Justice et Paix

" Je suis homme, l'injustice envers d'autres hommes révolte mon coeur. Je suis homme, l'oppression indigne ma nature. Je suis homme, les cruautés contre un si grand nombre de mes semblables ne m'inspirent que de l'horreur. Je suis homme et ce que je voudrais que l'on fit pour me rendre la liberté, l'honneur, les liens sacrés de la famille, je veux le faire pour rendre aux fils de ces peuples l'honneur, la liberté, la dignité. " (Cardinal Lavigerie, Conférence sur l'esclavage africain, Rome, église du Gesù)

 

NOS ENGAGEMENTS POUR LA JUSTICE T LA PAIX
S'EXPRIMENT DE DIFFÉRENTES MANIÈRES :

En vivant proches des pauvres, partageant leur vie.
Dans les lieux de fractures sociales où la dignité n'est pas respectée.
Dans les communautés de base où chaque personne est responsable et travaille pour le bien commun.
Dans les forums internationaux pour que les décisions prises ne laissent personne en marge.

Dans cette rubrique, nous aborderons différents engagements des Missionnaires d'Afrique, en particulier notre présence auprès des enfants de la rue à Ouagadougou et la défense du monde paysan.

 

Le Ghana ambitionne de rendre l’éducation secondaire gratuite

Par AFP
 

Le Ghana se prépare à rendre l'éducation gratuite pour tous les adolescents, quelle que soit leur origine sociale, une réforme qui pourrait changer la vie de millions de jeunes, particulièrement des filles, encore trop peu scolarisées.

Le président Nana Akufo-Addo en avait fait la promesse dans la dernière ligne droite de la campagne électorale qui l’a porté au pouvoir en décembre.

Aujourd’hui, l’accès à l’enseignement secondaire dépend d’un examen d’entrée, du nombre de places disponibles mais, surtout, de la capacité des parents à pouvoir payer les frais de scolarité.

Le mois dernier, le président Akufo-Addo a insisté sur cette réforme, assurant qu’elle permettrait que de « plus en plus de filles aient accès à une éducation de qualité et accélèrerait le développement du pays ».

« Une excellente éducation pour les filles est essentielle si nous voulons rayer la pauvreté, l’ignorance, la maladie de notre pays et le mettre sur le chemin de la prospérité », a-t-il ajouté.

Pour l’instant, 400 millions de Cedis (88 millions d’euros) ont été alloués au budget 2017 pour ce projet, notamment pour ouvrir d’autres écoles aux nouveaux candidats.

Selon un rapport des Nations unies de 2015, au Ghana, les filles passent en moyenne 5,8 ans à l’école, soit deux ans de moins que les garçons, avec 7,9 ans.

Ces chiffres restent plus élevés que dans le reste de l’Afrique sub-saharienne (4,5 ans pour les filles et 6,3 pour les garçons) mais bien en dessous de la moyenne mondiale (7,7 et 8,8).

Près de 85% des enfants ghanéens sont scolarisés en primaire mais seulement 44,4% des filles dans le secondaire et 48% des garçons, selon des chiffres de l’Unicef pour les années 2008 à 2012.

Nouvelle génération 

Camfed (Campaign for Female Education), une ONG basée à Accra, a sponsorisé l’éducation secondaire de près 70.000 adolescentes. Selon sa directrice, Dolores Dickson, « chaque jeune fille qui est allée à l’école réinvestit dans la famille, paie pour les soins de santé et les frais de scolarité de ses frères et soeurs ».

Une étude de l’OCDE, l’Organisation de coopération et de développement économiques, estime que si tous les moins de 15 ans avaient un niveau d’éducation de base, le PIB pourrait augmenter de 3 points grâce à leur « contribution aux revenus de la famille ».

L’OCDE note aussi qu’une éducation des plus jeunes endiguerait fortement les grossesses précoces et le taux de mortalité en couche.

Le Ghana est la deuxième économique d’Afrique de l’ouest (derrière le Nigeria) et les politiques successives ont fait de grands efforts sur le développement humain. Entre 1992 et 2013, le pays a réduit de moitié le nombre de ses habitants vivant sous les seuils de pauvreté – de 50 à 25%.

Pour Raymond Osei, père d’une adolescente de 13 ans, l’éducation de sa fille ne fait pas débat. Elle doit aller à l’école, même pour 350 euros par an.

Lui-même est banquier mais il reconnaît que les coûts de scolarité représentent un grand « repoussoir » pour les plus pauvres.

« Leurs enfants doivent abandonner car ils n’ont pas assez d’argent pour payer l’école », regrette-t-il.

La réforme, si elle est appliquée selon le programme du président Akufo-Addo, serait une « opportunité fantastique pour cette génération ».

« Si ça marche, cela voudra dire que, peu importe qui tu es ou d’où tu viens, l’éducation n’est plus un défi, ce n’est plus une barrière. Nous connaissons le pouvoir de l’éducation », se réjouit Mme Dickson de Camfed.

Pour Prince Armah, consultant sur les questions de l’éducation, l’initiative du gouvernement est bonne mais envoyer tous les enfants à l’école ne règlera pas les différences de niveau entres les régions.

« Les régions les plus pauvres, particulièrement dans le nord, ont des résultats terriblement bas pour les examens d’entrée au lycée », note l’expert.

Selon les chiffres du ministère de l’Éducation de 2015, les districts les plus riches du pays ont enregistré un taux de réussite de 25%. Les plus pauvres n’ont atteint que les 12%.

Marche des Haratines contre l'esclavage en Mauritanie: il reste du chemin

Femme au jardin en Mauritanie (photo d'illustration)
©
 

Les Haratines, les descendants d'esclaves mauritainiens ont manifesté ce samedi 29 avril dans les rues de Nouakchott pour fêter le quatrième anniversaire du Manifeste Haratines. Les Haratines réclament la fin des discriminations dont ils s'estiment toujours victimes. L'objectif de leur mouvement est de faire évoluer les mentalités et de «créer les conditions d'une cohabitation communautaire plus juste et plus harmonieuse», selon les organisateurs. Car il reste du chemin à parcourir.

« Le manifeste des Haratines appelle tous les Mauritaniens à se solidariser pour combattre l’injustice et d’ailleurs d’où qu’elle vienne, explique à RFI Boubacar Messaoud, président de SOS Esclave en Mauritanie. Il y a des Arabes qui sont opprimés, il y a des Arabes qui sont pauvres, il y a des Négro-Africains qui sont également pauvres. Il y en a même qui sont des descendants d’esclaves. Le pays a une société profondément inégalitaire. Et aujourd’hui nous avons vu que notre manifestation, notre manifeste, amène beaucoup de gens ».

Depuis le Manifeste pour les droits politiques économiques et sociaux des Haratines lancé en 2013, les mentalités bougent. « Les Haratines lèvent la tête, poursuit Boubacar Messaoud. Les Haratines dans ce pays ont toujours été instrumentalisés par leurs maîtres ou par leurs anciens maîtres. Mais aujourd’hui ils sont de plus en plus indépendants. Ça, c’est quelque chose que j’estime que nous avons nous créé. Nous avons nous participé à cet éveil-là ! »

Certains métiers et fonctions toujours difficiles d'accès

Mais aujourd'hui encore, les Haratines se sentent et se disent exclus de certains segments de la société, même si leur situation évolue. « Je ne dirais pas que les Haratines ne peuvent pas accéder à un certain type d’emplois, mais je dirais que pour tous les types d’emplois, les Haratines sont souvent les derniers à y accéder. Le problème c’est le problème des concours ; le problème, c’est le problème des recrutements... Effectivement, nous pouvons être recrutés comme les autres dans n’importe quel poste, mais nous sommes souvent refusés, surtout dans les enrôlements, dans l’armée, dans la police ou dans la douane…»

Certes, il y a quelques ministres Haratines mais une discrimination dans les recrutements persiste, poursuit Boubacar Messaoud « parce que nous sommes un Etat, une population qui n’est pas encore réellement devenue citoyenne. Ce sont des mentalités les plus difficiles à changer. Nous réclamons qu’on développe la citoyenneté. Que moi je sois un citoyen, [que] je ne sois pas un Hartani [singulier de Haratines], que je ne sois pas un Arabe, que je ne sois un Wolof, mais d’abord un Mauritanien ! ».

► à (re)lire: Le combat contre l'esclavage en Mauritanie récompensé par l'ONU

 

 

 

1er-Mai: les syndicats africains fêtent aussi le Travail

Le Gambian National Trade Union Congress, qui regroupe plusieurs syndicats gambiens, s'apprête à célébrer sa première fête du Travail de l'après-Jammeh.
© RFI/Claire Bargelès
 

A l'occasion du 1er-Mai, RFI revient sur l'histoire du syndicalisme en Afrique francophone. Un parcours qui au début du XXe siècle se confond avec l'histoire syndicale belge et française. Mais si ce lundi, la fête du Travail est célébrée un peu partout, chaque pays n’a pas les mêmes traditions syndicales et les mêmes préoccupations.

Si la première grève jamais enregistrée en Afrique subsaharienne se déroule à Dakar et date de 1919, il faudra attendre 1923 pour que le premier syndicat apparaisse : la Fédération des syndicats maritimes, affiliée à la CGT. La grande centrale française joue un rôle clé dans l'émergence des syndicats dans l'Afrique occidentale française (AOF). Tandis qu'au Congo belge, la CSC chrétienne et la FGTB socialiste sponsorisent des confédérations locales.

En 1937, un décret de Léon Blum favorise l'établissement de syndicats dans les colonies et l'on assiste à un véritable boum. A la veille de la Seconde Guerre mondiale, les colonies françaises comptaient 175 syndicats majoritairement affiliés à la CGT.

A (RE)LIRE → Que valent les syndicats africains ?

Après la guerre, les centrales africaines accompagnent la lutte contre la colonisation. C'est d'ailleurs la principale caractéristique des syndicats africains que d'être ainsi engagé à la fois dans les luttes sociales et politiques. Les premiers partis africains, comme le RDA, le Rassemblement démocratique africain, sortiront de cette matrice syndicale.

Les indépendances marqueront une certaine mise sous tutelle des syndicats nationaux, à mesure que les partis uniques se développent. A l'opposé, la vague de libéralisation des années 1990 a considérablement renforcé le pluralisme syndical. Au point qu'aujourd'hui le morcellement est l'une des principales faiblesses des centrales africaines.

  • Gambie, un vent de liberté pour les syndicats

Ce 1er-Mai est particulier en Gambie. C’est la première fête du Travail sous le nouveau régime. Jusque-là sans réel pouvoir de négociation, les syndicats espèrent bien marquer le début d’une nouvelle ère pour les droits des travailleurs dans le pays. L'heure était donc à l'enthousiasme chez les syndicalistes au moment des préparatifs.

Il faut marquer le coup pour ce jour du travail pas comme les autres, selon Amadou Bah, du syndicat des transports et de l'agriculture. « C'est bien sûr une fête du Travail différente. On s'attend à ce que la collaboration avec le nouveau gouvernement soit plus fructueuse », explique-t-il.

Il faut dire qu'avant, entre menaces et détentions arbitraires, la liberté d'expression était plus limitée. Essa Sowe s'occupe du syndicat des professeurs : « On devait faire beaucoup de compromis à l'époque, il fallait que nos déclarations soient flatteuses et on devait faire très attention à ce qu'on disait. Cela finissait par être des déclarations politiques, juste pour faire plaisir aux interlocuteurs et obtenir ce qu'on voulait », se souvient-il.

Aujourd'hui, Malick Secka, syndicaliste pour les dockers, espère bien se faire entendre. « Sous l'ancien régime, quand on se plaignait, ils n'écoutaient jamais ce qu'on avait à dire. A cause de la dictature, on nous répondait que les décisions venaient du haut. Peut-être que ce nouveau régime va écouter les plaintes des travailleurs », espère-t-il.

Amadou, du syndicat des transports, souhaite aussi ne plus se faire court-circuiter par des systèmes de corruption. « Les travailleurs utilisaient de l'argent pour gagner l'attention des agents et peser sur l'administration, affirme-t-il. Donc le syndicat n'avait pas beaucoup de poids. Cela va très certainement changer. »

Les syndicalistes procèderont à une marche ce lundi matin, puis remettront un document à la ministre du Commerce et de l'Industrie, pour appuyer leurs nouvelles revendications.

  • Des syndicats au centre de l’histoire burkinabè

Les syndicalistes burkinabè en sont fiers : à chaque tournant décisif de l'histoire, ils étaient là. En 1966, ils sont à l'origine du premier soulèvement populaire en Afrique qui a conduit à la chute d'un régime. Maurice Yaméogo avait démissionné. Ils se souviennent aussi de la grève générale historique de 1975 pour empêcher la mise en place d'un parti unique. En 2015, encore, ce sont eux qui ont contribué, en paralysant le pays, à mettre en échec la tentative de coup d'Etat.

Ils sont puissants et très bien organisés, explique Abdoul Karim Sango, analyste politique. « Le maillage est si important qu’il traverse tous les secteurs du monde public en particulier. Leur rôle me paraît d’autant plus intéressant que ce qui importe pour les syndicats burkinabè, ce n’est pas toujours des revendications corporatistes. Ils joignent à leur lutte le combat pour le renforcement de la démocratie et pour le respect des droits de l’homme, analyse-t-il. De ce point de vue, on est obligé de compter avec eux. »

Grande figure du syndicalisme burkinabè, Bassolma Bazié estime que les syndicats ont avant tout un rôle de contre-pouvoir. « Les organisations syndicales doivent savoir se tenir à égale distance de toutes les forces politiques, d’autant qu’elles n’ont pas pour rôle de conquérir et de gérer le pouvoir d’Etat. Leur rôle c’est de veiller à la mise en œuvre des décisions politiques et de dénoncer et aller au front et faire en sorte que ces décisions politiques n’aient pas d’impact négatif sur la vie des populations », estime-t-il.

Pour Bassolma Bazié, le 1er-Mai est bien plus qu'une simple fête, c'est surtout un moment de mobilisation et de combat. Ce lundi, à Ouagadougou, une marche sera suivie d’un meeting à la Bourse du travail.

La commémoration de cette année est placée sous l'angle de l'offensive.
Bassolma Bazié
01-05-2017 - Par Carine Frenk
 
  • Une contre-manifestation de colère au Gabon

Au Gabon, la fête du 1er-Mai est officiellement organisée sur le boulevard Triomphal Omar Bongo de la capitale, sous la supervision du président Ali Bongo. Au programme des décorations des travailleurs, un défilé, une exposition et un cocktail. Mais tous les syndicats ne se joindront pas à Ali Bongo. Plusieurs syndicats ont décidé d'organiser une contre-manifestation pour exiger la réhabilitation de la Convention nationale des syndicats de l'éducation nationale (Conasysed), interdite le 18 mars dernier.

Dimanche après-midi au siège de Dynamique unitaire et de l'ex-Conasysed à Awendje, dans le 4e arrondissement de Libreville, une douzaine de personnes travaillent avec beaucoup d'ardeur. Tous mettent la dernière main sur le manifeste qui sera lu ce lundi.

Ce 1er-Mai ne sera pas un jour de réjouissance, mais de colère contre la dissolution de la Conasysed, affirme Simon Ndong Edzo, délégué général de cette coalition syndicale dissoute. « C’est une journée de colère. Nous condamnons avec la dernière énergie la dissolution, sinon l’interdiction d’activité de la Conasysed par voie administrative. L’OIT [Organisation internationale du travail, ndlr] a condamné ça », souligne-t-il.

Les syndicats qui composaient la Conasysed marcheront du rond-point au stade de basket d'Awendje pour exiger la réhabilitation de leur coalition. « Nous demandons au gouvernement la réhabilitation pure et simple de la Conasysed et de ses activités parce qu’il n’est pas compétent pour suspendre une organisation syndicale par voie administrative », exhorte le syndicaliste.

Le gouvernement a interdit les activités de la Conasysed à cause d'une connivence présumée avec l'opposition radicale et l'organisation d'une grève sévère dans l'éducation nationale. Dix-sept enseignants grévistes sont d'ailleurs menacés de licenciement.

  • A Madagascar, le syndicalisme a du plomb dans l’aile

Le constat de Jean-Raymond Rakotoniasy, le secrétaire général de la nouvelle plateforme Solidarité syndicale de Madagascar est sans détour : « Le syndicalisme se porte mal aujourd'hui. »

D’année en année, les défilés se sont effilochés à Madagascar, les travailleurs se sont désengagés. A cela, plusieurs explications, comme la perte de crédibilité des centrales syndicales auprès des travailleurs, après que certains leaders ont détourné de l'argent ou pactisé avec des partis politiques.

Mais le problème vient aussi de la situation économique du pays, où le spectre du chômage et la précarité de l’emploi annihilent toute envie de revendication. Et ce, malgré les 80 ans d’existence du mouvement sur la Grande Ile. « Il y a eu beaucoup de leaders syndicaux et même des délégués syndicaux, notamment au sein d'Air Madagascar et de la Jirama, qui ont été licenciés, ce qui n'est pas conforme au Code du travail malgache. La peur d'être licencié, la peur de ne pas recevoir de salaire, c'est une des causes de la désyndicalisation à Madagascar », commente-t-il.

Par ailleurs, les mouvements syndicaux pâtissent d'un manque cruel de financement, la déduction automatique d'une cotisation sur les salaires n'existant pas. Ce qui entraîne tout un tas de difficultés pour les représentants syndicaux, à commencer par le niveau de qualité des services rendus ou la capacité de mobilisation des employés. « On a besoin de redynamiser le mouvement syndical à Madagascar. Parce qu'on ne peut plus aujourd'hui rester dans le mode classique de gouvernance, c'est-à-dire le pillage des richesses nationales, le détournement des deniers publics. Ce n'est plus acceptable par rapport à la pauvreté de la population à Madagascar », estime-t-il.

Jean-Raymond Rakotoniasy estime à moins de 15% le nombre de travailleurs aujourd'hui syndiqués.

Niger : le président Issoufou a rencontré
les dirigeants des étudiants mécontents

Par Jeune Afrique avec AFP
 
 

Le président du Niger, Mahamadou Issoufou, s'est entretenu samedi après-midi avec des syndicats des étudiants pour désamorcer la crise universitaire après la manifestation de lundi qui a fait un mort sur le campus de Niamey fermé depuis, a annoncé la radio publique.

« Nous avons rencontré le président de la république et des engagements ont été pris pour renouer le dialogue entre l’USN et le gouvernement », a affirmé à la radio Ousseïni Sambo, le secrétaire général du syndicat l’Union des scolaires nigériens (USN).

Renouer le dialogue 

Des sanctions vont être prises à l’encontre de responsables officiels, a-t-il souligné après la rencontre avec Mahamadou Issoufou qui, a-t-il ajouté, « a donné des instructions » en vue de la réouverture du campus universitaire, « peut-être lundi ».

Une autre rencontre est prévue avec « le Premier ministre, Brigi Rafini » pour « trouver des solutions adéquates » afin de satisfaire les revendications des étudiants, dont la construction de salles de cours et le versement des bourses, a-t-il expliqué. « Nous avons promis au président » d’agir dans « un esprit d’apaisement », a assuré Ousseïni Sambo.

Vendredi, le parquet a remis en liberté 83 manifestants arrêtés à Niamey, mais plusieurs autres responsables de syndicats d’étudiants ont été placés sous mandat de dépôt à la prison de la capitale, selon l’USN.

Un autre « engagement » obtenu à l’issue « des discussions avec le chef de l’Etat » est « la libération dans les prochains jours » de ces personnes « après avoir été entendues par la justice », a affirmé Ousseïni Sambo.

Un mort et 109 blessés

Lundi dernier, des centaines d’étudiants avaient manifesté à Niamey, paralysant la circulation à l’aide de pneus enflammés, de troncs d’arbres et de blocs de pierres, principalement sur la rive droite du fleuve Niger où se trouve l’université.

D’après un bilan officiel des manifestations rendu public mardi, 313 personnes ont été interpellées, dont 57 ont ensuite été libérées, et 109 blessées, 88 manifestants et 21 policiers.

Ce bilan a fait état du décès d’un « manifestant blessé suite à une chute », sans lien avec les « opérations de maintien de l’ordre » qui n’ont occasionné « aucune perte en vie humaine ».

Les autorités ont annoncé « l’ouverture d’une enquête » pour « déterminer les circonstances de cet accident mortel ».

L’USN a de son côté affirmé que la victime, Mala Bagalé, un étudiant en troisième année de sociologie, avait succombé après avoir été atteint par « une grenade lacrymogène ».

Burkina Faso: Blaise Compaoré et son gouvernement jugés à partir du 27 avril

Des manifestants devant les quartiers généraux de l'armée à Ouagadougou, le 31 octobre 2014.
© REUTERS/Joe Penney
 

L'ex-président burkinabè Blaise Compaoré, en exil en Côte d'Ivoire, et les ministres de son dernier gouvernement seront jugés à partir du 27 avril, a annoncé lundi 10 avril la Haute Cour de justice. Ils devront répondre d'« assassinat, complicité d’assassinat, coups et blessures » pour la répression de l'insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2014.

Tout a basculé le 30 octobre 2014, lorsque l'insurrection a éclaté au Burkina Faso pour empêcher la révision de l’article 37 de la Constitution. Si elle avait été votée par l'Assemblée nationale ce jour-là comme prévu, elle aurait permis à Blaise Compaoré de briguer un cinquième mandat présidentiel. Des dizaines de milliers de manifestants sont sortis dans la rue, incendiant l'hémicycle. Le soulèvement a emporté le régime de Blaise Compaoré en deux jours seulement. Mais à quel prix : officiellement, la répression a fait 33 morts et 625 blessés, essentiellement par balles.

L'accusation se fonde sur le Conseil extraordinaire des ministres du 29 octobre 2014, la veille du vote par l'Assemblée nationale et alors qu'un climat insurrectionnel s'est déjà installé dans le pays. Lors de ce Conseil des ministres, il est décidé de faire appel à l'armée pour réprimer les manifestants. Le procureur Armand Ouédraogo parle même d'« une réquisition complémentaire spéciale » qui autorise les militaires à faire usage de leurs armes à feu. Pour le parquet, « les ministres ont donné les moyens à ceux qui ont commis ces assassinats durant les journées troubles de le faire ». « Pour cela, ils sont mis en cause lors de ce procès. Pour cela et pour rien d'autre », explique un avocat burkinabè.

Blaise Compaoré en Côte d'Ivoire

En tout, 32 ministres vont être jugés. Parmi eux, le Premier ministre Luc Adolphe Tiao qui attend son procès en liberté provisoire, comme Jérôme Bougouma, le ministre de l'Administration territoriale, et Alain-Edouard Traoré, porte-parole à l'époque du gouvernement. Salif Kaboré, le ministre des Mines, est lui en exil comme d'autres anciens ministres.

Blaise Compaoré a même pris la nationalité ivoirienne. Il sera donc jugé par contumace. Mais il sera jugé. Une première. Il avait d'abord été question de poursuivre l'ancien président pour « haute trahison » ou « attentat à la Constitution ». Cette procédure a été avortée à cause, officiellement, d'un vide juridique. « Un problème d'achèvement des lois », avait expliqué le procureur de la Haute Cour de justice en septembre dernier. Cette fois, c'est donc en tant que ministre de la Défense – il cumulait les deux fonctions – que Blaise Compaoré sera jugé puisqu'il a assisté au fameux Conseil de ministres du 29 octobre 2014. En tant qu'ancien chef d'Etat, il est couvert par l'immunité, mais pas en tant que ministre de la Défense. S'il devait être condamné, rien ne dit cependant que la Côte d'Ivoire accepterait de l'extrader.

Un parfum d'inachevé

Avant même de commencer, ce procès a déjà un parfum d'inachevé. En raison de cette absence du président Compaoré, mais surtout parce que ce procès devant la Haute Cour de Justice se fera sans les victimes. En effet, les victimes ne peuvent pas se porter parties civiles devant cette juridiction. Elles attendent donc beaucoup des autres procédures ouvertes devant le tribunal de grande instance de Ouagadougou. Cela prend plus de temps, car la justice doit entendre plus de monde : des politiques, des militaires et bien sûr les victimes. Selon différentes sources, un procès pourrait avoir lieu en fin d'année et en début d'année prochaine. « Ce sera vraiment là le grand moment de vérité », estime Me Guy Hervé Kam, porte-parole du Balai citoyen, l’un des fers de lance de l'insurrection populaire.

Ce procès devant la Haute Cour de Justice est néanmoins très attendu, notamment dans le cadre de la lutte contre l'impunité. Selon Guy Hervé Kam, « au-delà de la responsabilité pénale, ce procès va ouvrir la voie à la responsabilité politique des gouvernants pour les actes qu'ils posent quand ils sont en fonction ». Les partisans de l'ancien régime dénoncent déjà quant à eux un « procès politique », un « procès joué d'avance » qui tient plus d'un « esprit de revanche » que d'un désir de justice.