Cérémonie d’ouverture de la 42e session du Conseil exécutif de l’Union africaine, à Abbis-Abeba, le 15 février 2023. © African Union
Ce rapport ne fait pas de grandes révélations, mais il enfonce un peu plus le couteau dans la plaie : préparé par le Comité des représentants permanents (CRP), présidé par le Sénégal, le document de 70 pages souligne l’absence de sanctions à l’encontre des membres du personnel de la Commission de l’Union Africaine (UA) qui ont commis des irrégularités financières.
À la tribune de la 42ème session du Conseil exécutif, le 15 février à Addis-Abeba, le représentant du Nigeria a donné le ton.
Répartition « injuste » des postes
Il s’est dit « profondément préoccupé » par la « non-application des sanctions » contre les employés de la Commission reconnus coupables de corruption. Ils « doivent être sanctionnés » pour « toute infraction commise », a-t-il ajouté.
Des soupçons de cette nature pèsent en effet depuis quelques années sur la Commission de l’UA. En 2021, la plateforme Devex avait rapporté qu’un audit externe réalisé par PricewaterhouseCoopers avait conclu à « de possibles actes répréhensibles, une mauvaise utilisation et/ou une mauvaise gestion des ressources de la Commission » dans plusieurs domaines, notamment le recrutement du personnel. Des irrégularités dans la rémunération et les indemnités du personnel avaient également été notifiées.
L’année précédente, c’était au tour du président de la Commission, Moussa Faki Mahamat, d’être accusé de copinage après la fuite d’un mémo assimilant l’UA à un cartel « mafieux » en raison de sa gestion des nominations de hauts fonctionnaires, effectuées en dehors de toute procédure régulière.
Malgré le démenti du porte-parole de l’UA, des États membres continuent de penser que la répartition des postes est injuste. À Addis-Abeba, le représentant de la Libye s’est plaint que ses compatriotes « avaient des difficultés à obtenir des postes en fonction de leurs compétences et de leur expérience ».
Freins institutionnels
Ces dérives sont autant de freins institutionnels qui empêchent les projets de se réaliser dans les budgets et les délais impartis, selon les ministres des Affaires étrangères. Le représentant du Ghana a suggéré que l’allocation budgétaire soit « liée aux taux d’exécution » et a indiqué que son pays « ne soutiendrait plus aucune dépense » à moins que « les délais de financement ne soient respectés ».
Même son de cloche au sein de la délégation ougandaise et chez le ministre éthiopien des Affaires étrangères, Demeke Mekonnen, qui a déploré « des anomalies majeures dans les performances financières de l’UA ».
Les recommandations de Paul Kagame
En 2016, le président rwandais Paul Kagame a été chargé de superviser un processus de réforme visant à rationaliser l’UA et à résoudre le problème de la fragmentation institutionnelle, alors que l’organisation était devenue trop pléthorique. Il a conclu que l’UA n’était pas adaptée à sa mission et a formulé des recommandations qui sont toujours en cours d’exécution.
Le ministre sud-africain des Affaires étrangères, Naledi Pandor, a fait référence à ces préoccupations lors de la réunion du Conseil exécutif du 15 février, avertissant que l’UA risque de se transformer en un « animal lourd qui nous coûtera beaucoup, mais ne nous fera pas avancer » si elle crée trop de nouvelles institutions ou élargit les institutions existantes.