Justice et Paix

" Je suis homme, l'injustice envers d'autres hommes révolte mon coeur. Je suis homme, l'oppression indigne ma nature. Je suis homme, les cruautés contre un si grand nombre de mes semblables ne m'inspirent que de l'horreur. Je suis homme et ce que je voudrais que l'on fit pour me rendre la liberté, l'honneur, les liens sacrés de la famille, je veux le faire pour rendre aux fils de ces peuples l'honneur, la liberté, la dignité. " (Cardinal Lavigerie, Conférence sur l'esclavage africain, Rome, église du Gesù)

 

NOS ENGAGEMENTS POUR LA JUSTICE T LA PAIX
S'EXPRIMENT DE DIFFÉRENTES MANIÈRES :

En vivant proches des pauvres, partageant leur vie.
Dans les lieux de fractures sociales où la dignité n'est pas respectée.
Dans les communautés de base où chaque personne est responsable et travaille pour le bien commun.
Dans les forums internationaux pour que les décisions prises ne laissent personne en marge.

Dans cette rubrique, nous aborderons différents engagements des Missionnaires d'Afrique, en particulier notre présence auprès des enfants de la rue à Ouagadougou et la défense du monde paysan.

 

L'Afrique subsaharienne est la seule région du monde où le mariage des enfants augmente

 

Mettre fin au mariage des enfants, c'est l'un des objectifs de développement durable fixés pour 2030 par les Nations unies. Pourtant le phénomène régresse trop lentement à l'échelle mondiale. En Afrique subsaharienne, les mariages précoces sont même en recrudescence, déplore le Fonds des Nations unies pour l'enfance. Car c'est une pratique aujourd'hui très liée à l'insécurité physique et économique des populations sur le continent.

L'Afrique subsaharienne est la seule région de la planète où le mariage des enfants continue d'augmenter. En 1997, 15 % des femmes de 20 à 24 ans avaient été mariées avant l'âge de 18 ans : elles sont 35 % aujourd'hui et leur proportion pourrait selon l'Unicef passer à 41 % en 2030.

Les seuls progrès réalisés ont été enregistrées chez les familles africaines les plus aisées. Chez les plus pauvres, le taux de prévalence du mariage des filles mineures est passé de 50 % à 60 %. 

En cause : la croissance démographique et les crises multiples que connaît le continent. Les conflits, les perturbations climatiques fragilisent les familles. Plongées dans l'insécurité - physique et économique - elles marient le plus tôt possible leurs filles en pensant les protéger.

En Éthiopie les mariages précoces avaient régressé jusqu'en 2016. Un an de conflit a causé un retour en arrière de quatre ans. De même chaque variation de 10 % des précipitations, en plus ou en moins, occasionne une hausse des mariages précoces de 1 %.

 

Facteur aggravant : la déscolarisation des filles. Or plus que partout ailleurs, les fillettes privées d'école en Afrique à cause de la pandémie de Covid-19 n'y sont pas retournées depuis.

Ce rapport de l’Unicef a été dirigé par Claudia Cappa, qui explique que le mariage des enfants a des conséquences néfastes sur les individus mais aussi sur l'ensemble de la société :

«Les mariage précoces se sentent immédiatement» et les «conséquences néfastes touchent plusieurs générations», explique Claudia Cappa, qui a dirigé un rapport de l’Unicef

► À lire aussi : Iran: le mariage des très jeunes filles en forte augmentation

En Mauritanie, Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani et la cruciale bataille des urnes

À un an de la présidentielle, le chef de l’État va tester sa popularité le 13 mai lors des élections législatives, régionales et municipales. Mais les islamistes de Tawassoul et le militant antiesclavagiste Biram Dah Abeid sont également sur les rangs. Voici ce qu’il faut attendre de ce scrutin.

Mis à jour le 5 mai 2023 à 14:17

 
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Le président mauritanien Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani à Chinguetti, le 11 avril 2019. © Carmen Abd Ali



Si, en Mauritanie, les élections locales ne soulèvent habituellement pas les passions, celles-ci suscitent un grand intérêt dans le pays. Un million d’électeurs iront voter pour élire leurs maires, députés et conseillers régionaux. Certes Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani disposait déjà à l’Assemblée nationale, dissoute le 13 mars, d’une majorité confortable. Mais pour la première fois, depuis son élection en juin 2019, le chef de l’État va se confronter aux urnes et, ainsi, tester sa popularité à un an de la prochaine présidentielle. Selon son entourage, il devrait en effet, même s’il fait toujours mystère de ses ambitions, briguer un deuxième mandat.

Biram et Tawassoul en pôle position

L’un de ses proches, l’ancien chef d’état-major Mohamed Ould Meguett, est pressenti pour prendre la tête de l’Assemblée nationale, qui comptera désormais 176 sièges, et non plus 157. Face au parti au pouvoir, El Insaf, qui a déployé de grands moyens en envoyant des candidats dans toutes les moughataa (« départements ») et dans la plupart des communes, le camp adverse est désuni.

Les opposants historiques, que furent Ahmed Ould Daddah (Rassemblement des forces démocratiques), Messaoud Ould Boulkheir (Alliance populaire progressiste) et même Mohamed Ould Maouloud (Union des forces de progrès), sont à la peine. Une page s’est en effet tournée dans la vie politique mauritanienne : ce sont désormais les islamistes de Tawassoul et le militant antiesclavagiste Biram Dah Abeid (IRA-Sawab) qui tirent leur épingle du jeu. Ces derniers temps, Tawassoul a connu beaucoup de départs, dont celui de son ex-leader Jemil Ould Mansour, et sa direction a également changé de visage. Confortera-t-il sa place de premier parti d’opposition ?

À LIREMauritanie : Biram Dah Abeid en quête de reconnaissance

Il sera concurrencé par le député Biram, dont on attend de constater si son score sera semblable, voire supérieur à celui de la présidentielle de 2019 à laquelle il avait obtenu 18 % des voix. Une chose est sûre, le leader de l’IRA – les autorités refusent toujours d’enregistrer cette ONG en tant que parti – est plus populaire que jamais, en dépit du fait que plusieurs de ses partisans l’aient récemment quitté. Coutumier des diatribes enflammées à l’approche des scrutins, il a tiré à boulets rouges ces derniers jours à la fois sur l’homme d’affaires Mohamed Ould Bouamatou – avec qui il est désormais en guerre ouverte –, sur le ministre de l’Intérieur, Mohamed Ahmed Ould Mohamed Lemine, mais aussi sur le président.

Duel électrique à Nouadhibou

Tous ont Nouakchott dans leur viseur. Si la capitale, dont la majorité des huit communes est habituellement acquise à l’opposition, est un enjeu important pour le pouvoir, l’ambiance y est très calme depuis le lancement officiel de la campagne électorale, le 28 avril. Il faut dire qu’un consensus sur l’organisation du scrutin a, pour la première fois depuis très longtemps, été trouvé entre le ministère de l’Intérieur et l’opposition, au sujet notamment de la Commission électorale nationale indépendante. L’atmosphère est bien plus électrique à plusieurs centaines de kilomètres au nord, à Nouadhibou. Car c’est ici que se joue l’une des plus grandes batailles électorales.

À LIREBouamatou et El Hassen, quand deux puissants hommes d’affaires mauritaniens se déchirent

Le député-maire sortant, El Ghassem Ould Bellali, est une personnalité réputée aussi incorruptible qu’irrévérencieuse. Très populaire, il a toujours remporté les élections au nez et à la barbe du pouvoir, même du temps du président Maaouiya Ould Taya (1984-2005). Cette fois, une grande coalition a été mise en place afin de le battre dans les urnes. Le directeur adjoint de l’Agence de promotion des investissements en Mauritanie (Apim), Ahmed Ould Khattry, a été choisi pour représenter El Insaf.

Sa campagne est dirigée par l’ancien président de l’Assemblée nationale Cheikh Ould Baya, dont l’adjoint n’est autre que l’ex-commandant de la marine nationale, Abderrahmane Ould Lekwar. Ces derniers ont la particularité d’être de grands rivaux d’El Ghassem Ould Bellali. Pour couronner le tout, l’homme d’affaires Mohamed Ould Bouamatou, dont les relations avec le député-maire sortant sont notoirement exécrables, se mobilise également derrière le candidat du pouvoir.

L’ombre de Mohamed Ould Abdelaziz

Enfin, l’ombre de Mohamed Ould Abdelaziz ne plane pas autant sur ces élections que ce l’on projetait il y a encore quelques mois. L’ancien président, dont le procès pour corruption se poursuit, n’est finalement pas candidat aux législatives, comme l’a annoncé Ribat al Watani, sans motiver ce choix. « Aziz » avait rejoint cette formation, dirigée par Saad Ould Louleid, en 2021.

À LIREMohamed Ould Abdelaziz, un ancien président mauritanien à la barre

Plusieurs de ses proches, dont sa sœur, seront en revanche en lice. Lui se trouve toujours en résidence surveillée, non plus à l’école de police de Nouakchott, mais dans un appartement de la capitale, situé dans le quartier Soukouk. Les récentes déclarations de témoins à la barre de la Cour criminelle, concernant de supposées grosses sommes d’argent qu’il leur avait confiées ou des biens publics qu’il aurait bradés, ont sérieusement écorné son image dans l’opinion, alors qu’il connaissait un regain de popularité. Était-ce une stratégie du pouvoir d’organiser les élections au moment du procès ? En tout cas, la première intervention d’Aziz devant les juges, le 3 mai, a eu peu d’écho dans le pays.

L’appel des 30 pour la liberté de la presse au Mali et au Burkina

Jeune Afrique, Joliba TV, L’Observateur Paalga ou encore France 24 et RFI : trente médias africains et internationaux lancent ce 3 mai un appel en faveur de la liberté de la presse au Mali et au Burkina Faso. Une lettre ouverte adressée aux gouvernements des deux pays et aux organisations internationales que nous publions ici en intégralité.

Mis à jour le 3 mai 2023 à 16:01
 
 
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Des journalistes lors d’une marche blanche le 4 novembre 2013 à Bamako, en mémoire de la journaliste de Radio France Internationale (RFI) Ghislaine Dupont et du technicien du son Claude Verlon tués dans la ville de Kidal.

 

Appels au meurtre de journalistes et de leaders d’opinion, menaces et intimidations sur la presse nationale, montages grotesques contre des journalistes, suspension des médias internationaux RFI et France 24, expulsion des correspondants des journaux français Libération et Le Monde…  Les menaces sur la liberté d’expression et la liberté de la presse sont très inquiétantes au Burkina Faso. Les mesures prises par les autorités de ce pays, surtout ces derniers mois, sont de nature à remettre en cause le droit fondamental des citoyens à être informés. La liberté commence là où finit l’ignorance.

Au Mali également, les pressions et les intimidations envers les journalistes et les leaders d’opinion se multiplient. De novembre à décembre 2022, la chaîne Joliba TV a été suspendue par la Haute autorité de la communication (HAC), après la diffusion d’un éditorial jugé critique envers les autorités. Le 20 février 2023, la Maison de la presse de Bamako a été mise à sac. Le 13 mars, le chroniqueur de radio Mohamed Youssouf Bathily, plus connu sous le pseudonyme de Ras Bath, a été inculpé et écroué pour avoir dénoncé « l’assassinat » de l’ex-Premier ministre Soumeylou Boubèye Maïga. Le 15 mars, Rokia Doumbia, dite « Rose vie chère », a été arrêtée à son tour pour avoir communiqué sur la hausse des prix et « l’échec » de la transition. Le 6 avril, le journaliste Aliou Touré a été enlevé par des hommes armés et cagoulés et n’a été retrouvé libre que quatre jours plus tard.

Là aussi, la presse internationale est loin d’être épargnée. En février 2022, un reporter de Jeune Afrique a été expulsé de Bamako. Et un mois plus tard, RFI et France 24 ont été coupés sur tout le territoire malien.

Menaces de mort

Au Burkina Faso comme au Mali, ces attaques sont de plus en plus relayées sur les réseaux sociaux par des « influenceurs » favorables aux régimes militaires de ces deux pays, qui jouent aux justiciers et n’hésitent pas à menacer de mort les journalistes et leaders d’opinion trop indépendants à leurs yeux. Aujourd’hui, le mensonge s’ajoute à la violence. « L’instauration d’un régime de terreur », comme l’écrit le quotidien burkinabè L’Observateur Paalga, s’accompagne d’une vague de « fake news » qui inondent les réseaux sociaux de contre-vérités. Les premières victimes de ces « influenceurs » sont les populations malienne et burkinabè, qui sont privées de débat démocratique.

À LIREAu Burkina Faso, les journalistes doivent choisir leur camp

En cette période de grave crise sécuritaire dans ces deux pays, les journalistes qui jouent un rôle crucial d’information des citoyens sont tous conscients de leurs responsabilités. Ils comprennent aussi la complexité du contexte politique,  géopolitique et militaire. Ils vivent et subissent aussi les graves conséquences de cette crise sécuritaire. Ils souhaitent, comme tous les citoyens, le retour rapide à la paix. Pour autant, la lutte contre le terrorisme ne doit en aucun cas servir de prétexte pour imposer une nouvelle norme de l’information et pour restreindre les droits fondamentaux des populations malienne et burkinabè à rechercher et à avoir accès à l’information par le biais des médias professionnels et indépendants.

Situation critique

Au Burkina Faso, la situation des journalistes est devenue tellement critique que même l’institution chargée de la régulation s’en émeut. Dans un communiqué publié le 29 mars 2023, le Conseil supérieur de la communication (CSC) « constate avec regret la récurrence des menaces proférées à l’endroit d’organes de presse et d’acteurs des médias ». Le CSC demande aux autorités burkinabè de « prendre les mesures idoines pour assurer la sécurité des médias et des journalistes dans l’exercice de leur profession ». De son côté, Volker Türk, le haut-commissaire des Nations unies aux droits de l’Homme, se dit « profondément troublé » par la situation des médias au Burkina Faso. « En cette période de transition, la protection des voix indépendantes est plus nécessaire que jamais », ajoute-t-il.

Le 20 février, Alioune Tine, l’expert indépendant des Nations unies sur la situation des droits de l’homme au Mali, a déclaré être « extrêmement préoccupé par le rétrécissement de l’espace civique, de la liberté d’expression et d’association » au Mali.

Sur la base de tous ces éléments, nous, signataires de cette lettre ouverte,

  • Exhortons les autorités du Mali et du Burkina Faso à mettre fin à toutes les mesures qui portent atteinte à la liberté de la presse.
  • Remarquons une absence de protection des forces de sécurité et un silence de la justice face aux campagnes d’intimidation et aux menaces de mort lancées contre les journalistes de ces deux pays. Tout en respectant l’indépendance de la justice, nous demandons aux procureurs et aux officiers de police judiciaire d’être plus réactifs sur ces actes répréhensibles par le droit pénal.
  • Demandons aux autorités de ces deux pays de garantir la protection et la sécurité de tous les professionnels des médias victimes de menaces, intimidations, harcèlement et attaques physiques.
  • Demandons aux autorités de diligenter des enquêtes impartiales, efficaces et indépendantes pour faire la lumière sur les abus commis contre les journalistes, identifier les responsables et les poursuivre en justice.
  • Appelons les deux gouvernements à respecter les obligations internationales signées et ratifiées par les États concernant la liberté d’expression et la liberté de la presse, en particulier la Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples, et le Pacte international relatif aux droits civils et politiques.
  • Appelons les responsables nationaux et les instances panafricaines et internationales destinataires de cette lettre ouverte à soutenir cette démarche au plus haut niveau : l’accès à l’information est un droit fondamental des peuples. En cette journée mondiale de la liberté de la presse, il est essentiel de la défendre et de la protéger.

Ce texte, que Jeune Afrique cosigne, a été adressé aux destinataires suivants :

  • Monsieur le Président de la Conférence des Chefs d’État et de Gouvernement de l’Union africaine,
  • Monsieur le Président de la Conférence des Chefs d’État et de Gouvernement de la Cedeao,
  • Monsieur le Président de la Conférence des Chefs d’État et de Gouvernement de l’UEMOA,
  • Monsieur le Président de la Commission de l’Union africaine,
  • Monsieur le Président de la Commission de la Cedeao,
  • Monsieur le Président de la Commission de l’UEMOA,
  • Monsieur le Président du Parlement panafricain,
  • Monsieur le Secrétaire général de l’ONU,
  • Monsieur le Président du Conseil des droits de l’Homme de l’ONU,
  • Madame la Directrice générale de l’Unesco,
  • Madame la Secrétaire générale de l’OIF,
  • Mesdames et Messieurs les Présidents des instances de régulation des médias des 15 pays de la Cedeao,
  • Monsieur le Président du Réseau francophone des régulateurs des médias,
  • Monsieur le Président de la Plateforme des régulateurs de l’audiovisuel des pays membres de l’UEMOA et de la Guinée,
  • Mesdames et Messieurs les ministres de la Communication des 15 pays de la Cedeao,
  • Monsieur le Président de l’Union africaine de radiodiffusion (UAR).

La liste complète des signataires :

  1. AfrikaJom Center
  2. Association  des Journalistes du Burkina Faso (AJB)
  3. Association des Professionnels de la Presse en Ligne (APPEL Sénégal)
  4. Cellule Norbert Zongo pour le Journalisme d’Investigation (CENOZO)
  5. Centre National de la Presse Norbert Zongo (CNP-NZ Burkina Faso)
  6. Courrier confidentiel (Burkina Faso)
  7. Fédération des Journalistes Africains (FAJ)
  8. Fédération Internationale des Journalistes (FIJ)
  9. Fédération Internationale pour les Droits de l’Homme (FIDH)
  10. France 24  (France)
  11. Fondation des médias pour l’Afrique de l’Ouest (MFWA)
  12. Human Rights Watch (HRW)
  13. International Press Institute (IPI)
  14. Jeune Afrique (France)
  15. Joliba TV News  (Mali)
  16. Le Pays (Burkina Faso)
  17. Le Monde (France)
  18. Lefaso.net (Burkina Faso)
  19. Le Reporter (Burkina Faso)
  20. L’Événement (Burkina Faso)
  21. Libération (France)
  22. L’Observateur Paalga (Burkina Faso)
  23. Radio France Internationale (France)
  24. Reporters Sans Frontières (RSF)
  25. Société des Editeurs de la Presse Privée du Burkina Faso (SEP)
  26. Omega Médias (Burkina Faso)
  27. Union Internationale de la Presse Francophone (UPF)
  28. Union des Journalistes d’Afrique de l’Ouest (UJAO)
  29. 24heures.bf (Burkina Faso)
  30. Wakat Sera (Burkina Faso)

Burkina Faso: les syndicats remettent un cahier de doléances au gouvernement

 

Au Burkina Faso, le 1er-Mai a mobilisé plus que l'an dernier dans les rues de la capitale. Un cahier de doléances a été remis au gouvernement pour lui demander de lutter contre la vie chère et la corruption, mais aussi contre les violations des droits de l'homme, qui se sont multipliées dans le pays. 

À Ouagadougou, le cortège était plus fourni que l'an dernier entre la Bourse du Travail et le ministère du Travail ce lundi 1er mai. Les revendications étaient aussi plus nombreuses cette année et pas seulement pour remédier à la vie chère.

« Tout a augmenté de manière exponentielle, donc nous avons demandé au gouvernement de veiller à améliorer les conditions de vie et de travail des travailleurs du Burkina Faso, explique Marcel Zanté, secrétaire général de la Confédération nationale des travailleurs du Burkina (CNTB). Nous avons également interpelé le gouvernement sur un certain nombre de dérives que nous avons constaté sur le terrain, notamment des violations des droits de l'homme et des libertés individuelles et collectives ».

Reçus par le Premier ministre lui-même, les syndicats burkinabé ont aussi demandé aux autorités de protéger les personnes et les biens, dans un pays où la moitié du territoire subit l'insécurité. Ils espèrent que cette année, ils auront une réponse à leurs doléances.

La démocratie togolaise face à ses défis

S’accommoder d’une démocratie balbutiante est-il le prix à payer pour obtenir la paix et le développement ? Face à cette épineuse question, l’opposition a plus que jamais un rôle crucial à jouer.

Mis à jour le 2 mai 2023 à 12:48
 
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Par Georges Dougueli

Journaliste spécialisé sur l'Afrique subsaharienne, il s’occupe particulièrement de l’Afrique centrale, de l’Union africaine et de la diversité en France. Il se passionne notamment pour les grands reportages et les coulisses de la politique.

 
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Élection présidentielle à Lomé, le 22 février 2020. © Sunday Alamba/AP/SIPA

 

« La démocratie est le meilleur outil dont nous disposons pour relever le large éventail de défis auxquels nous sommes tous confrontés », déclarait, en décembre 2021, le président américain Joe Biden lors d’un sommet organisé à Washington avec des dirigeants africains. Parmi eux, Faure Essozimna Gnassingbé écoutait, impassible. S’il s’était exprimé sur ce sujet, le chef de l’État togolais aurait probablement tenu un propos plus nuancé que celui de son homologue.

Vu d’Afrique sahélienne, « l’outil » démocratique étant encore en rodage, le développement économique serait peut-être le meilleur moyen de surmonter les défis auxquels le président des États-Unis faisait allusion.

Quelques entorses aux libertés

Prenons un grand défi de l’heure : le terrorisme qui menace le nord du Togo. Un phénomène qui s’impose de lui-même, qui peut survenir n’importe quand, n’importe où, de façon violente et aveugle. Il échappe à toute logique, ne connaît pas de frontières, menace les grandes démocraties, compromet à lui seul la stabilité des petits et des grands pays, se nourrit des injustices autant que de l’absence de progrès économiques et sociaux.

À LIRETogo : Faure Essozimna Gnassingbé, la méthode pour durer ?

Des études ont démontré que la décision de rejoindre ces groupes armés n’est pas toujours le résultat d’un endoctrinement. L’absence d’État peut pousser les jeunes à s’enrôler pour se protéger des attaques d’un groupe rival ou pour simplement disposer d’une arme avec laquelle ils espèrent protéger le bétail de la famille.

La situation est donc beaucoup plus complexe qu’il n’y paraît. Et le Togo est d’autant plus exposé que son économie repose sur un secteur tertiaire qui contribue à plus de la moitié du PIB (58,6 %) et est centré sur les activités logistiques, du commerce et de la finance. Laisser proliférer l’insécurité en provoquerait l’effondrement.

Entendons-nous bien. Il n’est pas question de sacrifier la démocratie sur l’autel de la stabilité et du développement. Mais la lutte livrée à ces sauvages vaut bien quelques entorses aux libertés. Ce qui relativise quelque peu le propos de Joe Biden.

L’incurie des forces du changement

Soyons honnêtes, les incursions terroristes sont loin d’être les seuls freins aux avancées démocratiques. En dépit de nombreuses réformes institutionnelles, le pays ne parvient pas organiser une élection présidentielle dont les résultats sont acceptés par tous. Les crises post-électorales se suivent, avec leurs cortèges de tensions, parfois de violences. Dans l’absolu, toute crise relève de la responsabilité de ceux qui gouvernent et disposent de la capacité de légiférer grâce à la confortable majorité dont ils bénéficient au Parlement. À l’exécutif togolais, donc, de trouver la formule susceptible de susciter l’adhésion des populations aux règles du processus démocratique.

Mais cette démocratie balbutie aussi à cause de l’incurie des forces du changement. À cause d’une opposition qui n’a jamais pu se départir de la tentation de la table rase, visant non pas à proposer un projet alternatif constructif pour le Togo, mais à chasser la famille Gnassingbé du pouvoir.

À LIRETogo : Jean-Pierre Fabre, Gerry Taama, Agbéyomé Kodjo ou Tikpi Atchadam… Qui incarne vraiment l’opposition ?

Depuis la présidentielle de février 2020, l’opposition n’est plus incarnée. Tel un champ de ruines représenté par une nébuleuse, la Dynamique monseigneur Kpodzro (DMK) – rebaptisée Dynamique pour la majorité du peuple (DMP) en avril –, l’opposition tente désespérément de maintenir ses partisans dans une lutte pour faire reconnaître la victoire de Messan Agbéyomé Kodjo lors du scrutin de 2020. Peine perdue, le front s’effrite depuis que le gouvernement a annoncé la tenue d’élections législatives et régionales en 2023. En dépit des mots d’ordre de boycott lancés par l’ecclésiastique qui cornaque la formation, une partie des troupes veut prendre part aux deux scrutins à venir.

Non seulement l’« outil démocratie » vanté par Biden n’est pas prêt à l’usage mais, bien que nécessaire, il reste insuffisant pour faire face aux défis de l’heure.