Témoignages

 

Dix choses à savoir sur Nady Bamba, le rempart de Laurent Gbagbo

Après avoir partagé, dans l’ombre, la vie de l’ancien chef de l’État ivoirien, l’ex-journaliste est désormais sa compagne officielle. Devenue incontournable, elle joue un rôle majeur à ses côtés.

Mis à jour le 9 mars 2023 à 09:31
 

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Nady Bamba. © MONTAGE JA : ISSOUF SANOGO/AFP

 

DIX CHOSES À SAVOIR SUR – Laurent Gbagbo descend les marches de l’amphithéâtre de la fondation Félix Houphouët-Boigny à Yamoussoukro, dans le centre de la Côte d’Ivoire. Costume sombre et cravate colorée, l’ancien président assiste ce 8 février à la remise du prix pour la recherche de la paix par l’Unesco en l’honneur du père de l’indépendance ivoirienne. La présence de celui qui, il y a un peu plus d’un an encore, vivait en exil en Europe – après plusieurs années de détention et un long procès devant la Cour pénale internationale (CPI) –, est en soi un événement. Mais, alors que Gbagbo avance d’un pas prudent, une élégante silhouette le suit de près. Celle de la femme qui partage aujourd’hui sa vie, Nady Bamba. Pour l’occasion, elle porte une longue robe bleu azur. Les téléphones portables sont de sortie, immortalisent le moment. Et si elle en était la véritable attraction ?

1. Journaliste

Musulmane, originaire de Touba, dans le Nord-Ouest, le fief des Fadiga et des Bamba, Nady Bamba est diplômée de l’École française des attachés de presse (Efap). Elle se lance dans le journalisme à la fin des années 1990. Correspondante de la radio Africa N° 1 à Abidjan, elle couvre l’actualité politique et sociale.

2. Idylle secrète

C’est dans ce contexte qu’elle rencontre Laurent Gbagbo. L’amourette se mue en passion secrète. Les amants se rencontrent souvent dans un pied-à-terre situé juste en face de la maison de l’opposant, dans le quartier de la Riviera Golf, à Abidjan.

3. Années 2000

L’entourage de Gbagbo fait la connaissance de Nady Bamba lors de la transition militaire qui suit le coup d’État de décembre 1999. Son appartement du quartier populaire des 220 Logements, dans la commune d’Adjamé, sert parfois de refuge à celui qui est alors le premier opposant au régime du général Robert Gueï, après avoir été celui de Félix Houphouët-Boigny. Laurent Gbagbo se présente à l’élection présidentielle de 2000. Toujours journaliste, « Nady » couvre ce scrutin historique.

4. Une rivale nommée Simone

Après des années de militantisme, Laurent Gbagbo accède à la magistrature suprême. Pour son épouse, Simone, elle-même cadre historique du Front populaire ivoirien (FPI), c’est un moment qui fera date. Se doute-t-elle qu’elle va désormais devoir partager son homme ? Nady Bamba devient une sorte de « maîtresse » officielle. Au palais présidentiel, elle est affublée du surnom de « Petite Maman », pour éviter toute confusion avec Simone, que l’on appelle « la Vieille » ou « Maman ».

5. Raïs

En 2001, Laurent et Nady scellent leur union selon les rites coutumiers mahouka et musulman. Eugène Allou, le directeur de protocole de Gbagbo, représente ce dernier, la tradition voulant que les époux ne soient pas présents. La naissance, un an plus tard, de leur fils, David al-Raïs, provoque une cassure inévitable avec Simone, et quelques frictions au sein de la famille.

6. Discrète…

Pendant les dix années de la présidence Gbagbo, Nady demeure très discrète. Longtemps, il n’existera qu’une unique photo d’elle. Vêtue d’une robe rouge, elle a le visage couvert d’un léger voile de la même couleur et porte de larges lunettes de soleil.

7. … Mais influente

Dans l’ombre, Nady Bamba œuvre à sa manière. Elle prend la tête du groupe Cyclone, actif dans la communication, la publicité et l’événementiel, et lance en avril 2003 un quotidien, Le Temps, toujours en kiosque aujourd’hui. Le directeur général de la Petroci, Kassoum Fadiga, n’est autre que son beau-frère.

8. En campagne

Nady joue un rôle important lors de la présidentielle d’octobre 2010. Avant le premier tour, elle est chargée de superviser la campagne dans le Nord, où elle tente de mobiliser les notables locaux. Le QG de campagne, à Abidjan, est logé dans une villa lui appartenant. Quant à Cyclone, il est en contact avec les communicants d’Euro RSCG, recrutés par le camp présidentiel.

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9. Entre Bruxelles et La Haye

Après la chute du régime, en avril 2011, et le transfert de Laurent Gbagbo à La Haye, Nady Bamba s’installe à Bruxelles, où Raïs est scolarisé. Elle se rend toutes les semaines au pénitencier de Haaglanden, à Scheveningen, pour voir l’ancien président, qui y reste emprisonné jusqu’en 2019. 

10. Nouvelle madame Gbagbo

Nady Bamba est aux côtés de Laurent Gbagbo lorsqu’il regagne Abidjan en juin 2021. Depuis, elle joue auprès de lui un rôle de rempart, filtrant les demandes de rendez-vous et les appels. Une attitude protectrice qui crée un certain ressentiment parmi les fidèles historiques du Woody.

kiye2022Une réflexion de notre confrère Vincent Kiye qui vit la missison à NIoro du Sahel au Mali

 
 
Le Carême, ce temps de briser les barrières de la haine entre les peuples afin de construire l’unité du peuple de Dieu (Une réflexion du Père Vincent KIYE du 3ème dimanche de Carême A)
Textes du jour :
1ère lecture : Ex 17, 3-7
2ème lecture : Rm 5, 1-2.5-8
Évangile : Jn 4, 5-42
«Jésus lui dit : "Donne-moi à boire".»
N’est-ce pas une provocation hors-norme  de voir un juif demander de l’eau à une Samaritaine au moment où la tradition ne le leur permettait pas ! Que peut-on comprendre de la symbolique de l'eau qui revient avec insistance dans la liturgie de ce 3ème dimanche de carême, notamment dans la première lecture et dans l’évangile et surtout en ce temps de privation et de renoncement? Quel lien établir entre la problématique de l’eau dans ces deux lectures précitées et la grâce de l'amour dont le Père nous a comblés en Jésus-Christ que nous lisons dans la deuxième lecture de ce jour? Voilà des questions que nous vous proposons pour nourrir notre méditation de ce 3ème dimanche de Carême, dit dimanche de la rencontre de Jésus avec la samaritaine.
Bien-aimés dans le Seigneur, comme vous pouvez le voir, la problématique de l’eau qui revient dans la première lecture et dans l’évangile de ce 3ème dimanche de carême se pose dans des contextes très particuliers et cela nous interpelle. Elle nous présente le visage d’un Dieu qui vient au secours de son peuple qui souffre et nous invite à comprendre que le temps de Carême est un temps qui nous est donné pour transcender les conditions d’une vie spirituelle médiocre que les barrières de la haine font peser sur les enfants de Dieu; un temps de transcender les prescriptions injustes qui empêchent toute cohésion sociale entre les enfants de Dieu et retardent l’avènement d’une nouvelle humanité, fondée sur l’amour de Dieu qui a été répandu dans nos cœurs par l’Esprit Saint qui nous a été donné. C’est un temps qui nous est donné pour que comme Dieu envers le peuple d’Israël au désert aride, nous soyons nous aussi, capables d’offrir de l’eau à tous ceux et celles qui attendent de nous, un geste providentiel de Dieu pour son peuple. C’est un temps qui nous est donné pour que nous puissions approcher tous ces Samaritains de notre vie, ceux et celles que les considérations ou les prescriptions ethniques et tribales, régionales et nationales nous empêchent d’approcher. Voilà les deux épisodes énigmatiques que le Seigneur nous donne à affronter pour une vie chrétienne digne de ce nom.
Oui bien-aimés dans le Seigneur, la liturgie de ce 3ème dimanche de Carême nous invite à briser les barrières de la haine ainsi que tous ces murs que les conditions existentielles ont érigés entre nous et nos prochains. Et cela n’est possible qu’avec la force de l’amour de Dieu qui a été répandu dans nos cœurs par l’Esprit Saint. Ainsi, il n'y aura plus ni juif ni samaritain, il y aura une seule nation, un seul peuple, le peuple de Dieu.
En effet, dans la première lecture et dans l’évangile nous voyons que Dieu vient au secours de son peuple dans sa précarité existentielle. La première lecture nous relate comment dans le désert, le peuple manquant d’eau, souffrit de la soif et récrimina contre Moïse qui à son tour cria vers le Seigneur qui répondu favorablement à la souffrance du peuple. Dieu vient en aide à son peuple dans l’extrême nécessité. Même son de cloche dans l’évangile lorsque le Seigneur vient à la rencontre de cette Samaritaine. Il y pose un acte qui brise les barrières de la haine et transcende une prescription que Jésus juge incompatible à la Bonne Nouvelle qu’il est venu annoncer. Voilà une attitude à imiter pour que notre Carême ne soit pas un carême de routine mais de changement réel, qu’il soit fructueux et ait un impact réel sur notre vie, sur notre entourage.
Les juifs et les Samaritains ne se fréquentaient pas, nous rapporte l’évangile. Ce pas que Jésus fait à la rencontre de cette samaritaine est d’une grande religiosité et donne de comprendre davantage l’exigence du temps de Carême que nous traversons. Jésus conduit cette samaritaine à une nouvelle approche de la religion et de la vie et nous invite à faire de même. Allons, nous aussi, à la rencontre de ces Samaritains et samaritaines, toutes ces personnes que le poids de la tradition et de l’histoire nous ont toujours empêché de rencontrer. C’est le temps de construire l’unité du peuple de Dieu avec la grâce de l’amour de Dieu qui a été répandu dans nos cœurs par l’Esprit Saint qui nous a été donné. Amen
Le Seigneur soit avec vous !
✍🏾 Père KIYE M. Vincent, Missionnaire d’Afrique
Paroisse de Nioro du sahel dans le diocèse de Kayes
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Mahamat Idriss Déby Itno : « Nous avons sauvé le Tchad du chaos »

Des manifestations du 20 octobre 2022 aux ambitions de l’opposant Succès Masra, en passant par ses relations avec la France, celui qui fut catapulté président à la mort de son père, en avril 2021, n’élude aucune question.

Mis à jour le 28 février 2023 à 08:27

 
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Mahamat Idriss Deby Itno à Paris, le 7 février 2023. © Vincent Fournier pour JA

 

 

Lorsque j’ai fait sa connaissance à N’Djamena en juin 2021, deux mois après son arrivée au pouvoir, Mahamat Idriss Déby Itno semblait encore flotter dans des habits trop grands pour lui, hésitant entre le battle-dress du général d’armée et le boubou soigneusement repassé que portait son père, le maréchal assassiné.

D’une sincérité désarmante, il reconnaissait que les évènements l’avaient porté comme une balle de ping-pong sur un jet d’eau, lui qui n’aurait jamais imaginé être un jour chef d’État. Le tout confessé d’une voix murmurée, comme s’il s’excusait de déroger à la traditionnelle pudeur tchadienne en parlant de lui-même. Je m’étais dit alors que ce “fils de” de 37 ans était sous l’étroite surveillance des crocodiles étoilés du Conseil militaire de transition (CMT) qui l’avaient placé à leur tête, et que sa longévité au pouvoir était une affaire de mois.

Légitimité contestée

Un an et demi plus tard, l’homme que Jeune Afrique a rencontré début février à Paris m’a donné tort. Lui qui « était » président, « fait » désormais président. La voix est plus assurée, le jugement plus tranchant, le regard plus acéré et l’on ne cherche plus autour de lui l’ombre tutélaire du commandeur défunt.

Certes, les grands partenaires du Tchad l’ont beaucoup aidé dans cette entreprise de consolidation d’un pouvoir dont la légitimité était – et demeure – vivement contestée par une partie, minoritaire il est vrai, de l’opposition. D’Emmanuel Macron, qui l’a adoubé dès le premier jour et dont le soutien s’est d’autant moins démenti que le France perdait des positions ailleurs au Sahel, à Joe Biden qui, en l’invitant à participer au sommet États-Unis-Afrique de Washington en décembre dernier, a clairement signifié qu’aux yeux de la diplomatie américaine, Mahamat Idriss Déby Itno n’était pas à ranger dans le même sac que les militaires putschistes de Bamako, Conakry et Ouagadougou. En allant inaugurer le 2 février l’ambassade du Tchad en Israël, le maître de N’Djamena a d’ailleurs démontré qu’il savait renvoyer l’ascenseur.

Surtout, de l’avis d’une majorité d’observateurs, le président tchadien a globalement réussi son Dialogue national inclusif et souverain (DNIS) de 2022, aux conclusions duquel ont adhéré la plupart des groupes politico-militaires et des partis historiques d’opposition, et qui a débouché sur la formation d’un gouvernement d’ouverture dirigé par Saleh Kebzabo, vétéran de toutes les luttes pour la démocratie.

À cet égard, la transition tchadienne pourrait être considérée comme exemplaire, n’eût été le sanglant accroc du 20 octobre 2022. Tentative de coup d’État pour le pouvoir, manifestations politiques violemment réprimées selon leurs organisateurs au premier rang desquels l’économiste Succès Masra, les évènements de ce « jeudi noir » se sont soldés par, au minimum, près de 80 morts. Près de cinq mois plus tard, ce traumatisme sur lequel Mahamat Idriss Déby Itno revient ici longuement avec sa propre version des faits, est encore profond et douloureux.

L’entretien que vous allez lire a été recueilli le 7 février dans la suite présidentielle d’un grand hôtel parisien, en présence du directeur général de la communication Hassan Bouyebri et sous l’œil vigilant du directeur de cabinet, le général Idriss Youssouf Boy. Devant la porte, des quidams en sandales boivent le thé en bavardant, aussi à l’aise dans les couloirs moquettés d’un palace que sur les sofas d’un salon de N’Djamena. Comme son père avant lui, c’est un peu de la terre du Tchad qu’à chaque voyage, Mahamat Idriss Déby Itno emporte sous la semelle de ses chaussures.

Jeune Afrique : Le 20 octobre 2022, des manifestations meurtrières contre votre régime se sont soldées par une cinquantaine de morts à N’Djamena et dans le sud du pays. Près de cinq mois plus tard, les Tchadiens sont-ils toujours aussi divisés ?

Mahamat Idriss Déby Itno : Non, les Tchadiens ne sont pas divisés. Mais revenons sur ces évènements. Contrairement à ce que vous dites, il ne s’agissait pas de manifestations plus ou moins pacifiques, avec un itinéraire précis et des revendications claires, si ce n’est acceptables, du type de celles que nous avons autorisées pendant dix-huit mois.

Le 20 octobre, nous avons eu affaire à une tentative de coup d’État qui a commencé à une heure du matin par l’attaque de commissariats de police et de biens privés appartenant à des personnalités jugées proches du pouvoir. Cette insurrection violente a été organisée par des politiciens sans aucune expérience, qui ont manipulé, payé et parfois drogué des jeunes gens en situation de précarité afin de les jeter dans la rue.

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Ce n’est évidement pas un hasard si ces évènements sont survenus alors que se déroulait un processus de dialogue auquel adhère l’écrasante majorité des Tchadiens, y compris des partis politiques dans l’opposition depuis plus de trente ans. Le but de ce coup d’État était de faire échouer la transition et de remettre en cause les conclusions du Dialogue national inclusif et souverain, auquel ces politiciens irresponsables ont refusé de participer.

Les affrontements du 20 octobre comportaient pourtant un aspect Nord-Sud relevé par nombre d’observateurs. Assiste-t-on à un retour des vieux démons communautaristes ?

Ce clivage Nord-Sud, et musulmans-chrétiens, n’existe plus au Tchad depuis le début des années 1980. Mais il est vrai que, faute de projet et de vision pour le pays, Succès Masra et son parti ont tenté récemment de ranimer les tensions ethnico-religieuses et sécessionnistes, au point d’en faire leur fonds de commerce pour accéder au pouvoir.

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Le problème pour Masra, c’est qu’en dehors des 7e et 9e arrondissements de N’Djamena, il ne connaît rien du Tchad et ne représente presque rien. C’est un pur phénomène de réseaux sociaux et d’ONG étrangères partisanes. Malgré cela, dans un souci de totale inclusivité, nous lui avons tendu la main, à lui comme aux autres, afin qu’il rejoigne le processus du dialogue national. Il a refusé. C’est son droit. Mais ce refus ne lui octroie pas le droit d’instaurer un climat de guerre civile.

Vous avez reçu Succès Masra à plusieurs reprises avant le 20 octobre. Ce dernier dément avoir sollicité la formation d’un quelconque ticket pour la future élection présidentielle, ainsi que vous l’avez affirmé…

Je l’ai effectivement reçu à huit reprises au cours des dix-huit mois qui ont suivi mon accession à la présidence, et nous avons beaucoup discuté. Mais il n’a jamais jugé bon d’informer les militants de son parti de ces rencontres, ce qui explique sans doute ses dénégations.

La réalité est qu’il m’a proposé de former un ticket présidentiel : moi président et lui vice-président. Ma réponse a été simple : dans la mesure où le dialogue national qui était en train de s’ouvrir est un dialogue souverain, aucun accord séparé de ce type n’était envisageable.

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Un peu plus tard, en plein dialogue, Masra est revenu me voir pour solliciter cette fois le poste de Premier ministre. Là encore, ma réponse a été claire : la mission du futur Premier ministre étant de mettre en œuvre les résolutions issues du DNIS, résolutions auxquelles il n’accordait aucune légitimité puisqu’il avait décidé de boycotter le processus, son incompatibilité avec le poste était rédhibitoire.

Succès Masra s’est alors rendu à Paris, où il a incité certains officiels français à faire pression sur moi. Ils se sont heurtés à un refus catégorique de ma part. Je crois que c’est à partir de ce moment que ce Monsieur a commencé à ourdir son projet de prise du pouvoir par la rue.

Plus de 600 personnes ont été arrêtées suite aux évènements tragiques du 20 octobre. Une partie d’entre elles ont depuis été libérées, d’autres condamnées ou en attente de jugement dans la prison de haute sécurité de Koro Toro, à 600 km de N’Djamena. Quelles sont leurs conditions de détention ?

Normales. Koro Toro n’est pas un bagne mais une prison officielle de l’État tchadien, connue, ouverte aux parents des détenus et à leurs avocats, ainsi qu’aux visites régulières de la Croix-Rouge. Le Tchad est un pays de droit. Une commission d’enquête nationale a été créée à propos du 20 octobre, et nous avons nous-même demandé à ce qu’une commission internationale indépendante soit formée. Elle est en ce moment sur le terrain et son rapport sera bientôt rendu public. Nous n’avons rien à cacher.

Dans son rapport sur le « jeudi noir » publié fin janvier, l’ONG Human Rights Watch parle d’une « violence extrême et disproportionnée » exercée par les forces de l’ordre. Reconnaissez-vous que ces dernières ont, pour le moins, surréagi ?

Le rapport auquel vous faites allusion est un rapport partial et entièrement à charge, cette ONG n’ayant en réalité sollicité ni la version du gouvernement, ni celle des forces de défense et de sécurité, ni celle des parents des policiers et gendarmes victimes des violences.

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Pour le reste, où que ce soit dans le monde, quand vous attaquez des commissariats de police ou des brigades de gendarmerie avec des armes à feu et des armes blanches et que vous tuez des membres des forces de l’ordre, à quoi vous attendez-vous ? À ce que les agents vous regardent faire les bras croisés et sans riposter ? Cela s’appelle de la légitime défense.

Les responsables, les coupables de tous ces morts et blessés, ce sont ceux qui les ont jetés dans la rue avec pour objectif assumé d’en faire des martyrs, alors qu’eux-mêmes se mettaient à l’abri, prêts à fuir en cas d’échec de leur coup d’État.

J’imagine que vous expliquez votre version des évènements à chaque interlocuteur étranger que vous rencontrez à Paris, à Washington, à Bruxelles ou ailleurs. Avez-vous le sentiment d’être compris ?

En privé et lors de mes entretiens officiels, oui. Mes partenaires me comprennent parce qu’ils connaissent la réalité. Le problème, c’est qu’ils n’arrivent pas à le dire publiquement, comme s’ils étaient tétanisés par les lobbies, les médias et les ONG. Ils savent très bien, via leurs ambassades à N’Djamena, la vérité de ce qui s’est passé le 20 octobre. Mais ils n’ont apparemment pas le courage de l’assumer.

Avez-vous l’intention de poursuivre Succès Masra en justice ?

Ce n’est pas à moi d’en décider, mais à la justice, et je ne me suis jamais mêlé de ce qui regarde la justice tchadienne. À l’heure où nous parlons, je n’ai pas connaissance d’une plainte déposée contre lui. Il faut dire qu’il a préféré fuir le pays plutôt que de prendre la tête des émeutiers, ce qui lui a évité d’être arrêté en flagrant délit.

Le dialogue national a-t-il réglé la question lancinante de la forme de l’État tchadien ?

Au cours de ce dialogue sans tabou, toutes les questions ont été discutées, y compris celle-ci : voulons-nous d’un État fédéral ou d’un État unitaire fortement décentralisé ? Un consensus s’est établi pour que ce choix soit tranché dans le cadre du référendum sur notre future Constitution. Mais jamais, à aucun moment, il n’a été question au cours de ce débat d’un quelconque problème Nord-Sud.

Je vous le redis : ce clivage est purement artificiel et il n’existe que dans les basses manœuvres de petits politiciens, prêts à vendre leur âme et à diviser le pays pour parvenir au pouvoir. C’est eux ou le chaos. Dieu et le peuple tchadien en ont décidé autrement.

Existe-t-il, selon vous, des liens entre Succès Masra et les groupes politico-militaires non-signataires des accords de Doha, en particulier avec le Front pour l’alternance et la concorde au Tchad (Fact) de Mahamat Mahdi Ali, responsable de la mort de votre père le 20 avril 2021 ?

C’est très probable. Succès Masra est capable de tout, y compris de s’allier avec le diable.

Vos désaccords avec votre compatriote Moussa Faki Mahamat, président de la Commission de l’Union africaine (UA), sont notoires. Ce dernier a ainsi dénoncé ce qu’il appelle la « répression sanglante » des manifestations du 20 octobre et demandé au Conseil Paix et Sécurité de l’UA de la condamner – sans y parvenir pour l’instant. Quelle légitimité accordez-vous à ses démarches ?

Moussa Faki Mahamat est un citoyen tchadien. Il a donc le droit d’avoir ses opinions, de vouloir faire de la politique, voire de penser à se présenter à une élection présidentielle. Mais pas celui de personnaliser à ses propres fins une institution internationale comme l’UA.

La période de transition tchadienne a été prolongée jusqu’à octobre 2024. En quoi était-ce nécessaire ?

La charte édictée au début de la transition prévoyait une période de 18 mois, renouvelable une fois. Mais la complexité du pré-dialogue de Doha avec les groupes politico-militaires nous a en quelque sorte pris de court.

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Pour toutes sortes de raisons, ce pré-dialogue s’est ouvert avec trois mois de retard et il a duré cinq mois au lieu des trois semaines prévues. Il a fallu attendre ses conclusions pour que puisse se dérouler un DNIS qui, en l’absence de ces groupes armés, n’aurait guère eu de sens. Ce dernier achevé, il nous restait un mois pour organiser le referendum et l’élection présidentielle, ce qui était évidemment impossible. D’où la décision, prise en toute transparence à l’issue du dialogue, de repousser de 24 mois au maximum le retour à un ordre constitutionnel.

Les résolutions adoptées à l’issue du DNIS vous laissent la possibilité de vous présenter à l’élection présidentielle. Comptez-vous être candidat ?

Ma mission, c’est de réussir la transition et de ramener au Tchad une paix définitive. C’est mon seul objectif et c’est déjà beaucoup.

Vous ne répondez pas clairement à ma question…

Je me consacre jour et nuit à cette tâche. Je n’ai pas le temps de penser à autre chose. Ma personne ne m’intéresse pas. Et vous n’obtiendrez pas d’autre réponse que celle-là.

Pour beaucoup d’observateurs, vous êtes parvenu au pouvoir par un coup d’État, finalement guère différent de ceux survenus au Mali, en Guinée ou au Burkina Faso. Cela vous agace d’être mis dans le même sac que les militaires putschistes ?

Pas spécialement. Je suis très serein à ce sujet et j’ai la conscience tranquille. Vous savez, j’ai opté pour une carrière militaire par choix, sans jamais imaginer que je serai un jour président.

Qui pouvait prévoir que le maréchal allait mourir au combat pendant les évènements d’avril 2021 ? Personne. Et quand je suis moi-même monté au front à cette occasion, étais-je sûr que j’allais en revenir vivant ? Absolument pas. Ce qui s’est passé est simple. Des mercenaires venus de Libye ont assassiné le chef de l’État. Le président de l’Assemblée nationale, successeur constitutionnel, a refusé de prendre ses responsabilités.

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Constatant ce vide institutionnel, l’armée les a prises à sa place et ce sont les officiers qui m’ont désigné comme président de la transition. Un coup d’État suppose une préparation, une préméditation et le renversement par la force du titulaire du poste. Il n’y a rien eu de tout cela.

La réalité est que si coup d’État il y a, il a été le fait de Mahdi et de son Fact. Pourquoi ne l’accuse-t-on pas ? Pourquoi n’est-il pas recherché par la justice internationale ? Pourquoi cet homme qui a commandité l’assassinat d’un chef d’État élu, continue-t-il à se promener sans être inquiété ? Le putschiste, c’est lui. Nous, nous avons sauvé le Tchad du chaos.

Qu’attendez-vous du redéploiement militaire français dans la région décidé par le président Macron ?

Plus de coopération bilatérale, plus d’équipements et plus de formation. Pour le reste, nos armées sont parfaitement capables de combattre seules les groupes armés terroristes. Nous, Tchadiens, l’avons fait dans les années 1980 contre une armée libyenne cent fois plus puissante sur le papier que la nôtre. Et nous l’avons chassée du pays. N’attendons pas que les autres fassent la guerre à notre place, ils ne la feront pas. Prenons nos responsabilités.

À N’Djamena aussi, on a vu des manifestants contre votre régime s’en prendre à des intérêts français et brandir des drapeaux russes. Le désormais viral « sentiment anti-français » est-il à l’œuvre au Tchad ?

Vous faites allusion à des incidents isolés, provoqués par des politiciens en panne d’arguments. Il n’y a au Tchad aucun sentiment de ce type.

Peut-être mais cela existe un peu partout dans la région. Pourquoi selon vous ?

Je crois qu’il s’agit là, pour des officiers qui ont failli à leur mission d’assurer la défense et la sécurité de leurs concitoyens, de se défausser de leurs responsabilités sur le dos des autres. Et de se donner une légitimité à bon compte, relayés par des partis politiques sans programme.

Quand vous brûlez le drapeau d’un pays étranger pour aussitôt brandir le drapeau d’un autre pays étranger, qu’est-ce qui a changé ? Vous ne faites que troquer une dépendance par une autre. Ce n’est pas le chemin de la responsabilité que doit prendre l’Afrique en 2023.

Boko Haram représente-t-il toujours une menace pour le Tchad ?

Oui, tant que cette nébuleuse terroriste n’aura pas été éradiquée à 100 %. Cela dit, il n’y a aucune présence permanente de Boko Haram au Tchad. Les incursions constatées dans la région du lac Tchad proviennent du Nigeria et du Niger.

Fin novembre, un avion non identifié a bombardé une base militaire centrafricaine occupée par les mercenaires russes de Wagner à Bossangoa, non loin de la frontière tchadienne. Certaines sources sécuritaires affirment que cet appareil aurait décollé du Tchad. Est-ce le cas ?

J’ai entendu cette histoire et laissez-moi vous dire : c’est du n’importe quoi. Mes relations avec le président Faustin-Archange Touadéra sont bonnes, tout comme elles le sont avec tous nos voisins.

Êtes-vous satisfait de l’état d’exécution de votre feuille de route sur les plans économique et social ?

Plutôt, oui. Les salaires des fonctionnaires sont payés à temps échu, une paix sociale a été conclue avec les syndicats, notre dette extérieure a été rééchelonnée et le prix du baril de pétrole aidant, les perspectives de croissance pour 2023 sont encourageantes.

Le pouvoir, dit-on, est une drogue. Y avez-vous pris goût ?

C’est mal me connaître que d’imaginer cela. Je suis un homme libre, qui aime socialiser et faire sa vie comme il l’entend. Le protocole, la sécurité, toutes les contraintes inhérentes à ma charge me pèsent, croyez-le. Je ne les supporte et ne les accepte qu’au service de mon pays. Pour le reste, rassurez-vous : je suis toujours le général Mahamat et je ne changerai jamais.

Qui est Ajay Banga, l’élu de Washington pour présider la Banque mondiale ?

L’ancien directeur général de Mastercard (2010-2020), Ajay Banga, a été désigné par Joe Biden pour succéder à David Malpass en tant que président de la Banque mondiale. Cet Américain né en Inde, issu de la sphère privée, est notamment spécialisé dans la mobilisation de fonds privés.

Mis à jour le 24 février 2023 à 18:25
 
 
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Ajay Banga est le candidat de Joe Biden pour diriger la Banque mondiale, après que son patron actuel, David Malpass, a annoncé sa démission. Ici en décembre 2018 lorsque l’Américain d’origine indienne était PDG de MasterCard,DC. © WIN MCNAMEE / GETTY / AFP)

 

Dix jours après la démission de David Malpass à son poste de président de la Banque mondiale (BM), la Maison Blanche a désigné un successeur. Et celui-ci ne figurait pas sur la liste des candidats pressentis au lendemain de l’annonce du départ de M. Malpass. Ce ne sera pas l’ancienne administratrice de l’Agence des États-Unis pour le développement international (USAID), Gayle Smith, Wally Adeyemo, l’actuel secrétaire adjoint du Trésor, non plus, ni Ngozi Okonjo-Iwea, la Nigériane à la tête de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) depuis 2021.

C’est Ajay Banga, un homme d’affaires indo-américain de 63 ans, qui a été choisi par l’exécutif américain, le 23 février, pour prétendre à la présidence de l’institution. Une décision « logique » selon le président des États-Unis Joe Biden, qui estime qu’ « Ajay dispose de toutes les qualités pour diriger la Banque mondiale dans cette période critique de son histoire ».

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Ce choix est une première car, selon un accord tacite et historique, uniquement les citoyens américains sont éligibles à ce poste prestigieux. Or, même si Ajay Banga détient le passeport bleu, il est né et a grandi en Asie.

Grandes multinationales

Le natif de Pune (Maharashtra, centre de l’Inde) est issu de la caste des Saini, qui appartient à la catégorie « classes défavorisées » (OBC). Pourtant, ce fils de militaire a réussi à se faire une place au sein de la haute sphère indienne.

Une fois obtenus ses diplômes en économie de l’Université de Delhi et de l’Indian Institute of Management, il commence sa carrière professionnelle en 1981 auprès de Nestlé et PepsiCo en Inde, aux États-Unis et au Moyen-Orient, en tant que gestionnaire de projets.

Ensuite, il a rejoint Citigroup en 1996, où il occupe divers postes de direction, notamment celui de président-directeur général de la région Asie-Pacifique. En 2009, il intègre Mastercard en tant que président et chef de l’exploitation, puis devient PDG de 2010 à 2021. « Ses efforts ont permis à 500 millions de personnes n’ayant pas de compte en banque d’avoir accès à l’économie numérique, de diriger les investissements privés vers des solutions pour faire face au réchauffement climatique et d’augmenter les opportunités économiques dans le cadre du Partenariat pour l’Amérique centrale», a détaillé la secrétaire américaine au Trésor Janet Yellen, dans un communiqué séparé dans lequel elle « applaudit la décision du président Biden ».

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Après plus de dix ans de loyaux services, Ajay Banga a quitté ses fonctions auprès du service de paiement pour prendre les rênes du fonds de capital-investissement américain General Atlantic.

En parallèle, le dirigeant d’entreprises est également président du holding d’investissement Exor, basée aux Pays-Bas, et responsable la gestion des partenariats public-privé pour l’Amérique centrale avec la vice-présidente américaine Kamala Harris. De plus, il siège au conseil d’administration de plusieurs organisations, dont la Fondation Obama, le Forum économique mondial et la Banque de réserve fédérale de New York. Il a par ailleurs été nommé comme l’un des meilleurs PDG du monde par l’hebdomadaire Barron’s en 2019, et est considéré comme un leader de premier plan dans le domaine des investissements et transactions.

Critiques

Pour certains, le profil d’Ajay Banga ne correspond pas à la mission et aux valeurs de la Banque mondiale. Jeff Hauser, qui a fondé le projet Revolving Door (filiale du Center for Economic and Policy Research (CEPR) qui a pour rôle d’examiner la pertinence des nominations dans les grandes institutions rejette celle de l’expert indien. « Ni General Atlantic ni MasterCard, ni Citigroup ni PepsiCo, ni Nestlé ne favorisent la prospérité partagée. Ces entreprises ont toutes fait beaucoup plus pour exacerber les inégalités que pour les combattre », a-t-il déclaré à la BBC.

IL DIT SON OBSESSION POUR L’EXPANSION DE L’INCLUSION FINANCIÈRE

Oxfam a pour sa part critiqué le manque de transparence dans le processus de nomination organisé par la Maison Blanche. « La Banque mondiale n’est pas une banque américaine, une banque commerciale ou une société de capital-investissement. Pour un poste de cette envergure, il faut plus qu’une tape sur l’épaule du président Biden », peut-on lire sur le site de l’organisation de lutte contre les inégalités.

Rôle des pays émergents

Et, pourtant, la candidature du fils de Maharashtra a été saluée. Cela fait plusieurs années que des pays émergents, comme la Chine, l’Inde, la Russie et le Brésil, souhaitent voir leur rôle au sein des institutions financières internationales s’accroître. Selon un communiqué de l’exécutif américain, Ajay Banga est idéal pour endosser le rôle, car en plus d’avoir  » grandi et démarré sa carrière professionnelle dans un pays émergent, il dispose d’un excellent bilan dans la promotion de la diversité, de l’inclusion et de l’égalité au travail, et d’une vaste connaissance des défis auxquels sont confrontés les pays en développement ».

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De plus, selon l’ex-Président de la Banque interaméricaine de développement (BID), Luis Alberto Moreno, le leader indien se distingue par son « obsession » pour l’expansion de l’inclusion financière et sa « profonde connaissance des nouvelles technologies ». Des éléments qui selon la même source, « pourraient aider à combler le fossé entre les pays riches et les marchés émergents ».

kiye2022
 
 
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Le carême, temps de combat contre les légèretés pour la vie en Dieu
0.      Mise en place
Bien-aimés dans le Seigneur, depuis un certain temps, nous avons pris l’engagement de vous fournir un exposé sur les différents temps forts que nous vivons dans l’Eglise. Après vous avoir exposé sur la problématique des temps ordinaires, nous voici avec un nouvel opus cette fois-ci, sur le temps de Carême que nous commençons déjà demain mercredi 22 février, avec l’imposition des cendres. Vous êtes certes nombreux à vouloir nous lire sur cette problématique du Carême, temps de jeûne, de prières et de partages. Trois concepts qui expriment clairement cette problématique. Mais de quoi s’agit-il réellement ?
En effet, le carême est la période de quarante jours qui précède la Pâques, fête principale de la religion chrétienne lors de laquelle est célébrée la mort et la résurrection de Jésus-Christ. Dérivant du mot latin quadragesima qui signifie « quarantième » et institué au IVe siècle, il couvre en fait une période de quarante-six jours puisque les dimanches ne sont pas comptés. Mais quelle est la symbolique du chiffre quarante ?
 
1.      De la symbolique du chiffre quarante
Quarante est le nombre le plus utilisé dans la Bible, c’est le nombre de la foi : c’est le temps de l’épreuve, le temps qu’il faut pour approcher Dieu, se convertir et faire appel à sa miséricorde. Il fait référence aux quarante années passées par les Hébreux entre leur sortie d’Égypte et leur entrée en Terre promise. Dans le récit du Déluge, la pluie se déverse pendant quarante jours et quarante nuits (Gn 7,4.12.17 ; 8,6). C’est aussi la durée de l’embaumement de Jacob (Gn 50,3). Ou encore la durée pendant laquelle le Philistin Goliath vient défier les Israélites (1 S 17,16). C’est aussi le temps de paix qui s’écoule dans le livre des Juges entre l’intervention d’un sauveur suscité par Dieu et sa mort ouvrant à une nouvelle crise (Jg 3,11 ; 5,32 ; 8,28). Le chiffre quarante fait aussi référence aux quarante jours passés par Jésus-Christ au désert après son baptême, en quête de la volonté de Dieu son Père. Comme nous pouvons le voir, le carême s’avère un temps de combat contre les forces du mal, un temps de la traversée vers un mieux-être.
2.      Un temps de proximité avec Dieu
Comme nous pouvons le voir, dans l’Ancien Testament notamment avec les hébreux, ce mieux-être était la Terre promise ou le règne de paix à l’époque des Juges, dans le Nouveau Testament avec Jésus ce mieux-être est bel et bien la conformité à la volonté de Dieu. Tout cela nous montre que le Carême est un temps de combat contre les forces du mal afin de nous conformer à la volonté de Dieu. C’est un temps de proximité avec Dieu. Et ces forces du mal qui nous guettent sont souvent de trois ordres : l’avoir, le pouvoir et le paraître. Ce sont des désirs ou des plaisirs de ce monde qui nous aveuglent et nous éloignent de Dieu. Lorsque l’homme s’engage dans la recherche effrénée des plaisirs de ce monde il voit en l’autre de l’ombre qui l’empêche de voir et par conséquent, il cherchera à se débarrasser de l’autre par l’élimination physique ou spirituelle.
3.      Le carême, un temps de conversion
Le carême qui débute le mercredi des Cendres, est un temps que l’Eglise nous donne pour nous détourner de tout ce qui nous empêche de vivre en harmonie avec Dieu et avec notre prochain, de tout ce qui nous éloigne de Dieu. C’est cela la conversion dont le prophète Jonas avait donné le ton, lui qui fut envoyé par Dieu pour prononcer un oracle contre la grande ville de Ninive à cause de la méchanceté de ses habitants. Parcourant Ninive, Jonas proclamait : « Encore quarante jours et Ninive sera détruite. » (Jon 3, 5-10) Conscients de l’importance de vivre en harmonie avec Dieu, la réaction des Ninivites est inattendue : à commencer par le roi, toute la population se met à jeûner, se couvre de sacs et s’assoit dans la cendre, espérant que Dieu revienne sur sa décision. En voyant leur réaction, Dieu décide de ne pas exécuter le châtiment prévu. Dieu revient de sa colère pour quiconque renonce au mal antérieur comme le rapporte le prophète Ezéchiel, « Est-ce que vraiment je prendrais plaisir à la mort du méchant – oracle du Seigneur Dieu – et non pas plutôt à ce qu’il se détourne de ses chemins et qu’il vive ? » (Ez 18, 23).
C’est un temps que l’Eglise nous donne pour nous armer de sagesse, de vigilance et de promptitude à nous conformer à la volonté de Dieu. Cette sagesse nous permet de comprendre ce qui est conforme à la volonté de Dieu et nous rend agréables et dignes de Lui. La vigilance nous détourne des pièges de Satan et la promptitude nous donne de nous engager sans tarder pour ce qui rend l’autre à faire plus humain. Tout cela n’est pas idéologique. C’est un effort que chaque chrétien, de chaque disciple du Christ Jésus qui a lui-même fait des efforts pour se priver les plaisirs trompeurs et éphémères du monde. Tout chrétien est appelé à faire des efforts contre les légèretés à l’imitation du christ lui-même. Se refuser des légèretés qui ne font que plonger la conscience dans la tristesse et dans un dogmatisme des regrets. Jésus a su faire la part de choses entre les plaisirs sensuels et le vrai plaisir, la vraie gloire, celle de vivre en harmonie avec Dieu. Il a refusé le pain au moment il avait vraiment faim : « Il est écrit : Ce n’est pas seulement de pain que l’homme doit vivre, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu. ». Il a refusé la démonstration de la puissance, au moment où il en était un légitime détenteur : «  Il est encore écrit : Tu ne mettras pas à l’épreuve le Seigneur ton Dieu ». En dernier lieu, il refusa le prestige, la gloire bref le pouvoir de ce monde : « Arrière, Satan ! Car il est écrit : C’est devant le Seigneur ton Dieu que tu te prosterneras, et c’est lui seul que tu adoreras. » (Mt 4, 1-11 ; Lc 4, 1-13). Voilà le combat que nous devons mener toute notre vie et de façon particulière, pendant ce temps de Carême. Résister aux tentations liées au prestige, à la gloire, au pouvoir berf, aux plaisirs désordonnés du monde qui ne garantissent pas la vie éternelle. Mais chercher en tout et pour tout, ce qui nous met en harmonie avec Dieu et avec notre prochain.
Tu auras beau te priver de manger et de boire pendant le Carême. Tout cela c’est bon! Mais il y a plus que cela ! Que Jésus ait refusé de manger voudrait dire plus. Cela voudrait dire qu’il s’est refusé tout plaisir qui corrompt l’esprit et distrait au moment on veut vivre en harmonie avec Dieu pour recevoir de lui les grâces dont on a besoin. Refuses-toi aussi toute légèreté qui te distrait au moment où tu veux vivre une relation intime avec Dieu pour recevoir de lui, les grâces dont tu as besoin pour ta vie sur terre.
Conclusion
Le carême est un temps où l’on se rapproche de Dieu comme Moïse sur la montagne, un moment de faire une halte dans notre vie pour rencontrer Dieu, comme Élie, dans une voix de fin silence. C’est aussi le moment de redécouvrir que l’homme ne vit pas seulement de pain qui représente tous les plaisirs sensuels, mais de tout ce qui sort de la bouche du Seigneur. C’est encore le temps, à l’exemple des Ninivites, à travers le jeûne et la prière, de se convertir et d’implorer la miséricorde du Seigneur.
Le Seigneur soit avec vous !
✍🏾 Père KIYE M. Vincent, Missionnaire d’Afrique
Paroisse de Nioro du Sahel, diocèse de Kayes au Mali
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