Justice et Paix

" Je suis homme, l'injustice envers d'autres hommes révolte mon coeur. Je suis homme, l'oppression indigne ma nature. Je suis homme, les cruautés contre un si grand nombre de mes semblables ne m'inspirent que de l'horreur. Je suis homme et ce que je voudrais que l'on fit pour me rendre la liberté, l'honneur, les liens sacrés de la famille, je veux le faire pour rendre aux fils de ces peuples l'honneur, la liberté, la dignité. " (Cardinal Lavigerie, Conférence sur l'esclavage africain, Rome, église du Gesù)

 

NOS ENGAGEMENTS POUR LA JUSTICE T LA PAIX
S'EXPRIMENT DE DIFFÉRENTES MANIÈRES :

En vivant proches des pauvres, partageant leur vie.
Dans les lieux de fractures sociales où la dignité n'est pas respectée.
Dans les communautés de base où chaque personne est responsable et travaille pour le bien commun.
Dans les forums internationaux pour que les décisions prises ne laissent personne en marge.

Dans cette rubrique, nous aborderons différents engagements des Missionnaires d'Afrique, en particulier notre présence auprès des enfants de la rue à Ouagadougou et la défense du monde paysan.

 

Burkina Faso : une liberté de la presse non sans ambiguïté

Après des menaces contre des journalistes, la junte burkinabè d’Ibrahim Traoré et ses soutiens soufflent respectivement le froid et le chaud.

Mis à jour le 7 décembre 2022 à 15:09
 

 

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Par Damien Glez

 Dessinateur et éditorialiste franco-burkinabè.

 

 

« Si je devais être un mort de plus, alors qu’il en soit ainsi. » Dans un Burkina Faso qui s’essaie à une outrance verbale aux accents maliens, Newton Ahmed Barry emploie, lui, des mots lourds d’expérience. En décembre 1998, après l’assassinat du journaliste Norbert Zongo, le confrère reprenait, avec d’autres, le flambeau de l’hebdomadaire L’indépendant, voué à l’extinction. Poil à gratter plus ou moins corrosif des différents régimes qui se succéderont, voilà Barry la cible récente d’appels « à la violence physique, au saccage des biens, jusqu’au meurtre » que le gouvernement s’est empressé de « condamner fermement et sans ambiguïté ».

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Culte de la personnalité

Sur les réseaux sociaux, les indélicats justifient pourtant leurs outrances par une adhésion inconditionnelle à la transition dirigée par un Ibrahim « IB » Traoré sujet d’un culte certain de la personnalité. Le « crime » de Newton Ahmed Barry ? Avoir dénoncé la violation de la loi que constitue la récente suspension de Radio France Internationale (RFI), interruption qui ne pouvait être légalement prononcée que par le Conseil supérieur de la Communication (CSC), organe de régulation des médias à qui le pays doit en partie son bon classement en matière de liberté de la presse.

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Condamnation gouvernementale « sans ambiguïté » ? C’est justement un certain flou qui entoure l’action de la junte actuelle, sankariste dans la posture, certes, mais pas au point d’assumer l’état d’exception mis en place par le révolutionnaire des années 1980. Si la Constitution, la justice et la liberté de presse sont les trois mamelles de la République, que dire du double régime propulsé par le Mouvement patriotique pour la sauvegarde et la restauration, un MPSR qui aime à dire qu’il a, par deux fois, rétabli la quatrième des Républiques burkinabè ?

République ou état d’exception ?

Lors de l’investiture du lieutenant-colonel Damiba, puis de celle du capitaine Traoré, les circonvolutions rhétoriques du Conseil constitutionnel n’ont pas convaincu. Pendant le séjour de Blaise Compaoré au Faso, sous le MPSR 1, la justice et les forces de l’ordre n’ont pas pu exécuter la sentence contre l’ancien président. Et voilà que c’est la liberté de la presse qui est mise à mal, cette fois par le « MPSR 2 ».

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République ou état d’exception ? La fin de semaine enseignera si les manifestations organisées par le Collectif des leaders panafricains (CLP) et la Fédération des mouvements panafricains du Burkina Faso (FMPBF) –notamment contre les « médias impérialistes déstabilisateurs mensongers » – ont été validées par les autorités, encadrées par les forces de l’ordre et couvertes médiatiquement en toute sérénité.

À sa nomination, l’actuel Premier ministre Appolinaire Kyelem de Tembela suggérait aux batteurs de bitume d’engager leur énergie « au front ». Mais si l’on en croit Newton Ahmed Barry, qui constate qu’il « est interdit de critiquer IB et de contester ses décisions », il semble bien y avoir un front dans le front.

Guinée: l’ex-Premier ministre Kassory Fofana reste en prison malgré une remise en liberté

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Plus de 180 personnalités de l’ancien gouvernement d'Alpha Condé sont dans le viseur de la junte guinéenne. Parmi eux, l'ancien Premier ministre Ibrahima Kassory Fofana, en détention préventive depuis avril. Il reste en prison malgré la quatrième mise en liberté provisoire depuis son arrestation, pour détournements de deniers publics, corruption d'agents publics, blanchiment de capitaux et enrichissement illicite, selon une ordonnance qui est parvenue vendredi 2 décembre.

Il y a deux jours, la chambre de d'instruction de la Cour spéciale de répression des infractions économiques et financières (Crief) décide de mettre en liberté provisoire l'ex-Premier ministre guinéen moyennant un contrôle judiciaire très strict. Il doit notamment se présenter au greffe de la chambre chaque mardi, ne pas sortir des limites de Conakry sans autorisation, ou encore déposer une somme de 320 000 euros en guise de caution.

Et pour justifier cette décision, les trois juges de cette cour mettent en avant notamment le fait qu'une commission rogatoire n'a découvert aucun élément nouveau qui incrimine Kassory Fofana. De plus, que les conditions pour une détention provisoire n'étaient pas remplie ou le fait que son état de santé l'exposait à des risques graves.

Mais la joie des proches du dernier Premier ministre d’Alpha Condé a été de courte durée. Le procureur près la Cour des infractions économiques et financières Aly Touré a fait appel devant la Chambre de contrôle dès vendredi matin, ce qui est suspensif de la décision de mise en liberté provisoire d'Ibrahima Kassory Fofana, au grand dam de sa défense.

« C'est la quatrième mise en liberté que nous obtenons devant la cour depuis huit mois et à chaque fois, le procureur s'y oppose alors qu'il n'a pas apporté la moindre preuve de détournement de la part de notre client, a dénoncé Sidiki Bérété, un de ses avocats. C'est de la séquestration, c'est un acharnement politique », a-t-il fustigé.23

Le procureur Aly Touré que nous avons tenté de joindre à plusieurs reprises vendredi soir ne répondait au téléphone.

► À lire aussi : Corruption: l'ex-président Alpha Condé et 187 personnalités dans le viseur des autorités en Guinée

Burkina: les civils craignent des représailles après les menaces du Jnim contre les VDP

 

Alors que la campagne de recrutement pour les Volontaires pour la défense de la patrie (VDP) a connu un succès, les civils y prenant part risquent d’en payer le prix. En début de semaine, les jihadistes du Groupe de soutien à l'Islam et aux musulmans (Jnim) ont menacé, dans une vidéo publiée en début de semaine, de s’attaquer aux villages des nouveaux VDP, au nombre de 90 000 selon les chiffres du gouvernement.

 

Dans la vidéo, le Groupe de soutien à l'Islam et aux musulmans (Jnim) prévient: les civils qui aideront les autorités mettront en danger leurs villages. Le groupe terroriste annonce la poursuite du blocus des villes du nord du pays, ainsi que son extension au reste du territoire. Des menaces prises au sérieux par Binta Sidibe Gascon, vice-présidente de l'observatoire Kisal, une ONG présente dans le Sahel :

« Il y a quelques jours, quand même, des jeunes ont été arrêtés sur l’axe de Fada par des terroristes, parce qu’on les accusait d’avoir répondu au recrutement des VDP. Jusque-là, les attaquent étaient essentiellement sur des symboles de l’État. Mais là, ils vont s’en prendre aux civiles. Le tout-militaire ne peut pas fonctionner, il faut vraiment s’attaquer aux causes profondes de cette crise sahélienne, aller vers des projets de développement, aller vers de la discussion, du dialogue, dans des zones où l’État est complètement absent. »

Pour Jules César Wangre, président de l'Union citoyenne pour le changement - une organisation de la société civile -, les VDP représentent une solution innovante pour lutter contre le terrorisme. Le reste n'est qu'intimidation :

« Il y a des civils qui avaient été massacrés avant que les VDP ne soient enrôlés. Donc cette question, sous cet angle, ne tient pas beaucoup. Les intimidations ne marchent pas et ne peuvent pas amener les uns et les autres à renoncer à la reconquête du territoire national. Le régime qui est là y est pour expérimenter des nouvelles façons d’approcher cette guerre, qui est asymétrique. »

Contactés par RFI, ni l'État-major, ni le porte-parole du gouvernement burkinabè n'ont donné suite à notre requête.

 À lire aussi: Plus de 5700 écoles fermées au Burkina Faso à cause de l'insécurité

Peine de mort en Afrique : quels sont les pays qui exécutent le plus ?

Égypte, Nigeria, Soudan… Malgré les quelques avancées du camp abolitionniste, la peine capitale reste largement répandue sur le continent. Alors que 49 personnes viennent d’être condamnées à mort en Algérie, Jeune Afrique fait le point sur la situation en infographies.

Mis à jour le 2 décembre 2022 à 12:00
 

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Le nombre de pays ne pratiquant plus la peine de mort est en progression en Afrique. © MONTAGE JA : ADOBESTOCK

 

 

C’est un sombre mois de novembre qui s’achève pour les abolitionnistes. Alors que se déroulait, à la mi-novembre à Berlin, le 8e Congrès mondial contre la peine de mort, son recours a connu une inquiétante recrudescence. En Arabie saoudite, la peine capitale a été appliquée presque quotidiennement depuis le 10 novembre. En moins d’un mois, au moins dix-sept personnes ont été exécutées par le régime de Riyad (la majorité pour des infractions liées à la drogue). De leur côté, les autorités iraniennes ont condamné 21 personnes dans le cadre de « procès fictifs » destinés, selon Amnesty International, « à intimider les participants au soulèvement populaire » qui secoue le pays depuis septembre.

43 DES 54 PAYS AFRICAINS N’ONT PLUS SIGNÉ D’ORDRE D’EXÉCUTION DEPUIS 2010

L’Afrique n’est pas en reste. Le 24 novembre, en Algérie, 49 personnes ont été condamnées à mort  pour avoir participé au lynchage mortel, en août 2021, de Djamel Bensmaïl, accusé à tort de pyromanie alors qu’il était venu aider à lutter contre les incendies qui ravageaient la Kabylie à cette période.

À LIREAlgérie : peine de mort requise contre les assassins de Djamel Bensmail

Pourtant, ces dernières années, sur le continent, la tendance est plutôt portée par le camp abolitionniste, rejoint en 2022 par la Centrafrique et la Guinée équatoriale. En outre, si la peine capitale est encore inscrite dans le code pénal d’une trentaine de pays, elle n’est généralement plus appliquée (depuis 1993 dans le cas de l’Algérie). La peine est presque systématiquement commuée en condamnation à perpétuité. Ainsi, 43 des 54 pays africains n’ont plus signé d’ordre d’exécution depuis 2010.

116 personnes pendues ou fusillées

Malgré ces avancées significatives, au moins 116 personnes ont été pendues ou fusillées en Afrique en 2021, très souvent à la suite de procès opaques et entachés d’irrégularités. Le nombre de condamnations à mort prononcées cette année-là a, lui, augmenté de 22 % – plus de 800 –, notamment à cause d’une forte hausse en Mauritanie et en RDC.

À LIRERDC – Experts de l’ONU assassinés : 51 condamnations à mort

Ces condamnations sont régulièrement requises pour des crimes non homicides, tels que le viol ou le blasphème, qui n’entrent pas dans les catégories des « crimes les plus graves » définies par le droit international. En juillet 2022, un tribunal de la charia de l’État de Bauchi, dans le nord du Nigeria, a ainsi condamné trois hommes, âgés de 20, 30 et 70 ans, à la lapidation pour homosexualité.

Que dit la loi dans les pays africains ? Et la réalité ? Dans quels États exécutions ont eu lieu ? Qui sont les condamnés ? Décryptage en infographies.

 

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VIH : en Afrique, la majorité des moins de 20 ans atteints restent sans traitement

Analyse 

À l’occasion de la Journée mondiale de lutte contre le sida, le 1er décembre, plusieurs ONG s’alarment d’un écart croissant dans les traitements entre les enfants et les adultes, notamment au Cameroun et au Malawi.

  • Sophie Alary, 
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VIH : en Afrique, la majorité des moins de 20 ans atteints restent sans traitement
 
En 2021, 87 % des 2,8 millions d’enfants et adolescents de moins de 20 ans porteurs du VIH dans le monde vivent sur le continent africain.DAI KUROKAWA/EPA

« La situation en matière de lutte contre le sida est figée depuis trois ansdes enfants et des adolescents passent à travers les mailles du filet en raison de notre incapacité collective à les soigner » : Anurita Bains, responsable adjointe de l’Unicef pour le sida, tire la sonnette d’alarme. En 2021, 2,8 millions d’enfants et adolescents de moins de 20 ans sont porteurs du VIH dans le monde, et 87 % d’entre eux vivent sur le continent africain.

Pour cette nouvelle Journée mondiale de lutte contre le sida, le mot d’ordre est « #Egaliser ». Si les avancées en matière de prévention et de traitement du VIH pour les enfants et les adolescents ont stagné ces dernières années, c’est à la fois parce que les accès aux services de soins ont été perturbés, que les écoles ont fermé avec la pandémie de Covid-19, que la pauvreté s’est aggravée, mais aussi « parce qu’il existe un écart croissant entre les enfants et les adultes dans les traitements », alerte l’Unicef.

Les moins de 20 ans échappent aux soins

Vingt-cinq ans après l’arrivée des trithérapies, les enfants sont laissés-pour-compte : seuls un peu plus de la moitié des moins de 20 ans (52 %) sont aujourd’hui traités à l’échelle mondiale. Au Cameroun, explique le docteur Abdelkader Bacha, responsable du programme VIH/sida pour l’Unicef, « ce sont deux tiers des enfants dépistés qui échappent au traitement et qui, pour beaucoup, ne survivront pas ». En effet, l’état de santé des très jeunes enfants porteurs du virus se dégrade rapidement s’ils ne sont pas traités dès la naissance. Infections répétées, pneumonies, anémies : « La plupart meurent entre 2 et 4 ans ».

Au Malawi, plus d’un habitant sur vingt est porteur du virus, et les jeunes restent aussi l’angle mort des politiques de lutte contre l’épidémie de sida. Dans un district du sud-est du pays, Médecins sans frontières (MSF), qui traite le VIH depuis de longues années, a passé le relais en 2015 au ministère de la santé. Mais l’ONG a constaté à ce moment-là que les patients les plus jeunes de sa file active gardaient une charge virale – la mesure du virus dans le sang – élevée.

Des traitements inadaptés aux petits

Au Malawi comme au Cameroun, si les traitements pour les adultes ont beaucoup évolué ces dernières années, ils sont longtemps restés inadaptés aux enfants. En raison d’un système immunitaire encore immature, ces derniers ont développé des résistances aux médicaments. Il a fallu trouver des traitements adéquats, que les sociétés pharmaceutiques ont tardé à rendre accessibles au marché mondial. « Au Malawi, les nourrissons et les jeunes enfants n’ont eu accès aux antirétroviraux pédiatriques que l’année dernière », précise Marion Péchayre, cheffe de mission pour MSF dans le pays.

La situation se complexifie pour les adolescents et les jeunes adultes. Au Malawi, « 30 % des patients entre 10 et 19 ans sont en échec thérapeutique, c’est énorme », poursuit Marion Péchayre. Les enfants qui entament leur puberté doivent composer avec le fait d’être atteints par une maladie sexuellement transmissible, qui doit aussi s’accompagner. « À l’adolescence, certains se rebellent ; si leur charge virale est maîtrisée, ils ne se voient pas forcément malades et peuvent donc décider d’arrêter leur traitement, alors que leur système immunitaire reste fragile. »

Initiatives prometteuses

Il fallait imaginer une solution plus spécifique : MSF a mis en place en 2018 les Teens clubs, des lieux qui proposent des soins adaptés mais aussi un soutien psychologique, parfois social, et la possibilité donnée aux adolescents de partager leur expérience avec leurs pairs. « Entre eux,ils peuvent dédramatiser la maladie et mieux s’armer pour affronter une société qui reste très conservatrice ».

Au Cameroun, selon une étude parue en 2018, neuf personnes sur dix dépistées dans la tranche d’âge des 15-24 ans sont des filles. Là aussi, il a fallu accélérer la réponse. L’Unicef a développé le programme Jeunes 3+1 : des adolescentes témoignent dans les écoles, les communautés et les centres de santé, mais aussi à travers une plateforme digitale, pour cibler un maximum de personnes et augmenter le dépistage.

Ces programmes s’inscrivent dans la durée, mais les résultats sont déjà encourageants. « En 2017, 30 % des jeunes de notre file active avaient une charge virale plus importante que la normale, en 2022 ils ne sont plus que 7 % », indique Marion Peychayre. MSF a développé depuis des projets similaires en Ouganda et au Kenya. Reste à garantir aux autorités les financements nécessaires pour poursuivre ce projet et le développer dans le reste du pays. « Avec des ressources pour intensifier nos programmes, nous pouvons mettre fin au sida chez les enfants et les adolescents », affirme l’Unicef.