouvoir et le profit, les autres au nom de codes d’honneur ancestraux. Dont le fameux pukhtu, qui renvoie aux valeurs fondamentales du peuple pachtoune, et dont le non-respect se lave dans le sang.

♦ Des cendres et du sang

Fay,de Larry Brown

Traduit de l’anglais (États-Unis) par Daniel Lemoine. Gallmeister, 546 p., 12 €

Jeune, belle, naïve, inconsciente et insouciante, Fay a tout d’une proie de choix pour les prédateurs comme son père, qui vient de tenter d’abuser d’elle quand l’histoire débute. Seulement, cette fois, elle est déterminée à ne plus se laisser faire. Pensant laisser derrière elle une vie de misère, elle part à pied à la découverte du monde, dont elle ignore tout. Cette femme-enfant, aussi attachante qu’inquiétante, entame alors un voyage où elle va montrer sa détermination, quitte à laisser dans son sillage une longue traînée de cendres et de sang. Ce roman noir, magistralement construit, implacablement tendu, est un petit bijou. Tant au niveau de l’écriture, minimaliste, que des personnages, souvent violents et rugueux. Un remarquable portrait de l’Amérique profonde rurale.

► Jeunesse

♦ La saveur du lien

À quoi rêvent les étoiles,de Manon Fargetton

À partir de 12 ans. Gallimard, « Pôle Fiction », 432 p., 8 €

Quel est le point commun entre un adolescent reclus dans sa chambre, accro aux jeux vidéo, une vieille dame qui a perdu l’envie de vivre en même temps que son mari, une lycéenne surprotégée par son père et une prof de théâtre dévouée à son métier ? Entre ces cinq personnages d’âges et d’horizons variés, Manon Fargetton tisse, avec habileté, des correspondances tantôt évidentes, tantôt invisibles qui vont aider chacun à grandir ou à panser d’anciennes blessures. Sans cesse sur le fil de l’émotion, ce roman choral célèbre la puissance réparatrice du contact humain et de la parole.

► Imaginaire

♦ Derrière les pierres

Les Jardins statuaires, de Jacques Abeille

Le Tripode, collection « Météores », 528 p., 13,90 €

C’est un pays pas comme les autres où, derrière d’épaisses murailles, les hommes cultivent des statues de pierre. Elles grandissent et prennent des formes que seul un jardinier expérimenté peut deviner. Parfois, elles sont à l’image d’un habitant récemment disparu. Elles tombent aussi malades, d’une lèpre bleuâtre qui les condamne à rejoindre un grand gouffre. Mais derrière la beauté des pierres, la place faite aux femmes est loin d’être enviable. Roman de l’imaginaire de très haute tenue littéraire, Les Jardins statuaires est désormais édité dans la collection de poche du Tripode, l’éditeur qui a permis à Jacques Abeille d’accéder à un vaste lectorat. Les Jardins statuaires est le prélude à six romans rassemblés sous le titre du Cycle des contrées. Sous une superbe couverture de François Schuiten, ce format poche est
le compagnon idéal pour passer un merveilleux été.

► BD

♦ Traits de génie

Pablo. L’intégrale,de Julie Birmant et Clément Oubrerie

Dargaud « Poche », 352 p., 9,90 €

Comment naît un génie ? Par quels hasards, quelles rencontres, quelles embûches ? Cette biographie dessinée raconte les premières années artistiques de Pablo Picasso, débarquant d’Espagne à 19 ans dans le Paris de 1900. Un destin raconté au travers des yeux d’Amélie Lang, la célèbre « Fernande », qui fut sa compagne et son modèle jusqu’en 1909 et qui évite lebdidactisme, grâce notamment au trait fort inspiré de Clément Oubrerie.

Pablo fait partie de la première livraison de la toute nouvelle collection « D » pour « Dargaud au format poche » rassemblant des récits graphiques récents, dont celui d’Aude Picault (Idéal standard).

► Poésie

♦ Poèmes d’à côté

Une poésie de vingt ans.Anthologie de la poésie en Belgique francophone (2000-2020),
choix et préface de Gérald Purnelle.

Espaces Nord, 440 p., 10 €

Cette anthologie élégante et accessible propose une rencontre avec la poésie belge telle qu’elle s’écrit aujourd’hui. Cent vingt-huit voix, confirmées (Guy Goffette, Colette Nys-Mazure…) ou émergentes, comme Quentin Volvert, né en 1997, chantent la frontière d’un paysage bouillonnant dans lequel on aime flâner. Guidés, amicalement, par des poètes comme Yves Namur qui nous chuchotent : « Tu te demandes / comment je suis entré dans l’ombre du figuier. // C’est une expérience étrange que celle-là / Et aujourd’hui encore je ne me l’explique toujours pas. »

► Photographie

♦ La Pléiade des clichés

Frank Horvat, introduction de Virginie Chardin, Samuel Fosso, introduction de Christine Barthe, et Klavdij Sluban, introduction de Zeljko Kozinc.

Actes Sud, « Photo Poche », 144 p., 13 €

Pour célébrer ses 40 ans, la collection « Photo Poche » (Actes Sud) se pare d’un nouvel habillage en couleurs pastel et accueille, à la suite des plus grands noms de la photographie, deux artistes contemporains, le Franco Camerounais Samuel Fosso et le Franco-Slovène Klavdij Sluban, ainsi qu’une édition remaniée du numéro consacré à Frank Horvat. Créée en 1982 par Robert Delpire, Photo Poche, première collection de livres de photographie au format poche, est devenue une référence dans l’histoire du livre.

► Philosophie

♦ Monument antique

De la brièveté de la vie,de Sénèque

Traduit du latin par Xavier Bordes. Mille et une nuits, 64 p., 3 €

« La vie, si tu sais en user, est longue », écrit Sénèque à son ami Paulinus, mais les hommes se dispersent en mille activités inutiles et, dès lors, « mince est la part que nous vivons », déplore le philosophe romain du Ier siècle dans ce célèbre texte de la sagesse antique. Comment mieux vivre ? Abandonner les « nouvelles occupations (qui) se substituent aux anciennes, l’espoir (qui) excite l’espoir, l’ambition (qui) entretient l’ambition », et choisir la compagnie des sages : « Ceux-ci t’ouvriront un chemin vers l’éternité, et t’élèveront en un lieu d’où personne n’est rejeté. Il n’y a que cette méthode pour outrepasser notre condition de mortels, ou plutôt la convertir en immortalité. »

► Spiritualité

♦ Dieu face au mal

Le Concept de Dieu après Auschwitz,de Hans Jonas

Traduit de l’allemand par Philippe Ivernel et Catherine Chalier, Rivages Poche, 92 p., 7,70 €

Ce discret petit ouvrage, publié en allemand en 1984, traduit en français en 1994 et qui vient d’être réédité, porte un souffle inversement proportionnel à sa taille. Au soir de sa vie, le grand philosophe juif Hans Jonas (1903-1993), exilé d’Allemagne depuis 1933, ancien combattant aux côtés des Alliés, proche ami d’Hannah Arendt, reprend la question de Dieu en fixant des yeux les horreurs de la Seconde Guerre mondiale. Face à Auschwitz, une question le hante : « Quel est ce Dieu qui a pu laisser faire cela ? » Pour Jonas, cette tragédie a ajouté « un inédit » qui ne peut être pensé à partir des « vieilles catégories théologiques ». Elle impose de donner congé à l’idée d’un « seigneur de l’Histoire » qui aurait gardé la capacité miraculeuse d’intervenir dans le cours du temps pour l’orienter favorablement. Étonné de sa propre audace théologique mais fortifiant peu à peu sa proposition par les sources bibliques et hébraïques, Hans Jonas dessine le visage d’un autre Dieu. Un Dieu ayant abandonné librement et irrévocablement la toute puissance, pour laisser advenir dans l’histoire la liberté risquée de l’homme.

► Histoire

♦ Histoire de rois et de reines

Le Corps du roi et Le Corps de la reine,de Stanis Perez

Perrin, « Tempus » , 540 et 570 p., 11 € le volume

Parmi les nombreux titres de « Tempus », la belle collection de poche des Éditions Perrin consacrée à l’histoire, sont récemment parus deux volumes de Stanis Perez. Ce spécialiste du Grand Siècle ausculte les corps de la reine et du roi au fil des règnes. Sacralité et permanence du royaume sont au centre des symboliques complexes qui leur ont été attachées. « L’un des facteurs de la stabilité du corps politique et social a résidé dans la place occupée par celui du roi. (…) Le corps est le lieu, pour ne pas dire le creuset, où se mêlent et fusionnent des processus subtils », rappelle l’auteur qui, loin d’une revue triviale ou thématique, propose d’étudier la spécificité de « l’incarnation royale ».

► Voyage

♦ Les forges de l’aventure

Ma philosophie du voyaged’Ella Maillart

Payot & Rivages, 253 p., 9 €

« Non seulement le voyage nous procure de nouveaux repères et des points
de comparaison qui nous manquaient, mais au contact d’autres pays, des aspects latents de nous-mêmes s’éveillent ;
 et nous nous découvrons nous-mêmes simultanément », écrit Ella Maillart dans Ma philosophie du voyage. Ce recueil réunit les plus beaux textes de la célèbre écrivaine et photographe suisse du XXe siècle, qui nous propose de la suivre à travers son périple vers l’est et le Turkestan russe. De son voyage en voiture, au début des années 1940, elle livre des anecdotes de rencontres insolites et des curiosités des territoires qu’elle rencontre, de la Turquie à la chaîne de l’Himalaya. Un ouvrage parfait pour les adeptes de pittoresque ou les assoiffés de dépaysement.

► Récit

♦ Le monde vu d’en haut

Par la force des arbresd’Édouard Cortès

Pocket, 144 p., 6,50 €

Après l’échec de son rêve professionnel (devenir berger) et la tentation de la désespérance, Édouard Cortès a choisi de changer de vie, fabriquant de ses mains une cabane en pleine forêt périgourdine pour s’y installer, loin du monde, à la recherche de la paix : « Pour me laisser guérir par cette forêt lumineuse… depuis mon balcon sylvestre je me suis penché sur la beauté du monde, et une gaieté neuve est apparue », confiait-il à La Croix il y a quelques mois. Son journal de bord le montre au quotidien dans la proximité de la nature et de ses leçons, à l’écoute de l’inattendu.

Côte d’Ivoire : ce qu’Alassane Ouattara a dit au ministre français des Armées

Trafic de cocaïne, présence des mercenaires du groupe Wagner au Mali… Lors d’une visite à Abidjan, le 16 juillet, Sébastien Lecornu s’est entretenu avec le président ivoirien.

Par Jeune Afrique
Mis à jour le 21 juillet 2022 à 18:09
 

 

Sébastien Lecornu et Alassane Ouattara, le 16 juillet. © ISSOUF SANOGO/AFP

 

Lors d’un déplacement express, qu’il a effectué le 16 juillet à Abidjan, Sébastien Lecornu, le ministre français des Armées, s’est d’abord entretenu avec son homologue ivoirien, Téné Birahima Ouattara. L’envoyé d’Emmanuel Macron a ensuite rendu visite aux Forces françaises en Côte d’Ivoire, sur leur base de Port-Bouët. Enfin, il a été reçu à la résidence présidentielle par Alassane Ouattara, qui, sachant combien la France est attentive à l’évolution de la vie politique ivoirienne, lui a fait un debriefing de sa rencontre du 14 juillet – la première depuis la fin de 2010 – avec ses prédécesseurs, Henri Konan Bédié et Laurent Gbagbo.

L’aide de la France

Selon nos sources, le chef de l’État ivoirien a fait part à son hôte de son inquiétude face à l’ampleur que prend le trafic de cocaïne en Côte d’Ivoire, ce qui fait de ce pays l’une des plaques tournantes du narco-trafic. Pour lutter contre ce fléau, il a sollicité l’aide de la France.

ADO a en outre clairement indiqué au ministre que la recrudescence du jihadisme dans le Sahel était liée à toutes les formes de réseaux transfrontaliers criminels. Sébastien Lecornu lui a alors assuré que Paris soutiendrait Abidjan, en le faisant bénéficier de son expertise et en renforçant les moyens et les équipements de surveillance et de défense.

À LIRETrafic de cocaïne en Côte d’Ivoire : Interpol s’invite dans l’enquête

Autre motif d’inquiétude pour les Ivoiriens et les Français : la présence, auprès de la junte malienne, de mercenaires appartenant au groupe militaire russe Wagner. Les deux pays craignent en effet que leur implantation au Mali favorise le lancement d’attaques cybercriminelles sur les systèmes technologiques et alimente le flot des fake news pro-russes dans la région.

Quinze millions d’euros

La Côte d’Ivoire est à la recherche de 46 millions d’euros pour financer la deuxième phase de son projet d’Académie internationale de lutte contre le terrorisme de Jacqueville. Celle-ci concernera les bâtiments hébergeant des stagiaires et des cadres, une zone d’entraînement aux opérations de contre-terrorisme maritime et un champ de tir à longue distance.

À LIRECôte d’Ivoire : Téné Birahima Ouattara en mission à Paris

Le 12 juillet, lors d’une conférence des bailleurs de fonds qui s’est tenue à Paris, Abidjan (qui était représenté par Téné Birahima Ouattara) a déjà pu mobiliser environ 15 millions d’euros. La France, qui a commencé à redéployer ses forces impliquées dans la lutte antiterroriste au Niger, espère achever ce processus d’ici à la fin de l’année.

Togo: après les attaques, les populations continuent à quitter les villages du Nord

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Après les dernières attaques dans le nord du pays, la situation devient préoccupante : les populations continuent à quitter leurs villages pour les villes ou d’autres endroits qu’ils estiment moins dangereux. La situation est prise au sérieux, les autorités multiplient les initiatives et le président Faure Gnassingbé est retourné dans la région mercredi 20 juillet où il a rencontré les diverses couches de Dapaong, ville située à l'extrême nord du pays.

Avec notre correspondant à Lomé, Peter Sassou Dogbé

Dans la nuit de lundi 18 à mardi 19 juillet, un nouvel accrochage a eu lieu entre groupes armés et forces de défense et de sécurité faisant deux morts au sein des forces armées togolaises. Cette information largement reprise par les journaux et les réseaux sociaux n’est encore officiellement ni confirmée ni infirmée.

Selon plusieurs sources, les populations continuent de fuir leurs villages notamment dans les localités de Lalabiga et Tiwoli, non loin de la ville de Mandouri. La maire de cette dernière ville a dû lancer un appel dans un communiqué aux populations de retourner chez eux.

Pour l’instant indiquent plusieurs sources, les habitants sont toujours sous le choc et vivent la peur au ventre : la situation est tendue.

Pour trouver des solutions, le gouvernement multiplie les initiatives. Faure Gnassingbé séjourne ainsi dans la région depuis mercredi 20 juillet, où il a rencontré diverses couches de la société à Dapaong, lors d’une grande rencontre : « Vous devez rester vigilants, restez ensemble quelle que soient les divergences pour combattre l’ennemi commun, a-t-il lancé aux populations. À partir d’aujourd’hui, les dispositions doivent changer, désormais c’est l’armée togolaise qui va être à l’offensive ».

Le président poursuit son séjour dans la région, il devrait rencontrer les populations meurtries de Kpendjal jeudi 21 juillet.

► À lire aussi : Attaques meurtrières au Togo: la classe politique inquiète face à la menace terroriste