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Mali: visite du médiateur de la Cédéao pour faire le point sur la transition

En prélude au sommet des chefs d’état de la Communauté économique des états de l’Afrique de l’Ouest prévu le 4 décembre à Abuja, l’ancien président du Nigéria Goodluck Jonathan, médiateur pour le Mali est arrivé mardi 29 novembre à Bamako. Avant de repartir mercredi matin, il a rencontré le président de la transition, le colonel Assimi Goïta, peu après avoir vu les membres du gouvernement. Cela dans le but de faire le point sur le processus de transition.

 

Avec notre correspondant régional, Serge Daniel

Au cours de son séjour, à Bamako, le médiateur de la Communauté économique des états de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao) pour le Mali Goodluck Jonathan a eu une importante séance de travail avec des membres du gouvernement. La partie malienne a expliqué à l’hôte du jour l’évolution de la transition et sa volonté de respecter les 24 mois qui doivent déboucher sur des élections présidentielles libres et transparentes.

« Nous sommes d’accord qu’il y a eu des efforts », a reconnu devant la presse Goodluck Jonathan. Mais il a tout de suite ajouté, sans donner des détails, qu’il y a des domaines dans lesquelles le gouvernement malien doit travailler d’arrache-pied afin de respecter ses engagements.

Dans une déclaration ce week-end, 51 partis politiques maliens se sont inquiétés d’un éventuel glissement du programme présenté à la Cédéao pour un retour à l’ordre constitutionnel.

Outre le dossier de la transition malienne, l’affaire des 46 militaires ivoiriens détenus à Bamako depuis le 10 juillet sera l’un des sujets à l’ordre du jour du prochain sommet des chefs d’états de la Cédéao à Abuja. Ce sujet a été également abordé par Goodluck Jonathan avec ses interlocuteurs, d’après nos informations.

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Sénégal : une armée pas comme les autres ?

Dakar investit sans compter dans sa défense nationale. Ce qui fait de sa force l’une des plus structurées de la sous-région… Et un partenaire privilégié pour Paris.

Par  - à Dakar
Mis à jour le 28 novembre 2022 à 17:36
 
 

 

 armee senegal

 

 

Des commandos sénégalais lors d’un exercice d’entraînement international à Saint-Louis, le 12 février 2016. © SERGEY PONOMAREV/The New York Times-REDUX-REA

 

 

Six mois pour inventer une nouvelle « stratégie de la France en Afrique ». Lorsque Emmanuel Macron officialise, le 9 novembre dernier, le départ définitif de l’opération Barkhane du Mali, le chef de l’État annonce aussi l’évolution de la présence française au Sahel et en Afrique de l’Ouest. Une « évidence » et une « conséquence à tirer » des interventions militaires hexagonales dans la sous-région. Dans le quartier Frédéric Geille de Ouakam, base aérienne de l’armée française pendant la colonisation, les éléments français au Sénégal (EFS) suivent les déclarations présidentielles avec attention. Les militaires positionnés à Dakar s’interrogent : vont-ils eux aussi devoir quitter le pays et abandonner leur mission de coopération avec leurs homologues ouest-africains ?

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Au même moment, à l’Assemblée nationale, le député Guy Marius Sagna interpelle le ministre des Forces armées, Sidiki Kaba. Le militant anti-impérialiste fraîchement élu s’interroge : « Monsieur le ministre, vous avez dit que « l’armée sénégalaise [avait] les capacités de faire face aux différentes menaces ». Je pense comme vous. Mais alors, que fait l’armée française, une armée d’occupation, au Sénégal ? » « L’armée française n’est là que pour des exercices, vous ne les voyez pas sur le terrain. Tout est fait par l’armée sénégalaise », lui répond Sidiki Kaba. La réponse n’est pas tout à fait exacte : à Dakar, les EFS sont chargés d’assurer la coopération de l’armée française avec les pays de la Cedeao et la Mauritanie – coopération qui comprend une composante de formation.

Partenaire privilégié

Au sortir des indépendances, Dakar a tout de suite constitué une base stratégique, alors que l’accord de défense franco-sénégalais assurait à Paris le maintien de sa présence militaire et de son influence dans le pays. Depuis la révision de l’accord, en 2011, cette présence et les missions françaises se sont réduites (1 200 éléments alors, contre 450 actuellement ; dissolution du 23e bataillon d’infanterie de marine)… Mais les relations militaires entre les deux pays sont toujours au beau fixe. « Lorsque nous réalisons des exercices communs, les choses se déroulent de manière très fluide, car nous parlons le même langage », glisse un gradé français.

Aux dernières heures de la colonisation et jusqu’en 1965, une bonne partie de l’élite militaire sénégalaise est passée par l’École de formation des officiers ressortissants des territoires d’outre-mer (Efortom, qui deviendra, en 1959, l’École de formation des officiers du régime transitoire des troupes de marine, située à Fréjus, dans le sud de la France). « Le Sénégal a eu la part belle de ces quotas », précise le général Babacar GayeL’ancien chef d’état-major sénégalais, un temps responsable de la Minusca, la mission de l’ONU en Centrafrique, rappelle le « statut particulier » du Sénégal d’alors au regard de l’ancienne puissance colonisatrice : citoyenneté française accordée aux résidents des quatre communes (Saint-Louis, Gorée, Rufisque et Dakar), importance stratégique de la capitale, et maintien d’une relation privilégiée avec le chef de l’État, Léopold Sédar Senghor. La fameuse devise de l’armée sénégalaise, « on nous tue, on ne nous déshonore pas », est en réalité inspirée d’une phrase du général Faidherbe, citée par le président lors d’une cérémonie de vœux à l’armée, en 1977.

À LIRESénégal : la part d’ombre de Senghor

Le premier chef de l’État sénégalais s’efforce également de renforcer une armée qu’il veut républicaine avant tout. En 1962, lorsque la crise gronde entre Senghor et son président du conseil, Mamadou Dia, le général Jean Alfred Diallo sera appelé à contenir les dissensions entre la gendarmerie et la garde républicaine, qui soutenait alors Mamadou Dia. « L’armée a toujours été consciente de ses responsabilités, habitée par l’intérêt général. Le recrutement en ses rangs s’est fait sur la base des compétences et de la reconnaissance des pairs, assure le général Babacar Gaye. Les chefs d’État se sont par ailleurs toujours refusés à s’entourer de gardes prétoriennes fondées sur des critères ethniques. »

« L’armée sénégalaise est ambitieuse, elle sait faire ce que peu sont capables de faire. Elle est probablement la plus structurée de la sous-région aujourd’hui », assure un représentant de l’armée française à Dakar. « C’est probablement la seule armée républicaine dans la zone, ajoute une autre source militaire. Ses cadres sont très bien formés, et elle a bénéficié d’un développement continu. »

Premier contributeur francophone à l’ONU

L’armée sénégalaise est également très présente sur les théâtres d’actions extérieures. Le pays est le premier contributeur francophone des opérations de maintien de la paix des Nations unies. Des expériences qui forment les soldats, leur permettent d’apprendre à manier des équipements de pointe et d’évoluer dans des environnements internationaux. Et qui participent également au « rayonnement du pays », souligne le général Babacar Gaye : « Le Conseil de sécurité ne peut pas ne pas distinguer l’apport que représente le Sénégal au niveau des opérations de maintien de la paix. »

Depuis son arrivée au pouvoir, en 2012, Macky Sall n’a pas lésiné sur les moyens pour renforcer son armée et préparer au mieux les jambaars (« guerriers ») nationaux. « Avec Macky Sall, nous avons rattrapé beaucoup de retard : mise à niveau du camp militaire, soutien au développement des effectifs, renforcement de la puissance de feu, adaptation aux menaces et aux progrès techniques… », insiste le général Gaye. « L’armée fait partie des institutions intouchables, c’est le ciment de notre cohésion nationale. Elle est la seule chose qui ne se discute pas. Son budget est toujours voté sans discussions au sein de l’Assemblée », souligne un proche de Macky Sall.

Le chef de l’État a d’ailleurs prévu de passer de 15 000 à plus de 30 000 hommes entre 2020 et 2025. « C’est un défi énorme, remarque un spécialiste des questions de défense. Doubler les effectifs, c’est aussi doubler le commandement. Pour former un colonel, il faut vingt ans… Mais le Sénégal fait en sorte de pallier les manques de ressources humaines. » Le pays vient en effet de se doter d’un institut de défense composé d’une école d’état-major et d’une école de guerre. Une manière de moins dépendre des pays extérieurs, mais aussi une façon de se positionner comme l’un des « pôles de rayonnement en matière de formation » et de renforcer son influence dans la sous-région.

Risque terroriste

Le pays ne peut de toute manière pas faire l’économie du renforcement de ses capacités, dans la perspective de la contagion jihadiste dans la sous-région, qui menace en particulier sa frontière est. Le pays vient également d’acquérir trois OPV 58 S du groupe français Piriou, des patrouilleurs océaniques chargés de lutter contre la pêche illégale et de protéger l’exploitation offshore d’hydrocarbures. « En renforçant à la fois les effectifs et le matériel, ils se préparent à toute éventualité », ajoute notre interlocuteur.

« La menace terroriste est prise en compte à tous les niveaux de la chaîne de commandement de l’armée. Que ce soit par les structures de planification des opérations de l’état-major général ou par les états-majors des différentes armées, ou encore au niveau des commandements opérationnels territoriaux », précise le chercheur Paulin Maurice Toupane.

« Ici, la menace terroriste n’est pas perçue uniquement comme une affaire de militaires, ajoute l’analyste de l’Institut d’études de sécurité (ISS). La police et la gendarmerie jouent un rôle important dans le renseignement. » La nomination à la tête du Cadre d’intervention et de coordination interministérielle des opérations de lutte anti-terroriste (Cico, qui dépend du ministère de l’Intérieur) du général Saïfoulaye Sow pourrait toutefois annoncer une plus grand mainmise de l’armée sur la lutte antiterroriste.

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À l’Est, les gendarmes qui effectuent les patrouilles frontalières bénéficient d’une formation des EFS visant à renforcer leur capacité de combat. À Dakar, 90 instructeurs de ces éléments sont chargés de conduire des formations, discutées chaque année avec les pays de la sous-région. « Certains, comme le Bénin ou la Côte d’Ivoire, sont très demandeurs. Mais le Sénégal bénéficie d’environ 30­% des formations dispensées par les EFS. Dakar estime qu’il doit être le premier servi et, dans un sens, c’est normal », concède un gradé de la base française.

Échange de renseignements

Établies par un accord de défense signé par le Sénégal et la France en 2012, les centaines d’éléments français résident à titre gracieux à Dakar, dans le camp de Ouakam, la station d’émission interarmées de Rufisque et le parc de Hann. L’accord marque la redéfinition du partenariat entre les deux pays, et définit trois objectifs de coopération dans les domaines de la sécurité et de la défense : la formation des élites militaires, le soutien au contrôle du territoire par les armées nationales, et la stabilité régionale. Les deux pays peuvent donc échanger des renseignements. Il comprend également la formation des élèves militaires dans les écoles françaises. Le traité, conclu pour une durée de cinq ans, est renouvelable « par tacite reconduction » pour cinq ans, et peut être dénoncé ou amendé dans un délai de six mois.

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« Les militaires continuent à discuter entre eux. Ils distinguent ce qu’ils font, qui est plus technique, de la chose politique. Notre présence est définie par un accord de défense bilatérale. Si le Sénégal voulait nous voir partir, il pourrait évidemment décider de réviser l’accord », souligne le gradé cité précédemment. Mais les Français veulent croire que cette coopération bilatérale et « équilibrée » est conçue pour durer.

Côte d'Ivoire: Charles Blé Goudé inscrit son retour dans l’optique de la réconciliation nationale

 
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L’ancien ministre de Laurent Gbagbo, Charles Blé Goudé, rentre en Côte d’Ivoire ce samedi 26 novembre. L’ex-leader des Jeunes Patriotes était jusque-là à La Haye, aux Pays Bas, où il avait été jugé puis acquitté par la Cour pénale internationale pour les violences post-électorales de 2010-11. Charles Blé Goudé veut un retour en toute sobriété, pour, dit-il, respecter « la mémoire de toutes les victimes de la crise ».

 

Avec notre envoyée spéciale à Abidjan, Bineta Diagne

Charles Blé Goudé veut une arrivée sobre. L’ex-leader des Jeunes Patriotes inscrit ce retour dans l’optique de la réconciliation nationale, enclenchée ces derniers mois au sein de la classe politique. Son retour a été longuement discuté avec les autorités, notamment avec le directeur de cabinet du président Alassane Ouattara. 

L’arrivée de Charles Blé Goudé a été pensée en deux temps. D’abord un accueil limité à quelques membres de sa famille et à des leaders politiques, à l’aéroport Félix Houphouët Boigny. Charles Blé Goudé rentre par un vol commercial. « Il ne passera pas par un pavillon ministériel ou présidentiel, précise Boga Sako, qui dirige son comité d’accueil. Il vient par le hall ordinaire de l’aéroport », souligne ce responsable de la société civile. Charles Blé Goudé marquera un temps de pause pour adresser un message aux Ivoiriens.

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Ensuite, Charles Blé Goudé se rend dans la commune de Yopougon. Près de 5 000 personnes sont attendues, place CP1, pour un accueil populaire, selon les organisateurs. Un moment de retrouvailles, après plusieurs années d’absence.

Rappelons que Charles Blé Goudé reste sous le coup d’une condamnation à 20 ans de prison par la justice ivoirienne, pour des faits liés à la crise post-électorale de 2010-11.

Plusieurs dizaines de soldats tchadiens tués dans une attaque de Boko Haram

 Tchad

Selon les sources, entre 20 à 40 soldats tchadiens ont été tués ce mardi 22 novembre dans la province du Lac (sud-est). Un communiqué de la présidence tchadienne évoque une attaque-surprise.

L'attaque a visé un poste avancé de l’armée qui était en train d’être installé sur l’île de Bouka Toullorom, près de Ngouboua, dans le cadre d’une réorganisation du dispositif militaire pour faire face à des jihadistes que le pouvoir disait affaibli. Les assaillants, très nombreux, ont attaqué par vagues successives. Ils sont finalement parvenus à entrer dans le poste avancé qu’ils ont détruit, avant d’emporter des armes, précisent des sources locales.

Le bilan est lourd. La présidence évoque une vingtaine de morts et des blessés dans les rangs de l’armée. D'autres sources parlent de plus de 35 tués, ainsi que d’une vingtaine de blessés et de plusieurs soldats portés disparus. Selon ces mêmes sources, les jihadistes ont également tué au moins quatre civils alors qu’ils se repliaient vers leurs repaires. Aucun bilan côté Boko Haram n’était disponible ce soir.

Cette attaque est la plus meurtrière depuis celle qui avait fait près d’une centaine de morts il y a deux ans à Bouma. Surtout, elle survient dix jours après une visite de Mahamat Idriss Deby Itno, dans la zone. Au cours de cette visite, le président de la transition avait déclaré que Boko Haram était « sérieusement affaibli », n’osait plus « attaquer frontalement l’armée » et s’adonnait désormais « au banditisme », telles que des prises d’otages.

Mahamat Idriss Deby Itno avait donc annoncé l’envoi de 600 soldats en renfort aux milliers d’autres déjà sur place, ainsi que la réorganisation des forces armées en unités plus mobiles, « pour faire face », explique Sieddick Abba, un spécialiste de la région. L'attaque de ce mardi est une façon pour ces jihadistes de lui répondre qu’ils ont encore une capacité de nuisance, alors que tout le monde les disaient en perte de vitesse, analyse le spécialiste.

Burkina Faso : le capitaine Traoré s’attaque à la réforme de l’armée

Il a pris le pouvoir en promettant de gagner la guerre contre les groupes terroristes. Depuis, le nouveau président de la transition burkinabè multiplie les annonces fortes, tant sur le fond que sur la forme.

Mis à jour le 22 novembre 2022 à 10:50

 
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Cérémonie de décoration de soldats lors du 62e anniversaire de la création de l’armée burkinabè, à Ouagadougou, le 1er novembre 2022. © Martin Demay / AFP

 

« L’armée a été infiltrée et chacun agit en fonction de certains [intérêts] politiques. À un moment donné, on a eu espoir que ça va (sic) cesser, notamment avec les événements du 24 janvier [le coup d’État contre Roch Marc Christian Kaboré, NDLR], et ça n’a pas cessé. » Le 11 novembre dernier, les mots d’Ibrahim Traoré lors d’une rencontre avec des responsables politiques et des leaders de la société civile ne sont pas passés inaperçus. 

Arrivé au pouvoir depuis moins de deux mois, par un putsch contre son prédécesseur, Paul-Henri Sandaogo Damiba, le jeune capitaine de 34 ans n’a pas épargné ses frères d’armes, leur faisant porter une partie de la responsabilité de la situation sécuritaire sur un territoire « presque perdu », a-t-il affirmé. Et d’évoquer des rivalités dans l’armée. Selon lui, les « officiers » basés « à Ouagadougou » sont responsables de semer la division alors que, dans les combats, les soldats sont « unis ».

Comme son prédécesseur, « IB », tel qu’il est surnommé, s’est arrogé le pouvoir avec une promesse centrale : celle de battre les jihadistes. Damiba a échoué à tenir parole et a été renversé huit mois seulement après son putsch. Conscient de l’épée de Damoclès qui pèse sur sa tête, Traoré fera-t-il mieux ?

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Hommes de confiance

Le soldat a en tout cas décider de réformer l’armée tous azimuts. Après avoir annoncé des recrutements de militaires et celui de 50 000 Volontaires pour la défense de la patrie (VDP), il a lancé le 14 novembre la création de six bataillons d’intervention rapide (BIR). Basés dans la garnison de Ouagadougou de façon transitoire, les BIR « peuvent être déployés en fonction des nécessités opérationnelles sur toutes l’étendue du territoire national ». Ces unités réactives et polyvalentes ont pour mission « d’intervenir, le plus vite possible et le plus avant face à toute menace ».

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C’est à des hommes de confiance qu’Ibrahim Traoré a tenu à confier ces bataillons spéciaux. À la tête du 4e, il a par exemple nommé le capitaine Farouk Azaria Sorgho, qui fut le porte-parole de la junte lors de sa prise de pouvoir, aux premiers jours d’octobre. « Tous ceux qu’il nomme étaient sur le terrain avec lui. Ce ne sont pas des bureaucrates », analyse Aly Nana, coordonnateur national du Mouvement pour la résistance populaire (MRP), une structure qui regroupe plusieurs centaines de VDP.

Conséquence directe de cette politique, la plupart des nouveaux cadres sont très jeunes, trentenaires. Ce qui n’est pas sans risque, analyse Arouna Louré, ex-député de l’Assemblée législative de transition (ALT). « Nommer des capitaines à des rôles de commandants de régions militaires est soit très courageux soit suicidaire », estime-t-il.  « Ces postes sont traditionnellement dévolus à des colonels ou à des officiers généraux. Le fait de les écarter est un signe de rupture entre les générations. »

« Restez debout »

Enfin, le 11 novembre dernier, le président de la transition, son Premier ministre, Kyélem de Tambèla Apollinaire Joachimson, et son ministre de la Défense, le colonel-major Kassoum Coulibaly, ont signé un décret rattachant le Commandement des opérations du théâtre national (COTN) à l’état-major général des armées.

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Créé en début février 2022 par Damiba et dirigé par l’un de ses proches, Yves Didier Bamouni, le COTN avait d’emblée été très critiqué pour être devenu un ministère de la Défense-bis et concentrer tous les pouvoirs. Grâce à sa réforme, Traoré entend rendre à l’état-major la place qui lui revient et ramener la concorde dans les troupes.

L’objectif est clair : prendre le dessus sur les jihadistes, comme il l’a réaffirmé, le 5 novembre dernier, devant les soldats du 14e régiment interarmes de Djibo. « Restez débout. Aucunement, nous ne devons laisser tomber ce pays. Armez-vous de courage pour ce qui va commencer bientôt », lançait-t-il à l’adresse de ceux qui venaient d’être attaqués par des terroristes, dix jours plus tôt, et à qui il avait réservé sa première visite de président.