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Mali: Bouaré Fily Sissoko écrit au président Goita pour être jugée rapidement

 

Cela fait un an qu'elle est emprisonnée à Bamako, Bouaré Fily Sissoko, vient d'adresser une lettre ouverte au président de la Transition, le colonel Assimi Goïta. L'ancienne ministre de l'Économie avait été arrêtée en, même temps que l'ancien Premier ministre Soumeylou Boubeye Maïga, puis placée sous mandat de dépôt dans le cadre d'une enquête de la justice malienne sur deux dossiers sulfureux : celui de l'achat de l'avion présidentiel et celui des contrats d'équipements militaires surfacturés.

Elle ne demande pas de grâce présidentielle, ni aucune faveur ou mesure d'exception. Bouaré Fily Sissoko s'adresse au président de transition, le colonel Assimi Goïta, en tant que « recours ultime » pour que la procédure qui la vise « puisse connaître un dénouement rapide ». En clair, pour que le procès qui l'attend puisse enfin se tenir.

L'ancienne ministre juge « difficile à comprendre » son maintien en détention provisoire depuis un an et estime que l'attente « se prolonge sans raison évidente objective ». Et de rappeler que tous les rapports d'audits, procès-verbaux d'enquête et autres pièces administratives ou comptables nécessaires « sont disponibles ». Bouaré Fily Sissoko rappelle d'ailleurs avoir versé elle-même tous les documents dont elle disposait, et s'être montrée disponible « à comparaître à tout moment » devant la Justice, et cela, avant même son arrestation, alors que le poste qu'elle occupait à l'Uemoa lui conférait une immunité dont elle n'a pas cherché à jouir.

« Livrer sa part de vérité »

Bouaré Fily Sissoko explique vouloir « livrer sa part de vérité » et « sortir blanchie de tout soupçon » afin que « [ses] enfants [...] puissent toujours marcher la tête haute » au Mali. Elle assure s'être toujours évertué à mettre « la transparence » au cœur de son action et cite en exemple ses déclarations de bien, « toujours déposées dans les délais » au cours de son parcours dans la fonction publique de 2000 à 2015.

À ce sujet, l'ancienne ministre « regrette que l'institution judiciaire ne mette pas souvent l'accent » sur la présomption d'innocence dont elle est pourtant censée bénéficier, et déplore être « jetée en pâture ».

Elle a un mot pour ses co-détenues de la prison pour femmes de Bollé, à Bamako, dont elle décrit la « détresse » – certaines attendent depuis plus de deux ans d'être présentées à un juge d'instruction – et un autre pour l'administration pénitentiaire à qui elle « rend hommage ».

Hommage à Soumeylou Boubeye Maïga

Elle en a aussi un pour l'ancien Premier ministre Soumeylou Boubeye Maïga, mort en détention après de multiples demandes d'évacuation sanitaire restées vaines. En mars, la femme de Soumeylou Boubeye Maïga avait, elle aussi, adressé une lettre ouverte au chef de la Transition, le suppliant de laisser son mari partir se soigner et s'engageant ce qu'il revienne comparaître. Soumeylou Boubeye Maïga était finalement mort, détenu, trois semaines plus tard.

Bouaré Fily Sissoko « s'incline pieusement » devant sa mémoire sans formuler aucun reproche aux autorités de transition, mais en rappelant simplement être « préoccupée » par le temps pris par la procédure qui la vise, « notamment au regard de son âge, 67 ans, et de l'espérance de vie très limitée dans nos pays ».

Sénégal : Mame Aby Seye, l’atout de Macky Sall pour renforcer la souveraineté économique

LE PORTRAIT ÉCO DE LA SEMAINE. Nommée il y a six mois à la tête de la Délégation générale à l’entreprenariat rapide des femmes et des jeunes (DER/FJ), cette quadragénaire est mandatée par le président pour soutenir les secteurs capables de réduire la dépendance du pays aux importations.

Mis à jour le 31 août 2022 à 16:17
 
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Mame Aby Seye a pris la direction de la DER/FJ (Délégation générale à l’entreprenariat rapide des femmes et des jeunes ). © Global Mind Consulting

 

Avant de prendre la direction de la Délégation générale à l’entreprenariat rapide des femmes et des jeunes (DER/FJ) en mars 2022, cette docteure en sociologie et démographie a fait ses premières armes dans les compotes de fruits. Outre ce poste de responsable des études marketing en France pour la marque d’agroalimentaire Andros, cette passionnée – et diplômée – d’urbanisme a aussi œuvré au sein d’une ONG, puis de l’agence publique sénégalaise pour des projets domaniaux.

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Revenue au pays en 2015 pour intégrer la Caisse des dépôts et consignation comme cheffe de projet, elle est repérée en 2019 par le président Macky Sall qui lui confie la direction du Fonds de financement de la formation professionnelle et technique (3FPT), un poste qui fait d’elle une technocrate en vue au sein de l’administration.

« Calme et conventionnelle »

En mars, alors que le charismatique Papa Amadou Sarr est brutalement remercié après un discours appelant à plus d’égalité femmes-hommes au Sénégal, qui a choqué certaines consciences locales, c’est à nouveau à Mame Aby Seye que le président pense. La nouvelle ministre hérite alors d’une institution qui, malgré son jeune âge – elle a été créée en 2018 –, incarne désormais une forme de modèle de développement au sein de la sous-région.

MA NOMINATION EST UN SIGNE DE CONFIANCE REDONNÉE À L’INSTITUTION

Ce nouveau profil au ton plus polissé que son prédécesseur veut éviter de nouvelles polémiques tout en incarnant la continuité d’une institution soutenue par la plus haute administration : « Ma nomination est un signe de confiance redonnée à l’institution », assure celle qui, lorsque nous la rencontrons en marge du salon VivaTech de Paris en juin, se réfère régulièrement à ses fiches pour nous répondre.

« Elle est calme, très structurée et a tous les atouts opposés de son prédécesseur. Elle calcule bien ses apparitions et ses prises de positions, et se repose beaucoup sur son équipe, tout en ne s’affichant que lorsqu’il le faut », observe un entrepreneur sénégalais. « Avec Mame Aby Seye, nous avons affaire à une directrice générale plus conventionnelle que Papa Amadou Sarr », tranche un bénéficiaire historique de la DER/FJ.

Microfinance et agriculture

L’entrepreneuriat numérique et l’emploi des jeunes ont été les premiers chantiers de la DER/FJ lors de sa création. Quatre ans plus tard, voici que l’organe se diversifie dans la microfinance et l’agriculture, des secteurs identifiés comme prioritaires pour garantir la souveraineté économique et alimentaire du pays de la teranga.

LA CRISE RUSSO-UKRAINIENNE, L’INFLATION GÉNÉRALISÉE AJOUTÉE À L’IMPACT DU COVID-19, NOUS OBLIGE À REVOIR NOS PRIORITÉS

« La crise russo-ukrainienne, l’inflation généralisée ajoutée à l’impact du Covid-19, nous oblige à revoir nos priorités, confirme Mame Aby Seye. On nous demande de redéfinir une stratégie notamment sur les produits de substitution à l’importation, comme le mil ou le sorgho, et de renforcer des chaînes de valeur locales », développe-t-elle.

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Jusqu’ici, la DER/FJ a contribué à la formalisation de 2 452 micros, petites et moyennes entreprises (TPME) de secteurs divers et financé 415 start-up ayant reçu une enveloppe totale de 9 millions d’euros via le Projet d’appui et de valorisation des initiatives entrepreneuriales (Pavie) des femmes et des jeunes. Ce programme phare, soutenu par la BAD et l’AFD, permettrait, d’ici à 2023, de créer 154 000 emplois dont la moitié bénéficieraient à des femmes. « On parle déjà d’un Pavie II », confie Mame Aby Seye, convaincue que le Sénégal bénéficie désormais d’un climat des affaires favorable et qui pourra attirer de nouveaux bailleurs privés.

En parallèle, un programme d’allocation de nanocrédit a bénéficié à 93 000 petits commerçants dont 50 % de commerçantes, représentant un volume de crédit alloué de 23 millions d’euros pour un taux de remboursement de 86 %, selon les chiffres présentés par la déléguée générale à l’entrepreneuriat rapide.

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Fin mars, un fonds supplémentaire d’appui à l’accélération des start-up sénégalaises (FSPI) de 2 millions d’euros (dont la moitié est apporté par la coopération française) a été lancé pour soutenir la croissance des jeunes pousses et la création de réseau d’investisseurs locaux. « L’idée est d’accompagner plus de 116 projets dans neuf régions du Sénégal, ainsi que d’implanter 14 pôles d’incubation », précise Mame Aby Seye, dont l’une des missions est aussi de décentraliser l’action de la DER/FJ afin de toucher l’ensemble des territoires. « Nous espérons trouver d’autres bailleurs pour élargir ce projet et doubler cette dotation », indique-t-elle.

Futur grand incubateur à Diamniadio

Outre un investissement d’1,2 million d’euros pour la création du D-Hub – un espace de 1 000 mètres carrés dédiés aux porteurs de projet et entrepreneurs, installé au Point E à Dakar –, la construction du Centre Mohammed Bin Zayed pour l’innovation et l’entrepreneuriat fait aussi partie des projets que Mame Aby Seye aura à finaliser dans les prochains mois. « Nous devrions réceptionner cet espace situé au sein du parc technologique de Diamniadio d’ici à dix-huit mois », remarque la déléguée générale.

Financé à hauteur de 12 milliards de F CFA par Abu Dhabi (soit un peu plus de 18 millions d’euros) pour un coût total de 18 milliards de F CFA, le bâtiment de 30 000 mètres carrés est conçu pour être la vitrine internationale de la DER/FJ et pour accueillir des start-up étrangères souhaitant se lancer au Sénégal, voire dans la sous-région. À l’instar de La Factory, fondée par le Marocain Mehdi Alaoui, d’ores et déjà hébergée au sein du D-Hub.

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Pour renforcer cette dimension internationale. Les équipes de la DER/FJ ont lancé en février dernier, un « fonds diaspora » dans lequel les Sénégalais de l’étranger pourront investir ou bénéficier de financements afin de revenir entreprendre dans le pays. « Le fonds est déjà doté de 4,5 millions d’euros apportés par la DER/FJ. Nous souhaitons lever 45 millions d’euros d’ici à cinq ans », conclut Mame Aby Seye.

« Être chrétien ne relève pas du désir sublime de donner sa vie dans un instant grandiose » 

 
  • Jean de Saint-CheronEssayiste, chroniqueur pour La Croix

Jean de Saint-Cheron revient pour sa première chronique hebdomadaire dans La Croix sur la mort en « martyre de l’amour » de saint Jean Baptiste, célébré ce 29 août. Un récit qui interpelle le croyant contemporain : être chrétien, serait-ce souhaiter se faire couper la tête ?

  • Jean de Saint-Cheron, 

 

« Être chrétien ne relève pas du désir sublime de donner sa vie dans un instant grandiose »
 
Jean de Saint-Cheron.CHRISTOPHER EVANS POUR LA CROIX

Se faire décapiter parce qu’une danse lascive est montée à la tête d’un vieux despote qui n’a pas osé décevoir sa bande d’amis éméchés – ni la jolie fille à qui il avait promis n’importe quoi –, est une mort bête. Personne ne la souhaite. C’est ce meurtre grotesque, pourtant, que l’Église célèbre le 29 août, « mémoire du martyre de saint Jean Baptiste ». Le plus grand des enfants des hommes achève sa vie terrestre au terme d’une scène de débauche, victime de la fureur d’une femme vexée et de la lâcheté d’un roi contrarié (cf. Mc 6, 17-29). Martyre signifiant témoignage, de quoi une telle aberration peut-elle bien témoigner ?

Car, sur ce point, les choses sont claires : qu’il y ait décollation ne suffit pas à ce qu’il y ait martyre. Et que l’assassiné soit saint ne suffit pas non plus. Car pour qu’il y ait témoignage, il faut que le meurtrier s’en soit délibérément pris à la noble cause pour laquelle le martyr était prêt à mourir (par exemple la foi). Et à moins d’avoir perdu la tête comme le pauvre Didi pressé de raccourcir Tintin pour qu’il puisse « trouver la voie » (1), personne ne choisit d’être témoin de l’absurde : la mort du martyr doit être riche de sens.

Amour authentique

 

Or, au jour de sa décapitation, le Précurseur n’est pas immédiatement témoin du Dieu d’Israël. Il meurt parce qu’Hérodiade, qui a trahi son mari Philippe en rejoignant la couche et le trône d’Hérode, ne supporte pas la parole prophétique qui conteste l’union illégitime : « Tu n’as pas le droit de prendre la femme de ton frère. » (Car pour couronner le tout, l’adultère que dénonce Jean Baptiste est un quasi-inceste, ou inceste par alliance, puisque Philippe, l’époux d’Hérodiade, est le propre frère d’Hérode.)

 

« Être chrétien ne relève pas du désir sublime de donner sa vie dans un instant grandiose »

C’est donc moins directement en haine de la foi qu’est tué Jean qu’en haine de la loi de l’amour telle qu’elle s’exprime dans la fidélité des époux et dans la pureté du mariage. Jean Baptiste est un martyr de l’amour authentique.

On peut presque toujours trouver des raisons ethniques, politiques ou économiques à la violence religieuse. Mais ce qu’enseigne la mort de Jean Baptiste, c’est que depuis la Genèse, l’amour dérange les hommes en leur égoïsme, contrecarrant leurs projets de domination ou de jouissance. Et qu’avec la force des armes, ils ne pensent qu’à le faire taire. Le président du Nicaragua Daniel Ortega s’illustre particulièrement, ces dernières semaines, dans la haine du christianisme. Mourant les mains nues, les martyrs de notre temps (ils sont nombreux, en Orient, en Afrique ou ailleurs) sont bien souvent les témoins non de luttes identitaires, mais du Dieu auquel croyait Jean Baptiste. Et leur destin nous impressionne.

Vivre le commandement de l’amour

Pour témoigner de l’amour, faut-il chercher pour autant à se faire couper la tête ? La Mère prieure du Dialogue des carmélites de Bernanos (l’histoire est vraie de ces seize religieuses assassinées en haine de la foi et de la vie monastique sur ordre du Tribunal révolutionnaire) appelait ses filles à la vigilance : « Méfions-nous de tout ce qui pourrait nous détourner de la prière, méfions-nous même du martyre. La prière est un devoir, le martyre est une récompense. » Croyant en la force de la prière, c’est ainsi qu’elles avaient choisi d’aimer.

Être chrétien ne relève pas du désir sublime de donner sa vie dans un instant grandiose, mais d’abord de vivre le commandement de l’amour dans ce qu’il a de plus ingrat, de plus caché, de moins illustre. « Avant de mourir par le glaive, mourons à coups d’épingles », disait la petite Thérèse. Phrase terrible, qui est aussi un encouragement, une promesse que nous pouvons être martyr aujourd’hui même, à notre place, si nous choisissons d’aimer.

Diplômé de Sciences Po Paris et de la Sorbonne, Jean de Saint-Cheron s’est fait connaître l’an dernier avec son essai Les Bons Chrétiens (Salvator). Il y bouscule les catholiques français, et leurs aptitudes pour les querelles intestines qui leur font courir le risque de perdre de vue l’essentiel de la foi. Directeur de cabinet du recteur de l’Institut catholique de Paris, il donne aussi un cours de littérature et collabore à la revue Magnificat. À partir du 29 août, il livre une chronique hebdomadaire dans La Croix.

(1) Cf. Le Lotus bleu.

« Salman Rushdie n’est pas une pensée, un livre ou une idée, c’est un homme » 

  • Ayyam SureauPhilosophe, chroniqueuse pour La Croix

La philosophe Ayyam Sureau inaugure sa chronique hebdomadaire dans La Croix en signant une critique de l’idée qu’en attaquant l’écrivain Salman Rushdie, son agresseur frapperait la liberté d’expression.

  • Ayyam Sureau, 
« Salman Rushdie n’est pas une pensée, un livre ou une idée, c’est un homme »
 
L’écrivain Salman Rushdie. JOEL SAGET/AFP

On ne sait pas ce que pense un meurtrier au moment de se précipiter sur une scène pour poignarder un homme inconnu de lui. Le plus probable est qu’il ne pense pas. En tuant son auteur, il croit supprimer les effets immatériels d’une œuvre. Peut-être n’est-ce pas du sang qu’il voit couler de la gorge de sa victime, mais de l’encre. Il imagine égorger une pensée, éventrer un livre, supprimer des idées. Il en est convaincu au point de plaider « non coupable » d’une tentative de meurtre.

Cependant, Salman Rushdie n’est pas une pensée, un livre ou une idée. C’est un homme. L’attaque dont il a fait l’objet, une tentative de meurtre. L’assaillant s’est servi d’un couteau pour supprimer un écrivain. Si le crime dont il accuse Salman Rushdie n’existe que dans l’imagination des défenseurs auto-proclamés de l’islam, la tentative de meurtre, elle, n’a rien de symbolique. C’est pourquoi je m’étonne des formules répétées à l’envi, selon lesquelles en s’attaquant à Salman Rushdie, l’assaillant frappait la liberté d’expression, en lui incarnée.

Personne n’a tué « Charlie »

De telles affirmations ne viennent-elles pas corroborer les convictions de l’assaillant ? En cherchant à dénoncer un crime, ces formules ne reprennent-elles pas, mais pour le compte du camp adverse, le nôtre, la logique barbare qui prétend tuer des idées en s’attaquant à ceux qui les expriment ? « On a tué Charlie Hebdo », criait aussi un homme masqué, arme au poing, convaincu d’avoir réglé son compte au libre exercice de la satire. Si Cabu, Elsa Cayat, Wolinski et tant d’autres ne sont plus, Charlie Hebdo, le journal, est toujours dans les kiosques. Personne n’a tué Charlie.

Salman Rushdie, en voie de rétablissement, souffre encore de ses blessures physiques. Il souffre depuis maintenant trente-trois ans d’un détournement radical de son destin littéraire, de l’effacement, de presque toutes les mémoires, que la reconnaissance de son talent d’écrivain ne devait rien à la fatwa d’un ayatollah fanatique.

Un romancier reconnu

Voici un auteur qui, dès 1981, pour son roman Les Enfants de minuit, recevait le Booker Prize, l’un des plus importants prix littéraires pour la littérature anglo-saxonne et le légendaire James Tait Black Memorial Prize, un prix qui a été attribué, depuis sa création en 1919, à D. H. Lawrence, Graham Greene, Evelyn Waugh, Aldous Huxley, Lawrence Durrell, Doris Lessing, Nadine Gordimer… Lorsque Rushdie reçoit ces distinctions, il a 34 ans et la vie devant lui pour tenir les promesses d’un romancier déjà reconnu comme l’un des plus notables de son temps.

Imaginer que la liberté d’expression a été touchée en la personne de Salman Rushdie ne revient-il pas à renforcer les convictions de nos ennemis au lieu de les combattre, à leur donner un sérieux motif de se réjouir et de recommencer ?

La liberté n’a pas saigné

Non, la liberté d’expression n’a pas été touchée, ni au cou, ni au ventre. La liberté n’a pas saigné, elle n’a pas été emmenée à l’hôpital pour y être soignée. Elle ne souffrira pas des séquelles d’un assaut ignoble perpétré par un pauvre type.

En lisant les déclarations de solidarité qui ont fusé après l’attaque contre Salman Rushdie, on pouvait ne pas comprendre clairement qu’il s’agissait d’une attaque contre sa personne. On pouvait croire, surtout par les temps qui courent, qu’un imbécile avait déboulonné un buste de l’écrivain, ou brûlé son effigie, ou que Rushdie avait été prié de démissionner d’un comité pour avoir tenu un propos inconvenant, ou encore que ses œuvres avaient été supprimées d’un programme scolaire. La liberté d’écrire, de dire et de penser autrement, n’est-elle pas frappée tous les jours par les petits tyrans orthodoxes que nous sommes devenus ? Mais seuls les fanatiques nourrissent l’espoir aussi niais que cruel d’atteindre la liberté elle-même en tuant une personne qui l’exerce. C’est leur rendre un service trop grand que de penser comme eux.

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Ayyam Sureau est philosophe. Après de nombreuses années au sein de la division de la philosophie à l’Unesco, elle a fondé l’Association Pierre-Claver. Cette dernière travaille depuis 2008 à une meilleure intégration des réfugiés statutaires à la société française. À partir du 29 août, elle tiendra une chronique hebdomadaire dans les pages « À Vif » de La Croix le lundi.

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Les informations sur nos maisons de formation datent de quelques années, et nous avons demandé aux responsables de ces maisons de nous donner des nouvelles plus récentes.
La première réponse reçue vient de Samagan, le noviciat près de Bobo-Dioulasso (lire la suite)

 

La deuxième réponse nous a été donnée par la "Maison Lavigerie", notre maison de formation à la périphérie de Ouagadougou, où les candidats ont leurs trois premières années de formation (lire la suite)